« Plus beau cloître du monde », le cloître
de Moissac est célèbre pour être le plus ancien cloître historié. Achevé en 1100, il
compte parmi les rares à avoir été conservés dans leur intégralité.
Pour la première fois, ses soixante-seize chapiteaux et ses grands
reliefs en marbre sont intégralement reproduits, sur toutes leurs faces, par quelque
quatre cents photographies en couleur. Citant les sources, explicitant les scènes,
analysant leur style, les auteurs sattachent à en déchiffrer le sens, révélant
ainsi un ensemble dimages sans précédent, dune étonnante richesse
iconographique. Cest à une véritable redécouverte de la sculpture de Moissac que
cet ouvrage nous invite, nous permettant den percevoir la très grande beauté. Un
livre au travers duquel lamateur dart roman saisira le dessein des sculpteurs,
attentifs à traduire dans la pierre la pensée dun homme hors du commun,
labbé Ansquitil, commanditaire du cloître, dont luvre a contribué à
léclosion de la grande sculpture monumentale romane.
Avant-propos
Avec Labbaye et les cloîtres de
Moissac, paru en 1897, Ernest Rupin donnait une description de toutes les sculptures
du cloître de Moissac, pour la première fois systématiquement accompagnée de dessins
ou de photographies. Un siècle plus tard, les progrès de lédition comme ceux de
notre connaissance de lart roman pouvaient rendre possible une sorte de
« nouveau Rupin ». Le projet rencontra lenthousiasme de Guy-Marie
Renié, le directeur des éditions Sud-Ouest et le photographe, sans qui ce livre
naurait pu voir le jour et sans lequel il naurait pas été ce quil
est : on en jugera en découvrant ou redécouvrant la sculpture du cloître à
travers les quelque quatre cents photographies en couleur qui lillustrent.
Sa réalisation fut un excellent prétexte à dinnombrables visites au « plus
beau cloître du monde », selon lexpression heureuse de Pierre Sirgant. Le
plaisir en a été accru par le soutien amical et constant que nous a notamment prodigué
Chantal Fraïsse, conservateur du Musée de Moissac et du Centre dart roman
Marcel-Durliat, et laccueil toujours chaleureux de lOffice du Tourisme qui
gère lentrée du cloître et que nous ne saurions trop remercier.
Deux principes nous ont guidés :
réaliser un guide de visite accessible à tous, et travailler « à pied
duvre », cest-à-dire observer et décrire toutes les sculptures
sur place. Pour chacun des chapiteaux et des piliers, une présentation simple a été
adoptée : les photographies de chacune des faces, repérées par leur orientation,
sont placées en regard dun commentaire rassemblant à la fois le texte (biblique ou
autre) à lorigine de liconographie, la description du chapiteau et une brève
analyse iconographique et stylistique. Il nous arrive de citer la Légende dorée
de Jacques de Voragine, dont la composition est largement postérieure à la réalisation
du cloître : il sagit cependant dune compilation de textes bien
antérieurs et elle a lavantage dêtre aujourdhui aisément consultable.
Les photographies ont été réalisées de nuit, en lumière artificielle, afin que les
différentes faces bénéficient de la même lumière. Ce parti-pris nefface pas, et
cest tant mieux, les différences de teinte de la pierre, dues à des provenances
diverses des matériaux et des expositions aux intempéries qui varient en fonction de la
position dans le cloître.
Toutes les inscriptions ont été
soigneusement retranscrites. Afin den faciliter la lecture, on a distingué les
lettres abrégées, placées entre parenthèses ( ), des lettres manquantes dont la
restitution est mise entre crochets [ ].
Enfin, il a paru nécessaire de modifier la
numérotation adoptée par Ernest Rupin, qui avait linconvénient de confondre
chapiteaux et piliers. Nous avons naturellement tenu compte du nouvel accès au cloître,
qui se fait désormais par l'extrémité nord de la galerie occidentale : le visiteur
découvre devant lui le chapiteau n° 1 et se dirige par la galerie ouest vers la masse
imposante de l'église, en passant devant l'inscription commémorative de l'uvre du
cloître. Les chapiteaux sont ainsi numérotés de 1 à 76 et les piliers de I à VIII,
leurs faces étant distinguées par leur orientation : ouest, sud, est et nord. On se
rendra compte au cours de la visite que cette numérotation nécessairement arbitraire
correspond finalement à un sens de lecture possible, peut-être voulu par le
commanditaire du XIe siècle.