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Mémoires de la Société
Archéologique du Midi de la France



Tome LVIII (1998)


SOMMAIRE

 

Christine DELAPLACE, Saint Exupère et la tradition hagiographique toulousaine

    Le culte de saint Exupère est, après celui de saint Saturnin, un des plus importants à Toulouse et dans la région toulousaine, mais la documentation hagiographique relatant les faits et gestes de cet évêque du début du Ve siècle s'avère relativement tardive. L'étude de la tradition hagiographique permet de mettre en lumière les évolutions que connaissent l'image de ce saint et son exploitation. Cette analyse rend possible l'examen du contexte intellectuel et spirituel qui a présidé, à la fin du siècle dernier, à la restauration de la chapelle Saint-Exupère de Blagnac. Celle-ci possédait un cycle de peintures murales relatant la geste du confesseur toulousain qui dataient du XVIe siècle. Le peintre Benezet lui adjoignit quatre nouvelles scènes relativement peu exploitées auparavant par l'hagiographie locale.

 

Patrice CABAU, Les données historiques relatives à la reconstruction de Saint-Sernin de Toulouse (XIe-XIIe siècles) - Réévaluation critique

    L'histoire de la construction de Saint-Sernin roman s'est constituée à l'époque moderne, principalement aux dix-septième et dix-neuvième siècles, sur la base d'un petit nombre de textes de provenance et de nature diverses. Ces documents (publiés en fin d'article) sont réexaminés dans une perspective critique, qui aboutit notamment à nier la valeur historique des indications contenues dans la "Vita" de saint Raymond Gérard, composée au seizième siècle. Au total, ce qu'on peut apprendre de certain au sujet de la reconstruction de Saint-Sernin entreprise au onzième siècle se résume aux éléments suivants : entre 1010 et 1035, l'évêque de Toulouse Pierre Roger prit la décision d'édifier une nouvelle basilique et il affecta au financement de ce projet le produit des offrandes des fidèles ; en 1083 au plus tard, une église nouvelle était en cours de construction ou sur le point d'être construite, et elle était assez avancée en 1096 pour qu'on puisse en faire la dédicace.

 

Anne-Laure NAPOLÉONE, Urbanisme et habitat à Figeac aux XIIe, XIIIe et XIVe siècles

    Les plus anciens textes ne mentionnent que l'installation des moines de Lunan sur le site de Figeac peu avant 838. Pourtant, l'analyse du parcellaire montre que la ville s'est formée autour de deux noyaux, celui de l'abbaye et celui de Notre-Dame du Puy, ce dernier vraisemblablement sur une occupation plus ancienne. L'étude des nombreux vestiges de constructions médiévales a permis de suivre plus précisément les étapes de la croissance urbaine jusqu'à la fin du XIVe siècle.
    L'habitat se divise en trois groupes d'édifices. Les plus anciens datés des XIIe-XIIIe siècles où prédominent des constructions simples et de petites dimensions, fréquemment bâties en matériaux mixtes (pierre et pan-de-bois) : la demeure n° 4 de la place Champollion, la plus ancienne connue, illustre parfaitement ce premier groupe. Dans le deuxième groupe, la maison de « la Monnaie » montre l'évolution des formes à partir du milieu du XIIIe siècle. Enfin, le palais de Balène symbolise les grands édifices bâtis au XIVe siècle dans la ville, témoignant de la grande prospérité économique de l'époque et des progrès du confort.

 

Anne-Laure NAPOLÉONE, Valérie ROUSSET , La maison de la rue des Lazaristes à Figeac (XIVe siècle)

    La maison de la rue des Lazaristes est une des vastes demeures figeacoises du XIVe siècle. Des travaux ont permis l'observation quasi exhaustive des maçonneries et une analyse détaillée de l'édifice. Celle-ci a permis de reconstituer un édifice composé de deux corps de bâtiments séparés par une cour. Le corps de bâtiment sud élevé sur la voie principale abritait les boutiques et une grande salle à l'étage. Le corps de bâtiment arrière comprenait une cuisine cantonnée d'une grande pièce équipée d'une cheminée monumentale sur le niveau de plain-pied. À l'étage, deux chambres dotées de latrines et d'une cheminée s'ouvraient au nord. La cour centrale distribuait toutes les pièces d'habitation et les combles grâce à un escalier prolongé par des galeries ; elle comprenait également à son extrémité une « colonne » d'évacuation où se déversaient l'évier et les latrines. Les parties basses montrent diverses reprises de maçonneries qui distinguent des vestiges de bâtiments antérieurs. La parcelle conserve donc aujourd'hui les traces de trois campagnes de construction : un mur ancien lié à la terre, une maçonnerie datable du XIIe-XIIIe siècle et le bâtiment édifié vers le milieu du XIVe siècle.

 

Georges BACCARABÈRE, La céramique toulousaine du XVe siècle dans l'ancien quartier Saint-Georges

    Des travaux entrepris en 1973 ont permis de découvrir un puits à eau contenant, entre autres, de la céramique de nature oxydante, cruches tronconiques ou sphériques, en forme de toupie et dérivées du pégau, ainsi qu'un pichet à pied haut. Des récipients divers sont représentés par des restes d'écuelles, des fragments d'assiette et d'un grand plat auxquels s'ajoute un fond de gobelet en verre. Les objets métalliques comprennent des outils, des éléments d'huisserie et de la quincaillerie. Enfin, un sceau en schiste ardoisier pourrait être une copie d'un sceau authentique. L'ensemble du mobilier pourrait dater du XVe siècle.

 

Jean CATALO, Emmanuel GAUDIN , Isabelle RODET-BELARBI, Vincent GENEVIÈVE, Vestiges archéologiques et enduit peint de la maison consulaire du XVe siècle au « Donjon du capitole » (Toulouse)

    L'actuel « Donjon du capitole » à Toulouse est l'ancien « Petit Consistoire » de la maison consulaire de la ville. Une fouille préventive réalisée à l'intérieur de cet édifice construit en 1525 a permis la découverte d'un bâtiment du XVe siècle qui l'a précédé. Sa configuration, le mobilier archéologique qui lui était associé, et les textes d'archives s'y rapportant, le présentent comme une des salles d'apparat et de délibération de la Maison commune. Le site a également livré des fragments d'enduits peints de grande qualité. De nombreux indices conduisent à les considérer comme les seuls vestiges des représentations picturales des capitouls qui ornaient les murs du Grand Consistoire du palais consulaire.

 

Michèle HENG, La tenture de L'Histoire de David du château d'Urtubie (Pyrénées-Atlantiques)

    La tenture inédite de L'Histoire de David conservée depuis le XVIIe siècle au château d'Urtubie, pose un certain nombre de questions. L'examen iconographique et stylistique de cette tenture en sept pièces permet d'avancer une provenance bruxelloise où elle aurait été vraisemblablement tissée dans le troisième quart du XVIe siècle d'après des cartons de Michel Coxcie. La comparaison avec les suites historiées de Bruxelles la situe dans les productions de l'atelier de Frans Geubels, une des plus illustres dynasties de lissiers de la ville. Le château d'Urtubie étant situé entre Saint-Jean-de-Luz et Hendaye, il est probable que cette tenture de haut prix au sujet galant a été liée à la paix des Pyrénées et aux cérémonies du mariage de Louis XIV et de Marie-Thérèse d'Espagne célébré à Saint-Jean-de-Luz le 9 juin 1660.

 

Marie-Luce PUJALTE Guillaume Cammas, architecte de l'hôtel de Puivert ?

    L'hôtel de Puivert est, selon la tradition, l'œuvre de l'architecte Labat de Savignac. Or, un document récemment découvert permet de proposer une nouvelle attribution : Guillaume Cammas, peintre officiel de la ville, architecte du Capitole, serait l'auteur des plans. Édifice d'exception, l'hôtel de Puivert atteste de cette architecture traditionnelle locale ayant su intégrer les nouvelles formules du XVIIIe siècle.

 

Jean NAYROLLES, L'église Saint-Paul de Nîmes et les origines de l'architecture néo-médiévale dans l'éclectisme français

    En remportant le concours lancé en 1835 par la municipalité de Nîmes en vue de la construction de la nouvelle église Saint-Paul, Charles-Auguste Questel (1807-1888) fut à l'origine du premier grand édifice religieux conçu en France dans des formes d'inspiration médiévale. Le choix, par l'architecte autant que par les édiles nîmois, d'un projet néo-roman était peut-être destiné à réunir dans un heureux consensus les partisans de la tradition classique, fidèles à l'orthodoxie gréco-romaine, et les romantiques de la jeune génération ne rêvant que de cathédrales gothiques. Pourtant, l'enjeu principal que représente cet événement dans l'histoire de l'architecture du XIXe siècle est ailleurs. Pour se conformer aux objections émises par le Conseil des Bâtiments civils, Questel modifia le projet originel de l'église deux ans après son élaboration : ces deux versions successives, qui diffèrent plus dans l'esprit que dans les formes, inaugurent deux voies divergentes à travers lesquelles l'éclectisme architectural des décennies à venir se déploiera.

 

Jean COPPOLANI, Les plans d'urbanisme de Toulouse au XXe siècle

    En exécution des lois de 1919, 1924 et 1943, la ville de Toulouse a élaboré successivement plusieurs plans d'urbanisme à travers lesquels on voit évoluer l'idée même de Plan d'Urbanisme, passant d'un schéma de voirie pratiquement figé à un plan d'aménagement évolutif traitant de l'ensemble des problèmes touchant à la voirie, aux transports, aux activités économiques, au logement, aux services publics et à l'environnement au sens large. Mais ces plans successifs : projet privé de la société culturelle des Toulousains de Toulouse en 1920, Plan Jaussely de 1928, Plan Nicod de 1947 et sa révision de 1956, Schéma de Voirie de 1965 dit Schéma Badani, ont chacun laissé quelques éléments, les uns réalisés au fur et à mesure des plans quinquennaux ou des décisions des pouvoirs publics, d'autres toujours en suspens et encore retenus dans le dernier projet, le Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme approuvé en 1982 et qui recouvre, outre la ville de Toulouse, soixante-deux communes périphériques qui constituent l'essentiel de la banlieue, celle-ci abritant maintenant presque autant d'habitants que la ville elle-même. L'exécution de ce dernier schéma a donné lieu à une réflexion que traduit le Projet d'Agglomération de 1995, préface à un nouveau schéma en cours d'élaboration. Mais l'histoire de ces presque quatre-vingts ans permet d'une part de suivre l'évolution des conceptions générales de l'urbanisme, et d'autre part de mesurer le poids particulier des conceptions de chacun des quatre maires successifs de la ville de Toulouse, ce qui amène à conclure que l'urbanisme est, avant tout, une politique.