Mémoires |
LES PLANS D'URBANISME
DE TOULOUSE AU XXe SIÈCLE
par Jean COPPOLANI
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M.S.A.M.F., T. LVIII, page 207
Le
XVIIIe siècle avait été marqué à Toulouse, comme dans beaucoup de villes de France, par des soucis et des projets durbanisme dont la traduction concrète, sans épuiser tout ce qui avait été projeté, est encore visible dans toute une partie de la ville actuelle, avec les quais de la Garonne et leurs façades inachevées, lensemble du Grand-Rond et des Allées, le Cours Dillon et les grandes voies de la rive gauche. Le « Projet pour le Commerce et les Embellissements de Toulouse » présenté en 1752 par Louis de Mondran était un plan durbanisme complet qui ne négligeait aucune des quatre fonctions que devait définir en 1933 la « Charte dAthènes » : habiter - travailler - circuler - recréer le corps et lesprit ; mais les réalisations demeurèrent très en-deçà des ambitions.Beaucoup plus empirique, le
XIXe siècle na conçu quun seul plan densemble : celui des Alignements, arrêté définitivement le 26 décembre 1842. borné aux problèmes de voirie, son exécution, limitée dans le centre ancien aux constructions neuves, le rendit rapidement inefficace face aux besoins de la circulation ; appliqué strictement dans les extensions de la ville jusque vers 1850, soit en gros la zone entre la place Dupuy, la rue Matabiau et le canal du Midi, zone qui lui doit sa voirie régulière, il ne fut jamais prolongé dans les extensions suivantes qui se firent dans la plus totale anarchie. Cest en fait au coup par coup et au fur et à mesure des besoins que furent décidés et réalisés les grands travaux de voirie jusquen 1914 : place du Capitole, place Wilson et allées Jean-Jaurès héritées de projets du XVIIIe siècle, aménagement des boulevards repris en partie des projets de Mondran, percées haussmaniennes dans le centre entre 1867 et 1912, les trois ponts Saint-Pierre, Saint-Michel et des Catalans, ces deux derniers achevant de dessiner, avec les allées du XVIIIe siècle et les boulevards du XIXe, une première rocade cernant la ville ancienne, mais sans que cette notion apparaisse dans les projets successifs. De même les grands équipements neufs : Abattoirs, Casernes, Cimetières, Facultés, ont été localisés au gré des circonstances, tandis que les services publics issus de la Révolution et ceux créés ou restaurés par Napoléon se logeaient avec plus ou moins de bonheur dans des locaux hérités de lAncien Régime et dans des bâtiments ecclésiastiques nationalisés en 1789.Il existe depuis longtemps toute une littérature sur lurbanisme toulousain du
XVIIIe siècle (1). Celui du XIXe siècle, plus longtemps négligé, a fait lobjet de nombreux travaux plus récents (2). Il est donc inutile dy revenir. Par contre, les nombreux projets durbanisme du XXe siècle, sils ont suscité une grande quantité de travaux et de commentaires__________
1. Cf. parmi les seuls travaux imprimés : E. Roschach,
« Toulouse capitale », dans Revue des Pyrénées, 1896, p. 201-254 ; J. Llanas,
« Lurbanisme à Toulouse au XVIIIe siècle », dans Recueil
des Jeux Floraux, 1936, p. 64-144 ; P. Mesplé, Joseph-Marie de Saget, ingénieur
des Travaux publics de la province de Languedoc, Toulouse, 1946 ; G. Costa, « Un
plan durbanisme pour Toulouse dans le second quart du XVIIIe
siècle », dans Comité des Travaux historiques
Bulletin de la Section de
géographie, 1953, p. 81-98 ; G. Costa, « Louis de Mondran, économiste et urbaniste
», dans Urbanisme et Habitation, 1955, p. 33-78 ; J. Coppolani, « Garipuy
urbaniste et ingénieur », dans M.A.S.I.B.L.T., 16e série, t. III, 1982, p.
173-185 ; J. Coppolani, « La "Promenade publique" de Toulouse
»,
dans LAuta, avril 1983, p. 99-116, et les ouvrages généraux : J.
Coppolani, Toulouse, étude de géographie urbaine, Toulouse, 1954 ; Ph. Wolff et
al., Histoire de Toulouse, 2e édition, Toulouse, 1974 ; Toulouse, les
délices de limitation (ouvrage collectif), Bruxelles et Liège, 1986.
2. Cf. Notamment P. Lespinasse, « Les origines de la place Wilson » dans M.A.S.I.B.L.T.,
12e série, t. X, 1932, p. 235-273 ; J. Coppolani, « Un plan dextension à Toulouse
sous la monarchie de Juillet », dans Comité des travaux historiques
Bulletin
de la Section de géographie, 1953, p. 69-77 ; J. Coppolani, « Une opération
durbanisme à Toulouse : les rues nouvelles de la fin du XIXe
siècle », dans M.A.S.I.B.L.T., 15e série, t. VII, 1976, p. 207-225 ; Toulouse
1810-1860, ouvrage collectif, Bruxelles et Liège, 1985 ; ainsi que les ouvrages
généraux cités en note 1.
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tant par leurs auteurs et leurs responsables fonctionnaires, techniciens et hommes politiques, que par les professionnels de lurbanisme, les géographes, les économistes et les sociologues , nont jamais été examinés dans une perspective historique, tenant compte de ce que chacun deux a apporté de concret dans les réalisations effectives, et aussi des conceptions urbanistiques successives quils ont voulu traduire. Cest ce que voudrait faire le présent travail.
Les lois de 1919 et 1924 et les premiers projets
Au lendemain de la Première Guerre mondiale qui avait très gravement frappé plusieurs villes du Nord et de lEst, le pouvoir dÉtat jugea quil était nécessaire de mettre de lordre dans lextension des villes françaises dont beaucoup, à linstar de Toulouse, avaient poussé de façon anarchique tout au long du
XIXe siècle. Ce fut le but recherché par les lois du 14 mars 1919 et du 19 juillet 1924, qui imposaient un « Plan dAménagement, dEmbellissement et dExtension » à toutes les villes de plus de 10 000 habitants, aux stations touristiques et aux « localités présentant un caractère pittoresque, artistique ou historique ». Ces lois donnaient en principe trois ans aux communes intéressées pour établir ce plan qui devait être approuvé par décret pris en Conseil dÉtat, mais leur laissaient toute latitude tant pour le choix des urbanistes que pour le contenu des plans, dont la dépense était laissée entièrement à leur charge.Les propositions des « Toulousains de Toulouse » (plan 1b)
Un an à peine après le vote de la loi de 1919, un premier projet durbanisme toulousain voyait le jour. Il némanait ni de la municipalité, ni de professionnels, mais dune société culturelle, fondée une quinzaine dannées auparavant par un groupe de Toulousains surtout préoccupés de sauvegarder les richesses monumentales héritées du passé de leur ville, et gravement mises à mal tant par le vandalisme révolutionnaire et post-révolutionnaire que par certains grands travaux de voirie du
XIXe siècle. Mais certains de ces « Toulousains de Toulouse », dans la tradition quavait brillamment illustrée au XVIIIe siècle Louis de Mondran, ajoutaient à ce souci celui des besoins présents de leur ville et celui de son avenir. Parmi eux un jeune journaliste, Henri Rouzaud, décédé prématurément en 1918, et un médecin, Albert Morel. Cest le fruit de leurs réflexions et de celles de quelques autres membres de la même société que publia en mars 1920 LAuta, bulletin de la Société, sous le titre LExtension de Toulouse après la Guerre (3).Après le rappel des étapes de la formation de la ville depuis ses origines, des opérations durbanisme des
XVIIIe et XIXe siècles et des effets du vandalisme, deux chapitres sont consacrés à la sauvegarde des monuments principaux et à la destination à donner à ceux qui se trouvaient à labandon comme les Jacobins. Le chapitre suivant traite des équipements à créer pour les transports, le commerce, lindustrie, lenseignement supérieur et professionnel, la santé, les sports, la culture, les spectacles. Très caractéristique des préoccupations majeures des notables toulousains dalors est la place prise dans ces propositions par le Théâtre dOpéra destiné à remplacer la salle du Capitole incendiée en 1917 : une page et demie est consacrée à ce monument pour lequel est proposé un emplacement au quartier Saint-Georges « entièrement rasé » ; presque autant de place est nécessaire pour les Musées existants ou à créer. Par contre, les zones industrielles à créer sont expédiées en un tiers de page et leur localisation reste vague : « les points de raccordement des canaux et aux voies ferrées sont particulièrement désignés pour laménagement de quartiers de cette sorte ». Le chapitre sur l« outillage urbain » insiste sur lurgence de la construction dun réseau dégouts vannes, sur lamélioration de la distribution deau potable et de léclairage public et sur lextension du réseau de tramways, par la création notamment, dune ligne circulaire par les boulevards (aujourdhui desservie par autobus) et aussi dune ligne Ponts-Jumeaux - Pont des Demoiselles le long du canal du Midi, et dune ligne suivant les quais de la Garonne, qui nexistent toujours pas. Le dernier chapitre est consacré aux opérations de voirie et de construc-__________
3. Lextension de Toulouse après la guerre. Considérations sur le plan daménagement, dembellissement et dextension imposé à la Ville par la loi du 14 mars 1919. Essai dapplication à ce plan des principes modernes de lurbanisme, LAuta, numéro spécial, mars 1920, 36 p. in 16°.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 209
tion. Fidèles aux conceptions haussmaniennes, ses auteurs proposaient deux nouvelles percées dans le centre historique : une voie du Pont Neuf à la place Lafayette (aujourdhui Wilson), reprise de la « rue de lImpératrice » proposée en 1859, et une « nouvelle voie longitudinale » dArnaud-Bernard au Salin, déjà envisagée au XVIIIe siècle (4). Ces deux tracés devaient permettre la mise en valeur de plusieurs monuments peu accessibles : tour des Cordeliers, église des Jacobins, clocher de la Dalbade (qui devait sécrouler en 1926), autre notion bien haussmanienne. Quelques années plus tard, le président de la même Société proposait délargir les rues Saint-Rome et des Changes en reculant des trottoirs sous les immeubles dont les arcades de rez-de-chaussée seraient ouvertes ; première conception de la rue piétonnière réalisée cinquante ans plus tard. Hors des boulevards étaient proposées plusieurs grandes voies nouvelles : le prolongement des allées Lafayette (Jean-Jaurès) jusquau plateau de Jolimont dont on parlait depuis une cinquantaine dannées déjà ; louverture de deux rues unissant la Patte-dOie aux deux ponts Saint-Michel et des Catalans sur la rive gauche, un nouveau quai du Bazacle aux Ponts-Jumeaux, enfin un « boulevard reliant le Faubourg Bonnefoy à Montaudran par les crêtes ». Dans le domaine de la construction, les Toulousains de Toulouse proposaient la création dun quartier d« habitations ouvrières » à lemplacement de lArsenal (5) et la destruction pure et simple du quartier Saint-Georges « verrue repoussante en plein centre de la ville ». À lextérieur, ils étaient partisans résolus de la maison individuelle qui allait effectivement garnir les lotissements, mode presque exclusif de lextension de Toulouse jusquen 1939.
Encore marqué largement par les idées du XIXe siècle, ce projet ne pouvait être directement mis à exécution par ses auteurs qui ne disposaient daucune espèce de pouvoir. Mais il influencera des projets officiels : la « nouvelle rue longitudinale » reparaîtra dans le plan Nicod, ainsi que les deux voies partant de la Patte-dOie ; la destruction et la reconstruction du quartier Saint-Georges se réaliseront de 1960 à 1982 au titre de la rénovation urbaine, et le boulevard de Bonnefoy à Montaudran, inscrit dans tous les plans postérieurs, a été réalisé par morceaux : le boulevard Deltour ouvert de 1929 à 1933, lavenue de la Terrasse aménagée en 1974 et prolongée en 1982 par lavenue Lucien-Baroux, le boulevard des Crêtes tracé en 1975-1976, mais ces trois tronçons ne se raccordent pas entre eux. Les auteurs de ces propositions nont donc pas travaillé en vain, même si leurs successeurs actuels à la tête de la Société les trouveraient peut-être trop peu respectueux de certains édifices du Vieux-Toulouse (6). On peut enfin constater quils nenvisageaient nullement la place quallait prendre lautomobile dans notre société, et que ces fervents défenseurs du visage traditionnel de leur ville navaient envisagé aucun règlement de construction pour le protéger contre des nouveautés intempestives.
Le plan Jaussely (plan 1c)
La municipalité Feuga qui eut en charge la ville de Toulouse de 1919 à 1925 neut pas de grandes ambitions, et elle ne jugea nullement urgent de la doter dun plan dextension, malgré les besoins en logements qui résultaient de la montée de la population passée de 155 000 habitants en 1911 à 175 000 en 1921. La municipalité socialiste qui lui succéda, dirigée de 1925 à 1934 par Étienne Billières, lança par contre de grands projets : nouvelle Bibliothèque municipale, Parc des sports du Ramier du Château, reconstruction du pont Saint-Pierre, écoles dans les quartiers neufs, logements populaires par loffice municipal dH.B.M., éclairage électrique « axial », renforcement de ladduction deau, programme de tout-à-légout (qui ne sera réalisé que plus tard). Lurbanisme par contre ne paraît guère lavoir préoccupée, et les lotissements continuèrent à proliférer en périphérie dans la même anarchie quauparavant ; la ville décida quand même de se mettre en règle avec la loi en demandant un plan durbanisme à Léon Jaussely. Le contrat entre le maire et lurbaniste fut passé le 21 juillet 1926.
Surtout connu par sa contribution au grandiose plan dextension de Barcelone, Léon Jaussely était toulousain de naissance et cest ce fait qui paraît avoir motivé le choix de la municipalité. Son plan, dont lavant-projet fut présenté le 25 octobre 1928, relevait de la même inspiration monumentale que son uvre dOutre-Pyrénées.
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4. Cf. J. Coppolani, Une opération durbanisme à Toulouse , art. cit., et Toulouse, les délices de limitation, op. cit.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 210
Le plan Jaussely (7) est encore très marqué par les conceptions du XIXe siècle. Son auteur a dailleurs très largement tiré parti de la brochure des Toulousains de Toulouse ; lexposé du parti du Plan en reproduit in extenso le préambule théorique et historique, tout comme les recommandations et propositions relatives aux monuments anciens et aux Musées à créer. Les données de base restent dans le vague et lhypothèse de population retenue, 400 000 habitants sur un territoire qui pourrait facilement en recevoir un million, ne sappuie ni sur une étude démographique ou économique, ni sur une prévision à un terme défini. Lessentiel de son plan réside ainsi dans des projets de voirie qui multiplient les percées et les élargissements dans la partie du territoire déjà urbanisée et ouvrent quantité de voies nouvelles pour desservir les nouveaux quartiers à créer dans la périphérie.
Le noyau central ancien entre boulevard et Garonne était ainsi éventré en tous sens par des voies larges de 15 à 20 m (8). Sept voies étaient entièrement nouvelles : du pont Saint-Pierre au boulevard de Strasbourg ; des Jacobins au boulevard Armand-Duportal à travers lArsenal, avec prolongement en ligne droite jusquau canal du Midi ; du Pont-Neuf à la place Wilson (soit à nouveau la « rue de lImpératrice », retenue aussi par les Toulousains de Toulouse) ; du Pont-Neuf à la place des Carmes et de celle-ci au Grand-Rond (autre tracé envisagé aussi au
XIXe siècle) ; de la place Saint-Georges au square Roland et au-delà jusquau canal du Midi, prolongé par lavenue de la Gloire élargie ; à lemplacement de la Garonnette ; enfin de la place Arnaud-Bernard à la place Saint-Sernin. Les élargissements concernaient les liaisons du Capitole avec le pont Saint-Pierre par les rues Romiguières et Pargaminières, avec la place Arnaud-Bernard par les rues des Lois, de la Chaîne et Arnaud-Bernard, avec la Préfecture et la cathédrale par les rues de la Pomme et Boulbonne. La place de la Bourse, traversée par la « rue de lImpératrice », était reliée au pont Guilheméry sur le canal par lélargissement des rues Temponières, Peyras, Antonin-Mercié, Cantegril, une percée à travers le quartier Saint-Georges, puis de nouveau les rues Delpech et de lÉtoile élargies. Une rue nouvelle reliait la place du Capitole à limpasse des Jacobins, et la rue Gambetta était portée sur toute sa longueur, au gabarit de la rue Jean-Suau. Enfin, la place des Carmes était mise en communication avec le Quartier Général par lélargissement des rues du Canard, Merlane et Saint-Jacques. Sur la rive gauche, la rue de la République, la rue Réclusane et la rue Viguerie étaient portées à 20 m. Cette répétition à une douzaine dexemplaires des percées du siècle précédent aurait réalisé un véritable dépeçage du noyau ancien de Toulouse, disloquant toutes les liaisons traditionnelles, et multipliant en fait les obstacles à la circulation bien plus quils nauraient facilité celle-ci. Avec des solutions moins radicales, le projet de Jaussely pour le centre de Toulouse nétait pas sans rappeler le « plan Voisin », inspiré par Le Corbusier, qui voulait raser tout le centre de Paris et y laisser seulement les monuments anciens dans un immense parc Sa réalisation eut pratiquement anéanti toute latmosphère traditionnelle du Vieux-Toulouse. Rien heureusement nen a été réalisé sinon la discutable avenue de la Garonnette qui sert surtout de parking, et le modeste élargissement de la rue Émile-Cartailhac vers Saint-Sernin.
Dans ce que nous nommons aujourdhui le Péricentre, entre les boulevards et le canal du Midi, Jaussely préconisait aussi élargissement et percées, plus justifiées ici par une voirie étriquée et labsence presque totale densembles du passé digne dêtre préservés. Outre les trois voies prolongées depuis le centre et mentionnées plus haut, Jaussely prévoyait une liaison à grand gabarit (15 m) de la place Dupuy aux Minimes par lélargissement des rues Riquet, Maury, Caffarelli, de lOrient, ensuite une percée faisant un coude au croisement avec la rue Gravelotte, pour atteindre lavenue Honoré-Serres et au-delà le prolongement du boulevard Armand-Duportal à travers les casernes dArtillerie qui devaient disparaître. La liaison pont Saint-Pierre boulevards se prolongeait par la rue de la Concorde portée à 15 m sur toute sa longueur, de même que le tronçon nord de la rue Riquet. Laccès à la gare Matabiau était facilité par la couverture du canal du Midi entre le pont Riquet et le pont Matabiau. Enfin le terre-plein central des allées Jean-Jaurès disparaissait au profit dune large voie de circulation prolongée au-delà du canal jusquau plateau de Jolimont et à la route dAgde après démolition de lÉcole vétérinaire et lélargissement des allées Marengo. Ce dernier projet, repris dans tous les plan postérieurs, sera le seul à être réalisé, par étapes, de 1956 à 1976.
Dans la périphérie enfin, Jaussely organisait un réseau très complet de grandes voies larges de 25 à 55 m, divisées en trois catégories : radiales, circulaires et tangentielles.
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7. Conservé aux Archives de la Ville de Toulouse sous la cote 29 A et B : Ingénieur de la ville.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 211
Les radiales prolongeaient jusquaux limites de la commune les axes de circulation ouverts dans le centre ; il en était prévu plus dune vingtaine, en incluant les dix-sept routes qui rayonnaient déjà autour du noyau central. Les tracés nouveaux étaient représentés par les allées Jean-Jaurès prolongées, des boulevards accompagnant les deux rives du canal latéral à la Garonne au nord et du canal du Midi au sud, et dautres accompagnant de même les voies ferrées vers la Méditerranée, Albi et Auch. À moindre distance, le boulevard Armand-Duportal, après avoir traversé lemplacement des casernes dArtillerie, franchissait en ligne droite le canal du Midi pour atteindre finalement le canal latéral ; un autre pont sur le canal du Midi donnait accès à un prolongement de la rue de la Concorde qui atteignait le pont sous la gare Raynal, puis traversait le quartier de Croix-Daurade pour arriver au pont sur lHers. Les allées des Zéphyrs (Paul-Sabatier) et des Soupirs escaladaient le coteau jusquà sa crête ; deux boulevards accompagnaient la Garonne sur ses deux rives, du Bazacle au pont de Blagnac et du pont Saint-Michel aux ponts dEmpalot ; le chemin de la Gloire élargi descendait en ligne droite jusquà lHers ; enfin lallée Frédéric-Mistral, avec son gabarit originel (30 toises, soit 58 m) allait en ligne droite rejoindre la route de la Méditerranée au-delà du carrefour de Rangueil, suivant un tracé déjà envisagé par Mondran et repris en 1842 dans le Plan dAlignement. On peut regretter aujourdhui que cette magnifique « Pénétrante Sud » nait pas été réalisée lorsquelle ne demandait que lacquisition dune bande de champs, cest-à-dire au plus tard au XIXe siècle.
Les circulaires (on dirait maintenant rocades) étaient au nombre de cinq, y compris la ceinture des boulevards achevée depuis 1913. La seconde circulaire empruntait les berges du canal du Midi déjà aménagées des Ponts-Jumeaux au pont des Demoiselles, lavenue Crampel, les boulevards du Sud (Delacourtie) et des Récollets, deux ponts successifs sur les deux bras de la Garonne enfermant lîle du Ramier du Château, les chemins doctroi de Saint-Cyprien (aujourdhui boulevards Déodat-de-Séverac, Gabriel-Knigs et Jean-Brunhes), un nouveau pont sur la Garonne et lavenue Debat-Ponsan pour aboutir sur une grande place couvrant le canal de Brienne jusquaux Ponts-Jumeaux. La cinquième circulaire, la plus extérieure, était aussi la plus large : 55 m dont deux allées promenades latérales de 15 m chacune. Partant de la Garonne au pont de Blagnac, elle se dirigeait vers léglise de Lalande, puis gagnait le pont de Croix-Daurade, suivait la rive gauche de lHers jusquau pont de Montaudran, suivait ensuite dassez près les limites sud et est de la commune par les Bourdettes, Pouvourville, les limites sud de la Poudrerie, le château de Monlong, Saint-Simon, puis courait parallèlement aux chemins de Gaillardie, Ferro-Lebres, Salinié, des Capelles et de la Flambère pour rejoindre le pont de Blagnac par lavenue des Arènes. La troisième et la quatrième circulaires, tantôt interrompues, tantôt dédoublées, comportaient notamment deux tracés de rive droite : lun, large de 50 m, des Sept-Deniers à la barrière de Paris, puis au passage sous la gare Raynal, Jolimont, la crête du Calvinet, aboutissant dune part au pont des Demoiselles, dautre part au carrefour de Lormeau ; lautre, partant du pont de Blagnac, passait au carrefour des Trois-Cocus, à celui de Croix-Daurade, suivait le chemin Nicol, le pied oriental du Calvinet de la Roseraie au bois de Limayrac et à Montaudran, puis ondulait dans la dépression de Rangueil pour aboutir au pont dEmpalot, continuait sur la rive gauche après deux ponts encadrant le ramier dEmpalot, passait au carrefour de la Cépière, au rond-point de Lardenne et à celui de Purpan, pour rejoindre les Sept-Deniers en longeant les ruines antiques des Arènes et en franchissant la Garonne par un nouveau pont.
Les voies tangentielles complétaient radiales et circulaires en joignant notamment le carrefour de la Cépière au château de Monlong par le Mirail et le chemin de Lestang, lembouchure au rond-point de Lardenne (avec un pont nouveau sur la Garonne) en longeant la Cartoucherie par louest, la barrière de Cugnaux (place Émile-Male) à Braqueville, la Patte-dOie aux deux ponts des Catalans et Saint-Michel ainsi quà la Croix-de-Pierre et à lEmbouchure, lallée Frédéric-Mistral à la gare Saint-Agne en prolongeant lavenue Frizac.
On ne peut pas dire que tout ce programme soit resté lettre morte. Plusieurs éléments ont été repris dans des plans postérieurs et une partie dentre eux sont réalisés ou en cours de réalisation. La seconde rocade a été achevée, sauf le bouclage par un pont sur la Garonne en amont des Ponts-Jumeaux, qui paraît bien abandonné. Des parties de la troisième rocade sont réalisées sur le Calvinet, comme on la dit plus haut. De Lalande à Montaudran, la cinquième rocade est maintenant achevée mais sous forme dautoroute et non davenue-parc ; la « rocade ouest », des Ponts-Jumeaux à Empalot, et la « rocade sud » dEmpalot à Montaudran, empruntent des tracés, soit de la troisième ou de la quatrième « circulaire » soit de la « tangentielle » Embouchure Lardenne ; « la pénétrante nord » représente une des radiales suivant le canal latéral à la Garonne. Dans la partie pavillonnaire de Rangueil, lavenue Albert-Bedouce et lavenue du Lauragais, ouvertes dans lentre-deux guerres, suivent des tracés inscrits dans le plan Jaussely. Les avenues Maréchal-Juin et Delattre-de-Tassigny réalisent lun des nouveaux quais prévus le long de la Garonne (mais, pour partie au moins, en dépression par rapport à la digue construite en 1948). Le quai de rive gauche en aval du Bazacle reste en suspens.
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 212
À côté de cet immense programme de voirie qui, réalisé en totalité, aurait donné à Toulouse un plan presque intouchable à allure de toile daraignée, les autres articles du plan étaient beaucoup moins prolixes.
Le zonage se bornait à délimiter quatre zones dhabitation de densité décroissante du centre vers la périphérie (plan 2) dont la plus extérieure ne devait recevoir que des maisons individuelles sur 50 % au plus de la surface des parcelles, avec un retrait obligatoire de 5 m par rapport à lalignement. Les trois autres, réservées aux immeubles collectifs, voyaient leur densité monter de 66 à 75 %, la hauteur des constructions sélever à deux, à trois, puis quatre étages, en allant de lextérieur vers le centre, les prospects maxima aller de la largeur de la rue à une fois et demie celle-ci. Rien nétait prévu pour laspect des constructions. Hors des 8 800 ha (sur 11 949 du territoire communal entier) ainsi livrés à lhabitat, au commerce et aux services, quatre zones industrielles étaient délimitées avec une certaine précision à Lalande, autour de la Cartoucherie et de la Poudrerie, et à Montaudran ; les trois dernières ont été retenues dans les plans suivants. Un bon millier dhectares non affectés restaient à lagriculture, à louest du touch et du canal Latéral et à lest de lHers.
Plus de place était par contre donnée aux espaces verts : promenades plantées accompagnant les nouveaux quais de la Garonne et surtout la localisation de vingt et un parcs couvrant en tout 1 100 hectares.
Seules parmi les réalisations postérieures, la « Zone verte de détente et de loisirs » de Pech-David et le parc de la Poudrerie correspondent aux suggestions de Jaussely.
Peu de choses aussi pour les services publics : rien en ce qui concerne lenseignement, la santé, les services sociaux, les sports. Pour le théâtre dOpéra, le plan reprenait le site des Arcades du Capitole déjà envisagé en 1848 par Urbain Vitry (9) ; lusine à gaz et les Abattoirs seraient transférés dans la zone industrielle de la Cartoucherie ; deux nouveaux cimetières étaient prévus à Lalande et à Lardenne, une nouvelle gare mixte, fer et eau, devait être construite à Lalande, les gares ferroviaires de Saint-Agne et Saint-Cyprien agrandies, toutes les lignes de tramways « prolongées jusquaux limites de la commune », les Casernes seraient purement et simplement supprimées, ainsi que lArsenal (10) ; lÉcole vétérinaire reconstruite à Jolimont et un Parc des Expositions édifié au Ramier du Château. Seule cette dernière proposition a été suivie dexécution en 1948 ; lÉcole vétérinaire achevée en 1939 par Jaussely lui-même a été finalement utilisée à dautres fins après 1940.
Malgré laspect souvent utopique de ses propositions, le travail de Léon Jaussely nest donc pas resté inutile. Mais les circonstances (la crise mondiale en 1929) comme létat desprit des dirigeants toulousains dalors nétaient pas favorables à une mise en uvre même de ses propositions les moins contraignantes. La procédure dapprobation se limita à une présentation à la Commission départementale dextension en 1933, et aucune décision ne sensuivit. Et la ville continua à pousser (194 000 habitants en 1931, 213 000 en 1936) et à séquiper sans plan directeur.
La loi de 1943 et le plan Nicod
Dès août 1940, le gouvernement de Vichy avait « suspendu » la municipalité socialiste de Toulouse et lavait remplacée par un maire et un conseil municipal nommés par lui. Lidéologie de la « Révolution Nationale » ne saccommodait guère de lanarchie qui avait présidé jusque-là au développement de la ville. Aussi, bien que la situation issue de la défaite et de loccupation ne se prêtât guère à des réalisations même modestes, les nouveaux dirigeants jugèrent nécessaire de doter leur ville dun Plan dUrbanisme applicable. Tel ne paraissait guère le Plan Jaussely, trop ambitieux. Le 13 août 1942, la ville passait un nouveau contrat avec un architecte-urbaniste parisien, Grand Prix de Rome, Charles Nicod. Moins dun an après, la loi du 25 juin 1943 transférait à l'État la responsabilité des plans durbanisme, en même temps quelle généralisait lobligation du permis de construire pour toute
__________ 9. Le théâtre avait été reconstruit en 1923 dans laile sud du Capitole : il y est toujours, après trois réfections en 1950, 1974 et 1995 ; mais le théâtre du Capitole ne tient plus, dans la société toulousaine de la fin du XXe siècle, la place quil tenait dans celle du siècle précédent.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 213
construction nouvelle et toute modification de construction, ce qui assurerait le respect des règles posées par les plans durbanisme. La loi de 1943 ayant été validée à la Libération, lÉtat renouvela le 9 octobre 1944 le contrat de Charles Nicod, qui avait déjà présenté une première esquisse de son plan à lautomne de 1943. Aidé par un bureau détude installé à Toulouse et dirigé par un architecte local, Joachim Génard, Nicod entreprit la mise en forme de son Plan dénommé désormais « dAménagement et dUrbanisme » (on ne parlait plus d« Embellissement »). Représentant de lÉtat, lUrbaniste en chef chargé de la Région assurait le suivi des études en même temps que les services municipaux. Terminé au cours de lété 1947, le projet Nicod fut « pris en considération » par arrêté ministériel du ministre chargé de lurbanisme (11) le 23 octobre 1947.
Le plan Nicod de 1947 (plans 1.d et 3)
Encore marqué comme Jaussely par les conceptions du XIXe siècle, Nicod mettait aussi en premier plan la voirie ; il proposait lui aussi de nouvelles percées, avec toutefois moins dabondance que son prédécesseur. En particulier, il restait attaché à une amélioration de la pénétration du centre ancien par louverture de voies nouvelles. Et en premier lieu une nouvelle voie nord-sud, large de 25 m, destinée aussi à relier les deux routes de Paris et de la Méditerranée. Reprenant dassez près le tracé proposé en 1920 par les Toulousains de Toulouse, elle partait de la place Arnaud-Bernard, suivait la rue du même nom et la rue de la Chaîne, dégageait la tour des Cordeliers et la façade des Jacobins, arrivait sur la Garonne par la place du Pont-Neuf agrandie, et se poursuivait par le quai de Tounis élargi jusquau carrefour des allées Jules-Guesde et Paul-Feuga. Cette percée était aussi dans lesprit de lurbaniste, une « Promenade archéologique » ouverte sur la place du Capitole par un jardin entouré dédifices sur arcades ; une « Entrée monumentale » sur la Place Arnaud-Bernard, des perspectives vers Saint-Sernin, léglise du Taur, lhôtel dAssézat, enfin un aménagement ordonnancé du quai de Tounis comportant hôtels, restaurants et cafés face à la Garonne achevaient le caractère monumental de cette percée.
Dans le sens est-ouest, une voie nouvelle devait traverser le quartier Saint-Georges entièrement rasé et se poursuivre dans le quartier Saint-Aubin pour relier la rue dAlsace-Lorraine à lavenue Camille-Pujol, et une autre prolonger la rue Bayard, accès à la gare Matabiau, jusquà sa rencontre en ligne droite avec la « Promenade archéologique » : un système continu de jardins devait relier la place Wilson aux Jacobins en rasant le moulon encadré par les rues du Poids-de-lHuile et Lafayette.
Nicod avait aussi retenu le tracé projeté par Jaussely pour améliorer la traversée du Péricentre des Minimes à la place Dupuy, parallèlement aux boulevards ; renonçant au grand prolongement de lallée Frédéric-Mistral, il se bornait à relier lavenue Frizac au carrefour Grand-rue-Saint-Michel boulevard des Récollets par une percée qui entraînait la disparition de la Prison remplacée par un jardin.
En périphérie, le plan Nicod envisageait seulement une rocade est, de Lalande à Montaudran, le long de lHers, rejoignant à Ramonville la route de la Méditerranée, et une rocade ouest de Lalande à Francazals par le pont de Blagnac, Purpan et Lardenne, avec une bifurcation depuis la Cépière vers Empalot et le carrefour de Rangueil, et une liaison du pont des Demoiselles à la barrière de Paris par la crête du Calvinet, le faubourg Bonnefoy et le passage sous la gare Raynal, prolongée jusquau pont de Blagnac et au-delà jusquà laéroport. Sur la rive gauche, les anciens chemins doctroi étaient aménagés en boulevards rejoignant les Ponts-Jumeaux par un pont sur la Garonne, tous tracés repris du plan Jaussely fortement allégé.
À lintérieur des rocades, Nicod envisageait plusieurs radiales : outre le prolongement des allées Jean-Jaurès jusquà Jolimont et à la rocade est, repris des plans antérieurs, il retenait du plan Jaussely le prolongement du boulevard Armand-Duportal jusquaux chemins doctroi des Minimes et au canal Latéral à travers les casernes dArtillerie, une liaison pont Saint-Michel Barrière de Lombez, une liaison Cépière Embouchure avec un nouveau pont sur la Garonne, une percée à travers les Magasins généraux depuis le canal du Midi jusquau passage sous la gare Raynal avec prolongement jusquà Croix-Daurade ; il y ajoutait une liaison du carrefour de Lormeau à celui
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11. On désignera ainsi le ministère dont les attributions comprenaient les plans durbanisme et qui porta quatre ou cinq noms successifs jusquà son absorption en 1966 par le nouveau ministère de lÉquipement.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 214
de Rangueil, une autre de la barrière de Cugnaux (place Émile-Male) au Pont-Neuf par les rues de Cugnaux et des Teinturiers élargies, enfin deux quais boulevards accompagnant chaque rive de la Garonne, des ponts dEmpalot au pont Saint-Michel et du pont des Catalans au pont de Blagnac.
En outre, des tracés de voirie poussés jusquau détail étaient prévus dans des espaces destinés à un réaménagement complet : quartiers « insalubres » de Saint-Georges, Arnaud-Bernard, Mirepoix-Blanchers, Saint-Cyprien, ex-île de Tounis ; Arsenal et casernes dArtillerie à remplacer, nouveaux quartiers à aménager à Jolimont et à Empalot, et divers alignements ou rectifications disséminés un peu partout dans les quartiers existants.
Le zonage, à peine esquissé par Jaussely, était ici beaucoup plus développé. Conformément à la loi, le plan délimitait un « Périmètre dAgglomération », « à lextérieur duquel les services publics (électricité, gaz de ville, eau potable, évacuation des eaux et des matières usées ) ne pourront être assurés ». Ce périmètre couvrait au total 4 025 ha pour une population maximum estimée à 370 000 habitants (12).
À lintérieur du périmètre
dagglomération, étaient définies trois zones dhabitation :
- zones dhabitation en continu secteur A, couvrant le centre
historique entre boulevards et Garonne : hauteur des constructions limitées à 22,50 m et
une fois et demie la largeur des voies, couverture en tuiles canal, nombreuses servitudes
daspect, densité doccupation limitée à 60 % de la surface des parcelles,
interdiction de tout établissement industriel ;
- zone dhabitation en continu secteur A1, couvrant le
Péricentre, Saint-Cyprien jusquaux chemins doctroi, et plusieurs faubourgs
déjà bâtis en continu le long des voies : Minimes, Bonnefoy, Marengo, Guilheméry,
Saint-Michel (cf. plan 3) : hauteur des constructions limitée à 25,80 m et une fois et
demie la largeur des voies (sauf dérogation si les prospects l
- zone dhabitation secteur B en ordre discontinu, couvrant le
reste du périmètre principal ainsi que sept périmètres satellites dessinés autour des
noyaux habités dans la périphérie : Lalande, Les Trois-Cocus, Saint-Martin-du-Touch,
Lardenne, Saint-Simon, Lafourguette et Pouvourville : hauteur des constructions limitées
à deux étages sur rez-de-chaussée sur les parcelles de moins de 1 000 m2, à quatre
étages sur les plus grandes, retrait obligatoire des constructions par rapport à
lalignement et aux limites séparatives, densité maximum de 25 à 30 % de la
surface des parcelles. Il sy ajoutait un règlement général de construction
concernant les combles, les cheminées, les saillies de toute sorte sur les façades.
Les zones industrielles étaient reprises du plan Jaussely, mais plus précisément délimitées et dotées dun règlement de construction sommaire.
Enfin la zone rurale était explicitement définie : réservée aux seules constructions destinées au logement des agriculteurs et aux bâtiments dexploitation, elle était aussi pourvue dun règlement de construction.
Les équipements publics étaient prévus plus en
détail que dans le plan Jaussely. Plusieurs localisations étaient expressément prévues
:
- à lemplacement de lArsenal, une Cité administrative
rassemblant les administrations disséminées en location dans la ville, une Cité
universitaire et lextension des facultés de Droit et de Lettres ;
- le Parc des Expositions au Ramier du Château (déjà envisagé par
Jaussely) ;
- lextension sur place de la Préfecture ;
- le Grand théâtre et le Conservatoire de Musique au quartier
Saint-Georges ;
- et en outre, de nouveaux locaux ou emplacements pour les Archives
départementales, lÉcole vétérinaire, le Marché de gros, lextension des
facultés de Médecine et des Sciences, lagrandissement de lhôpital de
Purpan, le déplacement des Abattoirs et de la prison, un lycée nouveau à Saint-Cyprien,
des groupes scolaires dans les quartiers neufs. Les casernes dArtillerie et
lhôpital militaire Larrey étaient désignés expressément pour recevoir certains
de ces services, mais sans que soient précisés lesquels
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12. Cf. sur tout ce chapitre : J. Genard, Exposé du parti général du Plan dUrbanisme de Toulouse, 1950, 60 p. in 8°, dactyl. ; et le dossier administratif du Plan déposé aux archives de la Ville de Toulouse.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 215
Un nouveau cimetière devait être créé hors du territoire communal à Balma, la gare Saint-Cyprien reportée à la Cépière au pied de la terrasse. De petits jardins de quartier étaient prévus à lemplacement dimmeubles démolis ou par acquisition despaces verts privés au quartier Saint-Georges, aux Minimes, à Saint-Cyprien, au faubourg Saint-Michel en bordure de Garonne, à Guilheméry. Plusieurs de ces projets (Cité administrative, Cité universitaire et Université des Sciences sociales à lArsenal, Lycée technique à Saint-Cyprien, en partie extension de la Préfecture, Parc des Expositions) ont été suivis de réalisation, mais il est évident que ni lurbaniste ni les pouvoirs publics ne pouvaient imaginer ce quallaient devenir les besoins en locaux de lenseignement secondaire et supérieur.
La protection des monuments, des sites et des paysages urbains faisait enfin lobjet dune longue annexe. Aux soixante-six immeubles ou parties dimmeubles alors classés monuments historiques ou inscrits à linventaire supplémentaire, elle najoutait pas moins de cent-soixante-douze autres articles, dont plusieurs concernant des ensembles non classés à cette date : façades des quais de la Garonne, Ponts-Jumeaux, canal de Brienne avec ses plantations, remparts le long du boulevard Armand-Duportal, rues Saint-Rome et des Changes, rue des Coffres, Darquier, Ninau et Vélane, rues de la Dalbade et de la Fonderie, places du Capitole, Wilson, Saint-Cyprien et Roguet, Pont-Neuf sur la Garonne et plusieurs ponts sur le canal du Midi et le Touch. Des mesures de classement sont venues depuis assurer la protection dun certain nombre de sites ou dédifices, mais quelques autres ont été par contre détruits ou défigurés.
Les annexes sanitaires (adductions deau potable et assainissement) ne figuraient que pour mémoire, devant être confiées par la Ville à un cabinet spécialisé. Enfin le plan Nicod conservait du plan Jaussely le classement en zones vertes non aedificandi de la vallée du Touch, du coteau de Pech-David en entier et du vallon de Limayrac jusquà lHers, la proposition dun parc urbain au Grand Selve et la protection dune vingtaine de parcs de châteaux dans la zone rurale.
Le plan à lépreuve des faits (1947-1955) (13)
La prise en considération du plan Nicod permettait sa mise en vigueur immédiate, mais sans contraindre les pouvoirs publics à sy conformer et en laissant à la Commission départementale durbanisme formée délus et de fonctionnaires de larges possibilités de dérogation à légard des particuliers. Or lapplication du plan tel quel va vite se heurter à des obstacles insurmontables.
Si la reconstruction nétait à Toulouse quun problème mineur (14), celui du logement se posait par contre en termes particulièrement aigus : les 213 000 habitants de 1936 étaient devenus en 1946 264 000, alors quon navait construit dans cette période que 5 000 logements environ (dont presque aucun après 1940) et que la poussée démographique paraissait se poursuivre, fut-ce au ralenti. Pour répondre à ce besoin impérieux, deux solutions étaient techniquement possibles : ou construire à neuf en terrain vierge, ou surélever des maisons qui pour la plupart navaient guère plus dun étage hors du noyau ancien cerné par les boulevards. Cest cette dernière solution, qui assurait une meilleure rentabilité aux services publics et limitait les charges de voirie, que préconisaient les techniciens de la Reconstruction. Prêchant dexemple, ils élevaient dès 1948 dans le périmètre de reconstruction dEmpalot deux immeubles de huit étages, alors que la plus haute maison construite avant 1936 nen avait que six ; encore était-elle unique. Mais peu dimmeubles se prêtaient en fait à une surélévation, qui dailleurs eut exigé laccord de leurs propriétaires ; dans la plupart des cas, il aurait fallu démolir pour construire à neuf plus haut. Par surcroît, les habitudes toulousaines depuis la fin du XIXe siècle privilégiaient largement la maison individuelle ; de 1919 à 1939, on navait guère édifié plus dune cinquantaine dimmeubles collectifs dhabitation pour un total de 9 627 logements neufs (15). Aussi les promoteurs locaux, y compris lOffice municipal dH.L.M., préférèrent-ils la construction neuve en terrain vierge. Théoriquement la zone B du périmètre dagglomération pouvait recevoir 142 000 habitants supplémentaires. Mais tous les terrains libres nétaient pas également faciles à acquérir. Or la
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13. Cf. notre article : J. Coppolani, « Le nouveau plan durbanisme de Toulouse », dans La vie urbaine, 1956, p. 13-29.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 216
demande, faible jusquen 1950 (encore seulement 270 permis de construire en 1949) enfla rapidement à partir de cette date, sautant de 1 013 logements projetés en 1951 à 3 392 en 1954. Une telle situation ne pouvait que déchaîner la spéculation foncière et elle ny manqua pas, à la fois par surenchère et par rétention : de 1949 à 1954, le prix des terrains à bâtir dans Toulouse séleva de 300 % alors que le coût de la vie naugmentait que de 45 %. Pour répondre à une demande de plus en plus pressante de logements, la tentation était forte dagrandir le périmètre dagglomération en ne refusant jamais de dérogation en zone rurale, et cela dautant plus que sa limite extérieure avait été bien souvent tracée de façon arbitraire, ne sappuyant ni sur la voirie, ni sur des accidents de terrain il ny en a guère à Toulouse , ni sur les limites parcellaires. De 1948 à 1954, la surface totale du périmètre dagglomération passa ainsi de 4025 à 4515 ha, cinq des sept périmètres satellites étaient réunis au périmètre principal, et on pouvait craindre que tout le territoire communal plus vaste que celui de Paris , à lexception des zones inondables et des pentes trop abruptes de Pech-David, finisse par être tout entier classé en zone urbaine.
Or cette perspective ne pouvait satisfaire ni les techniciens de lurbanisme ni la municipalité. Le maire désigné à la Libération, réélu en 1945, 1947 et 1953, Raymond Badiou, gestionnaire strict, sinquiétait particulièrement des charges nouvelles quapportait lallongement continu de la voirie (chaussées, mais aussi réseaux) qui, en 1954, couvrait 736 km et représentait ainsi 2,74 m par habitant contre 0,39 m à Paris et encore 1,06 m à Bordeaux, dans une ville où le revenu moyen était alors plutôt bas et les grandes entreprises, sources de grosses patentes, plutôt rares, et alors que le réseau dégouts-vannes, timidement amorcé en 1941, ne desservait même pas le dixième de la surface bâtie. Le choix paraissait être entre une agglomération de plus en plus distendue dont léquipement resterait toujours déficient, sinon même le deviendrait encore plus, et une restriction tant de la surface constructible que des projets de voirie. Cest la seconde solution que choisit en 1954 le maire, à la veille du lancement de lenquête publique qui devait précéder lapprobation définitive du Plan. Il était en plein accord sur ce point avec lUrbaniste en chef Raymond Coquerel, et avec J. Génard devenu le véritable maître duvre du Plan. La législation ly poussait, en autorisant par la loi du 6 août 1953 les propriétaires dont le terrain (bâti ou non) se trouvait frappé de servitude den exiger lacquisition par les pouvoirs publics dans les cinq années suivant le refus dun permis de construire motivé par cette servitude. Or il était évident que la majeure partie des tracés de voirie, en particulier, ne serait pas exécutée dans un tel délai.
On remit donc le Plan en chantier (plans 1.e et 4). Réduit à 3 225 ha, le Périmètre dAgglomération reculait fortement sur la rive gauche, moins sur la rive droite où il devait prendre en compte de nouveaux lotissements déjà autorisés. Sa délimitation devenait beaucoup plus précise : partout il suivait, soit des limites parcellaires bien déterminées, soit des voies publiques existantes, étant bien entendu que le côté de ces voies situé hors périmètre restait constructible par dérogation au coup par coup ; la réglementation de la zone rurale était précisée de façon à y éviter tout lotissement ou ensemble de logements important, mais en laissant une possibilité de développement aux zones déjà équipées. À lintérieur du périmètre, les trois zones dhabitation étaient conservées à peu près dans les mêmes limites, mais la zone C (ex B ; tandis que lA devenait B) était subdivisée en deux sous-zones : C1 qui associait immeubles collectifs et maisons individuelles, et C2 où seules seraient autorisées les maisons individuelles.
Quant au programme de voies nouvelles, il était
fortement réduit. Plus de percées dans le centre ancien ni dans le Péricentre. Un
aménagement des quais de la Garonne avec deux niveaux en sens unique, les quais existants
et une voie sur berges, devait assurer avec les allées du canal de Brienne au nord et un
boulevard appuyé sur la digue de la Garonne au sud, une traversée nord sud de la ville
doublant les rues dAlsace-Lorraine et de Languedoc. Le plan conservait les deux
rocades est et ouest, et reprenait la « seconde circulaire » de Jaussely par le canal du
Midi et les chemins doctroi de la rive gauche avec deux ponts sur la Garonne en
amont : le pont du Garigliano déjà construit sur le bras oriental et le futur pont de
Coubertin enjambant le bras occidental et le Ramier, et un troisième pont en aval amenant
aux Ponts-Jumeaux. Cette rocade était doublée sur la rive droite par une deuxième voie
circulaire des Ponts-Jumeaux au Pont des Demoiselles par les chemins doctroi des
Minimes et le grand « boulevard des Crêtes » ; enfin le plan conservait le vieux projet
du prolongement des allées Jean-Jaurès jusquà la rocade est et cinq liaisons
inter-quartiers : avenue Frizac carrefour Saint-Michel, canal du Midi pont
de Ginestous, canal du Midi gare Raynal, barrière de Cugnaux Pont-Neuf et
pont Saint-Michel Patte-dOie, ce dernier repris du plan Jaussely.
Les réserves demplacements pour services publics étaient
limitées aux opérations déjà décidées, sinon engagées. Par contre, des plans de
détail, à élaborer par la suite, recouvraient dune part les « îlots insalubres
» : Saint-Georges, Arnaud-Bernard, Mirepoix, faubourg Saint-Michel, Saint-Cyprien nord,
ancienne « bastide » de lÉtoile
, et dautre part les ensembles neufs :
Empalot, Jolimont, et Papus engagés depuis 1948, auxquels venaient sajouter le
Lazaret de Lalande, Fontanelles-Ayga et Rangueil. La superficie des zones industrielles
était réduite ; en zone rurale, des
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 217
mesures spéciales de protection recouvraient la zone maraîchère du nord, les Ramiers en bordure de Garonne, les vallées de lHers et du Touch et divers parcs et espaces boisés de moindre dimension.
Ainsi remanié et réduit dans ses ambitions, le Plan Nicod fut de nouveau « pris en considération » et la procédure réglementaire suivit cette fois son cours pour aboutir, après encore labandon de quelques voies nouvelles et de quelques servitudes de protection (plan 5), au décret dapprobation du 31 juillet 1962. Mais entre temps des faits nouveaux étaient intervenus et lapprobation fut dès avril 1963 suivie dun arrêté ordonnant la mise en révision du Plan.
La transition (1956-1967)
Le maire Louis Bazerque et « lopération Mirail »
Avec ce nouvel arrêté de prise en considération se terminait la prépondérance des urbanistes privés. Lélaboration des Plans dUrbanisme relevait maintenant de la responsabilité conjointe et parfois concurrente de la Ville qui se dotait dun « Atelier municipal dUrbanisme » (16) et de lÉtat représenté maintenant à la fois par lUrbaniste en chef chargé de la région et par la Direction départementale de la Construction définitivement organisée en 1959 et qui comprenait un service Urbanisme et Programmation. Les urbanistes et architectes privés comme les bureaux détudes spécialisés continuaient à assurer des études portant sur des points particuliers du Plan, ou à élaborer des plans-masses de détail mais sans jamais recevoir la responsabilité de laménagement densemble de la ville.
Pendant quelques années, on appliqua tant bien que mal les règlements de construction, non sans dérogations, notamment pour autoriser les promoteurs publics ou privés, convertis à limmeuble collectif par la pression des demandes de logements, à construire au hasard des emplacements qui le permettaient des « gratte-ciels » de plus en plus élevés : des huit étages de 1949 on passa successivement à dix, douze, quinze, dix-huit, pour culminer aux vingt étages de limmeuble Roguet achevé en 1957, le tout sans plan arrêté davance et plusieurs fois dans des sites où ils apparaissent bien importuns. La rénovation du quartier Saint-Georges fut décidée en 1956, mais le plan-masse ne devait être arrêté quen 1960 (17).
Mais, surtout, une série dévénements politiques, économiques, démographiques, allait condamner les conceptions restrictives qui avaient présidé au dernier état du Plan.
En effet la population de Toulouse, après avoir
marqué un palier au lendemain de la guerre 269 000 habitants (18) en 1954 contre
264 000 en 1946, soit seulement 5 000 de plus , avait repris une ascension rapide
avec lessor de lindustrie aéronautique (lancement du programme Caravelle
en 1955), le développement des services publics et notamment de lenseignement
secondaire et supérieur, la poursuite de lexode rural et les premiers retours de
Français dOutre-Mer ; les 325 000 habitants qui semblaient en 1954-1955
lhypothèse de population maximum pour 1970 étaient atteints dès 1962 où le
recensement en dénombrait 323 724, et les 400 000 envisagés par Jaussely et Nicod comme
une perspective reléguée dans un avenir lointain apparaissaient maintenant proches.
Entre la prise en considération du Plan et son approbation, une série de « coups partis
» avait bousculé ses prévisions :
- installation de la faculté des Sciences sur 250 ha à
lextrême sud du territoire communal, et nécessité de réserver à proximité une
surface à peu près équivalente pour installer lÉcole supérieure
dAéronautique, lÉcole Nationale dAviation Civile et les laboratoires
du Centre National dÉtudes spatiales, dont le transfert à Toulouse fut décidé en
1960 ;
- création dune zone industrielle à Saint-Martin-du-Touch en
bordure de laéroport ;
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16. Dirigé à lorigine par G. Tarrius.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 218
- élargissement du périmètre dagglomération au sud-ouest pour permettre la réalisation dun important programme dH.L.M. au domaine de Bagatelle par lOffice municipal qui ne trouvait nulle part ailleurs les terrains lui permettant de respecter les prix maxima autorisés. À partir de 1958, la construction de logements à Toulouse atteignit le « rythme de croisière » de 5 000 par an, et les promoteurs privés se plaignaient de ne plus trouver de terrains disponibles en ville et commençaient à en rechercher en banlieue, où quelques municipalités, à Colomiers et à Muret notamment, envisageaient des programmes importants de développement.
Mais probablement décisif fut un événement politique : le changement de la personne du Maire. Après les événements de mai-juin 1958 et lavènement de la Ve République, Raymond Badiou, en désaccord avec la majorité de son parti, la S.F.I.O. sur lattitude à tenir envers le nouveau régime, abandonna la Mairie en octobre de cette même année. Son successeur, Louis Bazerque, par ses origines et sa profession davoué, était beaucoup plus proche des milieux économiques. Pour lui, freiner la croissance de Toulouse sous prétexte que la ville ne pouvait en supporter les charges était une erreur majeure. Il fallait au contraire pousser cette croissance, au besoin par des initiatives spectaculaires qui attireraient les grandes entreprises et procureraient à la municipalité les financements nécessaires en accroissant la richesse disponible (19). La politique nationale des « métropoles déquilibre », définie en 1960 et développée à partir de 1963, allait dans la même direction, puisquelle se proposait dégaler Toulouse aux grandes métropoles européennes, Birmingham, Francfort ou Bologne. Doù linitiative audacieuse de Louis Bazerque, annoncée fin 1959 : une cité satellite de 100 000 habitants dans 23 000 logements sur le territoire communal de Toulouse, avec tous les équipements dune ville de cette importance. Aucun projet de cette taille navait encore été lancé dans toute lEurope ; ni les new towns anglaises, ni les plus grands « Ensembles » de la banlieue parisienne natteignaient cette dimension. Larrêté ministériel du 15 septembre 1960 érigea ce territoire de 680 ha en « Zone à urbaniser par priorité » (Z.U.P.), dénommée « Z.U.P. du Mirail », du nom dun des domaines ruraux inclus dans son périmètre. Le programme déquipement et daménagement de la Z.U.P. fut soumis en novembre 1960 à un concours international : son emplacement avait été choisi sur la rive gauche de la Garonne, partie sur la terrasse de Lardenne, partie sur la basse plaine, le talus limite des deux surfaces en formant laxe ; cétait une zone dagriculture assez médiocre et encore très faiblement bâtie, assez largement boisée, encadrée par les deux zones industrielles de Saint-Martin-du-Touch et de la Poudrerie.
On ne reviendra pas ici sur le plan original du Mirail, conçu par léquipe Candilis-Josic-Woods, lauréats en janvier 1962 du Concours international lancé par la ville de Toulouse, ni sur les abandons successifs dune partie de ses dispositions premières au fur et à mesure de son exécution : il existe là-dessus toute une littérature à laquelle il est facile de se reporter (20). Mais il faut en souligner les effets sur la structure générale du plan de Toulouse. La répartition future de la population de la ville se trouvait fortement modifiée au profit de la rive gauche, la rocade ouest devenait une voie interne à lagglomération, et la liaison entre ce nouveau centre urbain et le centre historique, comme le partage entre eux des fonctions majeures de la ville, étaient à repenser entièrement. Tout le parti du plan Nicod se trouvait dépassé, et sa mise en révision devenait en fait lélaboration dun nouveau plan.
Le « schéma Badani » (plan 6)
Tandis que se poursuivait jusquen 1970 au moins la croissance de la ville à un rythme toujours rapide qui portait sa population en 1968 à 371 000 habitants, dont environ 25 000 rapatriés dAfrique du Nord, pouvoir dÉtat et pouvoir municipal entreprenaient la remise en chantier du Plan en sattaquant au domaine sur lequel ils avaient le plus directement prise : la voirie.
__________ 19. Cf. la brochure de Toulouse de la Renaissance à la renaissance de Toulouse : le destin dune ville, Toulouse, 1959. (En fait, le manifeste électoral du nouveau maire).M.S.A.M.F., T. LVIII, page 219
Cette voirie devait répondre aux besoins nés de
trois facteurs principaux :
- la fonction de « métropole déquilibre » attribuée à
Toulouse,
- les besoins grandissants de la circulation automobile,
- la cohésion de la ville et en particulier la liaison Mirail
centre ancien.
Une métropole déquilibre, élément essentiel de laménagement du territoire national, devait communiquer aisément, non seulement avec sa région (donc pour Toulouse, les huit départements de Midi-Pyrénées) mais avec lensemble de la France et même de lEurope. Ce qui concernait les quatre moyens de communication : routes, voies ferrées, voies deau et transports aériens. Le réseau ferroviaire paraissait bien achevé et les améliorations à lui apporter, et notamment lachèvement de lélectrification, se situaient entièrement à lintérieur des emprises ferroviaires. Le rôle de la voie deau apparaissait négligeable, au point denvisager un temps lutilisation du lit des canaux pour faire passer une autoroute en pleine ville, la navigation étant déviée, soit par la vallée de lHers de Ramonville à Lalande suivant un tracé déjà envisagé en 1903, soit dans le lit de la Garonne rendue navigable par un barrage édifié en aval de Blagnac. Pour les liaisons aériennes, encore limitées en 1962 à la France et en premier à Paris et à lAfrique du Nord, laéroport de Blagnac, qui venait dêtre doté de deux pistes accessibles aux plus gros porteurs, paraissait très suffisant (il lest encore en 1998), mais il fallait le munir dune liaison rapide, dune part avec le centre urbain, dautre part avec le réseau régional. Au plan routier enfin, le réseau national défini en 1963 comportait une autoroute Bordeaux-Marseille par Toulouse, une voie rapide Toulouse-Bayonne (devenue ultérieurement autoroute) par Tarbes et Pau, des liaisons régionales de Toulouse à Cahors et Brive en direction de Paris, et de Toulouse à Rodez, Foix et Auch.
La trame de base de la nouvelle voirie, conçue pour
un trafic automobile intense et rapide, devait donc répondre aux trois conditions
suivantes :
- séparer la circulation de transit de celle qui doit pénétrer
jusquau centre urbain ;
- faciliter laccès vers ce centre jusquà lanneau
des boulevards ;
- assurer une liaison aisée et rapide dune part entre le centre
urbain et les trois pôles principaux de la périphérie : le Mirail, le complexe
scientifique de Rangueil et laéroport, et dautre part entre ces trois pôles.
Ce sont les solutions à ces problèmes qui étaient
demandées au schéma de voirie dont létude fut confiée en 1963 par les pouvoirs
publics à un bureau détudes parisien dirigé par les architectes urbanistes Badani
et Roux-Dorlut. Ce « schéma Badani » fut présenté en juin 1965.
Ce schéma reposait sur la distinction entre rocades, destinées à
éviter la ville, et pénétrantes conduisant vers le centre, celui-ci délimité par la
première rocade des boulevards et des allées.
Ceinturant entièrement la ville, la rocade extérieure comporte trois branches : est, ouest et sud. La rocade est correspond à la portion de lautoroute Bordeaux-Marseille (aujourdhui appelée Autoroute des deux mers) qui contourne Toulouse : depuis léchangeur situé au nord de léglise de Lalande, elle se dirige vers lHers quelle atteint au pont de Croix-Daurade sur la route dAlbi, le suit jusquau pont de Montaudran sur la route de Revel, conservant le tracé déterminé par Jaussely et entériné par les plans suivants, puis gagne léchangeur de Palays, à la limite de Ramonville ; cinq échangeurs au moins sont prévus sur son parcours à la rencontre des routes dAlbi, dAgde, de Balma, de Castres et de Revel. La rocade ouest, devenue une voie interne du fait de la mise en construction du Mirail, combine deux tracés de rocades du premier plan Nicod. Elle part de la Garonne en face du bassin de lEmbouchure sur le canal du Midi, passe au milieu du domaine de Purpan, atteint le rond-point de Lardenne, coupe à la Cépière la route de Cugnaux et va rejoindre la route des Pyrénées au lieu dit Langlade, à la lisière nord de la zone industrielle Poudrerie-O.N.I.A. (aujourdhui Atochem) ; un pont sur la Garonne la relie aux deux rives du bassin de lEmbouchure. La rocade sud part de la route des Pyrénées à Langlade, franchit la Garonne par deux ponts accolés aux deux viaducs ferroviaires dEmpalot, croise la route de Méditerranée au carrefour de Rangueil, puis va rejoindre le canal du Midi à léchangeur des Herbettes, suivant un tracé en partie différent de ceux quavaient prévus les plans précédents.
Les pénétrantes sont au nombre de cinq :
- pénétrante nord, de léchangeur de Lalande à
lEmbouchure ;
- pénétrante nord-est représentée par le prolongement des allées
Jean-Jaurès jusquà la rocade est ;
- pénétrante sud-est de léchangeur des Herbettes à celui de
Palays ;
- pénétrante sud-ouest arrivant au carrefour de Langlade depuis les
deux routes des Pyrénées suivant lune la Garonne et lautre lAriège ;
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 220
- pénétrante ouest enfin, partant de Purpan pour
rejoindre le tronçon dautoroute qui traverse Colomiers en direction dAuch.
La liaison vers Albi et Rodez serait assurée hors du territoire
communal de Toulouse par une pénétrante partant du pont de Croix-Daurade, proche de
larrivée sur la rocade est du prolongement des allées Jean-Jaurès.
La pénétrante nord et la pénétrante sud-est achèvent de boucler
lanneau des rocades.
Le schéma Badani comprenait aussi deux traversées nord-sud de la ville : lune par une autoroute installée dans le canal du Midi, de lEmbouchure à léchangeur des Herbettes, lautre par les allées qui accompagnent le canal de Brienne, les quais de la Garonne aménagés à deux niveaux, puis les boulevards le long de la digue de la Garonne jusquà Empalot. Enfin, il cherchait à résoudre les problèmes de liaison posés par le Mirail et laéroport.
La desserte de laéroport était assurée dune part par une voie rejoignant la pénétrante nord qui conduit, soit vers Montauban ou Albi via léchangeur de Lalande, soit vers le centre par les Ponts-Jumeaux ; dautre part, une voie rapide rejoignant à Saint-Martin-du-Touch la pénétrante ouest, et par la rocade ouest et la rocade sud les routes vers les Pyrénées et la Méditerranée. Pour décharger ces deux rocades, le schéma prévoyait en outre un contournement ouest partant de la pénétrante ouest à lentrée de Colomiers suivant la lisière ouest du Mirail, coupant la pénétrante sud-ouest, franchissant la Garonne à la limite sud de la commune de Toulouse, puis traversant le coteau pour retrouver lautoroute de la Méditerranée à léchangeur de Palays. Lautoroute dans le canal devait assurer une liaison rapide RangueilCentre-ville et les deux rocades sud et ouest la liaison MirailRangueil. Par contre, la liaison MirailCentre-ville, très difficile à travers Saint-Cyprien, aux voies étroites et au tissu urbain trop dense pour envisager une percée quelconque, nétait assurée que tangentiellement via la rocade ouest et dune part lEmbouchure et lautoroute dans le canal du Midi, dautre part la rocade sud et le boulevard le long de la Garonne depuis Empalot.
Malgré quelques lacunes, le schéma Badani paraissait de nature à régler les problèmes de circulation de Toulouse par des solutions techniquement valables et financièrement acceptables. Aussi fut-il cette fois inscrit dans la programmation des divers plans déquipement routiers contenus dans le Plan national. Il se trouve maintenant exécuté en totalité, à une exception toutefois : les deux traversées tangentes au Centre-ville par les quais de la Garonne et par le canal du Midi. Ce dernier projet rencontra immédiatement lopposition de la direction des canaux qui refusait toute coupure de la navigation à Toulouse mais trouvait à juste titre le trafic commercial trop faible pour justifier les dépenses quaurait entraînées une déviation du canal ; il sy ajoutait lopposition des mouvements écologistes et aussi celle de certains hauts fonctionnaires parisiens qui, débarquant à la gare Matabiau pour une réunion officielle, étaient séduits à la sortie par les vieux platanes se reflétant dans les eaux du canal.
Finalement, on se borna à ménager des passages sous quatre des dix ponts qui franchissent le canal entre les Ponts-Jumeaux et le complexe scientifique de Rangueil, solution qui nassure pas vraiment une liaison rapide de celui-ci avec le Centre ville, ne dégage en rien le difficile accès de la gare Matabiau, mais a entraîné la démolition de deux beaux ponts du XVIIIe siècle qui constituaient de vrais bouchons pour la circulation entre ce même Centre ville et les faubourgs situés au-delà du canal. Le problème des quais de la Garonne fut plus long à régler : dès lannonce du projet, un « Comité de défense des berges de la Garonne » se constitua pour en empêcher lexécution, appuyé par les mouvements écologistes, les défenseurs du visage traditionnel de Toulouse et une bonne partie de lopinion publique locale ; la municipalité, surtout depuis 1971 où Pierre Baudis, appuyé sur une majorité orientée à droite, avait remplacé à la mairie Louis Bazerque, était plutôt réticente face aux services de lÉtat, nettement favorables. La polémique se prolongea jusquaux élections municipales de 1983, où Dominique Baudis, candidat à la mairie quabandonnait son père, prit dans sa liste plusieurs membres du mouvement écologiste résolument hostile au projet, ce qui entraîna son abandon définitif.
Mais le reste du schéma a au contraire servi de base aux grands travaux de voirie exécutés depuis : dabord la rocade ouest, ouverte en 1970 de la route des Pyrénées à la route de Cugnaux, prolongée ensuite jusquau rond-point de Lardenne, puis jusquà lEmbouchure par un pont terminé en 1973 et reliée en 1975 à Empalot par les deux ponts enjambant le Ramier ; la rocade sud lui succéda en 1977, dEmpalot au carrefour de Rangueil ; lopposition dun Comité de défense du quartier de Rangueil retarda jusquen 1984 son achèvement jusquau passage sous le canal du Midi à la rencontre de la pénétrante sud-est exécutée de 1971 à 1983. La pénétrante sud-ouest avait été terminée avec ses deux branches en 1976 ; la pénétrante nord, de léchangeur de Lalande aux Ponts-Jumeaux, fut livrée à la circulation en 1982, en même temps que se terminait le tronçon dautoroute Toulouse-Castelsarrasin ; la rocade est, entreprise en 1985, a été terminée en mai 1987, réalisant la continuité autoroutière de Bordeaux à la Méditerranée.
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Le contournement ouest, dabord limité à un pourtournement du Mirail depuis la pénétrante sud-ouest jusquà la route secondaire de Vitarelle, est arrivé en 1997 à son terminus de Colomiers.
Un pont nouveau sur la Garonne au confluent du Touch assure la liaison avec laérogare, et la voie rapide qui le relie à la pénétrante nord a été achevée en 1998. Le prolongement des allées Jean-Jaurès (avenue Georges-Pompidou, Léon-Blum, et Yves-Brunault) est achevé depuis 1976, mais sarrête à la place de la Roseraie ; sa poursuite jusquà lautoroute restée en suspens et lexécution de la pénétrante nord-est reste à programmer. Une nouvelle pénétrante, dite « pénétrante du Raisin » a été inscrite par la suite dans le schéma ; reproduisant en partie la percée du canal du Midi à la gare Raynal par les Magasins généraux inscrite dans les plans Jaussely et Nicod, elle doit partir de lautoroute entre léchangeur de Lalande et celui de Croix-Daurade et arriver au canal du Midi ; le tronçon sud (avenue Collignon) est ouvert depuis 1985 ; son rôle paraît être beaucoup plus douvrir à lurbanisation ce quartier du Raisin occupé jusque-là presque uniquement par des entrepôts que d'assurer un nouvel accès vers le Centre ville. Seule lexécution du contournement sud entre la pénétrante sud-ouest et Ramonville, reste à programmer.
Mais au cours de lexécution de ce schéma, des changements dans la législation et lévolution démographique de Toulouse et de la banlieue en ont fait un simple élément dun réseau beaucoup plus étendu qui couvre maintenant un ensemble de soixante-trois communes : laire du Schéma Directeur dAménagement et dUrbanisme de lAgglomération Toulousaine.
La loi foncière de 1967 : S.D.A.U. et P.O.S.
Promulguée le 30 décembre 1967, la « Loi
dOrientation Foncière et Urbaine » posait en effet des principes nouveaux en
distinguant deux documents distincts : le Schéma Directeur dAménagement et
dUrbanisme (S.D.A.U.) et le Plan dOccupation des Sols (P.O.S.).
Le Schéma Directeur dAménagement et dUrbanisme (article
12 du code de lUrbanisme) fixe les orientations fondamentales de laménagement
du territoire
« notamment en ce qui concerne lextension des agglomérations,
le tracé des grands équipements dinfrastructure, lorganisation générale
des transports, la localisation des services et des activités les plus importants et des
zones préférentielles dextension et de rénovation. Il oriente et coordonne les
programmes de lÉtat, des collectivités publiques et des services publics
».
Les programmes et décisions administratives doivent être compatibles avec son contenu.
Son élaboration est faite conjointement par les services de lÉtat (direction
départementale et aussi direction régionale de lÉquipement) et les communes
intéressées.
Le « Plan dOccupation des Sols » (article 13 du code de lUrbanisme) « fixe dans le cadre des orientations des S.D.A.U., les règles générales et servitudes dutilisation des sols qui peuvent comporter linterdiction de construire. Il détermine notamment : lemplacement des zones durbanisation, laffectation des sols (habitation, industrie, services publics ), la densité doccupation par le Coefficient doccupation du Sol (C.O.S.), le tracé des voies à conserver, à modifier et à créer, les quartiers à mettre en valeur, ou à protéger, lemplacement des espaces verts, les règles dimplantation des constructions ». Élaboré dans les mêmes conditions que le S.D.A.U., il peut être modifié doffice par une décision dutilité publique concernant une portion du territoire communal. Les terrains grevés de servitude pour services publics doivent être acquis dans les trois ans suivant la déclaration dutilité publique. Les dispositions du P.O.S. concernent directement les particuliers, propriétaires ou candidats à la construction.
La mise en uvre de la législation nouvelle relevait dun nouvel organisme local, la Commission locale dAménagement et dUrbanisme (C.L.A.U.), présidée par le Préfet et composée délus et de représentants des administrations et des services publics intéressés.
Installée le 23 octobre 1969, la C.L.A.U. eut comme première tâche de délimiter le périmètre du S.D.A.U. de Toulouse. Lévolution démographique de la ville comme celle des communes environnantes interdisait en effet de traiter Toulouse indépendamment de son environnement, comme lavaient fait en pratique les plans antérieurs. Au recensement de 1968, la ville avait encore gagné 47 000 habitants en six ans, soit un taux daccroissement annuel de 2,1 % ; mais parmi ces nouveaux Toulousains figuraient 23 000 rapatriés dAfrique du Nord ; les excédents des naissances et limmigration « normale » navaient apporté que 24 000 personnes, ce qui ramenait le taux de
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croissance à 1,25 % par an contre 2,50 % pour la période 1954-1962. Mais surtout lInstitut National de la Statistique (I.N.S.E.E.) faisait cette fois état dune « agglomération » (on dira ensuite « unité urbaine ») de Toulouse, qui groupait autour de la ville vingt-huit communes dont la surface urbanisée était en continuité avec la sienne. Ces communes avaient gagné de 1962 à 1968 27 000 habitants, ce qui leur donnait un taux annuel de croissance proche de 11 %, plus de quatre fois celui de Toulouse-ville. Ces deux faits : croissance rapide de la banlieue et débordement de lurbanisation hors des limites de la ville obligeaient à concevoir un S.D.A.U. qui intégrerait Toulouse et banlieue sans sarrêter aux limites communales, mettant fin à la politique disolement quavait pratiqué jusque-là la ville-centre (21).
Un précédent : le Groupement durbanisme
À vrai dire, il y avait à cela un précédent. Déjà la loi de 1919 avait prévu la possibilité de plans durbanisme sétendant sur plusieurs communes, et celle de 1943 stipulait que « peuvent être constituées en Groupement dUrbanisme les communes voisines, limitrophes ou non, que réunissent des intérêts communs lorsquelles forment un même ensemble géographique » pour un aménagement des éléments communs aux communes constituant le Groupement. Et en janvier 1945, lUrbaniste en chef chargé de la région confia à Joachim Génard la mission de préparer un avant-projet daménagement dun Groupement dUrbanisme de Toulouse.
Restait à trouver un cadre territorial pour ce
Groupement. Les données statistiques du plus récent recensement, celui de 1936, étaient
largement périmées et napportaient dailleurs rien sur les migrations de
travail, ni sur lactivité de la construction. Faute de mieux, on se rabattit sur le
réseau des autobus de banlieue. Ceux-ci desservaient quotidiennement trente-six commues
qui furent incorporées doffice dans le Groupement, sauf Muret que ses attributions
administratives comme sa vie économique plus indépendante firent exclure. On y ajouta à
louest Aussonne, Cornebarrieu et Plaisance-du-Touch, que touchaient les nuisances
dues aux deux aérodromes de Blagnac et de Francazals, au nord Saint-Jory où la S.N.C.F.
prévoyait une grande gare de triage, et on laissait en suspens le sort dEscalquens,
Montrabe et Pibrac qui disposaient de liaisons ferroviaires faciles avec la grande ville.
On arrivait ainsi à un Groupement dUrbanisme de quarante à quarante-trois communes
y compris Toulouse (22). Après une première esquisse présentée en 1948, on réduisit
en 1956 le Groupement aux vingt-six communes qui paraissaient nécessiter un aménagement
commun. Mais cet aménagement commun se borna à inscrire sur le sol les équipements
déjà programmés :
- agrandissement des deux aérodromes ;
- nouvelle gare de triage dite de Saint-Jory (en réalité à
Fenouillet et Lespinasse) ;
- cimetière suburbain dabord prévu à Balma et finalement
implanté à Cornebarrieu ;
- cité militaire regroupant tous les établissements de larmée
situés à Toulouse, et qui, promenée de Beauzelle à Cugnaux, Portet et Balma, fut
finalement abandonnée devant lopposition des principaux intéressés.
Il sy ajoutait lénumération des sites et des édifices
classés ou à protéger, la proposition dune mesure générale de protection pour
les Ramiers accompagnant le cours de la Garonne, lesquisse dune Zone
industrielle linéaire de Lalande à Saint-Jory parallèle à la voie ferrée et à la
route vers Montauban, enfin des périmètres dagglomération tracés sommairement
autour de chaque centre communal, et dont de nombreux maires ne tinrent aucun compte. En
1961, six communes seulement, celles où la construction sétait développée plus
quailleurs, avaient entrepris de se doter dun plan durbanisme, mais seul
celui de Colomiers organisait vraiment le développement de la commune. Cependant les
demandes individuelles de permis de construire et même les projets de lotissement se
multipliaient dans toute la périphérie de Toulouse, et on commençait à envisager une
extension du Groupement dUrbanisme dans une aire couvrant environ quatre-vingts
communes dont Muret, Pibrac et Saint-Lys. Mais rien navait été décidé en 1968,
sinon la mise en chantier de plans durbanisme communaux, non coordonnés entre eux,
dans une bonne partie de ces communes.
__________
21. Cf. notre article : J. Coppolani, « Une politique disolement communal : Toulouse », dans Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, t. XLII, 1971, p. 391-409.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 223
Délimitation du S.D.A.U. (plan 7)
Pour délimiter laire du S.D.A.U., la Commission locale prit comme base les vingt-neuf communes de lagglomération définie par lI.N.S.E.E. Cette agglomération englobait, outre la majeure partie des quatre cantons de Toulouse (devenus quinze en 1973), ceux de Castanet-Tolosan et Muret pour partie, et, chacun pour une seule commune, ceux de Fronton et de Montgiscard. On maintint lexclusion de Muret dont le maire, alors opposé politiquement à celui de Toulouse, aurait mal accepté tout ce qui pouvait apparaître comme une main-mise du chef-lieu sur sa ville. Une zone-tampon de cinq communes, dont trois étaient desservies par les autobus suburbains et qui, toutes, étaient à lorigine de migrations de travail importantes vers Toulouse (23), fut même réservée entre la limite sud du S.D.A.U. et Muret.
Ailleurs par contre, on alla très au-delà des limites de lagglomération I.N.S.E.E., en organisant une consultation auprès des maires de la plupart des communes de laire envisagée en 1961. Des trente-trois communes des quatre cantons de Toulouse, trente et une répondirent positivement et furent donc incorporées dans le S.D.A.U. ; seules deux, à lépoque encore très rurales, restèrent donc en dehors. De même, dans le canton de Castanet dont quatre communes étaient dans lagglomération, les onze autres où, à linitiative du maire de lune delles, un important programme de résidences « de standing » sur de vastes parcelles était à létude, adhérèrent toutes au S.D.A.U. Vers louest, les projets dutilisation de la forêt domaniale de Bouconne, médiocre taillis de 2 000 ha à une vingtaine de kilomètres de Toulouse, comme grand parc suburbain, entraîna lincorporation de cinq communes du canton de Léguevin et de deux du canton de Grenade, qui touchaient à la forêt ou se trouvaient sur ses voies daccès. Au nord, deux autres communes du canton de Fronton où se préparaient dimportants lotissements vinrent sajouter à celle de Lespinasse qui était déjà incluse dans lagglomération I.N.S.E.E. Au sud-est, le canton de Montgiscard ajoutait à Pompertuzat, déjà pris dans lagglomération, Escalquens qui équipait une grande zone dateliers. Enfin le canton de Muret restait présent par les quatre communes de lagglomération I.N.S.E.E. On arrivait ainsi au total de soixante-trois communes, défini par larrêté préfectoral du 5 novembre 1971 et qui est resté depuis sans changement. Lensemble a une forme grossièrement circulaire, avec au nord-est une brèche représentée par la commune de Lapeyrouse-Fossat. Quoique semblable en tout à celles qui lentourent, cette commune navait pas été consultée lors de la formation du S.D.A.U. parce quelle faisait partie du canton de Montastruc et non, comme les autres, du quinzième canton de Toulouse (alors canton de Toulouse-Centre). Une autre brèche à lest est formée par les deux communes de Mondouzil et Mons, du huitième canton de Toulouse (alors Toulouse-sud), qui ont refusé dêtre incluses dans le S.D.A.U., et une troisième également à lest par lavancée du canton de Lanta, encore très rural en 1969, entre ceux de Toulouse-sud et de Castanet.
Les dispositions du S.D.A.U. (24)
L« élaboration conjointe » prévue par la
loi du 30 décembre 1967 sest traduite par lintervention de trois organismes :
- le Groupe détudes et Programmation (G.E.P.) de la direction
départementale de lÉquipement,
- lAtelier municipal dUrbanisme de la ville de Toulouse,
- et un organisme de droit privé, lAgence dUrbanisme de
lAgglomération Toulousaine (A.U.A.T.), constitué et financé par
lassociation de lÉtat avec le département de la Haute-Garonne, la ville de
Toulouse et seulement vingt-quatre communes du S.D.A.U. sur soixante-deux. Son conseil
dadministration, formé de vingt et un représentants des communes (dont douze de
Toulouse), trois du département et quatre de lÉtat, était à lorigine la
seule structure de concertation existant au niveau du S.D.A.U., et il avait été alors
impossible de créer à Toulouse une communauté ou un district. La rivalité entre la
forte personnalité de Louis Bazerque et celles de certains maires de banlieue comme Alex
Raymond à Colomiers, puis après 1971 lopposition politique entre la municipalité
de droite de Pierre Baudis et les municipalités de banlieue presque toutes aux mains des
partis de gauche, ont longtemps fait
__________
23. Cf. A. Hermet, « Contribution à létude des migrations alternantes et des communes dortoirs dans la zone dinfluence de Toulouse », Midi-Pyrénées, Revue de lÉconomie régionale, n° 6, nov. 1958, p. 59-89.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 224
échouer toutes les tentatives dans ce sens. Seuls les transports en commun avaient suscité en 1972 la formation dun Syndicat mixte présidé par le Président du Conseil Général de la Haute-Garonne. Mais des cinquante-deux communes qui adhèrent actuellement à ce syndicat, six sont hors du S.D.A.U., tandis que dix-sept communes du S.D.A.U. lui restent extérieures. Et on na pas essayé de mettre à profit les redécoupages cantonaux de 1973 et 1998 pour faire coïncider, comme à Rodez par exemple, les limites des cantons avec celles du S.D.A.U. Mais Rodez avait déjà un district urbain.
Créée en 1972, lAgence est dirigée par un haut fonctionnaire de lÉtat (en général ingénieur des Ponts et Chaussées) en service détaché ; son personnel comprend quelques fonctionnaires détachés et une majorité de contractuels (25). Après une dizaine dannées de travail et de concertation avec les administrations intéressées et les municipalités, le S.D.A.U. a été approuvé par décret du 2 septembre 1982.
À la différence des plans précédents, le schéma repose sur des hypothèses démographiques et économiques établies avec le maximum de fiabilité à partir des résultats des recensements de 1954 à 1975. À cette dernière date, la population des soixante-trois communes sélevait à 532 309 habitants dont 373 796 pour Toulouse. La capacité daccueil des zones dhabitation, délimitées largement pour parer à tout imprévu, était fixée à 690 000 habitants pour 1985 et 870 000 pour 2 000. Le recensement de 1982 a donné seulement 553 193 habitants dont 347 995 pour Toulouse, ce qui laissait théoriquement une large marge de manuvre pour lutilisation des surfaces réservées, soit pour lhabitation, soit pour les activités.
La première partie du schéma se présentait plus
comme une déclaration dintentions et une liste de recommandations que comme un
programme précis de travaux. Il reprenait en considération le schéma de voirie de 1965
dont il conservait les quatre idées directrices :
- affirmer la vocation de carrefour de Toulouse,
- garantir le maintien de lactivité économique du centre en
assurant son accès par des voies rapides,
- développer de nouvelles structures urbaines le long des principales
liaisons internes,
- intégrer le Mirail dans les fonctions centrales.
Les recommandations portaient sur la protection de lenvironnement
et spécialement des rares espaces boisés et des zones « à vocation agricole ». Le
schéma se proposait de « briser la tendance radio-concentrique » et dorganiser
lextension de lagglomération suivant des axes privilégiés parallèles aux
grands axes de circulation ; des centres complémentaires étaient à rechercher et à
organiser en banlieue pour structurer lagglomération, le Centre-ville actuel
demeurant le centre principal dont les activités seraient valorisées, la population
maintenue et les accès améliorés. Une politique « globale et volontariste » des
déplacements devait être mise en uvre, offrant aux citadins « une véritable
liberté de choix » entre les transports individuels et les transports en commun. Ces
derniers devaient être développés et améliorés, et la voirie adaptée à une plus
grande utilisation des deux roues.
Pour les activités, le schéma insistait sur la nécessité de localiser les zones dextraction de graviers qui dégradent lenvironnement, la création des zones industrielles bien situées par rapport aux moyens de communication, lenrichissement du secteur tertiaire principalement autour du centre principal et des centres secondaires. La politique de construction, destinée à procurer 5 000 à 7 000 logements neufs par an, devait répondre à des exigences de qualité, favoriser la vie de quartier, éviter les ségrégations sociales et favoriser la réhabilitation de lhabitat ancien. Passant rapidement sur ladduction deau et les réseaux dassainissement, le schéma examinait les « équipements de superstructure » pour noter limportance de lenseignement supérieur, léquipement hospitalier quil jugait insuffisant, la nécessité dun centre daccueil pour les congrès, les possibilités de développement des installations de loisirs de plein air. Enfin étaient notées les lacunes de léquipement commercial, et la recommandation de localiser les grandes surfaces autour des Centres secondaires prévus en banlieue.
__________
25. Avant cet organisme créé dans le cadre de la loi de 1967 avait existé, de 1967 à 1972, une « Agence durbanisme de Toulouse », émanée de la Direction régionale de lÉquipement, dirigée par un Urbaniste en chef de lÉtat assisté de quelques fonctionnaires de ce ministère et de plusieurs contractuels de disciplines variées. Sa fonction était détablir un « Livre Blanc » préalable à lélaboration dun schéma dagglomération dans une aire quil fallait dabord délimiter. Travaillant sur 108 communes censées pouvoir contenir à terme un million dhabitants, lAgence exécuta diverses études qui furent ensuite utilisées par lAgence dAgglomération. Mais, ignorée en fait tant par la municipalité de Toulouse que par la Direction départementale, elle fut finalement absorbée par la Direction régionale, tandis que son personnel contractuel était en majeure partie embauché par le G.E.P. départemental.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 225
Des propositions plus concrètes sont présentées dans le cadre des six secteurs entre lesquels le S.D.A.U. découpe lagglomération. Un de ces secteurs est constitué par le Centre-ville largement étendu entre la Garonne, le canal du Midi depuis les Ponts-Jumeaux jusquau pont des Demoiselles et la limite sud de la ville ancienne jusquau pont Saint-Michel. Quatre des cinq autres secteurs associent des quartiers périphériques de Toulouse à des communes de banlieue : innovation totale par rapport aux plans antérieurs qui ne sortaient pas des limites communales. Seul le sixième secteur (ouest-nord-ouest) ne couvre que des communes de banlieue, de Blagnac à la forêt de Bouconne. Chaque secteur pour lequel est présentée une double hypothèse de population (1985 et 2000) fait lobjet d« options daménagement » dans quatre domaines : habitat, équipement, activités et liaisons. Lensemble est résumé sur une grande carte au 1/100 000e annexée à la brochure et qui fait apparaître la traduction sur le terrain des propositions du S.D.A.U. (cf. plan 8).
La Voirie était lélément le moins
nouveau du S.D.A.U. Celui-ci entérinait purement et simplement le schéma de 1965 dont il
fixait approximativement lexécution totale à l« horizon 2000 », ce qui a
été effectivement réalisé. À ce réseau de base sajoutaient des tracés
secondaires : une nouvelle radiale du Mirail vers Seysses parallèle au canal de
Saint-Martory, le prolongement en direction de Grenade de la voie de desserte de
laéroport, une liaison lUnionBruguières par les coteaux, le
rabattement de la route de Castres (R.N. 126) sur léchangeur de Montaudran. Un
boulevard urbain parallèle à lautoroute devait relier la route de Paris à la
route dAgde ; une transversale devait relier Portet à Colomiers par Cugnaux et
Tournefeuille, une autre Blagnac à Bruguières et au-delà Gratentour avec un nouveau
pont sur la Garonne ; enfin les deux routes de Revel par Saint-Félix et de Carcassonne
(R.N. 113) seraient rabattues sur un échangeur à réaliser à Labège.
Mais la grande innovation du S.D.A.U. concernait les transports en
commun. Après la disparition en 1957 du dernier tramway, on avait pensé que les autobus
pourraient circuler sans problèmes sur la voirie générale. Or la réalité fut toute
autre : malgré la création par le Plan de Circulation de 1972, de couloirs réservés
dans les rues dAlsace-Lorraine et de Languedoc, de Metz et de la République, la
vitesse commerciale des autobus ne dépassait pas 12 km/h dans le centre (26) et les
auteurs du S.D.A.U. concluaient à la nécessité de la substitution de nouveaux moyens de
transport à lautomobile. En 1974 fut arrêté le principe de la construction
dun Transport en Commun en site Propre (T.C.S.P.) dont le S.D.A.U. esquissait le
tracé avec deux lignes allant de Jolimont au Mirail par le Capitole et Saint-Cyprien, et
de laéroport à Rangueil, et lincorporation à ce réseau de la portion de
ligne S.N.C.F. Saint-CyprienColomiers ; le choix étant laissé pour les deux
premières lignes entre un tramway au sol et un métro léger enterré ; les lignes
dautobus de banlieue seraient rabattues sur les terminus du métro et ne
pénétreraient plus dans le centre.
En outre, étaient envisagés le développement du réseau des voies
réservées aux piétons, esquissé entre 1974 et 1978 dans les rues des Filatiers, des
Changes et Saint-Rome, la création de parkings périphériques et dun réseau de
pistes cyclables.
Dans le domaine des Grands Équipements, le S.D.A.U. prenait
dabord en compte les créations non prévues dans les plans précédents et déjà
réalisées ou en cours dexécution : Centre hospitalier de Rangueil, Hôpital
militaire à Pouvourville, École vétérinaire à Lardenne, Université de Toulouse-Le
Mirail, Lycée agricole et Laboratoire de lI.N.R.A. à Auzeville.
Dans le centre et à proximité, deux opérations
importantes étaient prévues pour accueillir des activités liées aux fonctions
métropolitaines :
- sur lemplacement des anciennes casernes dartillerie
Caffarelli et Compans et sur le site de Marengo-Jolimont à lextrémité des allées
Jean-Jaurès ;
- au cur du Mirail, un « Centre complétaire » devait ajouter
divers services publics et activités « de haut niveau », à luniversité déjà
implantée.
- cinq « Centres secondaires » étaient envisagés en périphérie :
à Blagnac et Colomiers autour de laéroport ; au nord vers Bruguières ; au
nord-est dans les quartiers de Gramont et de Montredon à cheval sur Toulouse, Balma et
lUnion ; au sud-est autour de Castanet ; au sud-ouest à Portet ou Roques en
direction de Muret dont le rôle possible était passé sous silence en raison de son
exclusion du S.D.A.U.
__________
26. Cf. R. Marconis, Midi-Pyrénées, XIXe-XXe siècles. Transport, Espace, Société, t. II, Crise et croissance de lagglomération toulousaine, Toulouse, éd. Milan, 1986, 400 p. fig. cartes.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 226
Pour lindustrie, le schéma
entérinait aussi bien lexistence des diverses zones déjà délimitées sur
Toulouse et plusieures communes périphériques, les unes déjà pratiquement garnies
(Cartoucherie, Mirail-Bellefontaine, Montaudran, Poudrerie, Fondeyre et Thibaud à
Toulouse, Aéronautique et en Jaca à Colomiers, Fenouillet, la Grande Borde à Labège,
Bois-Vert à Portet, Saint-Alban) que celles en cours daménagement et en partie au
moins disponibles : à Toulouse, Braqueville, Candie, la Glacière (reprise des plans
Jaussely et Nicod) Larrieu, Mirail-nord, Palays, Saint-Martin-du-Touch, à Blagnac le
Ritouret, à Colomiers les zones dénommées simplement Est et Ouest, le Casque à
Cugnaux, la Zone dActivités dEscalquens, celle de Labège, celle du Canal à
Ramonville, celle de lHers à lUnion. Ces zones couvrant en tout 800 ha
mêlaient en fait, industries, entrepôts et même grandes surfaces commerciales. Mais
pour accueillir les 310 000 emplois théoriquement jugés nécessaires en 2 000, de
nouvelles surfaces seraient à dégager, que le S.D.A.U. proposait de localiser :
- une zone dactivité Nord, de tracé linéaire parallèle au
canal, à la voie ferrée et à la future autoroute, englobant les zones déjà
aménagées et les établissements existant dans les quartiers de Lalande et Ginestous à
Toulouse et sur Aucamville, Fenouillet, Saint-Alban, Lespinasse et au-delà vers
Saint-Jory ;
- une zone sud-est, de Montaudran à Labège avec les zones satellites
de Castanet et dEscalquens, encadré par la voie ferrée et lautoroute ;
- une zone sud-ouest, prolongeant sur Portet et Roques lensemble
Poudrerie O.N.I.A., le long de lautoroute des Pyrénées, rejoignant la zone
industrielle de Muret ;
- enfin des zones moins étendues autour des échangeurs de la rocade
est, notamment dans les quartiers de Gramont et Montredon et à Balma.
Ces localisations ne faisaient guère quentériner et développer
des situations de fait, sans innovations réelles.
La politique de lHabitat concernait tout à la fois le
bâti existant et les constructions neuves qui devaient, selon le S.D.A.U., porter sur 5
000 à 7 000 logements chaque année. La disposition des nouvelles zones dhabitation
devait se faire suivant un schéma linéaire parallèle aux grands axes de circulation et
de transports.
Pour le centre, le S.D.A.U. prévoyait larrêt de la substitution des bureaux aux logements, labandon des rénovations type Saint-Georges au profit de « réhabilitations » conservant au maximum le bâti ancien. En périphérie, lintention était de livrer entièrement à la construction la quasi-totalité des territoires de Toulouse et des communes limitrophes, et la création de nouvelles zones dhabitation à Toulouse, à Ginestous et Borderouge, en banlieue entre Bruguières, Castelginest et Saint-Alban, sur la route dAlbi jusquà Castelmaurou, autour de Castanet et Saint-Orens, de Saint-Simon à Frouzins, de Tournefeuille à Plaisance-du-Touch, de Colomiers à Léguevin le long de la route dAuch, au nord de Blagnac jusquà Seilh, avec des « coupures vertes » séparant ces divers axes et laissées à lagriculture ou aménagées en parcs de loisirs. Les coteaux de lest et du sud devaient garder un « caractère résidentiel aéré », tandis que la partie non aménagée de lex-Z.U.P. du Mirail était depuis 1971 partagée en une série de Z.A.C. (Zones dAménagement Concerté) délimitées au fur et à mesure des demandes et ne comportant que des pavillons et des immeubles bas, avec desserte directe par des rues mêlant piétons et voitures et abandon de la dalle qui était lélément le plus original du projet Candilis.
Les Zones Naturelles insérées entre les axes de développement, outre lagriculture (cultures irriguées sur les terrasses, grande culture céréalière sur les coteaux), devaient comporter la conservation de « coulées vertes » le long des petites rivières : Hers et ses affluents, Touch, Aussonnelle, Courbet, sajoutant aux Ramiers des bords de Garonne et de lAriège ; « Bases de Plein Air et de loisirs » dans la forêt de Bouconne et sur la périphérie de Toulouse (les Argoulets, Larramet, Pech-David et Sesquières), la protection de labrupt des coteaux au-dessus de la Garonne et de lAriège, le cantonnement des extractions de graviers le long de la Garonne, de Roques à Portet et de Ginestous à Cagnac, et sur la basse terrasse entre Plaisance-du-Touch et Frouzins, et leur aménagement ultérieur en zones de loisirs pour la pêche, la baignade et la promenade pédestre ou équestre sous les arbres.
Procédant dune vue générale de lagglomération, le S.D.A.U. fixait des directives générales sans localisation précise des opérations. Il laissait en fait toute latitude tant aux administrations de lÉtat quau département ou aux municipalités pour leur application concrète. Celle-ci relevait de lautre document institué par la loi du 30 décembre 1967 : le Plan dOccupation des Sols.
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 227
Le Plan dOccupation des Sols de Toulouse (plans 9 et 10)
Si le S.D.A.U. fixe les grandes lignes dun zonage qui, dun plan à lautre, avait déjà gagné en précision, cest dans le P.O.S. que sont inscrits les règlements de construction qui fixent la disposition et laspect de ce qui sédifie sur le sol. Pour rester dans la continuité des plans successifs de 1928 à 1962, cest aux dispositions du seul P.O.S. de Toulouse quon sattachera ici, pour en déterminer les points quil a conservés des plans antérieurs et les innovations quil apporte.
Ce P.O.S. a été élaboré conjointement par lAtelier Municipal dUrbanisme et lAgence dUrbanisme et dAgglomération. Approuvé une première fois par arrêté du 28 décembre 1981, il a été aussitôt mis en révision pour en adapter certaines dispositions à des décisions concernant tel ou tel secteur de la ville. Une série de révisions ont été ainsi approuvées, notamment en 1986, 1987, 1988 et 1989. Les dispositions du P.O.S. reprennent, en principe, les choix du S.D.A.U. pour les grandes opérations de voirie et la localisation des grands équipements, et pour le reste portent essentiellement sur deux points : le zonage et laménagement des quartiers.
Zonage
Le zonage abandonne la notion de « périmètre
dagglomération ». Pour reprendre le mot du ministre à qui est due la loi
foncière du 30 novembre 1967, « tout terrain viabilisé est constructible ». Seuls
échappent définitivement à toute construction les zones de risques naturels, certains
sites protégés et notamment les espaces boisés de plus de 500 m2 (donc
divers jardins privés, même en pleine ville) et, mais pour lhabitat seulement, les
zones de bruit autour des pistes des trois aérodromes de Blagnac, Francazals et
Montaudran. Le reste du territoire communal comprend deux espèces de zones : les zones «
urbaines » (U) déjà construites, et les zones « naturelles » (N) considérées, non
comme des zones à laisser libres de toute construction, mais comme des réserves
foncières en vue dune urbanisation future. On compte plusieurs zones urbaines et
plusieurs zones naturelles qui ont été délimitées à partir des anciennes zones A, B,
C1 et C2, mais avec des modifications de détail et surtout des précisions dont le but
principal est, semble-t-il, dassurer une meilleure homogénéité de la construction
dans les divers quartiers. On trouve ainsi dabord :
- la zone 1 UA, correspondant au centre historique accru des quartiers
entre boulevards et canal, entre la place Dupuy et la rue de la Concorde, définie comme
la zone « dhabitat ancien du centre historique, à forte densité dactivités
commerciales, de bureaux privés et dadministrations » ;
- la zone 2 UA est la zone « dhabitat traditionnel en
périphérie de lhyper-centre ». Elle ne couvre guère que lespace entre
boulevards et Canal au nord, de la rue de la Concorde aux Ponts-Jumeaux, le faubourg
Saint-Étienne et le sud du faubourg Saint-Cyprien ;
- la zone 3 UA correspond à l« habitat traditionnel des
faubourgs et du centre des quartiers périphériques ». Elle recouvre toute la partie de
la ville déjà urbanisée en 1919, hors du centre : sur la rive droite, les faubourgs des
Minimes, Bonnefoy, Marengo, Providence, Guilheméry, Côte-Pavée, Pont des Demoiselles,
Montplaisir, Busca, Saint-Michel ; sur la rive gauche, tout lespace entre les
allées Charles-de-Fitte et lancien mur doctroi et les faubourgs qui avaient
poussé au-delà de celui-ci le long des quatre routes de Bayonne, Lombez, Cugnaux et
Muret. On y a ajouté les anciens noyaux villageois de Lalande, Montaudran, Pouvourville,
Saint-Simon, Lardenne et Saint-Martin-du-Touch.
Ces trois zones, sauf les anciens noyaux villageois, correspondent assez exactement à lancienne zone de construction en continu. Les trois règlements de construction sont dailleurs très voisins. La construction en continu de lalignement des voies reste la règle, mais le prospect est partout égal aux quatre tiers de la largeur de la voie. Les nuances portent sur les hauteurs maxima : 21 m dans la zone 1, 23,5 m dans la zone 2, de 9 à 32 m suivant les sous-zones dans la zone 3. Le caractère architectural de lenvironnement doit être partout respecté, mais sans que les règles précises soient édictées. Pour les toitures, il est seulement prescrit de refaire à lidentique celles qui sont en tuiles canal, mais les terrasses ne sont pas systématiquement proscrites, sauf dans la zone 1. La densité doccupation des parcelles est limitée à 70 ou 80 % de la surface dans la zone 1, 60 % dans les zones 2 et 3. Les trois zones incluent diverses Z.A.C. où le programme de construction est entièrement déterminé, et des zones de réhabilitation (Arnaud-Bernard, Saint-Cyprien) ou de restructuration. En sus des voies qui constituent des sites urbains classés (place du Capitole et Wilson, quais Saint-Pierre, Lucien-Lombard et de la Daurade, diverses rues dont les rues Saint-Rome, des Changes et de la Dalbade), des disciplines architecturales particulières sont imposées, le long des boulevards, du canal du Midi et des grands axes des faubourgs, et notamment lobligation de réserver les rez-de-chaussée à des
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locaux commerciaux ou à des bureaux. Sur quelques voies étroites, est imposé un recul des constructions par rapport à lalignement ; enfin, dans la zone 3, les voies neuves larges de plus de 10 m doivent être plantées, et toute opération nouvelle dépassant en surface un hectare doit comprendre un espace vert. Depuis larrêté du 26 août 1986 qui la entièrement classée en Secteur Sauvegardé, la zone 1 se trouve soumise en totalité à la surveillance des architectes des Bâtiments de France, mais les plans de zone concernant laménagement du secteur sont toujours en cours délaboration.
La zone UB enveloppe entièrement les trois zones A et sétend sur tous les quartiers postérieurs à 1919, aussi bien les lotissements pavillonnaires que les ensembles de collectifs édifiés en presque totalité depuis 1950, et même au-delà dans certains quartiers comme Croix-Daurade ou Lardenne. Avec le Mirail et les zones dactivité dont on parlera plus loin, léquivalent de ce qui était avant 1967 le Périmètre dAgglomération recouvre à peu près tout le territoire que le Plan Jaussely prévoyait durbaniser il y a soixante ans. Du fait du caractère extrêmement disparate des constructions existantes, le règlement de construction na pu être que très souple. Il se borne à limiter la hauteur maxima des immeubles entre 9 et 22 m suivant les sous-zones au nombre de douze, et de fixer le coefficient doccupation du sol (C.O.S.) entre 0,4 et 1. Les constructions peuvent être édifiées à lalignement des voies, ou avec un recul fixé par le règlement pour les voies principales ; elles peuvent être édifiées sur les limites séparatives ou au contraire en être écartées dune distance en rapport avec leur hauteur. La souplesse de ce règlement a surtout pour but de préserver lhomogénéité architecturale de chaque quartier, doù la division en sous-zones correspondant chacune à un quartier relativement homogène. Les nombreuses Z.A.C. quenglobe la zone B devront conformer leur programme aux dispositions générales.
Les hauteurs maxima fixées tant pour les trois zones A que dans la zone B interdisent lédification de nouveaux « gratte-ciels » ; ceux qui existent resteront donc des exceptions pas toujours heureuses. Seule la zone du Mirail pourra encore en recevoir quelques-uns.
Lex-Z.U.P. du Mirail forme maintenant la zone UM. La première tranche, pratiquement achevée, qui couvre les trois quartiers de Bellefontaine, Reynerie et Université, garde comme règlement de construction les trois plans masses établis lors du lancement de chaque quartier. La seconde tranche sédifie en une série de Z.A.C. qui ont chacune leur programme de construction détaillé, mais dont les hauteurs doivent respecter les normes de la zone B. Dans la première tranche, les hauteurs maxima varient, suivant les vingt-deux sous-zones, entre 7 m (2 niveaux) et 49 m (16 niveaux). Enfin toute unité foncière doit obligatoirement comprendre un jardin.
Sous le sigle UE sont comprises les zones dactivité, vocable qui recouvre aussi bien les grands services publics consommateurs despace tels que les établissements denseignement supérieur et de recherche, les hôpitaux, les installations militaires, et aussi le Marché Gare (M.I.N.) de Lalande et la Cité administrative, que les zones réservées aux activités dinitiative privée : usines et ateliers, entrepôts, grandes surfaces commerciales, ou même ensemble de bureaux hors des zones dhabitation. Les premiers ont été localisés au coup par coup sur une très longue période puisque lHôpital psychiatrique Marchant a été commencé en 1852, alors que linstallation des services de la Météorologie nationale est alors à peine décidée. Le plan se borne, en conformité avec les options du S.D.A.U. à réserver des terrains pour lextension des deux hôpitaux de Purpan et Marchant. Quant aux autres zones, elles sont localisées dans les emplacements prévus par le S.D.A.U. qui reprend en gros les choix des plans antérieurs : Lalande-Ginestous, Gramont, la Cartoucherie, Saint-Martin-du-Touch, Montaudran, les lisières est et ouest du Mirail, et surtout tout le sud-ouest entre le Mirail et la Garonne. Le P.O.S. se borne à y ajouter le quartier de Maubec situé dans la zone de bruit de laéroport de Blagnac, à préciser les limites de chaque zone et à fixer des règles pour le volume des constructions et leur desserte. La plupart de ces terrains sont dailleurs déjà occupés, de même que les petites zones UE disséminées à travers les zones dhabitation et recouvrant des ateliers ou entrepôts existants et qui paraissent devoir subsister un certain temps.
Deux sigles spéciaux, UF et UY, recouvrent respectivement les aéroports et les emprises ferroviaires, dont le P.O.S. se borne à entériner lexistence.
Les zones « naturelles » comprennent aussi plusieurs catégories : la zone NA est expressément réservée à une urbanisation future : les sous-zones 1 NA et 3 NA pour lhabitat, les zones 2 NA et 4 NA à de nouvelles activités, 2 NA pour les activités sans nuisances et 4 NA pour les activités à nuisances excluant tout habitat. Les constructions ne peuvent dépasser nulle part 7, 12 ou 15 m selon les sous-zones, et doivent couvrir au maximum 200 m
2 et être édifiés en ordre discontinu. La zone NB peut en outre recevoir des lotissements. La zone NC est en principe réservéeM.S.A.M.F., T. LVIII, page 229
aux activités agricoles et les seules constructions autorisées doivent être liées à ces activités : logement des agriculteurs et bâtiments dexploitation. La zone ND recouvre les sites et parcs naturels dont on veut préserver le caractère : île du Ramier du Château avec le Parc des expositions, le Parc des sports, la Cité universitaire Daniel Faucher ; labrupt de Pech-David au-dessus du chemin des Étroits, ce chemin lui-même et les berges de la Garonne en-dessous ; la vallée du Touch et partie de celle de lHers, les ramiers de la Garonne, les trois sites classés des parcs de la Barigoude (à Lardenne), de Candie et de Limayrac, ces deux derniers propriété de la ville, et aussi les zones de bruit autour des aérodromes de Blagnac et Francazals. Les constructions y demeurent possibles, mais avec une faible densité et sous condition du respect de règles concernant lisolation phonique (zones de bruit) ou les risques dinondation (Ramiers et chemin des Étroits). Cest dans cette même zone ND que sinscrivent les trois grandes Bases de Plein Air et de Loisirs des Argoulets, de Pech-David et de Sesquières inscrites au S.D.A.U., ainsi que les réserves naturelles de Palayre (en amont de la Poudrerie) et des îlots sauvages de la Garonne. Les espaces boisés protégés, y compris les parcs publics anciens (Jardin des Plantes, etc.) ou nouveaux (Parc des Casernes, Parc de la Poudrerie, Bois de Limayrac, Jardins du Barry), ainsi que divers parcs privés comme celui du Caousou, forment des sortes denclaves dans toutes les zones, y compris les zones UA. Les diverses zones N simbriquent de façon presque inextricable les unes dans les autres comme si on avait voulu tout à la fois satisfaire le désir de spéculation de nombreux propriétaires et manifester quand même lintention de garder un « poumon vert » autour de lagglomération et de protéger les quelques agriculteurs qui sobstinent à exercer leur activité (27). Déjà plusieurs Z.A.C. et Z.A.D. (zones daménagement différé) préparent le passage de certains secteurs dans la zone urbaine, sous condition dune révision du P.O.S. expressément prévue par le rapport de présentation.
Les aménagements locaux
La majorité des « emplacements réservés » inscrits au P.O.S. concerne des opérations de voirie. Parmi celles-ci, une cinquantaine concernent la grande voirie prévue par le S.D.A.U. et dont le P.O.S. ne fait quinscrire avec précision les tracés ; il sy ajoute toutefois des opérations plus ponctuelles : aménagements de carrefours, ouverture dimpasses, détournements des voies locales coupées par les nouvelles autoroutes. Les autres, environ cent-cinquante en tout, sont presque toutes des opérations ponctuelles à réaliser dans le cadre dopérations de construction. On y trouve toutefois quelques voies entièrement nouvelles, dinitiatives communales, comme le raccordement des deux tronçons de la rue Roquemauel le long de la Cartoucherie (28) ou la voie sur berges qui doit accompagner la digue de la Garonne entre le pont des Catalans et le quartier de Casselardit.
Les autres réservations concernent des opérations déquipement public décidées en presque totalité par la municipalité : bon nombre dentre elles sont simplement désignées par la simple indication « équipement public du quartier » et visent à « geler » des terrains en vue de réalisations à assez long terme. Dautres, par contre, sont plus précises : extension dÉcoles, de Cimetières, (29) de Centres sociaux, création de terrains de sports, mais là encore il sagit bien souvent de réserver des surfaces pour des opérations futures. Enfin sont prévus de larges espaces pour « grands équipements urbains », ou « réaménagement de quartier », qui expriment seulement une intention qui devra se concrétiser le moment venu sous forme de Z.A.C. ou de déclaration dutilité publique. Par contre, une partie des opérations ponctuelles inscrites lors de la première rédaction du P.O.S. (1981) ont été exécutées par la suite mais figurent toujours sur le document.
Avec linscription de ces opérations de détail, le P.O.S. rejoint dans sa complexité la première version du plan Nicod, mais dans une perspective à moyen sinon à court terme, ce qui lui donne beaucoup plus de réalisme. Mais on peut remarquer que presque toutes sinscrivent dans des zones encore peu densément construites et concernent en fait des terrains non bâtis ; le temps des percées à la Haussmann, abondantes dans le plan Jaussely et dans la première
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27. Parmi les terrains inscrits NC (vocation agricole) figurent ceux qui appartiennent aux deux Écoles dAgriculture de Monlong (E.N.S.A.) et de Purpan.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 230
version du plan Nicod, encore présentes quoiquen petit nombre dans le document approuvé en 1962, est bien révolu. Dautre part, après le modernisme architectural des grands immeubles de la période 1950-1970, après la nouveauté volontairement révolutionnaire du Mirail, la venue au pouvoir en 1971 de la majorité municipale conduite par Pierre Baudis puis par son fils Dominique a marqué un retour vers les formes traditionnelles tant en architecture quen urbanisme, avec la recherche de la conservation de la physionomie de chaque quartier, et le caractère quelque peu « rétro » du style de certaines réalisations municipales récentes comme le nouveau pont Saint-Pierre, tandis que promoteurs et architectes réalisaient ça et là des pastiches parfois fort réussis, dautres fois moins heureux. On peut en outre constater que les couvertures en terrasses ont presque disparu dans les constructions postérieures à 1980, alors quelles ne sont pas vraiment proscrites, et que les immeubles aussi bien collectifs quindividuels retrouvent des formes inspirées du passé avec des toits à deux ou quatre pentes en tuiles rondes. Les badigeons blancs chers à lépoque 1950-1970, qui ne sont interdites en fait (mais pas formellement) que dans les zones traditionnelles 1A et 2A, ont disparu eux aussi, et on emploie surtout des teintes ocres (ou plus rarement rosées) plus ou moins proches de celle de largile naturelle, parfois des revêtements de briques rouges ; et quelques essais de polychromie, notamment au Mirail et dans le ravalement des façades de grands immeubles primitivement peints en blanc, introduisent dans cette gamme de couleurs des variantes plus ou moins heureuses, tandis que nombre de façades antérieures à 1860, dans les quartiers anciens, sont débarrassées de leurs crépis et présentent leurs briques rouges à découvert. Mais, beaucoup moins que les dispositions somme toute très souples du P.O.S., il faut sans doute voir là les effets de laction des architectes des Bâtiments de France protecteurs de lenvironnement des monuments classés et de celle des architectes conseils du service du permis de construire, aidés par une incontestable mode « rétro ».
Du « Schéma Directeur » au « Projet dAgglomération (1982-1995)
Une fois le S.D.A.U. approuvé par larrêté du 2 septembre 1982, sa mise à exécution restait du ressort des diverses administrations responsables et dinitiatives privées provenant de créateurs dentreprises ou de constructeurs-promoteurs. Après une dizaine dannées, le besoin se manifesta de faire le bilan de cette exécution et den revoir les objectifs. Le résultat en fut le « Projet dAgglomération » publié en juillet 1995 par lAgence dUrbanisme dAgglomération. Ce bilan se présente de manière très inégale suivant les divers chapitres.
La Voirie et la Circulation sont
les domaines où le programme arrêté en 1982 a été le mieux suivi. Comme on la
dit plus haut, la construction du réseau autoroutier de base défini en 1965 sest
achevé en 1997 ; des voies dintérêt plus local, le boulevard urbain du nord,
reliant la route de Paris à celle dAgde, est en cours dachèvement avec
dune part lavenue Jean-Zay, dautre part le boulevard André-Netweiller
et lavenue dAtlanta ; il reste à exécuter la partie comprise entre la route
de Launaguet et la future « pénétrante du Raisin ». La liaison Seilh Lespinasse
Bruguières, avec un pont sur la Garonne est aussi achevée ; par contre, la
liaison Portet Colomiers est à peine esquissée le long de la base aérienne de
Francazals et la « voie du Canal de Saint-Martory » reste en projet.
Pour le transport en Commun en Site Propre (T.C.S.P.), le choix
sest finalement porté un peu pour raison de prestige sur un métro
léger en souterrain du type « Val ». La première ligne inaugurée en juin 1993 relie
le plateau de Jolimont au Mirail par le centre ancien vingt-cinq ans trop tard pour
donner au Mirail le rôle quespéraient ses promoteurs ! et les lignes
dautobus de la rive gauche ont été rabattues sur deux de ses stations. Le
financement de la seconde ligne nord-sud, aboutissant à Ramonville et croisant la
première au carrefour Jean-Jaurès nest pas encore acquis en juillet 1998, et
lemplacement de son terminus nord sera déterminé par le plan de la future zone
daménagement concerté (Z.A.C.) de Borderouge entre Lalande et Croix-Daurade. La
troisième ligne Arènes Colomiers se borne pour le moment à la possibilité
daccès à cette section de la ligne S.N.C.F. Toulouse-Auch pour les voyageurs munis
dun ticket de métro. De nouvelles haltes ont été établies entre la gare Matabiau
et Saint-Jory en direction de Montauban, entre la gare Matabiau et Escalquens en direction
de Carcassonne, première esquisse dune desserte de banlieue par chemin de fer.
Laménagement de lemplacement des anciennes casernes
dartillerie sest traduit par la plantation dun grand parc de 10 ha, la
construction dun Palais des Sports, dun Palais des Congrès, de la nouvelle
École de Commerce, dun hôtel de tourisme, dune résidence pour personnes
âgées et de deux ensembles dimmeubles de bureaux, le tout réalisant une extension
vers le nord du centre urbain ; on peut seulement regretter quun programme
architectural commun nait pas été défini à lorigine pour ce nouveau
quartier où ne manquent pas les exemples de belle architecture moderne notamment en
briques apparentes.
M.S.A.M.F., T. LVIII, page 231
Par contre, le futur aménagement du quartier Marengo en prolongement des allées Jean-Jaurès reste encore sans projet défini. Dautres équipements nouveaux : Conservatoire de musique dans lancien hôpital Larrey, nouveau Théâtre Labéda, Musée dArt Moderne à lemplacement des Abattoirs désaffectés, Cité de lEspace dans la vallée de lHers entre Montaudran et le bois de Limayrac, affectation à lUniversité des Sciences-Sociales de lancienne Manufacture des Tabacs, construction dune salle de concerts Zénith sur les terrains abandonnés par la Cartoucherie, nouveau siège de ladministration départementale au pont des Minimes se sont inscrits dans le P.O.S. sans nécessiter une mise en cause des options du S.D.A.U., et il en va de même pour lextension de la zone piétonnière dans le centre ancien.
Par contre deux « coups partis », dont linitiative nest pas venue de la ville de Toulouse, sont venus remettre en cause les options du S.D.A.U. : il sagit dune part de l«Innopole » de Labège dans le secteur sud-est, et dautre part, hors de laire du S.D.A.U., de la « Plate-Forme Multimodale Eurocentre » en voie de réalisation à la lisière nord du département.
LInnopole de Labège a été lancée en 1990 sous la forme dune Z.A.C. par un groupe de six communes de la vallée de lHers en amont de Toulouse et jouxtant lensemble scientifique de Rangueil : Auzeville, Auzielle, Castanet, Escalquens, Labège et Saint-Orens, constitué en un syndicat à vocation multiple dénommé SICOVAL (30). Sur un terrain de 40 ha encadré à louest par lHers, à lest par la voie ferrée Toulouse-Narbonne et la route de Toulouse à Baziège, accessible depuis léchangeur de Palays par lautoroute des Deux Mers, elle a accueilli environ trois cents entreprises avec 3 000 emplois, relevant des nouvelles technologies, avec un ensemble de services (hôtels, restaurants, banques, locaux pour congrès et séminaires ) et aussi un Centre dArt contemporain ; une gare S.N.C.F. et une piste pour hélicoptères permettent des liaisons directes avec lextérieur sans passer par Toulouse. Lextension du SICOVAL à lensemble des communes des cantons de Castanet et de Montgiscard a débordé les limites du S.D.A.U., mais ladhésion de la ville de Toulouse, de Blagnac et de Colomiers en font un des éléments majeurs du Grand Toulouse.
Le projet de la « Plate-Forme Multimodale »
dénommée « Eurocentre » a été lancé en 1990 par le Conseil Régional de
Midi-Pyrénées et le Conseil général de la Haute-Garonne et sa réalisation confiée à
un syndicat mixte réunissant la Région, le département et les deux communes de
Castelnau-dEstretefonts et de Villeneuve-les-Bouloc sur le territoire desquelles
elle est située. Il sagit donc dun projet extérieur aux limites du S.D.A.U.,
dans lequel la Ville de Toulouse nest pas impliquée. Mais sa proximité de la gare
de triage dite de Saint-Jory et de lensemble dentreprises installées entre
celle-ci et les quartiers nord de Toulouse font que son existence aura nécessairement une
répercussion sur laménagement de tout le nord de laire du S.D.A.U.
Lensemble doit couvrir 300 ha encadrés à lest par un
échangeur donnant un accès direct à lautoroute des Deux Mers, à louest par
la voie ferrée Toulouse-Montauban dont se détachera un faisceau de voies ferrées
desservant les installations. Celles-ci doivent comprendre un centre de groupage et
dégroupage de marchandises, des espaces de stationnement pour les camions, un centre
technique pour lentretien des véhicules et un centre de vie avec hôtels et
restaurants, bureau de poste et services financiers, lensemble permettant en
particulier les transferts directs des marchandises du rail à la route et vice-versa. Fin
1997, léchangeur a été terminé et linstallation de plusieurs entreprises
importantes est envisagée prochainement (31). La disparition du trafic commercial sur le
Canal Latéral a eu pour effet quaucune liaison avec celui-ci na été
prévue, alors quil est accolé à la voie ferrée.
Ces deux décisions majeures et lévolution de lensemble du territoire depuis 1982, ont conduit le Syndicat mixte chargé de laménagement de lagglomération à revoir la mise en application du S.D.A.U. et à envisager son éventuelle révision, ce qui a abouti en 1995 au « Projet dAgglomération » élaboré par lAgence dUrbanisme de lAgglomération Toulousaine. Il ne sagit pas cette fois dun projet comprenant des propositions concrètes, mais dune réflexion densemble sur le futur dun « Grand Toulouse » aux limites assez floues et lesquisse des grandes lignes de son aménagement (plan 11).
Après un bref bilan de lévolution démographique et économique de lagglomération toulousaine de 1982 à 1995 dans des limites laissées volontairement dans le vague, puis un examen de la position européenne, nationale et régionale de Toulouse, le projet définit les axes de développement préférentiels de son économie : industrie (aérospatiale, électronique, logiciel, santé), tourisme, recherche fondamentale et appliquée. Il prend acte de la
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30. Cf. la plaquette Labège Innopole, la Cité dAvance, éditée en 1990 par le SICOVAL.M.S.A.M.F., T. LVIII, page 232
formation dun axe de développement périphérique allant de Blagnac à Labège par Colomiers, le Mirail et Rangueil, et définit six points forts de lagglomération : le Centre-ville de Toulouse, voué aux activités tertiaires (commerce, tourisme et culture), le « pôle aéronautique » Blagnac-Colomiers-Saint-Martin-du-Touch, le Mirail avec lélectronique et la météorologie, la « plate-forme chimique » de Braqueville, prolongée sur Portet par des établissements commerciaux et tendant à rejoindre Muret ; lensemble Montaudran-Labège voué à lindustrie spatiale, à la bio-technologie et aux technologies nouvelles, enfin laxe nord de Lalande à Saint-Jory, en direction de lEurocentre, qui mêle industries diverses et activités dentrepôt.
Parmi les propositions daménagement, une nouvelle rubrique qui prend une grande importance est celle de lenvironnement qui présente le schéma dune « Trame verte » prenant appui, non seulement sur la Garonne, lAriège et les Ramiers qui accompagnent leurs cours, mais aussi sur tous les cours deau, Touch, Aussonnelle et Courbet sur la rive gauche, Hers et ses affluents (Sausse et Ceillonne, Saune et Marcaissonne) et même de minuscules ruisseaux comme lAussau, la Pichounelle, le Roussimort ou la Saudrune, sur la végétation spontanée poussée autour des anciennes gravières à Fenouillet, Gagnac et Roques, et bien entendu sur la forêt de Bouconne à la lisière nord-ouest et les bois ou parcs de château disséminés dans tout le territoire. Il sy ajouterait des « liaisons vertes » à aménager le long des routes secondaires pour relier entre elles ces zones naturelles, et les parcs déjà aménagés. À côté de ce long développement consacré au patrimoine naturel, le patrimoine bâti, tant monumental que simplement intéressant comme témoignage du passé, ne fait lobjet que dune mention rapide qui paraît en laisser le soin aux architectes des Monuments historiques et des Bâtiments de France et aux prescriptions des P.O.S. communaux, et donc à lappréciation de maires très inégalement attachés à sa conservation. Des dommages irréparables ont déjà été commis dans ce domaine, même à Toulouse.
Pour la circulation, le programme entérine le schéma de 1965 qui approchait en 1995 de son achèvement, et ny fait que quelques additions : achèvement de la « pénétrante du Raisin » entre la rocade Est et le canal du Midi, et du « contournement ouest » depuis Braqueville jusquà léchangeur de Palays sur lautoroute des Deux Mers, avec un tunnel sous Pech-David, « voie du canal de Saint-Martory » depuis le contournement ouest jusquà Seysses. À long terme, un grand contournement routier organiserait une liaison par périphérique extérieure par Aussonne, Léguevin, au sud-ouest de Plaisance-du-Touch, Frouzins et Roques, en effleurant Muret, puis Pins-Justaret, Clermont, Montgiscard, Odars, Flourens, Beaupuy, Lapeyrouse, Castelginest et Fenouillet, en débordant à plusieurs reprises les limites du S.D.A.U. Plus lointain encore dans lespace et dans le temps, un grand évitement de structure quasi-autoroutière relierait Grenade à Baziège et Auterive à Carbonne par la vallée du Girou, puis les coteaux du Lauragais vers Caraman ; ce dernier projet issu de la Direction de lÉquipement de la Haute-Garonne provoque dès à présent un mouvement de protestation dans les coteaux.
Aux trois lignes de métro existantes ou programmées sajouterait une quatrième unissant laéroport de Blagnac à Montaudran par les Minimes et le coteau de Calvinet, croisant à Marengo et aux Minimes les lignes antérieures. Une « desserte cadencée » assurant un vrai service de banlieue serait établie jusquà Brax-Léguevin sur la ligne dauch, jusquà Saint-Jory sur la ligne de Montauban, jusquà Montrabe sur la ligne dAlbi-Rodez, jusquà Muret sur la ligne des Pyrénées, et des transports en commun en site propre, vraisemblablement sous forme de tramways, et à partir des terminus du métro, devraient desservir les axes BlagnacSeilh, BorderougeCastelginest, BorderougeSaint-Jean, JolimontBalma, MontaudranSaint-Orens, MontaudranCastanet, Basso-CamboSeysses et Basso-CamboPlaisance.
Le Projet dAgglomération désigne enfin quelques sites privilégiés pour « accueillir les fonctions économiques et métropolitaines majeures ». Ces sites sont de deux sortes : les « Portes de Ville » et les grands territoires à fonction métropolitaine.
Les « Portes de Ville » doivent sorganiser autour des cinq échangeurs qui font communiquer lanneau des rocades avec les cinq pénétrantes autoroutières : Porte de Paris à Lalande, Porte de Lyon à Gramont-Périole, Porte de Narbonne à Rangueil-Montaudran, Porte dEspagne à Braqueville-Mirail, Porte dAuch de Purpan aux Arènes. Ces portes « ont pour vocation daccueillir préférentiellement les équipements et services urbains générateurs de trafic (hôpitaux, universités, services publics, grands équipements sportifs ) » et de servir de « plate-forme multimodales déchanges » à la rencontre des divers moyens de transport en commun. Elles doivent aussi faire lobjet dun aménagement architectural ordonnancé et de qualité.
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Les « Pôles de Développement majeurs » sont eux
aussi attachés aux cinq grands axes de pénétration, mais se développent
essentiellement hors de lanneau des rocades et donc en majeure partie hors du
territoire municipal de Toulouse. Ils sont destinés à accueillir « les services et les
activités dexcellence en matière aéronautique, informatique, biochimique,
agronomique et santé ». On voit aussi se succéder :
- laxe de la R.N. 20 nord depuis Lalande jusquà l«
Eurocentre », qui nécessite une « recomposition » totale pour accueillir « une
nouvelle génération dactivités économiques » ;
- le « pôle aéronautique » Blagnac-Saint-Martin-Colomiers prolongé
éventuellement vers Tournefeuille ;
- le « pôle informatique et électronique » du Mirail (Basso-Cambo)
relié par le contournement ouest Colomiers-Portet à lensemble chimique de
Braqueville et aux activités de commerce et dentrepôt le long de la route
dEspagne à Portet et Roques, avec éventuellement prolongement jusquà Muret
;
- le « pôle spatial et technologique » le long de lautoroute
des Deux Mers, sur Ramonville, Auzeville et Labège, prolongeant lensemble
scientifique de Rangueil ;
- moins important, le « pôle de Gramont-Montredon » sur
Toulouse-Balma et lUnion, susceptible daccueillir des activités du secteur
tertiaire.
Hors ces points forts de laménagement et le noyau urbain de la ville de Toulouse, le reste du territoire de lagglomération se répartit entre le « Réseau vert et bleu » qui rassemble les zones vertes protégées et celles qui accompagnent les cours deau, les « Zones de Redéploiement urbain » destinées à recevoir les grandes opérations de construction destinées à lhabitation, enfin les secteurs ruraux conservés autour des noyaux villageois.
Les « Zones de Redéploiement Urbain » devront se développer vers lextérieur des Portes de Ville, dans des espaces encore en partie inhabités où subsiste çà et là une agriculture résiduelle avec bon nombre de terrains vagues. Ce sont au nord le quartier toulousain de Borderouge et son prolongement sur Launaguet, à lest le quartier de Gramont et son extension vers Balma et lUnion, au sud-est dune part Saint-Orens et Quint-Fonsegrives et dautre part Ramonville et Labège dans la vallée de lHers ; à louest la région comprise entre le quartier toulousain de Sa int-Martin-du-Touch, Colomiers et Tounefeuille, et laxe de la « voie du canal de Saint-Martory » de Cugnaux à Frouzins.
À la périphérie du territoire municipal de
Toulouse, les « noyaux villageois » de Croix-Daurade au nord, Pouvourville au sud,
Lafourguette, Lardenne et Saint-Simon à louest et au sud-ouest sont à « valoriser
».
Enfin, dans le reste du territoire, lespace agricole doit être
conservé et valorisé, surtout dans les coteaux de lest et du sud, mais aussi à
louest sur les meilleures terres, chaque noyau communal formant le centre dune
agglomération dont lextension paraît devoir être contenue par les dispositions du
P.O.S. communal. Parmi les communes périphériques, Balma, Blagnac, Colomiers, Portet,
Ramonville et Saint-Orens sont spécialement désignées comme lieux de « centralité
sectorielle » rassemblant les services publics et privés à lusage du secteur de
banlieue correspondant, et « desservies à moyen et long terme par un réseau de
transport en commun performant ».
Sur le territoire même de la ville de Toulouse, outre les noyaux
villageois, le projet recommande de « dynamiser les faubourgs » constitués au XIXe
siècle, de remanier toute la rive gauche en équipant les grands axes partant de la
Patte-dOie, de construire un centre « logistique » autour des Arènes et du
terrain quabandonne la Cartoucherie, de faire du Mirail un second pôle
dactivité et de services pour tout louest de lagglomération. Sur la
rive droite enfin, le quartier des Minimes et celui de Marengo sont expressément
désignés comme les lieux privilégiés de lextension du Centre ville.
Telles sont les grandes lignes de ce « Projet dAgglomération » qui se présente comme une préface à une prochaine révision du Schéma Directeur dont laire devra vraisemblablement être élargie pour prendre en compte le rôle joué au nord par lEurocentre, au sud par Muret, dans la vie du Grand Toulouse.
Ainsi, presque trois quarts de siècle après la première loi française durbanisme, lexemple de Toulouse nous a fait assister à lévolution des conceptions dans cette technique. uvres darchitectes travaillant presque seuls plus en artistes quen techniciens, le plan Jaussely et le premier plan Nicod dessinaient une image idéale de Toulouse figée pour toujours mais à très longue échéance. Le contact obligé avec les projets des administrations, les besoins exprimés des constructeurs, les données des autres techniques et les contraintes financières ont poussé peu à peu au réalisme. De luvre dart conçue par un « maître », le plan durbanisme est devenu une construction pluri-disciplinaire où les politiques, les ingénieurs, et accessoirement les sociologues et les économistes, se sont joints aux architectes, dont le rôle devient accessoire. La création en 1966 du ministère de lÉquipement, où les Ingénieurs des
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Ponts et Chaussées sont devenus le corps prédominant face aux Urbanistes, presque tous architectes à lorigine et beaucoup moins nombreux, a eu à cet égard un rôle décisif. Les architectes urbanistes nont pourtant pas toujours versé dans lutopie : les ingénieurs qui ont construit lautoroute des Deux Mers ont suivi un tracé déjà inscrit dans le plan Jaussely, et le zonage du premier plan Nicod, se retrouve, très affiné, dans le P.O.S. actuel. Certains règlements de construction parfois ressentis comme des brimades par une partie au moins de lopinion répondent à des soucis esthétiques sans nécessité technique, et entraînent des surcoûts pour les constructeurs. Le mot « embellissement » a disparu de la dénomination des plans, mais la multiplication des espaces verts de quartier comme la restauration des façades anciennes vont bien dans le sens de la recherche dune image de la ville plus agréable tant pour ses habitants que pour ses visiteurs. La conversion à lurbanisme de lopinion et des hommes politiques est aussi une des nouveautés de la période postérieure à 1950 après lindifférence quavait affichée lentre-deux-guerres. Il faut aussi souligner la marque personnelle que chacun des quatre maires successifs de Toulouse a imposée depuis 1945 à lurbanisme toulousain : gestion prudente, presque « frileuse » de Raymond Badiou, modernisme ambitieux de Louis Bazerque, retour vers la tradition et la qualité de la vie avec Pierre Baudis, modernisme de nouveau, mais plutôt dans léconomie (le spatial, la technopole) et les techniques (le métro) que dans larchitecture, avec son fils. La pression des faits et notamment la poussée de la banlieue ont aussi obligé les divers responsables à programmer le développement et léquipement de Toulouse dans un cadre multicommunal, mettant fin à la politique disolement qui avait longtemps prévalu. Mais cela ne suffit pas pour réaliser une véritable « unité de commandement » pour lensemble. Il y a bien depuis 1992 un district urbain de Toulouse, mais il ne regroupe que quinze des soixante-trois communes de laire du S.D.A.U. et ses attributions sont assez limitées ; seul le SICOVAL est constitué en communauté de communes, mais seulement dix-sept de ses trente-trois communes relèvent du S.D.A.U. Neuf autres syndicats inter-communaux à la compétence généralement limitée à une ou deux fonctions (adduction deau, ramassage des ordures, électrification ) se partagent la périphérie, parfois en débordant les limites de laire, comme le syndicat « Synergie » basé à Grenade ou celui des coteaux de Lanta. Seul le Syndicat mixte des Transports en Commun de lAgglomération Toulousaine (S.M.T.C.) sétend à une large portion de laire du S.D.A.U. ; encore exclut-il les dix-sept communes que ne desservent pas ses lignes dautobus, tandis que cinq communes extérieures en font partie Si bien que reste toujours dactualité le titre (inspiré de celui dun film alors en vogue) de la brochure publiée en 1987 par un groupe de géographes de lUniversité du Mirail : Y-a-t-il un pilote dans lagglo ? (32).
Après des années de réflexion, après une abondance de travaux dont la pléthore confine au gaspillage, gaspillage didées et gaspillage de crédits, lurbanisme toulousain reste largement empirique, et le nouveau « Projet dAgglomération » comme le Schéma Directeur de 1982, doit dadapter aux « coups partis » décidés, sinon sans concertation préalable, du moins suivant les logiques propres des divers décideurs impliqués dans le développement spatial de Toulouse.
Mais, à travers les plans successifs, un fait apparaît nettement : le rôle souvent prédominant des maires successifs de Toulouse. Ce qui montre que lurbanisme, plus quun art, plus quune technique, est dabord et avant tout, une politique.
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32. Université de Toulouse-Le Mirail, Y-a-t-il un pilote dans lagglo ? Les modes de régulation du système urbain dans lagglomération toulousaine, Toulouse, 1987, in 4°, 106 p., 4 cartes h.t.