Mémoires |
BULLETIN DE LANNÉE ACADÉMIQUE
2006-2007
établi par Patrice CABAU & Maurice SCELLÈS
Les parties non reproduites dans l'édition papier apparaissent en vert dans cette édition électronique.
SÉANCE DU 3 OCTOBRE 2006
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier,
Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM.
Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone,
Watin-Grandchamp, M. Bordes, le Père Montagnes, M. Peyrusse, membres titulaires ;
Mmes Barber, Bayle, Cazals, Fraïsse, Friquart, Galés, Guiraud, Krispin, MM.
Barber, Darles, Stouffs, membres correspondants.
Excusés : Mmes Andrieu, Cazes, MM. Garland, Séraphin, Testard.
Invité : M. Georges Cugulières.
La Présidente déclare ouverte l’année académique 2006-2007, qu’elle souhaite riche de recherches et de communications scientifiques de toute nature. Le programme en est presque complet. La prochaine séance sera consacrée à la visite de l’exposition Tarraco et rendez-vous est donné au Musée Saint-Raymond à 17 heures.
La
correspondance manuscrite comprend trois candidatures au titre de membre
correspondant, que nous aurons à examiner le 7 novembre prochain : celles
de Mme Martine Jaoul et de MM. Yoan Mattalia et Frédéric Loppe.
Puis la Présidente
donne lecture d’une lettre, attristante, de notre Directeur honoraire, Jean
Coppolani, par laquelle il nous informe qu’un grave accident de santé et ses
suites lui interdisent désormais l’Hôtel d’Assézat. En présentant ses
excuses à notre Compagnie et en l’assurant de sa sympathie, notre confrère
demande à être nommé membre libre afin de rendre disponible un siège de
membre titulaire.
Le Secrétaire
général donne lecture du procès-verbal de la séance du 6 juin 2006, qui est
adopté.
La
correspondance imprimée comprend en particulier l’annonce d’un colloque sur
L’emploi du plomb et du fer dans l’architecture gothique, qui se tiendra à Noyon les 16 et 17 novembre, et
de la IIIe Bienal de Restauración
Monumental qui se tiendra à Séville les 23-25 novembre 2006.
Plusieurs
dons viennent enrichir notre bibliothèque :
- Luis
Barrocal-Rangel, Philippe Gardes, Entre
Celtos y Ibéricos. Las poblaciones protohistóricas de las Galias e Hispania,
Madrid, Real Academia de la Historia, Casa de Velázquez, 2001, 246 p. (don de
Philippe Gardes) ;
- Chantal
Fraïsse, Moissac, histoire d’une abbaye, Cahors, La Louve éditions,
2006, 286 p. (don de l’auteur) ;
- la
collection complète de la revue Archéologia,
offerte par Mme Jacqueline Carabia.
La Présidente ajoute que Mme Carabia, qu’elle a remerciée au nom de notre Société, se propose de nous donner également les Dossiers de la même revue.
La parole est à Louis Latour pour une communication sur Les lampes à huile romaines d’Auterive, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Louis Latour, en le félicitant de sa parfaite maîtrise des outils numériques
utilisés pour illustrer sa communication. Après avoir souligné tout l’intérêt
des documents collectés, elle relève que le fort pourcentage de représentations
de gladiateurs paraît inhabituel. Louis Latour le confirme en rapprochant les
29 % de représentations de gladiateurs à Auterive, contre par exemple 12 % à
Trèves et 13 % en Suisse. Certains auteurs voient dans ces représentations
la marque du goût de la société romaine pour la force et le combat, mais
d’autres soulignent que ces images avaient sans doute des connotations plus
nobles, comparables à celles du sport aujourd’hui : école du courage,
école du civisme…
La Présidente
constate que les figures de dieux sont peu nombreuses. Louis Latour acquiesce et cite les quelques représentations de Mercure ou de Fortune. Daniel
Cazes se demande si un torse figuré sur l’un des fragments ne pourrait
appartenir à une représentation d’Hercule.
Pour Hélène
Guiraud, la fréquence des représentations de gladiateurs doit sans doute être
mise en relation avec la datation proposée. Après avoir rappelé que ces
lampes proviennent en majorité d’une partie seulement du site d’Auterive,
Louis Latour dit y voir la marque de la romanisation du site.
En rendant
hommage à la grande précision avec laquelle Louis Latour a toujours conduit
ses travaux archéologiques, Daniel Cazes rappelle que notre confrère est également
à l’origine de la création d’un dépôt archéologique très intéressant,
et il suggère qu’une visite en soit organisée. Louis Latour accepte le principe d’une
visite par un petit groupe d’une dizaine de membres
de notre Société.
Au titre des questions diverses, le Secrétaire général informe la Compagnie de l’état d’avancement du volume 2005 de nos Mémoires, qui accuse un retard très important puisqu’il ne pourra paraître avant la fin du mois de décembre. Il faudra revenir pour les deux prochains volumes à des délais de publication plus raisonnables.
La Présidente
rend compte du colloque sur La maison au
Moyen Âge dans le Midi de la France, organisé par notre Société à
Cahors les 6-8 juillet derniers. Anne-Laure Napoléone en a été
l’organisatrice efficace et, comme toujours, discrète. Les journées se sont
déroulées, en présence d’un public relativement nombreux, dans une ambiance
très amicale et nous avons été très bien reçus par la Ville de Cahors et le
Pays de Cahors, qui ont pris en charge une grande partie de la logistique. En
distribuant très généreusement des volumes de ses Mémoires, qui ont
été très appréciés, notre Société s’est fait mieux connaître.
Il faut
maintenant en publier les actes : les articles sont attendus pour le mois
de mars 2007, et l’on espère une parution avant la fin de l’année. Il
faudra encore en assurer la diffusion. Les résultats obtenus avec le premier
volume, qui continue à se vendre, sont un encouragement à poursuivre.
SÉANCE DU 17 OCTOBRE 2006
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier,
Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M.
Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Labrousse, Napoléone, Sudre, le Père
Montagnes, Mgr Rocacher, membres titulaires ; Mmes Barber, Bayle, Félix, Jiménez,
Krispin, MM. Barber, Darles, Surmonne, membres correspondants.
Excusé : M. Cabau, Secrétaire-adjoint.
Invités : Mmes Lassure, Latour, MM. Cugulières, Kerbrat.
La Compagnie est accueillie au Musée Saint-Raymond par Daniel Cazes, conservateur en chef du musée, pour la visite de l’exposition Tarraco. Daniel Cazes souligne le caractère extraordinaire de cette exposition, et la chance qu’elle est pour Toulouse. Des années de collaboration avec nos collègues catalans ont créé une confiance réciproque sans laquelle nombre d’œuvres exceptionnelles, qui n’avaient jamais quitté l’Espagne ni même Tarragone, n’auraient pu être présentées à Toulouse. Nos remerciements vont en premier lieu à Francesc Tarrats Bou, Directeur du Musée national archéologique de Tarragone, et Pilar Sada i Castillo, conservateur.
Cette exposition est aussi le fruit d’un travail considérable accompli depuis un quart de siècle par nos amis catalans, à la faveur d’une collaboration, exemplaire en Europe, entre les différentes institutions : musées, université et archéologues… dans laquelle s’est inscrite l’épopée du Ted’A, l’atelier-école d’archéologie créé par Xavier Dupré i Raventós, qui associait des professionnels, de jeunes archéologues et des jeunes sans emploi. Le catalogue de l’exposition rend un hommage tout particulier à Xavier Dupré, mort cette année dans sa cinquantième année.
Daniel Cazes convie la Compagnie à voir la vidéo-projection de l’exposition avant d’en présenter chacune des sections et d’en commenter les pièces les plus importantes.
La Présidente remercie Daniel Cazes pour cette présentation très érudite – notre confrère proteste qu’il n’a fait que répéter ses collègues espagnols – et, se souvenant d’un voyage à Tarragone il y a vingt-cinq ans, confirme l’ampleur du travail accompli. Où en est-on du dégagement du cirque qui était alors envisagé ? Daniel Cazes dit que les travaux ont avancé et que d’autres parties ont été mises en valeur. La Ville de Tarragone poursuit ainsi son projet de récupération du cirque, avec une audace et un courage qui semblent inconcevables chez nous.
Répondant à une question de Guy Ahlsell de Toulza, Daniel Cazes remarque que la régionalisation permet au citoyen de s’emparer du patrimoine. L’archéologie est portée par la population et aucune protestation ne s’élève quand sont annoncés les budgets. Puis revenant à Toulouse, il constate que deux mois et demi après son ouverture, l’exposition a reçu 7 500 visiteurs, dans une agglomération et une région d’1,5 million d’habitants… Et de s’interroger sur ce qu’il faut aux Toulousains. L’exposition a été montée spécialement pour Toulouse, et elle a plus de retentissement en Espagne qu’en France où elle est présentée. Plusieurs musées espagnols sont sur les rangs pour la recevoir, dont les musées de Madrid et de Mérida, mais aucun musée français ne l’a demandée.
SÉANCE DU 7 NOVEMBRE 2006
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Scellès, Secrétaire
général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint
; Mmes Napoléone, Pousthomis-Dalle, M. Bordes, le Père Montagnes, M. Peyrusse,
membres titulaires ; Mmes Barber, Fraïsse, Guiraud, MM. Barber,
Geneviève, Laurière, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-adjoint,
Mmes Cazes, Friquart, Krispin, MM. Garland,
Pradalier, Mgr Rocacher, MM. Testard, Tollon.
Invités : MM. Pascal Capus, Marc Comelongue.
La Présidente
annonce que le programme des séances de l’année académique 2006-2007 est désormais
à peu près complet ; seules des communications courtes pourront encore y
être ajoutées. La date de la séance publique a dû être modifiée :
elle aura lieu le samedi 17 mars à 16 heures, avec une conférence de notre
confrère Pascal Julien.
Le Secrétaire-adjoint
donne lecture du procès-verbal de la séance du 9 mai 2006, qui est adopté. La
lecture du procès-verbal de la séance du 3 octobre 2006 est reportée.
La correspondance imprimée comprend en particulier l’annonce du prochain congrès de la Fédération historique de Midi-Pyrénées qui aura lieu les 14-16 juin 2007 à Toulouse, et le bulletin de souscription aux actes du colloque consacré au cardinal Saliège, archevêque de Toulouse de 1929 à 1956, à paraître au cours du premier trimestre 2007.
La Présidente
donne quelques nouvelles de Jean Coppolani, dont la santé s’est heureusement
améliorée mais pas suffisamment pour qu’il puisse prendre l’autobus. Le
Bureau a pensé le proposer comme membre honoraire, en remerciement de
l’immense travail qu’il a accompli au sein de la Société depuis 1950,
en tant que Bibliothécaire et en tant que Secrétaire. La Présidente soumet la proposition
au vote de la Compagnie : Jean Coppolani est élu membre honoraire de notre Société.
L’ordre du
jour appelle l’élection de membres correspondants. Maurice Scellès présente
son rapport sur la candidature de Mme Martine Jaoul, et la Présidente donne
lecture des rapports de Nelly Pousthomis-Dalle sur les candidatures de MM. Yoan Mattalia et Frédéric Loppe. On procède au vote : Mme Martine Jaoul,
MM. Yoan Mattalia et Frédéric Loppe sont élus membres correspondants de
notre Société.
Hélène Guiraud aimerait avoir des éclaircissements sur les catégories de membres de notre Société. La Présidente et Louis Peyrusse expliquent que notre Compagnie est une société académique qui de ce fait comprend 40 membres titulaires, auxquels s’ajoutent au maximum 10 membres honoraires, 20 membres libres et un nombre illimité de membres correspondants. Tous les membres participent également à la vie de notre Société, exception faite des élections et des décisions financières qui sont de la compétence des seuls membres titulaires. La Présidente relève qu'il serait nécessaire d'actualiser notre règlement intérieur, et de disposer d'exemplaires qui pourraient être distribués aux membres.
La parole est à Vincent Geneviève pour une communication sur Le trésor d’antoniniani de Cazères II et les autres trésors monétaires de la fin du IIIe siècle après J.-C. découverts autour de Martres-Tolosane, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie notre confrère de nous avoir présenté une enquête aussi
passionnante. Vincent Geneviève dit qu’en effet la modification de
l’attribution du terminus dans un lot de monnaies peut en changer la
signification globale. Il rend hommage au précieux inventaire du professeur
Michel Labrousse, dont les quelques erreurs peuvent être corrigées et sans
lequel il serait aujourd’hui impossible de reconnaître dans les collections
du musée les monnaies provenant du trésor de Cazères. L’absence de monnaies
frustes indique sans doute qu’elles ont été restaurées pour tenter de les
identifier, ce qui a entraîné leur dispersion dans les collections.
Daniel Cazes
félicite à son tour Vincent Geneviève en rappelant qu’après la mort de
Michel Labrousse en 1988, plus personne n’a étudié le médaillier du Musée Saint-Raymond. Vincent Geneviève en a repris l’étude depuis une dizaine
d'années, et
ce n’était pas une mince affaire : les inventaires avaient souvent été
mal tenus, ou bien ils étaient imprécis, relevant plutôt de manières de
collectionneurs qui négligent les descriptions. Les difficultés étaient donc
nombreuses, qui sont souvent surmontées grâce à des astuces de numismate et
une très grande familiarité avec le médaillier. Marc Comelongue apporte de précieuses
contributions à l’histoire de la collection, dont Pascal Capus assure
aujourd’hui au sein du musée une gestion raisonnée.
Hélène
Guiraud fait remarquer que plusieurs de ces trésors sont dits de 3600 monnaies
environ, soit 11 à 12 kg. Est-ce en rapport avec la taille des vases qui les
contenaient ? Vincent Geneviève accepte l’hypothèse. Puis Hélène
Guiraud s’étonne de la rareté des monnaies en provenance de Samosate ou
d’Antioche. Vincent Geneviève confirme qu’elles sont toujours très
minoritaires, leur présence dans la vallée de la Garonne ne pouvant résulter
que de la circulation commerciale ou militaire.
Patrice Cabau
voudrait avoir des précisions sur les monnaies saucées. Vincent Geneviève
explique que les artisans monnayeurs disposaient de techniques qui nous échappent.
Nous savons que l’électrolyse était connue des Romains. Les techniques
utilisées pour fabriquer des monnaies fourrées ou des monnaies saucées
recouvertes d’une couche d’argent de quelques microns étaient complexes, et
sans doute variées. Les procédés de fabrication sont encore très mal connus
et Vincent Geneviève cite comme exemple la frappe des sesterces, toujours
illustrée dans les musées et les publications par une frappe au marteau :
une étude récente de Georges Depeyrot, menée avec la Monnaie de Paris, a
montré qu’il fallait une poussée de 80 kg, qui ne pouvait être obtenue
qu’avec un mouton. Ce que n’admettent toujours pas certains numismates.
La Présidente remercie Vincent Geneviève pour ces précisions très éclairantes.
SÉANCE DU 21 NOVEMBRE 2006
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Cabau, Secrétaire-adjoint
; Mme Napoléone, M. Bordes, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Prin, Tollon,
membres titulaires ; Mmes Bayle, Félix, Fraïsse, Friquart, MM. Balagna,
Boyer, Darles, Le Pottier, Mattalia, Stouffs, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Latour, Bibliothécaire-adjoint, Mmes
Jaoul, Krispin, MM. Garland, Lapart.
Après avoir
donné des nouvelles de la santé de Louis Latour, la Présidente souhaite la
bienvenue à Yoan Mattalia qui prend séance ce soir.
Le Secrétaire
général donne lecture des procès-verbaux des séances des 3 octobre et 7
novembre 2006, qui sont adoptés.
La Présidente annonce la mise en chantier de la révision de notre règlement intérieur, dont la dernière version date de 1885, et qui a besoin d’être actualisé. On profitera des temps libres qui se présenteront en fin de séance pour examiner chacun des articles et travailler à une nouvelle rédaction. Louis Peyrusse pense qu’il faudra ensuite s’attaquer à la révision de nos statuts, afin de les mettre en conformité avec nos pratiques actuelles, en sollicitant l’aide de l’Académie de législation pour prévenir les éventuels écueils juridiques.
En remerciement pour l’aide qu’il a trouvée auprès des membres de notre Compagnie, M. Patrick Fraïsse offre à la Société un exemplaire de sa thèse, Le patrimoine monumental en images : des médiations informationnelles à la conversion monumentaire des documents, sous la direction de Viviane Couzinet et Gérard Regimbeau, Université de Toulouse, 2006, 384 p.
La parole est à Jean-Claude Boyer pour une communication sur Un « May » de Notre-Dame de Paris en Gascogne, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
félicite Jean-Claude Boyer pour cette enquête très aboutie qui ne laisse guère
de doute sur l’attribution proposée. Comme elle l’interroge sur
l’appellation de « may », Jean-Claude Boyer rappelle que ces
tableaux étaient offerts le premier mai de chaque année à Notre-Dame de
Paris.
Bernadette
Suau remarque que le tableau est parfaitement adapté au retable. Or Mazzetti,
auquel est également attribué l’autel de l’église paroissiale de Vielmur
dans le Tarn, arrive assez tardivement dans la région, dans le sillage de l’évêque
de Dax Suarès d’Aulan. Bernard Montagnes ajoute que Mazzetti est connu comme
marbrier et que l’autel-retable de Mirande associe des colonnes de marbre à
du bois doré. Jean-Claude Boyer cite à son tour l’église de Saint-Affrique
d’Albi, dans la même zone géographique que Vielmur ; il admet qu’il
faudrait vérifier si Mazzetti travaille autant le bois que le marbre. Puis il précise
que le tableau porte actuellement un blason aux armes de Mirande, associées à
une crosse et une mitre : il y a toute raison de supposer qu’elles ont
remplacé des armoiries plus anciennes qui pourraient être conservées sous le
repeint. Jean-Marc Stouffs signale que la réponse se trouve peut-être dans le
dossier de restauration du tableau.
Bruno Tollon
constate que la forme de l’autel est assez courante depuis les années 1720,
le retable étant parfois remplacé par un baldaquin. Puis il demande si Antoine
Coypel a réalisé d’autres compositions en deux registres. Jean-Claude Boyer
dit que c’est possible, mais qu’il n’a pas examiné précisément ce
point. Répondant à une question de Louis Peyrusse, il confirme que les références
à Titien ne sont pas choquantes dans un grand tableau parisien des années
1690. Il ajoute que dans toute sa carrière, Antoine Coypel n’a peint qu’une
seule Assomption, pour Notre-Dame, en 1717.
Louis
Peyrusse revient sur la forme chantournée du cadre du tableau pour se demander
si d’autres mays ont cette forme, ou si le tableau a été adapté pour
Berdoues ou pour Mirande. Sans avoir vu des photographies de tous les mays,
Jean-Claude Boyer croit cependant pouvoir dire qu’ils sont plutôt carrés ;
celui de 1635 présente un cadre cintré mais il était sans doute carré à
l’origine. Guy Ahlsell de Toulza estime que la forme chantournée correspond
mieux à la composition de Coypel que le rectangle ; le tableau serait dans
ce cas un peu hors normes par rapport à la tradition des mays. Jean-Claude
Boyer n’exclut pas cependant que la partie haute ait pu être complétée pour
être adaptée à la forme du cadre.
Dans l’attente du conférencier suivant, la Présidente ouvre les questions diverses. Christian Darles informe la Compagnie de la mise en place d’un projet d’étude archéologique de la partie de l’aqueduc romain située sur le site de l’Université de Toulouse-Le Mirail.
Puis on aborde l’examen du règlement intérieur, dont les articles 1 à 9 sont discutés.
Christophe Balagna demande à la Compagnie de bien vouloir excuser son retard. La Présidente lui donne la parole pour une communication sur Les quatre chapiteaux romans de l’église du Born (Haute-Garonne) :
L’église du Born, dédiée à sainte Foy, appartient au canton de Villemur, dans le département de la Haute-Garonne [1]. Elle est aujourd’hui l’église paroissiale de cette petite commune, essentiellement rurale, située aux confins de la Haute-Garonne, du Tarn-et-Garonne et du Tarn. Au XIe siècle, la paroisse fit partie des possessions de l’abbaye bénédictine de Conques, en Rouergue. En effet, le cartulaire conquois fait état de deux textes, le premier rappelant que l’abbaye rouergate a reçu l’église du Born, « ecclesia de Borno », dans le diocèse de Toulouse, vers 1060, de Pons, fils de Bernard, et de plusieurs autres seigneurs, le second disant que Haton Isnard et Géraud de Cépet donnèrent, vers 1100, à l’abbaye de Conques, un alleu situé au Born [2]. L’église fut peut-être alors le siège d’un prieuré accueillant des pèlerins de Saint-Jacques sur le chemin de Conques. Nous savons aussi qu’au XVIe siècle, Conques possédait toujours l’église Sainte-Foy du Born et son annexe Le Fraysse, aujourd’hui commune de Bondigoux. En revanche, au siècle suivant, la paroisse fut rattachée au diocèse de Montauban.
Il semble que l’édifice actuel, entièrement en briques, ait été en partie construit au XIVe siècle, comme en témoigne le portail occidental aux multiples voussures de forme brisée et aux bases moulurées, sans tympan, inséré dans un mur en pierre de taille. Il mesure en hauteur le tiers de la façade actuelle, terminée par un beau clocher-mur en briques auquel est accolé, au sud-ouest, une tourelle d’escalier. À l’intérieur, le portail donne sur une courte nef à vaisseau unique, lambrissée et sans doute jamais voûtée, terminée par un chœur à trois pans précédé d’une travée donnant au nord et au sud sur deux chapelles latérales, dont celle du nord ouvre sur une sacristie [3]. Cette travée droite et le chœur polygonal sont voûtés d’ogives prismatiques [4]. Le chevet est épaulé de contreforts très larges qui sont établis de manière maladroite. La clef de voûte de la travée droite porte la date de 1682, correspondant à une campagne de restauration de l’édifice.
Les nervures orientales de l’abside reposent sur quatre chapiteaux, eux-mêmes paraissant couronner des supports circulaires dont les bases moulurées romanes apparaissent derrière la cloison qui les masque aujourd’hui entièrement à la vue. Ces quatre chapiteaux appartiennent à l'époque romane. Ils sont assez bien conservés, malgré quelques mutilations qui apparaissent sous le badigeon de chaux. Au-dessus d'eux, on aperçoit une énorme tablette faisant office de tailloir. Elle ne comporte aucun décor, ne correspond pas aux dimensions des chapiteaux et paraît être contemporaine de la campagne de voûtement du XIVe siècle. On peut d’ailleurs se demander s’il s'agit d'une voûte d'ogives témoignant d'une reconstruction à l'époque gothique ou d’un voûtement consécutif à des travaux de restauration menés au XVIIe siècle ou au XIXe siècle. Il semble donc que l’on ait décidé, au moment de la reconstruction de l’église et de son voûtement, de réutiliser les chapiteaux romans, ainsi que les colonnes et leurs bases, seuls vestiges de la construction primitive.Les chapiteaux présentent un épannelage corinthisant, un astragale torique, un abaque échancré. Comme les chapiteaux sont engagés, ils sont sculptés sur deux faces perpendiculaires. Les quatre chapiteaux comportent un dé médian sur chaque face, assez large, à la face centrale abattue. Sur un seul chapiteau, les dés médians sont nus et lisses, en revanche pour les trois autres, les deux dés servent de support à l'organisation du décor sculpté. À l'angle, on trouve des volutes aux enroulements grêles, formant une petite boule, placés à l'extrémité de hampes fines. Mais il faut signaler que la plupart des volutes ont été assez abîmées. Dans le domaine du décor, les quatre chapiteaux s'opposent deux à deux. En effet, deux chapiteaux sont à décor végétal simple, tandis que les deux autres font intervenir, l'un des oiseaux dans une composition essentiellement décorative, l'autre la figure animale et la figure humaine au sein d'un thème moralisateur.
Le premier chapiteau à décor végétal comporte deux niveaux superposés de feuilles lisses disposées en quinconce. Les feuilles larges sont marquées par une nervure médiane et se recourbent légèrement vers l'extérieur pour donner naissance à une petite boule. Au registre supérieur, le motif a disparu à l'angle. Les traces de mutilations évoquent la présence d'un motif assez large, boule ou pomme de pin, destiné à mettre en valeur l'angle de la structure du chapiteau et son axe de symétrie. Ce type de composition est tout à fait classique dans la sculpture romane méridionale. En effet, il s'agit d'une déclinaison très simplifiée du chapiteau corinthien, dont on a conservé la disposition des feuilles, mais dont on a supprimé le décor couvrant. L'aspect monumental des feuilles, leur rigidité, la petitesse des boules font de ce chapiteau une œuvre de qualité moyenne, caractéristique de la production du temps. En effet, nous rencontrons des œuvres similaires dès la fin du XIe siècle dans l'abbatiale de Conques [5], au rez-de-chaussée et dans les tribunes, à Saint-Sernin dans l'atelier du Maître de la Porte des Comtes dans les vingt dernières années du siècle [6], puis dans la région toulousaine, à Venerque, à Saint-Rustice [7], en Albigeois dans l'église Saint-Michel de Lescure [8] notamment, et surtout le long du piémont pyrénéen, en Comminges à Saint-Gaudens [9], par exemple, en Bigorre, comme à Saint-Sever de Rustan [10], et surtout en Gascogne landaise, à Saint-Sever-sur-l'Adour où ce genre décoratif connaît un succès considérable pour se diffuser dans les églises des environs [11].
Le deuxième chapiteau est une déclinaison du précédent : un seul niveau de feuilles lisses avec nervure médiane se répartissant en une feuille d'angle et deux feuilles latérales qui se recourbent en une pointe de manière élégante. La nouveauté réside dans la présence de deux têtes animales, vraisemblablement des têtes de chat ou des gueules de lions, disposées sur les deux dés médians. Le sculpteur a donc voulu insérer un arrière-plan animal à cette composition ornementale. À nouveau, on peut comparer cette œuvre avec les chapiteaux conservés dans les édifices cités plus haut pour le chapiteau précédent, notamment avec deux chapiteaux de Saint-Michel de Lescure [12], surtout un, ainsi qu’avec la frise de l’archivolte du portail de cette même église, scandée de têtes de félins. Il pourrait être intéressant de procéder à un grattage du chapiteau, en particulier au niveau de la gueule léonine de gauche. En effet, elle semble présenter des ressemblances avec les lions sculptés par le Maître de la Porte des Comtes, à Saint-Sernin de Toulouse [13], bien qu'elle soit exécutée de manière plus sommaire.
Le troisième chapiteau fait intervenir la figure animale de manière plus directe puisqu'il représente deux oiseaux affrontés, les serres posées sur l'astragale, leurs ailes en partie déployées, tandis que les dés médians latéraux accueillent des feuilles rigides et étroites parcourues de nervures verticales. Leur tête est traitée de manière assez originale puisqu'elle semble posséder une crête et une caroncule, comme chez certains volatiles, tels le dindon, le coq, le pigeon. Mais comme le motif d'angle a disparu, cette partie plate pourrait peut-être aussi en constituer le prolongement. On peut remarquer aussi que la patte antérieure gauche de l'oiseau de gauche et la patte antérieure droite de l'oiseau de droite se rejoignent au centre. Il semble ne rien y avoir au milieu, mais l'on aperçoit à l'arrière les extrémités des ailes des oiseaux dans un jeu réussi de superposition de surfaces. Parfois, les oiseaux emprisonnent entre leurs serres une tête humaine, sous-entendant ainsi une scène démoniaque. On le voit à Saint-Sernin et dans les édifices influencés par le Maître de la Porte des Comtes, mais également en Gascogne landaise, dans la crypte de Saint-Girons d’Hagetmau [14] ou dans la tribune nord de Saint-Sever-sur-l’Adour [15]. Mais ici, le sculpteur a délaissé ce niveau de lecture pour en faire une œuvre purement décorative. Encore une fois, la composition, le traitement des volatiles, leur posture, les deux serres se réunissant au centre, tout cela rappelle, d’assez loin tout de même, les œuvres de Saint-Sernin qui vont largement influencer, autour de 1100 et dans le premier quart du XIIe siècle, de nombreux édifices régionaux, comme Saint-Sever de Rustan en Bigorre. Plus proches, on peut citer le cloître de Moissac, achevé en 1100 [16], l'église de Saint-Rustice, Saint-Michel de Lescure près d'Albi... Le chapiteau du Born est néanmoins d'une qualité inférieure à celle de ces autres œuvres.
Le dernier chapiteau est le plus réussi et le plus intéressant. C'est aussi le seul parmi les quatre à témoigner d'une influence véritablement directe de l'atelier du Maître de la Porte des Comtes de Saint-Sernin, bien que cette influence doive être tempérée d'un point de vue stylistique. Il s'agit d'une composition historiée parfaitement reconnaissable : au centre du chapiteau, se trouve un personnage humain, assis sur un siège invisible, les jambes écartées, les pieds posés sur l'astragale. Il lève les bras au-dessus de lui pour écarter de son crâne les crocs de deux dragons qui essaient de le dévorer. En même temps, ceux-ci s'accrochent fermement à l’homme par leurs griffes posées sur ses genoux. Il s'agit donc d'une composition très harmonieuse où l'homme et les animaux sont étroitement liés dans une étreinte mortelle puisqu'il s'agit d'une scène évoquant un châtiment infernal, comme les affectionne le Maître de la Porte des Comtes, et qui pourrait évoquer plus précisément le châtiment de l'orgueil.
Stylistiquement, l'œuvre témoigne d'une influence double provenant de Saint-Sernin et de Moissac. De Saint-Sernin viennent le schéma d'ensemble de la composition, la structure iconographique, la posture générale du personnage et des oiseaux, leur queue serpentiforme qui s'enroule sur elle-même, les ailes repliées se terminant en volute sur le dé médian [17]. De Moissac sont issus les drapés du personnage, l'extrémité du vêtement retombant sur les côtés et formant un triangle étiré parcouru de fins plissés, et surtout le bourrelet horizontal qui ceint le bas-ventre du personnage, témoignant d'une recherche de modelé qui donne à l'homme un aspect un peu bedonnant, influence que l'on retrouve d'ailleurs à Toulouse, dans les chapiteaux du premier atelier de La Daurade, réalisés vers 1100 par des sculpteurs moissagais [18]. Cette double influence est caractéristique de la région du Born, aux confins de l'influence de Saint-Sernin et de Moissac. Effectivement, on peut retrouver des œuvres absolument identiques à Saint-Rustice, au portail de l'église de Gémil [19] et plus loin, en Albigeois, sur un chapiteau du portail de Lescure. D'autres œuvres se rattachent plus directement à l'influence de Saint-Sernin : le portail nord de l'église de Belberaud [20], et plus loin, l'église Saint-Jean-Baptiste de Mazères à Castelnau-Rivière-Basse [21], l'église de Saint-Sever de Rustan.
En conclusion, on peut dire que les quatre chapiteaux de l'église du Born témoignent de l’attraction artistique des grands édifices régionaux contemporains. En effet, ils présentent un caractère simplement ornemental ou plus recherché, en délivrant sur l'un des chapiteaux un véritable message à l'intention du fidèle ou du moine, puisqu’en certains endroits, notamment à Mazères ou dans le chœur de la cathédrale de Lescar [22], les personnages en proie aux dragons paraissent vêtus d’une chasuble. La structure, la composition, le décor évoquent de manière très directe l'attirance de l'atelier de sculpteurs qui travaille à Saint-Sernin dans le dernier quart du XIe siècle et qui va ensuite participer à des chantiers plus modestes situés dans la région toulousaine et plus globalement dans une partie du Midi toulousain, jusqu'en Albigeois, en Bigorre et en Gascogne [23]. Enfin, la position géographique de l'église du Born, entre Toulouse et Moissac, lui permet, tout comme pour les églises de Saint-Rustice, de Roquesérière [24] ou de Gémil, de bénéficier du rayonnement artistique des deux cités, même si le ou les sculpteurs du Born ne peuvent rivaliser, en qualité et originalité, avec leurs devanciers. Le nettoyage des chapiteaux et l’enlèvement de leur badigeon permettraient peut-être de savoir si ce ou ces sculpteurs appartiennent ou n’appartiennent pas à l’atelier du Maître de la Porte des Comtes ou aux sculpteurs ayant exécuté les chapiteaux du cloître de Moissac. Nous sommes donc là autour de 1100 et, au plus tard, dans le premier quart du XIIe siècle, au moment où le rayonnement artistique des sculpteurs du cloître de Moissac et des artistes rattachés à l'atelier du Maître de la Porte des Comtes est le plus fort.
Christophe BALAGNA
[1] Il existe une courte notice du monument et de la commune à laquelle il appartient dans l’ouvrage collectif Le patrimoine des communes de la Haute-Garonne, 2000, p. 1750-1751.
[2] Cf. Gustave Desjardins, Cartulaire de l’abbaye de Conques en Rouergue, Paris, 1879, p. CIV et CV et p. 59-60 pour la charte n° 60, et p. 335-336 pour la charte n° 464.
[3] Cet agrandissement de l’édifice paroissial a dû être réalisé au cours du XIXe siècle.
[4] Il est aujourd’hui difficile de préciser les campagnes de construction et de restauration du monument du fait de l’absence de sources et de documents. De plus, l’épais crépi extérieur, dont la couleur grisâtre ne met pas en valeur le monument, empêche tout examen précis des élévations extérieures.
[5] Marcel Durliat, La sculpture romane de la route de Saint-Jacques. De Conques à Compostelle, Mont-de-Marsan, 1990.
[6] Idem, ainsi que abbé Jean Cabanot, « Le décor sculpté de la basilique Saint-Sernin de Toulouse », dans Bulletin Monumental, 1974, p. 99-145.
[7] Pour ces deux édifices, cf. M. Durliat, Haut-Languedoc roman, La Pierre-qui-vire, 1978, p. 41-42.
[8] M. Durliat, « Les chapiteaux et le portail de Saint-Michel de Lescure », dans Cahiers de Civilisation Médiévale, 1962, p. 411-434.
[9] M. Durliat, « Les chapiteaux romans de l’église de Saint-Gaudens », dans Revue de Comminges, 1982, p. 31-70, et Emmanuel Garland et Nelly Pousthomis-Dalle, « La collégiale Saint-Pierre et Saint-Gaudens à Saint-Gaudens », dans Congrès Archéologique de France, Monuments en Toulousain et Comminges, 1996, Paris, 2002, p. 139-149.
[10] Cf. Abbé J. Cabanot, « Saint-Sever de Rustan », dans Gascogne romane, La Pierre-qui-vire, 1978, p. 209-210.
[11] Abbé J. Cabanot, « Au cœur de la Gascogne : le rayonnement de Saint-Sever », dans Gascogne romane, p. 91-121 ; « Les chapiteaux romans de l’abbatiale de Saint-Sever », dans Bulletin de la Société de Borda, 1963, 1966 à 1969 ; Les débuts de la sculpture romane dans le Sud-Ouest de la France, Paris, 1987.
[12] Cf. M. Durliat, « Les chapiteaux et le portail de Saint-Michel de Lescure », p. 411-434.
[13] Cf. M. Durliat, La sculpture romane de la route de Saint-Jacques. De Conques à Compostelle, et abbé Jean Cabanot, « Le décor sculpté de la basilique Saint-Sernin de Toulouse », p. 99-145.
[14] Abbé J. Cabanot, « Saint-Girons d’Hagetmau », dans Gascogne romane, p. 122-127, et Les débuts de la sculpture romane dans le Sud-Ouest de la France.
[15] Abbé J. Cabanot, « Les chapiteaux romans de l’abbatiale de Saint-Sever », dans Bulletin de la Société de Borda, 1967, p. 133-158.
[16] En dernier lieu, on consultera Quitterie Cazes et Maurice Scellès, Le cloître de Moissac, éd. Sud-Ouest, 2001.
[17] À Saint-Sernin, ce type de composition est visible au rez-de-chaussée du bras sud du transept (chap. n° 127), à la Porte des Comtes ou dans la tribune du bras sud (chap. n° 251). La numérotation des chapiteaux est celle adoptée par M. Durliat, La sculpture romane de la route de Saint-Jacques. De Conques à Compostelle.
[18] À ce sujet, cf. M. Durliat, La sculpture romane de la route de Saint-Jacques. De Conques à Compostelle, et Q. Cazes et M. Scellès, Le cloître de Moissac.
[19] M. Durliat, Haut-Languedoc roman, p. 34-35.
[20] Idem, p. 30.
[21] Sur cet édifice important, voir abbé Jean Cabanot, « L’église Saint-Jean de Mazères et le problème des origines de la sculpture romane dans le sud-ouest de la France », dans Bulletin de la Société de Borda, n° 336, 1969, p. 409-435, « L’église Saint-Jean de Mazères », dans Congrès Archéologique de France, Gascogne, 1970, Paris, 1970, p. 67-79 et « Saint-Jean-Baptiste de Mazères », dans Gascogne romane, p. 203-208.
[22] En dernier lieu, on consultera Jacques Lacoste, Les grandes œuvres de la sculpture romane en Béarn, éd. Sud-Ouest, 2007, p. 13-54.
[23] Cf. Christophe Balagna, « L’église romane de Croute à Lasserrade (Gers) : un édifice inachevé de Gascogne centrale autour de 1125 », à paraître prochainement.
[24] M. Durliat, Haut-Languedoc roman, p. 37-38.
La Présidente
remercie Christophe Balagna de nous avoir fait découvrir ces chapiteaux romans
inédits, que l’on souhaiterait voir nettoyer afin de mieux en apprécier la
sculpture. Louis Peyrusse s’étonne du traitement qui a été infligé à
l’abside. Maurice Scellès renchérit en constatant que la rénovation de l’église
a abouti à sa complète dénaturation, et tout cela grâce à de l’argent
public. Quand on s’interroge sur le coût de la conservation du patrimoine,
c’est quelque chose qu’il faut prendre en compte. Cet argent qui, avec les
meilleures intentions, entraîne de fait la destruction du patrimoine que l’on
prétend mettre en valeur, pourrait sans aucun doute être mieux employé.
Répondant à
une question de Louis Peyrusse sur l’iconographie des chapiteaux, Christophe
Balagna précise que l’homme dont la tête est dévorée par des monstres est
une représentation habituelle de l’orgueil ; mais, faute de savoir si
les chapiteaux sont en place, il est impossible de dire si la représentation a
ici conservé sa signification.
Maurice Scellès
observe qu’il n’est pas nécessaire d’ajouter à la référence aux
chapiteaux du cloître de Moissac celle de la porte de Comtes de Saint-Sernin.
Il insiste ensuite sur l’intérêt que représente la recension de toutes ces
œuvres pour la connaissance de la diffusion du style et de l’iconographie à
partir des grands chantiers romans.
Chantal Fraïsse
pense qu’une importance exagérée est accordée au bourrelet ventral, dont
elle n’est d’ailleurs pas sûre qu’il soit une caractéristique du seul
cloître de Moissac.
Pour Guy
Ahlsell de Toulza, les oiseaux représentés sur l’un des chapiteaux sont bien
des coqs, dont on reconnaît la crête et les barbillons ainsi que les plumes de
la queue. Il ajoute que les chapiteaux et les bases conservés laissent supposer
des colonnes qui seraient seulement masquées par l’enduit moderne, et qu’il
y a dès lors toutes les raisons de se demander si l’abside n’est pas
romane. Christophe Balagna dit y avoir songé, mais rappelle que l’état
actuel de l’édifice ne permet aucune vérification. Louis Peyrusse suggère
de rechercher des photographies anciennes qui apporteraient peut-être des éléments
de réponse.
SÉANCE DU 5 DÉCEMBRE 2006
Présents : MM. Cazes,
Directeur, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Mme
Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier ; Mmes
Napoléone, Watin-Grandchamp, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Prin, Mgr
Rocacher, membres titulaires ; Mmes Barber, Bayle, Krispin, MM. Le
Pottier, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, M. Latour, Bibliothécaire-adjoint,
Mme Cazes, M. Bordes.
Le Directeur
ouvre la séance à 17 h, priant la Compagnie d’excuser l’absence de la Présidente,
empêchée.
Daniel Cazes
signale un article de Philippe Eymeri paru dans la Dépêche du Midi du
17 novembre 2006 annonçant qu’une société immobilière a procédé à
l’achat de l’Hôtel dit du Vieux-Raisin (36, rue du Languedoc et 4, rue
Ozenne), édifié après 1518 pour l’avocat Bérenger Maynier puis complété
après 1550 pour le greffier Jean Burnet, en vue de le rénover.
Paraphrasant
le titre de cet article, Patrice Cabau déclare qu’il s’agit de la « Chronique
d’une mort annoncée » : les opérations de ce type, réalisées
sans aucune étude préalable aux châteaux de La Cépière et de
Lacroix-Falgarde ou à l’Hôtel de Maleprade, ont entraîné la dénaturation
des lieux ainsi que la perte de quantité d’informations.
Louis
Peyrusse note l’importance des restaurations intervenues au XIXe siècle,
qui ont passablement bouleversé l’intérieur. Le seul élément originel
encore visible est la cheminée monumentale ornant la grande salle qui servait
naguère de cabinet au docteur Bernard Combes ; subsistent également des
boiseries du XVIIIe siècle. Daniel Cazes rappelle que l’enlèvement
des enduits ou des plâtres peut réserver des surprises, et permettre
d’utiles observations archéologiques. Maurice Scellès s’étonne du statut
assurant la protection de l’hôtel, non pas classé parmi les Monuments
Historiques, mais seulement inscrit. De toute manière, dans le cadre de
l’intervention projetée, une étude préalable et un suivi pendant travaux
paraissent indispensables.
Le Directeur
souligne la très grande qualité du décor de sculpture de la Renaissance qui
orne l’hôtel. Certaines, comme celles de l’encadrement de la porte de la
tour, ont été récemment remplacées à l’identique. Que sont devenus les
originaux : jetés à la décharge, ou recyclés dans le commerce des
antiquités ? Du point de vue archéologique, les pratiques en vigueur sur
les chantiers de restauration sont inacceptables. Daniel Cazes se demande aussi ce
qu’il adviendra des éléments du petit ensemble lapidaire conservé dans
l’enceinte de l’hôtel : sous le portique, un beau chapiteau roman et
un morceau de pilier gothique ; ailleurs, une gargouille qui, selon Maurice
Prin, pourrait venir de la chapelle de Rieux de l’ancien couvent des
Cordeliers. Le Directeur préconise que les membres de la Société se rendent régulièrement
sur place et consignent leurs observations sur ce qui s’y passe.
Louis
Peyrusse s’interroge sur l’utilité d’adresser un courrier sur le sujet au
Directeur régional des Affaires culturelles ; finalement, il lui semble
important d’« acter les différends ».
Guy Ahlsell de Toulza revient sur l’impact des
restaurations du XIXe siècle. Louis Peyrusse confirme que des
remaniements ont eu lieu à peu près partout, comme il a pu s’en rendre
compte avec notre confrère Bruno Tollon. La façade sur la rue Ozenne a été
entièrement « resuivie », peut-être aussi les baies regardant vers
la rue du Languedoc ; des médaillons ont été ajoutés dans la cage
d’escalier. Quant à la date et à la portée exacte des diverses campagnes,
Louis Peyrusse note qu’on se heurte ici au problème des propriétés privées
qui n’ont aucune mémoire.
Toujours au chapitre des « restaurations », le Trésorier annonce, d’après le magazine municipal Capitole Infos (n° 162), l’inauguration prochaine de la « Maison de l’Occitanie » dans l’Hôtel Boysson-Cheverri (11, rue Malcousinat). Les bâtiments ont été rénovés, et quelques cheminées anciennes révélées ; le corps en façade sur la rue, du XVIIIe siècle, a été entièrement « curé », les niveaux de ses étages revus, les ouvertures du rez-de-chaussée modifiées. Là encore, aucune étude préalable n’a été réalisée.
Louis Peyrusse signale que le château des Verrières (avenue Honoré-Serres), laissé à l’abandon, est occupé par un squatt d’artistes. Pour Maurice Scellès, il est clair que le monument est « promis à la ruine pour démolition ».
Après cette triste chronique du patrimoine architectural civil de Toulouse, le Directeur donne la parole à notre consœur Jeanne Bayle pour la communication du jour, intitulée L’ancien archevêché de Toulouse jusqu’à monseigneur Colbert, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
M. Cazes
remercie chaleureusement Mme Bayle pour cet exposé passionnant, qui constitue
la base de la monographie qui reste à réaliser sur l’actuelle Préfecture.
L’étude historique montre déjà toute la « stratification »
d’un ensemble fort complexe. Pour la compléter par une analyse archéologique,
il faudrait pouvoir travailler sur place, mais les lieux sont difficilement
accessibles. M. Cazes a pour sa part eu la chance de les visiter de fond en
comble à deux reprises, notamment lors du récolement des œuvres d’art mises
en dépôt par le Musée des Augustins ; il a appris à cette occasion que
le pavement en carrelage émaillé de la fin du XIIIe siècle publié
par l’architecte Jacques-Jean Esquié en 1878 existe encore en sous-sol.
Mme Bayle
confirme la perspective essentiellement historique de son travail, mené
exclusivement d’après les documents textuels et graphiques conservés dans
les archives. Toutefois, il lui paraît intéressant d’illustrer la
publication par une photographie de la façade donnant sur le jardin.
Le Directeur
évoque l’importance du site occupé par l’ancien évêché devenu archevêché :
c’était dans l’Antiquité celui du deuxième ensemble monumental de Tolosa,
après le forum. Sur l’emplacement de l’area du temple antique auquel
succéda l’ancienne église Saint-Jacques ont été découverts des fragments
de statues d’empereurs, en marbre, de 2 à 3 m de hauteur.
Passant ensuite aux questions diverses, Daniel Cazes signale l’arrivée dans nos locaux, cet après-midi même, d’un relief du XVIe siècle provenant de l’ancien collège de L’Esquile (34, rue des Lois), récemment rénové pour les Services fiscaux. Il s’agit d’une plaque en grès de Furne qui se trouvait à l’angle des corps de bâtiment situés à la rencontre des rues des Lois et de L’Esquile, encastrée dans le chaînage de pierre, au niveau de la pénultième assise, à environ 2 m de haut. Malgré les diverses altérations subies par la sculpture, fort exposée aux intempéries, martelée à la Révolution et brisée en deux morceaux lors de sa dépose à la fin du mois d’octobre dernier, on distingue de part et d’autres d’un médaillon central (des armoiries ?) deux silhouettes dans lesquelles on reconnaît des faunes regardant vers l’extérieur de la plaque ; le style est celui des productions de Louis Privat autour de 1530. Ce relief ayant disparu et ayant été remplacé par une pierre fruste, M. Cazes s’est enquis de ce qu’il avait pu devenir. Le Directeur des Services fiscaux affectataire des lieux n’ayant pas manifesté d’intérêt, non plus que l’architecte responsable du chantier, la sculpture a finalement été déposée à la S.A.M.F. par l’entreprise chargée des travaux et destinataire des matériaux de décharge.
La parole est enfin au Secrétaire général pour la continuation de l’examen du règlement intérieur de notre Société, dont la mise à jour est poursuivie jusqu’à la fin de l’article 13.
SÉANCE DU 19 DÉCEMBRE 2006
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Cabau, Secrétaire-adjoint
; Mme Napoléone, M. Bordes, membres titulaires ; Mmes Barber, Bayle,
Friquart, Jaoul, Krispin, MM. Laurière, Mattalia, Surmonne, membres
correspondants.
Excusés : M. Latour, Bibliothécaire-adjoint, le Père Montagnes, M.
Pradalier.
Invitée : Mlle Anaïs Charrier.
La Présidente souhaite la bienvenue à Martine Jaoul, qui prend séance ce soir, et à notre invitée, Mlle Anaïs Charrier, étudiante en master 1 à l’Université de Paris-Sorbonne et qui a apporté son aide à Anne-Laure Napoléone pour les relevés de la maison d’Arcambal à Martel.
Le Secrétaire général puis le Secrétaire-adjoint donnent lecture des procès-verbaux des séances des 21 novembre et 5 décembre derniers, qui sont adoptés.
Guy Ahlsell de Toulza rend compte de la visite de l’Hôtel de Boysson-Cheverri qu’il a faite à l’occasion d’une journée porte ouverte. La belle voûte du rez-de-chaussée, à nervures de briques et clef en pierre, a été entièrement badigeonnée en blanc ; le même badigeon, lourdement chargé, a été passé sur la grande cheminée de la salle du rez-de-chaussée. Deux cheminées ont été révélées au premier étage : il est dommage que leur base soit enfouie dans une surélévation du plancher de 30 cm, dont on ne comprend pas la raison. Les coursives en bois ont été entièrement refaites à neuf et un escalier contemporain a été installé dans la cour. Les belles fenêtres Renaissance de la façade de la partie sud ont été murées. Guy Ahlsell de Toulza conclut que le traitement de l’édifice ne lui paraît pas très cohérent mais que cela aurait pu être pire. Patrice Cabau relève que l’article paru dans Capitole Info ne dit pas un mot de l’histoire de l’Hôtel.
Notre bibliothèque s’enrichit d’un don de Guy Ahlsell de Toulza, auteur de Rabastens, église Notre-Dame du Bourg. Guide du visiteur, s.l.n.d. [2006], 36 p.
La parole est à Raymond Laurière pour une communication sur Les ruines de l'église de Sabadel (Aveyron), problèmes de chronologie.
La Présidente
remercie Raymond Laurière de nous avoir fait part de cette découverte d’un
édifice en effet très intrigant. L’analyse de la nef pose de nombreuses
questions. L’angle nord-ouest était-il également arrondi ? Raymond
Laurière le confirme en indiquant que la fondation du mur ouest a été retrouvée.
La Présidente souligne ensuite l’intérêt de la technique de construction de
l’abside, qui fait alterner des assises de hauteur différente. Ce type
d’appareil et les trous de boulins traversants permettent à Raymond Laurière
d’évoquer des constructions des IVe et Ve siècles. La
Présidente rappelle l’étude de Nicolas Reveron sur les trous de boulins.
Pour Maurice
Scellès, la chronologie relative proposée pour la nef et l’abside pourrait être
inversée. À en juger d’après les photographies, les deux maçonneries sont
séparées sur l’élévation nord par une reprise : si cela était vérifié,
l’abside serait postérieure à la nef dont la maçonnerie aurait été coupée
pour permettre la construction de la nouvelle abside plus large, l’interstice
subsistant entre la chaîne d’angle de l’abside et le mur de la nef étant
ensuite comblé. Cette hypothèse permettrait en outre d’expliquer la
disparition des angles arrondis de la nef au nord-est et au sud-est. Raymond
Laurière se réfère à l’avis des spécialistes qui sont venus sur place,
mais ne rejette pas l’hypothèse proposée.
Répondant à
une question de Bernadette Suau, Raymond Laurière précise que l’église se
trouve sur une hauteur, et il ajoute qu’une fontaine se trouvait à une
trentaine de mètres de l’église.
Patrice Cabau
propose de rapprocher l’analyse de l’église de Sabadel de celle de l’église
Sainte-Matrone sur laquelle Gabriel Manière avait attiré l’attention de
notre Compagnie l’année dernière. Comme Bernadette Suau souligne la médiocrité
des matériaux de construction de la nef, qui ne lui semble pas correspondre à
une église pré-romane, Raymond Laurière cite les exemples de Belcastel ou de
Mirabel, où l’appareil n’est pas de meilleure qualité.
Guy Ahlsell
de Toulza s’intéresse aux chapiteaux, que la Présidente daterait plutôt de
la fin du XIIe siècle que du XIIIe siècle. Il ne se
trouve en revanche personne pour se prononcer sur la datation des bases retrouvées
en remploi.
Guy Ahlsell
de Toulza s’étonne que l’agrandissement de la nef réalisé en 1740 n’ait
été que d’un mètre. Raymond Laurière détaille les informations données
par les archives ; il précise que la paroisse compte 80 familles en 1750.
Maurice Scellès
voudrait avoir des précisions sur les fouilles du chœur. Raymond Laurière
proteste qu’il n’y a pas eu de fouilles, mais seulement un dégagement de
remblais modernes.
La parole est à Anne-Laure Napoléone pour une communication sur La maison dite « d'Arcambal » à Martel (Lot) :
Dans une première synthèse sur la construction en pans de bois avant les XVe-XVIe siècles, Gilles Séraphin présente deux types de structure (1) :
- le premier type est constitué par les maisons à « pans de bois autoportant à sablière maîtresse », c’est-à-dire celles dont la structure charpentée repose sur la sablière et supporte le poids des planchers et de la charpente de toit. Cette structure est celle que nous connaissons pour les demeures à pans de bois de la fin du Moyen Âge et de l’Époque moderne, mais qui existe dès les XIIIe-XIVe siècles comme le montre l’exemple de la maison de la rue Donzelle à Cahors (2).
- le second type comprend les demeures à « pans de bois à piles porteuses », piles maçonnées dont on retrouve quelquefois les vestiges, le pan de bois ayant le plus souvent disparu (maison Peyrière à Figeac, XIIe-XIIIe siècles). Cette structure montre qu’au contraire du système précédent, le poids des planchers et des charpentes est reporté sur les piles et têtes de mur maçonnées, le pan de bois posé sur la sablière ne supportant dans ce cas-là que son propre poids (3).Rarement conservé et plus complexe à appréhender, ce second type de structure de pans de bois laisse imaginer une technique de construction peut-être plus ancienne, pour laquelle il serait nécessaire d’établir un inventaire et de multiplier les monographies. C’est dans cette optique, et pour alimenter une nouvelle synthèse sur cette technique de construction (4), qu’une rapide étude a été faite sur la maison dite d’« Arcambal » à Martel, qui présente aujourd’hui les avantages d’être à la fois bien conservée, assez bien documentée et partiellement en travaux (fig. 1 et 2) (5). Cet édifice fait partie d’un ensemble de maisons médiévales important déjà repéré dans la ville (6). Le dépouillement des archives de Martel, que l’on doit à Marguerite Guély, permet d’attribuer cet édifice à la famille d’Arcambal, nom des propriétaires aux XVIe et XVIIe siècles. Les sources plus anciennes semblent indiquer que cette demeure avait appartenu à la famille bourgeoise de Lespinasse et à ses successeurs, les Lespinasse étant héritiers de deux autres familles bourgeoises martelloises : les Clavel et les Taillefer. On note d’ailleurs, en 1300-1309, une maison d’Arcambal-Lespinasse dans le registre des tailles de Martel, située précisément dans le barry de l’Église (7).
La maison dite d’« Arcambal » élève aujourd’hui son mur gouttereau sur la rue de l’Église, elle comprend un rez-de-chaussée maçonné et un étage en pans de bois à remplissage de tuf. L’observation de la construction montre que les colombages ont été montés sur un rez-de-chaussée qui lui est antérieur puisque, pour asseoir les solives et leur corbeau, il a fallu détruire la partie haute du grand arc, au centre de la façade (fig. 3). Cette construction de grands blocs de taille de calcaire froid s’appuie contre la maison voisine située à l’est ; les deux parcelles ayant sans doute été rapidement regroupées. L’étage en pans de bois constitue donc une troisième phase de construction, à laquelle il faut associer la réfection de la plus grande partie du mur pignon ouest et toute la façade arrière, côté jardin. À partir d’un répertoire de formes médiévales, qu’il est nécessaire de préciser encore pour la ville de Martel, il semble que l’on puisse associer les deux premières phases à l’époque romane (XIIe-XIIIe siècles). Le pan de bois, intimement lié aux bois des planchers et de la charpente, fonctionne logiquement avec la maçonnerie arrière qui supporte l’autre extrémité des solives et des fermes. Les congés en biais qui amortissent les chanfreins, sur les piédroits des ouvertures, semblent être une caractéristique de la construction de la fin du Moyen Âge à Martel ; on peut donc dater cette dernière phase du XIVe ou du XVe siècle.
Le pan de bois repose sur un solivage serré soulagé par des corbeaux sur un encorbellement très important (jusqu’à 1,10 m). Sur la sablière de chambrée, une trame de poteaux également serrée, rythme la façade de l’étage. Aucune pièce oblique ne vient contreventer les panneaux. Les deux jours restituables prennent appui sur un cordon régnant, ou pièce horizontale, courant sur toute la façade. Il s’agit d’une petite ouverture rectangulaire à l’est et d’une croisée à l’ouest. En dehors des ouvertures, de gros blocs de tuf remplissent les travées délimitées par les pièces de bois. Ceux-ci sont taillés de façon à déborder au-dessus des pièces horizontales, c’est-à-dire la sablière de chambrée et le cordon. Cette protection permet d’éviter la stagnation de l’eau et le pourrissement du bois. En haut, la sablière de toit reçoit les solives des combles. La dégradation de certaines pièces de bois laisse apparaître les assemblages à mi-bois et à tenons et mortaises, maintenus à chaque fois par des chevilles. Le décor mouluré apparaît à l’observation détaillée de chaque pièce. Il est visible en premier lieu aux abouts des corbeaux et des solives de l’étage mais également sur le cordon régnant souligné par un large chanfrein. Au-dessous, les poteaux sont traités comme des consoles supportant la grande pièce horizontale. Les bois qui encadrent les ouvertures sont adoucis par un large chanfrein amorti en bas par des congés en biais. Enfin, les solives des combles sont moulurées d’un profil arrondi, comme celles de l’étage. Le mur pignon ouest montre le profil aigu de la toiture et la rupture de pente dans sa partie inférieure. Ici apparaît encore la reprise de maçonnerie attribuable à la troisième phase et la petite tourelle qui s’élève vers l’arrière. Le mur bâti côté jardin a été très repris ; il laisse cependant apparaître un appareil de moellons non équarris qui contraste avec la maçonnerie plus soignée des deux premières phases de construction.
L’intérieur, partiellement en travaux, a livré quelques indices intéressants. Au rez-de-chaussée, le mur de façade montre plus clairement les embrasures de trois ouvertures médiévales reprises lors de la troisième phase. La construction de la façade arrière se poursuivant sur la maison voisine laisse penser que le regroupement des deux parcelles a été effectué également à cette époque. L’escalier placé contre le mur ouest est récent, mais c’est ici que se trouvait sans doute le premier degré, plus étroit et calé entre deux solives, dans le prolongement de la porte qui s’ouvrait là. Le premier étage montre clairement la mise en place du pan de bois (fig. 4). Celui-ci est accroché aux têtes de murs, dont l’une appartient à la maison voisine. Une poutre de près de 10 m d’envergure a été également ancrée dans ces maçonneries pour servir de support aux solives des combles et à la charpente située au-dessus. Celle-ci permet de reporter le poids de ces structures sur les têtes de murs : nous sommes donc bien en présence du second type décrit par Gilles Séraphin. L’observation du plafond a montré que la plus grande partie des solives est en place, elles portent encore les traces des ais d’entrevous qui les reliaient le long des murs.
La charpente de toiture est également contemporaine des solives et du pan de bois auxquels elle est liée. Il s’agit d’une charpente à chevrons formant ferme, équipée de coyaux pour soutenir la rupture de pente. Les pièces sont assemblées à tenon et mortaise et solidement maintenues par des chevilles.
L’exemple de la maison dite d’« Arcambal » illustre bien le système des « pans de bois à pile porteuse », bien que la grande portée de la poutre n’ait pas nécessité de support intermédiaire. En effet, il n’y a de pile que si la maison occupe une parcelle d’angle ou si la largeur de la façade est trop importante pour la portée d’une seule poutre, comme le montrent par exemple les vestiges de la maison de la rue Droite. Ce n’est donc pas la pile qui constitue la caractéristique principale de ce système de construction mais bien la poutre, pièce capitale, qui permet de reporter le poids sur les structures maçonnées : têtes de mur et, selon les cas, pile ou autre support intermédiaire.
Anne-Laure NAPOLÉONE
1. Gilles Séraphin, « Le pan de bois au Moyen Âge dans la France méridionale : premières esquisses typologiques », dans La maison au Moyen Âge, Actes de la session d’Université d’été 2003 organisée par Via Patrimoine sous la dir. de Pierre Garrigou Grandchamp, numéro spécial du Bulletin de la Société Archéologique et Historique de la Charente, 2006, p. 241-255.
2. Id.
3. Id.
4. Voir notre article sur la construction en pan de bois dans les actes du colloque de Cahors (juillet 2006), La maison au Moyen Âge dans le Midi de la France, t. 2, numéro spécial des M.S.A.M.F. (à paraître).
5. Je remercie Anaïs Charrier et Laure Corneille pour l’aide précieuse apportée sur le terrain.
6. Voir en particulier le travail de maîtrise sur Martel de Virginie Ferrat (non soutenu) et l’inventaire effectué par Maurice Scellès et Gilles Séraphin sur le département du Lot.
7. Nous tenons à remercier Mme Guély pour nous avoir spontanément et rapidement communiqué la documentation historique qu’elle avait déjà amassée sur cet édifice.
La Présidente
remercie Anne-Laure Napoléone pour cette démonstration tout à fait imparable
qui conduit à souhaiter qu’une analyse de dendrochronologie apporte sans
tarder une datation de l’étage de la maison.
À Patrice
Cabau qui voudrait avoir des précisions sur le jet-d’eau qui protège la pièce
de bois placée à hauteur d’appui, Anne-Laure Napoléone répond que les
blocs de tuf sont entaillés de manière à laisser le passage des poteaux. La
Présidente demande si le tuf est fréquemment employé à Martel. Anne-Laure
Napoléone connaît une deuxième maison à hourdis de tuf, mais elle rappelle
que peu de maisons médiévales ont conservé leurs pans-de-bois.
Patrice Cabau
ayant demandé des précisions sur le premier état de la maison, Anne-Laure
Napoléone explique que l’on ne connaît de celui-ci que les vestiges
observables en rez-de-chaussée. Le pan-de-bois de l’étage, qui correspond au
deuxième état, est réalisé alors que l’on annexe la maison voisine. Elle
ajoute que le débord de l’étage est en effet de 1,20 m à 1,40 m ; cet
important débord nécessite des solives rapprochées.
SÉANCE DU 9 JANVIER 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint,
Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Watin-Grandchamp, MM. Bordes,
Julien, Peyrusse, Pradalier, Mgr Rocacher, MM. Roquebert, Tollon, membres
titulaires ; Mmes Andrieu, Barber, Bayle, Fraïsse, Friquart,
Fronton-Wessel, Guiraud, Jaoul, Jiménez, Krispin, MM. Barber, Burroni, Mattalia,
Surmonne, membres correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur.
La Présidente annonce à la Compagnie la disparition du professeur Marcel Durliat :
« J’ai la très grande tristesse de vous annoncer le décès du professeur Marcel Durliat le lendemain de Noël. Ses obsèques ont eu lieu dans l’église de Toulouges, dans ce Roussillon qu’il aimait tant et où il avait passé les années les plus heureuses de sa vie, les années de jeunesse. Marcel Durliat était membre de la Société archéologique du Midi de la France depuis 1954, membre honoraire depuis 1998. Bien que n’ayant jamais écrit dans nos Mémoires, il suivait nos travaux avec intérêt et se réjouissait de nous lire.
Né dans le territoire de Belfort, en 1917, orphelin de père, il a été élevé par une mère méritante et très aimée ; découvert, comme Albert Camus, par ses instituteurs, il fut poussé par eux à faire des études, dans un milieu où l’on n’en faisait pas. L’école normale, puis l’École Normale Supérieure de Saint-Cloud le conduisirent à l’agrégation d’histoire, passée en 1945. Après l’agrégation, ce fut le lycée de Perpignan, la découverte du Midi pour cet Alsacien, découverte du soleil, de l’histoire de l’art, de Barcelone et des arbres en fleurs de Majorque. Il entreprit un minutieux inventaire de La sculpture romane en Roussillon, publié en quatre tomes entre 1948 et 1954, véritable feuilleton dont chaque volume était attendu avec impatience et qui le fit immédiatement connaître du monde universitaire. Dès 1950, il participe au Congrès de Montpellier, de la Société Française d’Archéologie, et organise en 1954 celui du Roussillon. Les fonctions de Conservateur des Antiquités et Objets d’art des Pyrénées-Orientales le poussent à élargir à l’art gothique et à l’époque moderne son champ d’intérêt. La publication des Arts Anciens du Roussillon en 1954, ouvrage irremplaçable pour tous ceux qui travaillent sur l’art catalan, montre son éclectisme ainsi que les deux thèses qu’il dirigera sur les retables du XVIIe et du XVIIIe siècle en Roussillon. Le séjour en Roussillon est l’époque de la thèse, L’art dans le Royaume de Majorque, faite sous la direction d’Ėlie Lambert, publiée chez Privat en 1962. En bon historien, il dépouille les archives de Majorque et fait de très nombreuses découvertes sur le terrain, qui sont à l’origine de son intérêt pour le gothique dans le Midi. Plusieurs de ses étudiants ont, par la suite, en prenant sa thèse comme livre de chevet, repris cette voie. Le temps de la thèse, c’est celui de l’amitié avec Sylvain Stym-Popper, architecte en chef des Monuments Historiques, « le plus parfait des amis » dira-t-il par la suite, et dont la mort tragique dans un accident de voiture le laissera blessé. De cette amitié et de l’étroite collaboration nouée sur les chantiers du palais des Rois de Majorque et des Jacobins de Toulouse est né son goût pour le XIXe siècle, ce siècle de la redécouverte du Moyen Âge, sur lequel il fera faire par la suite une thèse et nombre de DEA à ses étudiants toulousains.
La mort de Raymond Rey lui ouvrit en 1958 les portes de l’Université de Toulouse et le poste de professeur d’histoire de l’art médiéval. Les étudiants tardèrent à venir à ses cours, impressionnés par la rigueur scientifique et l’exigence d’un professeur qui faisait peur. Il avait la réputation d’être terrible. Après les sept premiers auditeurs libres, les étudiants poussèrent enfin la porte à tambour de la salle d’histoire de l’art du 56, rue du Taur. Son cours n’était alors qu’une option dans un certificat d’histoire médiévale, et les plus téméraires s’accrochèrent, et ne repartirent plus, découvrant avec passion un monde enchanté dont Marcel Durliat était le Maître. On revenait d’année en année, subjugués par un enthousiasme communicatif, par une passion profonde, une pédagogie hors pair et un goût profond pour la beauté. Les cours, le séminaire, drainèrent un groupe de plus en plus nombreux, lié par une admiration commune et par des excursions mémorables qui nous jetaient chaque année, au moment de la Pentecôte, sur les routes de la Provence romane, de la Catalogne, du Val d’Aran, de l’Aragon. Une dizaine d’enseignants à l’Université, deux à l’École des Beaux-Arts, un à l’Institut Catholique, des conservateurs de Musée, des conservateurs de l’Inventaire et des Monuments Historiques, sont issus de ce groupe des élèves de Marcel Durliat, et leur vocation est née de l’avoir connu. Beaucoup sont ici, à la Société archéologique du Midi de la France.
La période toulousaine, qui dura jusqu’à la retraite, en 1979, puisque Marcel Durliat refusa à trois reprises les postes parisiens qu’on lui proposait, fut une période d’intense travail, mené jusqu’aux limites d’une santé souvent fragile. Membre de la Commission Supérieure des monuments Historiques et du Comité National des Universités, enseignant à l’École de Chaillot, membre correspondant de l’Institut, il se rendait régulièrement à Paris, tout en participant à de nombreux colloques et en entraînant avec lui ses élèves. Il dirigeait alors toutes les thèses qui se faisaient dans les universités au sud de la Loire. Marcel Durliat dirigea en particulier un groupe de thèses portant sur le XIe siècle qui ont complètement renouvelé l’approche de cette période mal connue des débuts de l’art roman.
Après avoir animé les Journées romanes de Cuxa, il organise désormais tous les congrès de la Société Française d’Archéologie tenus dans le Midi : en 1970 la Gascogne, en 1973 les Pays de l’Aude, en 1975 le Velay, en 1982 l’Albigeois. Paraissent en même temps ses ouvrages majeurs : le Roussillon roman dans la collection Zodiaque en 1958, suivi des Pyrénées romanes et du Haut-Languedoc roman, puis L’art roman et Des Barbares à l’An Mil dans la collection Mazenod, un Saint-Sernin de Toulouse chez Éché. En 1990 il publie enfin un beau livre qui fait la synthèse de sa réflexion et de son enseignement : La sculpture romane de la route de Saint-Jacques. De Conques à Compostelle. Ce ne sont là que les titres principaux ; lorsqu’il accepta, pour ses 75 ans d’être honoré par un volume de Mélanges, De la création à la restauration, lui qui refusait les honneurs et les distinctions, sa bibliographie comptait 414 entrées. Il ne cessa d’écrire qu’au cours de ces dernières années, envoyant régulièrement des comptes rendus à différentes revues.Je garde en mémoire d’innombrables lettres écrites d’une petite écriture appliquée, envoyées le jour même en réponse à nos demandes, et l’image d’un homme frêle, mais d’une tension vibrante, les cheveux en brosse sur un visage raviné, le regard intense et le sourire accueillant. Je garde surtout le souvenir d’une grande bonté et d’une constante attention aux autres. »
Michèle Pradalier indique qu’une messe du souvenir sera célébrée en l’église du couvent des dominicains le samedi 13 janvier.
Louis Peyrusse exprime son plein accord le portrait du professeur Marcel Durliat évoqué par notre Présidente. Nous serons nombreux à conserver sa mémoire, mais nous nous devons de laisser une mémoire de papier. Louis Peyrusse propose de regrouper nos souvenirs pieux en un petit mémorial pour dire l’homme extraordinaire que Marcel Durliat a été pour nous tous, le pédagogue sans doute, mais pas seulement. Observant que la mémoire des grands professeurs s’efface en effet très vite, la Présidente souscrit au projet de rassembler les témoignages pour rappeler tout ce que l’on doit à cet enseignement des années 1970, donné par un homme qui s’est intéressé à toutes les techniques, à tous les domaines et à toutes les périodes. La discussion qui s’ensuit permet d’évoquer différents aspects de la personnalité de Marcel Durliat et de préciser le projet de publication. Décision est prise d’y travailler sans tarder.
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 19 décembre, qui est adopté à l’unanimité. Pour compléter son compte rendu de la visite de l’Hôtel de Boisson-Cheverri, Guy Ahlsell de Toulza propose de fournir des photographies.
La correspondance manuscrite comprend de nombreux vœux pour la nouvelle année, dont ceux de notre confrère Gabriel Manière.
Des dons
viennent enrichir notre bibliothèque :
- Quitterie
Cazes, « L’abbatiale de Conques, genèse d’un modèle architectural
roman », dans Les cahiers de Saint-Michel de Cuxa, XXXVII, 2006, p.
103-116 (don de l’auteur) ;
- B.
Pousthomis et Sandrine Conan, « Espelette (Pays basque) : découverte
d’une fosse médiévale », dans Résidences aristocratiques, résidences
du pouvoir entre Loire et Pyrénées, Xe-XVe siècles,
actes du colloque de Pau, 3-5 octobre 2002, p. 413-414 (don de S. Conan) ;
- Christian Rémy,
Patrice Conte et Sandrine Conan, « Châlucet (Haute-Vienne) :
organisation de l’habitat castral et expressions du pouvoir », dans Résidences
aristocratiques, résidences du pouvoir entre Loire et Pyrénées, Xe-XVe
siècles, actes du colloque de Pau, 3-5 octobre 2002, p. 253-290 (don de S.
Conan) ;
- Letters, orders and
musters of Bertrand du Guesclin, edited by Michael Jones, The Boydal Press,
Woodbridge, 2004, 415 p. (don de Pierre Garrigou Grandchamp).
La parole est à Pascal Julien pour une communication intitulée Gervais Drouet et le retable majeur de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse (1662-1667) : l’honneur d’un sculpteur, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Pascal Julien de cette étude très précise qui réhabilite ce qui
apparaît en effet comme un grand sujet, malheureusement bien mal servi par l’état
actuel du maître-autel. A-t-on une idée de ce qui a précédé ? Pascal
Julien rappelle que le tombeau de Bertrand de L’Isle a fondu dans l’incendie
de 1609 et que les colonnes de laiton qui supportaient l’autel ont été
vendues dans les années 1670 ; mais, à vrai dire, on ne sait que très
peu de choses.
Répondant à
une question de Patrice Cabau, Pascal Julien rappelle que Daniel Cazes a publié,
le premier, des documents concernant des travaux de restauration effectués au
XIXe siècle ; quelques recherches complémentaires restent sans
doute à faire aux Archives nationales.
Louis
Peyrusse s’intéresse aux faces grimaçantes des lapidateurs, qui s’opposent
au visage de saint Étienne. Pascal Julien parle de leur bestialité très rude.
Pour Bruno Tollon, s’il est clair que Gervais Drouet a sculpté son groupe en
privilégiant un point de vue un peu éloigné, la question du sens qu’il faut
donner à ces caricatures subsiste.
En réponse
à une question de Bruno Tollon, Pascal Julien précise que la pierre, le marbre
et le stuc sont employés conjointement par Gervais Drouet dans son groupe
sculpté. Comme Bruno Tollon l’interroge sur un éventuel contrat concernant
la maquette du retable, Pascal Julien dit que nous n’en avons aucune
indication, peut-être en raison des lacunes importantes que présentent les
registres du notaire de Drouet pour ces années-là.
Bruno Tollon
pense que notre confrère a raison d’insister sur la double signature du
retable et du groupe sculpté : la nuance qui est marquée par F(ECIT) pour
Mercier et INVENIT pour Drouet doit être soulignée. Pascal Julien ajoute que
les deux hommes ont continué à travailler ensemble. Au moment où est réalisé
le retable de la cathédrale de Toulouse, Gervais Drouet est occupé au très
gros chantier du jubé d’Auch ; dès que le jubé d’Auch est achevé,
il soumissionne pour Saint-Sernin.
Guy Ahlsell
de Toulza voudrait connaître les arguments qui ont été avancés pour refuser
les sculptures des niches. Pascal Julien cite les deux appréciations qui ont été
invoquées : la première se contente d’affirmer qu’elles « ne
peuvent servir », la seconde qu’on ne peut les garder parce qu’elles
sont disproportionnées ; quant à ce qu’elles sont devenues, nous n’en
savons rien.
Patrice Cabau
note qu’à côté des diverses qualités de marbre sont employées de la
pierre grise et de pierre blanche et il demande si l’on en connaît la
provenance. Faute de disposer des contrats, Pascal Julien ne peut que supposer
qu’elles proviennent des Pyrénées. Dominique Watin-Grandchamp croit savoir
que la pierre grise proviendrait de l’Aude.
Maurice Scellès
dit qu’une visite faite en vue de la communication de ce soir lui a donné
l’occasion de constater une fois de plus l’état affligeant de la cathédrale
de Toulouse. Dès l’entrée on est saisi par la tristesse qui se dégage de la
grisaille ambiante, de l’architecture comme des œuvres d’art qui s’y
trouvent. Nous donnons aux visiteurs français et étrangers une bien piètre
image de l’attention que nous portons à notre patrimoine.
Le constat peut malheureusement être confirmé et précisé. L’inventaire du
mobilier réalisé tout récemment confirme l’état de dégradation de
nombreux objets. Au manque d’entretien s’ajoutent des dégradations
volontaires et des vols fréquents. La cathédrale de Toulouse souffre évidemment
de la disette budgétaire actuelle. Mais pourquoi ne pas faire à Saint-Étienne
ce qui se fait dans d’autres cathédrales de France qui bénéficient de la présence
de gardiens et de stands du Centre des monuments nationaux ?
Au titre des questions diverses, Nicole Andrieu présente à la Compagnie un tableau attribuable à Ambroise Frédeau découvert dans l'église de Deyme (canton de Montgiscard, Haute-Garonne) :
Depuis quelques années, la Conservation des antiquités et objets d’art de Haute-Garonne apporte son aide aux étudiants en histoire de l’art qui choisissent des sujets de recherches sur le mobilier des églises du département. C’est ainsi qu’en 2004, nous avons travaillé avec Sophie Duprat qui souhaitait faire un inventaire des peintures des XVIIe et XVIIIe siècles dans le canton de Montgiscard et qui a obtenu une mention très bien pour son mémoire rendu en 2005.
Après un premier semestre consacré à un inventaire des églises et à des recherches en archives et en bibliothèques, elle a pu faire un stage d’été au Service régional de l’Inventaire auprès de Xavier-Philippe Guiochon, conservateur du patrimoine, spécialiste du mobilier. Le 15 juillet, nous sommes retournés à Deyme, accompagnés de Jean-François Peiré, photographe de la D.R.A.C., qui, montant au clocher, a découvert ce tableau.Haut de 0,85 m et large de 1,05 m, il est constitué d’une toile assez épaisse, tendue sur un châssis à écharpes et traverse d’essence résineuse, non chanfreiné. Le châssis est constellé de trous d’envol de vrillettes et très fragilisé. La toile montre plusieurs déchirures le long du cadre, dues probablement à des chocs ou des gravats amassés. Dans la partie inférieure, un fragment de toile peinte semble avoir été collé pour maintenir les déchirures de la base. Le cadre est cloué sur la face du tableau.
La couche picturale est composée d’une couche colorée assez épaisse sur une préparation à base d’argile ocre rouge. Les vernis sont très chancis, jaunis et altérés. (Les précisions techniques sont tirées du devis fait par l’Atelier Meyerfeld – Florence Meyerfeld, Jérôme Ruiz – à la demande de la conservation départementale des Antiquités et Objets d’Art.)Le tableau représente la Vierge Marie assise tendant l’Enfant Jésus vers un vieillard agenouillé à sa gauche. Un homme est assis en retrait à la droite de la Vierge. Le vieillard vers lequel l’Enfant Jésus tend les bras peut être identifié comme saint Antoine de Padoue ou saint Félix de Cantalice. L’homme plus jeune, en arrière de la Vierge, semble être un donateur. Le Vierge porte une robe rouge et un manteau blanc ; l’homme attentif derrière elle est vêtu d’un habit à grand col blanc largement ouvert et d’un manteau drapé rouge. Son visage est proche de celui de saint Augustin dans la toile Saint Augustin présentant son cœur à 1’Enfant Jésus d’Ambroise Frédeau (Musée des Augustins), de même que le visage et l’expression de l’Enfant, ou celui de la Vierge.
L’état actuel du tableau ne facilite pas l’attribution à un peintre, mais le rapprochement avec plusieurs œuvres d’Ambroise Frédeau, comme l’a confirmé Jean Penent, conservateur du Musée Paul-Dupuy, reste troublant.Nicole ANDRIEU
La Présidente
remercie Nicole Andrieu de nous avoir fait part de cette découverte, et elle
souligne la qualité du visage de la Vierge. Il faut espérer que son nettoyage
permettra d’en savoir un peu plus sur ce tableau. Nicole Andrieu indique que
le devis est établi ; la commune s’est d’ailleurs engagée dans un
programme qui permet la restauration d’une œuvre chaque année.
Guy Ahlsell
de Toulza et Henri Pradalier s’interrogent sur la représentation de saint
Antoine. Maurice Scellès exprime quelques réserves quant aux rapprochements
proposés avec des œuvres d’Ambroise Frédeau. Pascal Julien propose de voir
dans ce tableau un ex-voto qui aurait pu être offert à l’occasion d’une
naissance, le donateur étant représenté à l’arrière-plan.
Pascal Julien attire à son tour l’attention sur l’état déplorable du château de Lacroix-Falgarde. Une série de photographies permet à la Compagnie de juger des importantes déprédations subies par l’édifice. Les travaux sont actuellement arrêtés, l’édifice a été revendu et un nouveau permis de construire aurait été déposé.
SÉANCE DU 23 JANVIER 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint,
Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Cazes, Napoléone, Watin-Grandchamp, MM.
Bordes, Boudartchouk, Julien, Lassure, Peyrusse, Pradalier, Tollon, membres
titulaires ; Mmes Barber, Bayle, Jaoul, Jiménez, Watin-Grandchamp, MM.
Barber, Mattalia, Molet, membres correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur, Mmes Andrieu, Balty, Fournié, Friquart,
Krispin, MM. Balty, Darles, Garland, le Père Montagnes, M. Surmonne.
Au nom de notre Société, la Présidente complimente François Bordes, reçu docteur après une brillante soutenance de thèse qui lui a valu la mention très honorable avec les félicitations du jury. Des applaudissements saluent notre confrère.
La Présidente rend compte de la correspondance manuscrite. Mme Hiromi Haruna-Czaplicki présente sa thèse au concours de notre Société. Sollicité par la Présidente, François Bordes accepte d’en être le rapporteur.
Notre bibliothèque s’enrichit de l’ouvrage Abbaye Sainte-Marie de Lagrasse. Chanoines Réguliers de la Mère de Dieu, Imprimerie Saint-Amand-Redond, 2006, 48 p., offert par les auteurs.
La Compagnie
se constitue en assemblée générale.
La Présidente
présente le rapport moral de l’année 2006. Puis elle donne la parole à
Bernadette Suau qui dresse l’état de l’avancement du récolement de la
bibliothèque et des archives, de la restauration des ouvrages et de
l’informatisation des fichiers. Le Trésorier présente le rapport financier
de l’année 2006.
Le rapport
moral est adopté et quitus est donné au Trésorier pour sa bonne gestion. On
procède aux élections statutaires. Daniel Cazes, Guy Ahlsell de Toulza et
Patrice Cabau sont réélus respectivement aux fonctions de Directeur, de Trésorier
et de Secrétaire-adjoint.
La parole est alors à Lisa Barber et Michèle Pradalier-Schlumberger pour une communication sur Notre-Dame-du-Clocher et le clocher de Noguès à Lescure, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
Pour
la datation des parties supérieures du clocher, Louis Peyrusse évoque celui,
tout à fait comparable, de Saint-Porquier, dans le Tarn-et-Garonne, qui est
achevé au XVIIe siècle.
Maurice
Scellès ayant demandé si le premier niveau n’était pas à l’origine un
porche ouvert, Michèle Pradalier confirme que les arcs aujourd’hui aveugles
des côtés nord et ouest étaient probablement libres, mais ils auraient été
très vite fermés. Guy Ahlsell de Toulza observe qu’il ne s’agit pas
d’arcs formerets et que les arcades étaient donc ouvertes.
Michèle
Pradalier souligne que les seuls éléments de datation dont nous pourrions
disposer sont les congés des moulures et la clef de voûte, dont le graphisme
est cependant difficilement datable avec précision et qui, en outre, a pu être
remplacée.
Comme
Maurice Scellès considère que la couleur et le format de la brique sont en
faveur de l’époque moderne, Quitterie Cazes juge qu’il faut sur ce point être
plus prudent.
À
propos du fragment de sculpture en terre cuite, François Bordes rappelle que la
fabrique Giscard est déjà spécialisée dans la production de décors d’église
dans les années 1880. Des albums existent qui permettraient peut-être
d’identifier ce fragment. Répondant à une question de Quitterie Cazes, Lisa
Barber dit avoir recherché en vain des registres de fabrique ; comme François
Bordes l’interroge sur les registres paroissiaux, elle ajoute que ceux-ci
mentionnent en effet des sépultures mais sans préciser le lieu d’inhumation.
Bernadette
Suau demande si des travaux de sauvegarde du clocher sont prévus. Lisa Barber
indique qu’une association s’en préoccupe en relation avec la municipalité ;
on sait que cela sera cher mais on cherche les solutions.
Au
titre des questions diverses, Guy Ahlsell de Toulza présente à la Compagnie
des séries de photographies qu’il commente.
La
première montre l’autel majeur de Rabastens, dont les angelots en marbre de Carrare
viennent d’être volés. Les sculptures ont été arrachées en début d’après-midi,
probablement avec un simple pied-de-biche car elles n’étaient que collées
aux angles de l’autel. Le lendemain les voleurs opéraient à la cathédrale
de Lavaur.
La deuxième série
illustre la visite de notre confrère à l’Hôtel de Boisson-Cheverri.
La dernière
complète notre information sur l’état actuel du château de Lacroix-Falgarde, dont les travaux ont été interrompus après le décès subit
du propriétaire. Pour Louis Peyrusse, il faut sans attendre alerter l’opinion
en faisant passer un article dans La Dépêche du Midi ou L’Auta ;
la Présidente propose que le texte en soit élaboré par le Bureau.
Quant à l’Hôtel de Boisson-Cheverri,
Louis Peyrusse voudrait connaître la raison de la surélévation des sols. François
Bordes suppose que c’est pour pouvoir passer les gaines techniques.
Jean-Luc Boudartchouk rend compte de l’article d’Anne-Véronique Gilles-Raynal, « Le dossier hagiographique de saint Saturnin de Toulouse », Beihefte der Francia, Band 65, Miracles, vies et réécritures dans l’Occident médiéval, Sources hagiographiques de la Gaule, XII, 2006, p. 341-407 :
Dans ce long, dense et rigoureux article, l’auteur présente, sous une forme normalisée, l’intégralité du dossier hagiographique de Saturnin de Toulouse. On y trouve notamment, outre une bibliographie détaillée, les références de tous les manuscrits contenant une ou plusieurs vitae de l’évêque. Ces vitae sont classées par ordre chronologique en quatre familles principales : la classique « Passio antiqua » dans ses différentes variantes ; la « Passio interpolata », texte demeuré inédit ; les « Gesta Saturnini », œuvre peu diffusée ; la longue « Passion rimée ». La première, un document élaboré à Toulouse, fait l’objet d’une analyse extrêmement détaillée qui débouche sur des propositions de datation précises : le récit de la vie et du martyre date de la fin du IVe siècle ou de l’époque d’Exupère, le récit de translation du corps de 406-407 et la rédaction du texte sous sa forme achevée du milieu du Ve siècle. La seconde, qui procède d’un « enrichissement » de la « Passio antiqua » à l’aide d’épisodes du martyre de Potitus, aurait été élaborée hors de Toulouse, avant 900. La troisième vita, d’origine gasconne (Auch ?) et qui prend nettement plus de libertés au regard du récit originel, porte une date : 900. Enfin la « Passion rimée », récit interminable autant que soigné, aurait été rédigée à l’instigation de l’évêque Agius de Narbonne (912-926), puis encore amplifiée par Borellus. L’auteur conclut sur le caractère historique du récit originel, qui fut respecté jusqu’au IXe siècle avant d’être transformé dans le but de servir les intérêts d’Églises locales.
La Présidente remercie Jean-Luc Boudartchouk de ce nouvel ajout à un dossier toujours ouvert.
Quitterie Cazes signale la parution, tant attendue, de la thèse de Jacqueline Caille sur Notre-Dame la Daurade. Il s’agit d’un ouvrage fondamental pour Toulouse et elle engage les membres de notre Société à l’acquérir, en insistant sur le fait qu’il est important de soutenir ce type de publication.
SÉANCE DU 6 FÉVRIER 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, M. Scellès, Secrétaire général, Mme
Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes
Napoléone, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, M. Julien, le Père Montagnes,
MM. Peyrusse, Pradalier, Prin, Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes
Andrieu, Balty, Barber, Bayle, Friquart, Krispin, MM. Balty, Burroni, Le
Pottier, Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Cabau, Secrétaire-adjoint,
Mmes Cazes, Jaoul, MM. Barber, Bordes, Garland, Stouffs.
Invités : Mlle Myriam Tessariole, M. Floréal Daniel.
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 9 janvier, qui est adopté.
La Présidente annonce que nous avons une nouvelle candidature pour le concours de notre Société : Mlle Catherine Rigeade présente son travail sur Les sépultures de catastrophe : approche anthropologique des sites d’inhumation en relation avec des épidémies de peste, des massacres de population et des charniers militaires, thèse de doctorat, Université de la Méditerranée (Marseille)-Université de Turin, décembre 2006, 236 p. Maurice Scellès propose de demander le rapport à Jean Catalo.
Notre bibliothèque a reçu un don de Bonnie Effros, Merovingian Mortuary, Archaeology and the Making of the early Middle Age, University of California Press, 273 p.
Parmi les échanges, ce sont cinq volumes du Musée archéologique de Barcelone qui sont plus particulièrement signalés :
-
I Jornades Hispànicas d’Història del Vidre, Actes, Museu d’Arqueologia
de Catalunya, Barcelona, Monografies 1, 2005, 399 p. ;
- La difusió de la Terra Sigillata sudgàl-lica al nord d’Hispània,
Museu d’Arqueologia de Catalunya, Barcelona, Monografies 6, 2005, 244 p.
;
- Artefax, engineria
romana a Hispània, Museu d’Arqueologia de Catalunya, Barcelona, del 9
d’octubre de 2006 al 5 de februar de 2007, 130 p. ;
- Peinando la muerte,
rituales de vida y muerte en la prehistoria de Menorca, Museu d’Arqueologia
de Catalunya, Barcelona, del 9 de febrero al 28 de mayo de 2006, 108 p. ;
- Jesús Caldón, Antinous o la història circular, Museu d’Arqueologia
de Catalunya, Barcelona, 2006, 29 p. + pl.
La Présidente donne la parole à Virginie Czerniak et Myriam Tessariole pour une communication sur Le décor peint et la polychromie du portail occidental de la cathédrale Saint-Étienne de Cahors, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie les deux oratrices de cette démonstration très solidement étayée,
dont les résultats s’avèrent extrêmement intéressants. Le décor sculpté
du portail reste néanmoins problématique, avec des motifs qui seraient très
précoces dans les années 1280-1290 et pour lesquels on ne peut donc exclure
qu’ils aient été repris. Virginie Czerniak souligne à son tour que si les
feuillages naturalistes ne surprennent pas pour ces années-là, d’autres éléments
du décor paraissent très « fantaisistes ».
Michèle
Pradalier-Schlumberger s’intéresse ensuite à l’apparition et au développement
de ces portails peints, dont plusieurs exemples sont connus dans le Midi de la
France. Les exemples les plus proches sont bien sûr ceux des Cordeliers de
Toulouse et de la cathédrale de Rieux-Volvestre ; la dorure, qui y est également
employée, semble à la mode depuis la première moitié du XIVe siècle.
Louis
Peyrusse voudrait savoir si ce sont des comparaisons avec des enluminures de
manuscrits qui permettent de dater le décor peint des années 1290. Après
avoir résumé les arguments qui ont prévalu depuis le XIXe siècle
en faveur d’une attribution des peintures à l’épiscopat de Guillaume de
Labroue (1317-1324), et pour cela placées dans l’influence avignonnaise,
Virginie Czerniak dit que le style et la composition des scènes se retrouvent
dans des œuvres septentrionales des années 1290 ; elle propose donc de
situer le décor vers 1300.
Maurice Scellès
rappelle les raisons qui les ont conduits, Gilles Séraphin et lui-même, à
dater le massif occidental des années 1280. Pour ce qui est des fleurs de lys,
on peut douter qu’il s’agisse des armes de France, car il n’y a,
semble-t-il, aucune raison pour que le roi soit inscrit au portail de la cathédrale.
Le fait qu’elles soient recouvertes de feuilles d’étain, et donc
d’argent, exclurait cette hypothèse. Maurice Scellès fait remarquer que des
fleurs de lys sur fond d’azur entourent également la clef de voûte du porche
central du massif occidental ; en outre, décrivant le tombeau de l’évêque
Raymond de Cornil, l’abbé Foulhiac mentionnait curieusement des fleurs de
lys.
Pour Henri
Pradalier, il faut se débarrasser de l’idée selon laquelle le Languedoc
imiterait les réalisations avignonnaises, alors qu’en ce qui concerne
l’architecture, il apparaît clairement que le processus est inverse. Puis il
demande si le minium est aussi employé pour les peintures des coupoles de la
cathédrale. Virginie Czerniak évoque les restaurations et dérestaurations déjà
anciennes qu’ont subies les peintures de la coupole ouest ; en revanche
un petit tympan peint de l’ancienne église Notre-Dame-des-Soubirous, qui n’a
jamais été analysé, comporte un rouge orangé qui pourrait bien être du
minium, et fournirait un autre exemple de son emploi à Cahors au XIIIe
siècle. Nelly Pousthomis fait état de minium utilisé dans la seconde moitié
du XIIIe siècle pour les peintures de l’enfeu mis au jour au grand
prieuré de Malte à Toulouse.
Henri
Pradalier voudrait avoir des précisions sur le blanc de céruse retrouvé sur
le portail et la calcite observée à l’intérieur. Myriam Tessariole suppose
que le blanc de céruse est une préparation plus adaptée à recevoir une
peinture à l’huile, et donc à un décor extérieur.
Nelly
Pousthomis évoque la possibilité que les fleurs de lys répondent à une mode.
Henri Pradalier observe qu’à la cathédrale de Cahors, la chapelle Notre-Dame,
de la fin du XVe siècle, est également ornée de fleurs de lys et qu’il
s’agit dans ce cas d’un décor marial. Pour Virginie Czerniak, l’hypothèse
pourrait être retenue, d’autant que le trumeau du portail était peut-être
destiné à recevoir une statue de la Vierge.
Pascal Julien
se demande si le dégagement du linteau n’aurait pas été effectué par
Sylvain Stym-Popper, et pour Louis Peyrusse, il pourrait s’agir d’une bonne
manière de l’architecte en chef des Monuments historiques envers Raymond Rey.
L’ordre du jour appelle la communication de Nicole Andrieu sur Un groupe sculpté de la première moitié du XVIe siècle, découvert dans l’église de Lauzerville (Haute-Garonne) :
En avril 2006, à l’occasion de travaux dans la chapelle nord de l’église Saint-Michel de Lauzerville, des sondages ont permis de trouver une fosse d’environ 1 m3 dans laquelle reposait un groupe sculpté en pierre ayant conservé une polychromie largement présente et vive. Les trois têtes, séparées des corps, étaient aussi dans cette fosse.
Ce groupe qui figure sainte Anne, la Vierge et l’Enfant Jésus, ou sainte Anne Trinitaire, thème né au XIVe siècle dans les pays germaniques, en Italie et en Espagne, rapidement diffusé à toute l’Europe occidentale, est constitué d’un monolithe de pierre calcaire à grain fin et homogène.
Les outils employés ont laissé des traces : ciseau plat, ciseau à dents, boucharde et trépan.
LAUZERVILLE, ÉGLISE SAINT-MICHEL, groupe sculpté : vue de face. Cliché A.D. Haute-Garonne.
LAUZERVILLE, ÉGLISE SAINT-MICHEL, groupe sculpté, détail : l'Enfant Jésus. Cliché A.D. Haute-Garonne.
LAUZERVILLE, ÉGLISE SAINT-MICHEL, groupe sculpté : détail de sainte Anne. Cliché A.D. Haute-Garonne.
La tête de sainte Anne est peut-être une partie rapportée dès l’origine : les plans d’assemblage et les percements pour les goujons ne présentent aucun bouchage ou rajout de matière. La tête de l’Enfant Jésus est réalisée dans un matériau plus tendre que la pierre du groupe. Cette tête a probablement été modelée avec un produit composé de poudre de pierre, de chaux et d’un liant non identifié. Elle ne présente aucune trace d’outils, mais les mêmes couches picturales que l’ensemble.
La tête de l’Enfant et celle de la Vierge ont été cassées au niveau du cou alors que celle de sainte Anne n’a été que détachée.
L’ensemble est recouvert d’une couche d’apprêt fine, de couleur ocre, permettant de masquer les défauts de la pierre et de la taille et de préparer la polychromie. Cette polychromie est celle d’origine, mais très fragile et très pulvérulente, du fait du long séjour sous terre.Sainte Anne et Marie sont assises sur un banc sculpté. Sainte Anne tient deux livres superposés sur ses genoux, les maintenant de sa main droite et tournant la page de la main gauche. Marie est assise à sa droite, maintenant l’Enfant Jésus qui semble s’élancer vers sa grand-mère, en prenant appui des pieds sur les jambes de sa mère.
Marie est figurée très juvénile, sa chevelure blonde et ondulée laissée libre dans le dos, et simplement coiffée d’un diadème. Sa robe est caractéristique de la mode française de cour de l’extrême fin du XVe siècle et du début du XVIe : décolleté carré, taille basse et appuyée, marquée par une ceinture précieuse, des manches bouffantes retenues par plusieurs liens, un manteau léger.
Sainte Anne est, elle, vêtue d’une robe dont on ne distingue qu’une partie du corsage et les larges emmanchures ; son visage est entouré d’une guimpe, la tête couverte d’un voile, et un vaste manteau drapé complète sa tenue.Sainte Anne et Marie sont en cela parfaitement conformes avec l’iconographie des innombrables Éducation de la Vierge présentes dans les églises de France. Mais la composition de ce groupe se rattache plutôt à la peinture comme peuvent en témoigner un vitrail d’une église de Champagne-Ardenne (Saint-Amand) daté de 1540 ou une peinture flamande datée de 1525 ( National Gallery de Londres).
Il est évidemment plus probable de rattacher ce groupe au courant des Vierges assises dans le cadre de l’Adoration des Mages, ou s’offrant à la vénération de donateurs, assez fréquent à la fin du XVe siècle et au début du XVIe, et dont l’un des modèles prestigieux est la Notre-Dame de Grasse du Musée des Augustins. Dans le catalogue récemment publié à l’occasion de la restauration de Notre-Dame de Grasse, Charlotte Riou montre les points communs et les divergences dans tout un groupe d’œuvres : il semble probable que, au moins pour l’attitude de l’Enfant et pour les draperies du vêtement de sainte Anne, associant des mouvements courbes, des plis anguleux et des souples replis étalés sur la base, on puisse parler d’influence directe.
L’état actuel du visage de la Vierge rend l’analyse difficile, mais il est bien ce visage encore enfantin un peu boudeur, avec des yeux en amandes, que l’on retrouve sur la plupart des Vierges de cette époque. La tête de sainte Anne est celle qui a le plus souffert : une partie du côté droit est détruite.L’histoire de l’église de Lauzerville ne contient rien concernant ce groupe, si ce n’est que l’église a été brûlée en 1570 par les Protestants : est-ce à ce moment que le groupe décapité a été enterré ?
Nicole ANDRIEU
La Présidente
remercie Nicole Andrieu de nous avoir présenté cette bien jolie découverte et
elle souligne la grande fraîcheur de la polychromie de ces sculptures.
Bernadette
Suau fait observer qu’il ne faut pas forcément attribuer de telles
mutilations aux guerres de Religion. Il arrive que la cessation d’un culte
rende une statue inutile, ou bien c’est son remplacement par une œuvre au goût
du jour. Et Bernadette Suau cite l’exemple qu’elle connaît, dans le département
de l’Eure, d’un saint Jacques décapité et enterré après son remplacement
par une nouvelle statue au XVIIIe siècle. Nicole Andrieu évoque
aussi les conséquences du Concile de Trente, après lequel certains cultes sont
considérés comme des dérives suspectes, dont celui de sainte Anne trinitaire.
En demandant
des précisions sur les conditions de la découverte, Nelly Pousthomis-Dalle
regrette que les travaux aient été faits sans surveillance archéologique,
nous privant ainsi de précieux renseignements sur le contexte de ce dépôt.
L’effort d’information doit être poursuivi afin que les municipalités et
les associations locales sachent à qui s’adresser en de pareilles
circonstances.
Au titre des questions diverses, la Compagnie poursuit l’examen du règlement intérieur en vue de sa nouvelle rédaction. Les articles 16 à 23 sont lus et discutés.
SÉANCE DU 27 FÉVRIER 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, M. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier,
Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes
Napoléone, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, M. Julien, le Père Montagnes,
MM. Peyrusse, Pradalier, Prin, Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes
Andrieu, Balty, Barber, Bayle, Friquart, Krispin, MM. Balty, Burroni, Le
Pottier, Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint,
Mmes Cazes, Jaoul, MM. Barber, Bordes, Garland, Stouffs.
Daniel
Cazes, conservateur en chef du musée Saint-Raymond, accueille les sociétaires
et rappelle les conditions dans lesquelles l’exposition La fragilité dans le temps. Le verre dans l’Antiquité
a été organisée au Musée Saint-Raymond. Il s’agit d’une exposition
préparée sous la direction de Teresa Carreras Rossell, commissaire de
l’exposition, et qui a été présentée au Musée d’Archéologie de Catalogne-Barcelone et au
Musée National Archéologique de Tarragone. Les pièces
proviennent de la collection du Musée d’Archéologie de Catalogne-Barcelone,
qui pratique depuis le XIXe siècle une politique très dynamique
d’achats à des collectionneurs particuliers, et certaines viennent également
de fouilles. Cela explique le très bon état de conservation des œuvres.
L’exposition réunit en outre des
verres provenant du Proche-Orient, d’Égypte, d’Asie Mineure, et ce sont en
général des pièces exceptionnelles, uniques par leur qualité.
La
préparation de l’exposition a été faite par des conservateurs catalans, aidés
par des chercheurs italiens. Elle est accompagnée par un catalogue publié en
catalan et elle sera présentée à Gérone, à La Coruña, puis en Italie et enfin au château
de La Granja.
Pascal Capus, attaché de conservation au Musée Saint-Raymond, présente ensuite l’exposition, expliquant en particulier les choix muséographiques très originaux : les pièces sont en effet exposées dans des « blocs vitrines » qui permettent d’observer les objets en verre, souvent petits, sur toutes leurs faces. L’exposition s’organise de manière chronologique autour de trois parties. La première expose de manière très pédagogique les origines du verre, objet de luxe et de parure issu de la faïence égyptienne. La seconde partie montre la popularisation du verre, à partir du Ier siècle avant J.-C., moment où est découverte la technique du soufflage et où l’on pratique le soufflage-moulage. Enfin on découvre dans la dernière partie l’évolution des modèles jusqu’au Bas-Empire et au début du Moyen Âge, avec en particulier l’apparition du verre à vitre, une des nouveautés de l’exposition.
SÉANCE DU 6 MARS 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint,
Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Watin-Grandchamp, MM. Bordes,
Lassure, Pradalier, Prin, Mgr Rocacher, MM. Roquebert, Testard, Tollon, membres
titulaires ; Mmes Friquart, Galés, Jiménez, Rousset, MM. Le Pottier,
Mattalia, Molet, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur, Mmes Barber, Cazes, Krispin, M. Barber, le
Père Montagnes, MM. Garland, Peyrusse.
La Présidente ouvre la séance et annonce la parution du volume 2005 de nos Mémoires.
Le Secrétaire général donne lecture des procès-verbaux des séances des 21 janvier et 6 février derniers, qui sont adoptés.
La correspondance imprimée comprend le programme du congrès du C.T.H.S. qui se tiendra à Arles les 16-21 avril 2007, et l’appel à communication pour le 58e congrès de la Fédération historique de Midi-Pyrénées, consacré à Toulouse, une métropole méridionale. Vingt siècles de vie urbaine, qui se tiendra dans notre ville les 14-16 juin prochains.
L’association des Amis de l’Hôtel d’Assézat nous adresse le n° 44 (mars 2007) de sa Lettre.
Plusieurs
dons viennent enrichir notre bibliothèque :
- Martine
Rieg, Restauration du retable de Saint-Martial, Entraygues (Corrèze),
dossier multigraphié (don de l’auteur) ;
- Gilbert
Imbert, Un lexique occitan de la construction, Bribes d’histoire,
s.l.n.d., 64 p. (don de l’auteur) ;
- Pascal
Julien, Marbres, de carrières en palais, Manosque, Éditions Le Bec en
l’air, 2006, 272 p. (don de l’auteur) ;
- François
Bordes, Formes et enjeux d’une mémoire urbaine au Bas Moyen Âge : le
premier « Livre des Histoires » de Toulouse (1295-1532), thèse
de doctorat nouveau régime, sous la direction de madame le professeur Michelle
Fournié, Université de Toulouse-Le Mirail, 2006, 5 volumes (don de
l’auteur).
Louis Latour signale l’arrivée d’environ un millier de cartes postales anciennes qui nous ont été cédées, contre la seule prise en charge des frais de port, par la Société des Antiquaires de Picardie, qui ne pouvait les conserver faute de place. Bernadette Suau confirme qu’il s’agit d’une collection dont l’intérêt est loin d’être nul.
L’ordre du jour appelle l’examen des rapports sur le concours.
Le Secrétaire général rend compte du rapport de Jean Catalo sur le mémoire présenté par Mme Catherine Rigeade, qui confirme l’impression que lui avait donnée la consultation rapide de ce mémoire : l’étude proposée au jury par Mlle Catherine Rigeade est un mémoire de thèse, présenté conjointement à l’Université de la Méditerranée et à l’Université de Turin, toutes deux universités des sciences. Le sujet se rapporte aux sépultures à inhumations dites « de catastrophe » analysées à partir d’un corpus de 49 sites de toutes époques et de tous pays. Seulement six de ces sites appartiennent au Midi de la France, ce qui ne permet pas de considérer cet ouvrage comme entrant dans le cadre du concours.
François Bordes présente son rapport sur la thèse de Mme Hiromi Haruna-Czaplicki :
« Mme Hiromi Haruna-Czaplicki a soutenu à l’Université de Toulouse-Le Mirail, en décembre 2006, une thèse portant sur Les manuscrits enluminés exécutés pour Bernard de Castanet, évêque d’Albi de 1276 à 1308, et la production du livre à Toulouse aux alentours de 1300, sous la direction de Michèle Pradalier-Schlumberger et de Henri Pradalier. Le jury était composé de Michèle Pradalier-Schlumberger, de Jean-Louis Biget, de Michelle Fournié et de Patricia Stirnemann, responsable de la section iconographique de l’Institut de Recherche et d’Histoire des textes qui le présidait.
Ce travail comprend 4 volumes : un volume de texte de 357 p. accompagné d’un volume de 82 p. regroupant la bibliographie sur le sujet, un volume d’annexes de 189 p. et un volume de 322 planches.
Il faut signaler en premier lieu tout le courage et la volonté de l’impétrante de rédiger et soutenir une thèse dans une langue étrangère, et convenir avec le jury que les imperfections de style ou de formulation n’enlèvent rien à la qualité du travail scientifique qui a été réalisé par cette étudiante.
Le sujet même de son étude porte sur l’analyse paléographique et décorative des 17 manuscrits copiés à la demande de l’évêque d’Albi Bernard de Castanet, et encore conservés aujourd’hui. Ces ouvrages réalisés entre 1291 et 1300 étaient des livres d’étude destinés à sa bibliothèque et dont il légua la plupart à celle des Dominicains de Toulouse. Ce type de manuscrit, beaucoup moins précieux que les exemplaires « de luxe » richement enluminés, ne comporte aucune scène historiée et est uniquement décoré d’initiales ornées sans dorure et d’initiales filigranées. Et ça n’est pas le moindre défi de Mme Hiromi Haruna-Czaplicki que de s’être attaquée à un champ d’investigation très neuf et encore peu documenté.
Le texte de son travail est organisé en trois parties. La première s’attache à cerner la personnalité et la carrière du commanditaire des manuscrits, l’évêque Bernard de Castanet, très lié au monde des Dominicains, et présente les manuscrits, leur contenu, leur datation et leur itinéraire jusqu’à nos jours. La doctorante y met en particulier en lumière les relations des copistes avec Moissac par l’identification d’un exemplar ayant servi à l’une des copies.
La deuxième propose une étude paléographique extrêmement fouillée de ces recueils, dans laquelle l’impétrante tente de discerner les différentes influences sur la graphie méridionale des écritures septentrionales ou italiennes, et en particulier bolognaises. Elle analyse pour ce faire toute la production toulousaine et régionale de livres liturgiques, de bibles, de registres laïques et de livres juridiques de ce tournant des XIIIe-XIVe siècles. Elle en conclut que ces copies furent certainement réalisées à Albi même, mais par des scribes de formation toulousaine.
Sa troisième partie, consacrée à la décoration des manuscrits de Bernard de Castanet, est certainement la plus riche et la plus novatrice. Après un historique de l’art de la lettre ornée et des éléments traditionnels de sa décoration, elle analyse en détail l’enluminure de ces recueils et de leurs marges. Elle arrive ainsi à identifier deux enlumineurs distincts, l’un qui ne décora qu’un manuscrit mais qui œuvra également pour un des missels des Dominicains de Toulouse à l’époque, et l’autre, moins expérimenté, peut-être élève du précédent, qui travailla sur les seize autres manuscrits de Castanet et sur un autre missel des Dominicains. L’un des apports essentiels de cette étude est la découverte d’un « motif toulousain », représentant « une tête ronde ; frontale et hilare, coiffée d’un bonnet conique et tirant la langue, qui est perchée au bout d’un long cou ondulé ou bouclé », motif qui semble avoir circulé entre Toulouse et Avignon dans les années 1310-1340.
La bibliographie, organisée de manière méthodique, représente une somme à elle seule et les annexes proposent des fiches extrêmement détaillées sur chacun des 17 manuscrits étudiés. Quant au volume de planches, il va devenir à l’évidence un corpus de référence pour les recherches futures dans ce domaine extrêmement pointu et encore naissant.
Pour conclure, Mme Hiromi Haruna-Czaplicki a produit ici un travail très précieux qui, au-delà des seuls manuscrits de Bernard de Castanet, nous introduit dans toute la production livresque de Toulouse et de sa région et nous montre l’originalité d’une école toulousaine de copistes, de filigraneurs et d’enlumineurs encore méconnue.
Pour toutes ces raisons, son œuvre pionnière mérite d’être récompensée par la Société archéologique du Midi de la France. »
La Présidente
fait procéder au vote : le prix de
Clausade est attribué à Mme Hiromi Haruna. Il est décidé de ne pas attribuer
le prix de Champreux.
La Présidente
regrette que les affiches placées à l’Université de Toulouse-Le Mirail
n’aient pas suscité d’autres candidatures. Elle constate qu’il
conviendrait de faire plus de publicité pour le concours et sans doute de
solliciter à nouveau les directeurs de recherche.
La parole est à Valérie Rousset pour une communication sur L’église Saint-Martin à Mayrinhac-le-Francal (Rocamadour, Lot), publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Valérie Rousset pour cette monographie très complète d’un édifice
intéressant à plusieurs titres. C’est en premier lieu, et malheureusement,
un rappel de la folie de la pierre à nu, qui a sévi dans les années 1970 :
un véritable cas d’école… Valérie Rousset confirme que les maçonneries
ont été entièrement rejointoyées au ciment. La Présidente remarque que les
éléments observables sont néanmoins suffisants pour autoriser une chronologie
tout à fait pertinente entre les parties pré-romanes et la construction
romane, qui apparaît de belle qualité. Comme Michèle Pradalier-Schlumberger
l’interroge sur la voûte, Valérie Rousset explique qu’il en subsiste le départ
et qu’il est cohérent avec le premier état. Quant aux contreforts
semi-circulaires, il est probable que leur datation aurait pu être précisée
par des fouilles archéologiques, mais le sol a malheureusement été décaissé.
Répondant à Henri Molet, Valérie Rousset indique qu’elle a cherché en vain
à savoir ce qu’étaient devenus les déblais.
Maurice Scellès
se demande s’il ne faudrait pas retenir une fourchette de datation plus large
pour les parties pré-romanes, en raison en particulier des contreforts
semi-circulaires. Quant à la datation de la porte de l’élévation nord, sa
forme lui paraîtrait mieux convenir au XIIe siècle. Valérie
Rousset explique qu’elle appartient à un état du XIVe siècle,
datation confirmée par la similitude avec la porte de la maison double voisine,
datée par dendrochronologie.
Jean-Michel
Lassure rappelle que l’on connaît d’autres cas d’églises équipées
d’une citerne, et il cite comme exemple l’église de Peyrepertuse où la
citerne a été installée lorsque l’on a fortifié l’édifice.
Guy Ahlsell
de Toulza s’étonne que la pièce forte établie au-dessus du chevet n’ait
été fermée que par une cloison de planches. Valérie Rousset explique
qu’elle a remplacé le mur du clocher contre lequel venait s’appuyer la
chambre forte.
Au titre des questions diverses, Patrice Cabau souhaite revenir sur l’acte d’abjuration de Pierre Maurand, pour préciser que, contrairement à ce qu’il croyait au moment de sa communication du 8 novembre 2005, le document n’était pas inconnu : il avait en effet été identifié par John Hine Mundy, et il est publié dans un ouvrage posthume paru tout récemment : Studies in the Ecclesiastical and Social History of Toulouse in the Age of the Cathars, série « Church, Faith and Culture in the Medieval West », Aldershot/Burlington, Ashgate, 2006, 258 p., 14 cartes ou plans.
La Bibliothécaire-Archiviste demande à notre confrère s’il lui serait possible de fournir la recension complète des articles et ouvrages de Mundy, en indiquant les lieux où ils sont consultables à Toulouse. Notre Société pourrait en acquérir certains.
Louis Latour invite la Compagnie à venir examiner dans la salle de lecture, à l’issue de la séance, des tessons de verres romains d’époque augustéenne provenant des fouilles d’Auterive.
SÉANCE DU 20 MARS 2007
Présents :
Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de
Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste,
M. Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Watin-Grandchamp, M.
Boudartchouk, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Testard, membres titulaires ;
Mmes Barber, Béa, Friquart, Jaoul, Krispin, MM. Le Pottier, Mattalia, Surmonne,
membres correspondants.
Excusés :
M. Latour, Bibliothécaire-adjoint, Mme Cazes, MM. Barber, Bordes, Pradalier,
Tollon.
Invitée : Mme Sophie Cueille, stagiaire au Service régional de l’Inventaire.
La Présidente ouvre la séance à 17 h et donne immédiatement la parole à notre consœur Adeline Béa, qui présente une communication consacrée à La collégiale Saint-Étienne de Capestang, un chantier exceptionnel de la première moitié du XIVe siècle, qui sera publiée dans un prochain volume de nos Mémoires.
Michèle Pradalier-Schlumberger remercie Mme Béa, qui, bien que surchargée, a accepté d’intervenir de manière un peu impromptue. La collégiale de Capestang est effectivement un édifice très intéressant, et le parallèle avec la cathédrale de Narbonne paraît fort suggestif. Cela conduit à se poser la question des rapports existant entre l’archevêque et la collégiale. Adeline Béa cite à ce propos plusieurs documents : pour le XIIIe siècle, une donation de 1236, confirmée en 1245 ; pour le XIVe, la fondation en 1318, par l’archevêque Gilles Aycelin, d’une messe perpétuelle à Capestang. À cette dernière date, le chantier de la collégiale devait être en pleine activité. Mme Pradalier-Schlumberger note que l’ampleur de ce chantier doit s’expliquer par les excellentes conditions économiques dont le Bas-Languedoc a joui pendant la première moitié du XIVe siècle.
La Présidente fait ensuite appel aux questions des membres de la Compagnie. Maurice Scellès s’intéresse au personnage en pied figuré sur une clef de voûte, se demandant d’une part s’il s’agit de saint Étienne, d’autre part si la lapidation du protomartyr est une scène fréquemment représentée, et le Père Montagnes aux armes de la Ville de Capestang, également sculptées sur une clef. Dominique Watin-Grandchamp s’interroge au sujet des armoiries : celles du seigneur primitif ne sont-elles pas devenues celles de la Ville ? Mme Béa dit que les armes figurant sur la clef sont connues à partir du XVIIe siècle pour être celles de la Ville ; quant aux seigneurs de Capestang, ce furent à l’origine les archevêques de Narbonne, puis la famille des Trencavel.
Mme Pradalier-Schlumberger souligne le caractère atypique des clefs de la sacristie de la cathédrale de Narbonne : il s’agit de têtes de feuilles avec un motif latéral d’ange, très proéminent. Pour Daniel Cazes, le motif des têtes de feuillage peut se rattacher à la clef figurée dans son carnet par Villard de Honnecourt, mais il semble ici très proche de modèles antiques, tels ceux du temple d’Aurélien à Rome ; la question se pose de la signification de ces têtes dans le monde gothique et de leur relation avec l’ange. Mme Pradalier-Schlumberger évoque le vocabulaire fantastique en usage au début du XIVe siècle, et Adeline Béa précise que ces sculptures peuvent être datées du deuxième quart de ce siècle.
Maurice Scellès analyse ensuite le portail latéral du narthex ouvrant sur la rue, dont les éléments lui paraissent appartenir à la fin du XVe siècle ; Dominique Watin-Grandchamp et Louis Peyrusse s’accordent aussi à attribuer la forme des bases, des jambages en quart-de-rond, de l’arc segmentaire ainsi que du larmier aux environs de 1500.
Anne Laure-Napoléone pose la question de la nature des pierres employées dans la construction de la collégiale et pour celle du palais archiépiscopal de Capestang : il s’agit à Saint-Étienne d’une variété de calcaire bien plus résistante.
La parole est ensuite à Patrice Cabau pour la lecture d’une brève note sur La chronologie des abbés de Saint-Sernin de Toulouse dans le dernier quart du XIIe siècle :
La préparation d’un article consacré au reliquaire de la Vraie Croix conservé dans le trésor de Saint-Sernin de Toulouse (1) nous a amené à tenter de préciser la biographie de trois des protagonistes du récit figuré sur les plaques émaillées et dorées qui ornent ce coffret : l’abbé Jean de Sainte-Marie de Josaphat à Jérusalem (ABBAS DE IOSAFAT), le notaire toulousain Raymond Botardel (RAIMVNDVS BOTARDELLI), et l’abbé Pons de Saint-Sernin de Toulouse (ABBAS PONCIVS).
Concernant les dates de l’abbatiat de ce dernier, une certaine incertitude a longtemps régné : 1176-1183 pour Denis de Sainte-Marthe et ses continuateurs, 1182-1199 suivant Émile Mabille, 1175-1198 selon Célestin Douais, dont la chronologie a été adoptée par l’ensemble des auteurs depuis la fin du XIXe siècle (2) ; il résulte de nos recherches que cet abbatiat doit être placé de 1175 à 1194.COFFRET RELIQUAIRE DE LA VRAIE CROIX (petite face latérale gauche) :
l’abbé Pons de Montpezat et les chanoines de Saint-Sernin (?) reçoivent la relique de la Croix ramenée de Jérusalem par Raymond Botardel.
Cliché Jean-François Peiré, 2002.Pons (ou Ponce) de Montpezat, vraisemblablement originaire de Montpezat en Comminges (3) et issu de la famille fondatrice de l’abbaye cistercienne Sainte-Marie de Bonnefont (4), paraît comme chanoine régulier de Saint-Sernin de Toulouse (O.S.A.) les 6/27 octobre 1159, 3/24 septembre et 8 octobre 1160 (5), puis en tant qu’archidiacre de Saint-Sernin – ou de Villelongue – les 5/26 avril 1172 et 7/21 mars 1173 (6). À cette dernière date, le deuxième abbé de Saint-Sernin, Hugues, avait déjà élu évêque de Toulouse (7), mais il mourut le 16 avril 1175 (8).
Pons de Montpezat lui succéda comme troisième abbé. Il était dit « élu » le 6/27 juin 1175, et encore le 4/18 mars 1176 (9). Le jeudi 25 mars 1176, à Anagni, il obtenait du pape Alexandre III, qui venait certainement de le consacrer, une grande bulle confirmant les privilèges et les biens de son abbaye (10). Les chartes de Saint-Sernin, transcrites en nombre dans les cartulaires de Saint-Sernin commencés sous son prédécesseur et complétés pendant la première moitié de son propre abbatiat (11), ainsi que les archives de l’abbaye cistercienne Sainte-Marie de Grandselve et de l’Hôpital Saint-Remi de Toulouse – en tout près de cinquante actes –, le montrent administrant le temporel de son monastère (12). Il disparut au terme de près de vingt années d’activité, le lundi 22 août 1194 (13).L’acte daté du jeudi 2/30 avril 1198 que Célestin Douais, suivi par Pierre Gérard (14), a cru antérieur à la mort de Pons lui est en réalité postérieur : l’actio remonte en effet à l’époque où le notaire public Arnaud de Tramesaygues, remplacé pour la conscriptio de la charte par Bertrand de la Saune, était encore en vie (15), où Arnaud Guillaume [Raynaud] était consul de Toulouse (16), où Bertrand de Millau était prieur de l’Hôpital de Jérusalem de Saint-Gilles (17) et Sicre de Léran prieur de l’Hôpital Saint-Remi de Toulouse (18), autrement dit à 1193.
L’un des très rares textes présentant Pons en dehors du cadre de la gestion des intérêts de la communauté canoniale de Saint-Sernin est la lettre adressée aux fidèles chrétiens par l’abbé de Clairvaux Henri de Marcy, que maître Roger de Hoveden, historien anglais, a insérée dans sa chronique : en 1178, le jour fixé pour sa pénitence par le légat pontifical Pierre de Pavie, cardinal prêtre du titre de Saint-Chrysogone, l’ancien hérésiarque toulousain Pierre Maurand dut entrer dans l’église Saint-Sernin dénudé et déchaussé, « fustigé par l’évêque de Toulouse et l’abbé de Saint-Sernin » (19).
À deux reprises, en 1175-1176 et 1178-1179, Pons de Montpezat, tel son prédécesseur l’abbé Hugues, aurait pu devenir évêque de Toulouse ; les chanoines du Chapitre de la cathédrale Saint-Étienne lui préférèrent Bertrand, prieur bénédictin de Camont (O.S.B.), puis Henri de Marcy, abbé de Clairvaux (O.Cist.), et finalement Fulcrand, prévôt du Chapitre canonial de la cathédrale Saint-Pierre de Maguelonne (O.S.A.) (20).Le successeur de Pons de Montpezat fut un abbé Raymond, qui paraît les 19 et 23 février 1195*, puis le 13 juin 1196 (21), mais qui fut bientôt remplacé par Guillaume de Canté, prévôt du Chapitre canonial de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse (O.S.A.) depuis la fin de 1185 (22).
La succession chronologique des abbés de Saint-Sernin de Toulouse au cours du XIIe siècle doit ainsi s’établir comme suit :
1. Raymond Guillaume …2 janvier 1119 - † 18 juillet 1140 ;
2. Hugues …24 mars 1141* - † 16 avril 1175 ;
3. Pons de Montpezat …27 juin 1175 - † 22 août 1194 ;
4. Raymond …19 février 1195* - 13 juin 1196… ;
5. Guillaume de Canté …15 février 1198* - † 5 janvier 1213*.
Patrice CABAU
1. WATIN-GRANDCHAMP, CABAU, CAZES, CAZES 2007, p. 37-46.
2. Denis de Sainte-Marthe et ses continuateurs ont erré sur la date du décès : « VI. Pontius de Montpezat, præerat anno 1176. […] Mortem appetiit 1183. » (G.C.3 1785, c. 95). Émile Mabille a embrouillé la question en prenant Pons de Sainte-Foy, scribe rédacteur de plusieurs chartes, pour un abbé de Saint-Sernin : « III. PONS I DE SAINTE-FOI était abbé de Saint-Sernin en 1175. Les auteurs du Gallia Christiana le font mourir en 1183 & lui donnent Guillaume de Cantez pour successeur ; mais selon les chartes, Pons de Montpezat était abbé de Saint-Sernin au mois d’avril 1182 ; c’est donc lui qui fut le successeur de Pons de Sainte-Foi. / IV. PONS II DE MONTPEZAT fut abbé de Saint-Sernin, selon les chartes, depuis 1182 jusqu’en 1199. » (H.G.L.3 1876, p. 525). Célestin Douais, perplexe, mais se fondant lui aussi sur les chartes, a indiqué pour l’abbatiat de Pons les dates extrêmes de 1175 et 1198 (DOUAIS 1887, p. XLV-XLVI).
3. Lieu-dit de la commune de Saint-Martory (ch.-l. cant., arr. Saint-Gaudens, Haute-Garonne), plutôt que Monpezat en Savès. Raymundus de Montepesato, mentionné comme abbé de Saint-Pierre de Lézat-sur-Lèze (O.S.B. ; Ariège) en 1223-1225 (OURLIAC, MAGNOU 1984-1987, nos 8, 140, 1041, 142, 95, 1042, 1410, 1536, 460, 1564 ; cf. p. XXXI, XXXII), apparemment le même que Raymundus de Monte Pensato, abbé de Saint-Pierre de Moissac (O.S.B. ; Tarn-et-Garonne) en 1218-1245 (?) (LA HAYE 1999, p. 182-189), ainsi que Raimundus de Montpesad / Montepesato, cité comme moine de Lézat en 1242-1248 et prieur de Casserre en 1248 (OURLIAC, MAGNOU 1984-1987, nos 1219, 117, 589, 756, 816, 33, 211), devaient appartenir à une famille du Quercy ou de l’Agenais.
4. SAMARAN, HIGOUNET 1970, nos 3 (1137 ou 1138* : milites alii qui infra terminos habebant, Pontius uidelicet de Montpezat, et filii eius Raimundus Garsias et Willelmus et frater eius Ademar), 6 (1143 : Pons de Montpezat, Raymond Garsie son fils), 30 (1155 ou 1156* : Huius rei sunt testes Bernardus de Montepesato et Pontius filius eius) ; cf. p. 19. Ponce ne figure pas dans l’essai de généalogie de la famille de Montpezat que Charles Higounet a dressé (HIGOUNET 1949 [I], p. 261-265, et pl. h.-t.), mais le prénom de Pons apparaît comme un « marqueur familial ». Précisons que nous faisons suivre d’un astérique les millésimes convertis, par augmentation d’une unité, du calcul florentin du commencement de l’année, compté à partir de l’Annonciation, pour les dates allant du 1er janvier au 24 mars.
5. Cartulaire de Saint-Sernin (A.D. Haute-Garonne, 101 H 1 = DOUAIS 1887 – GÉRARD 1999), nos 86 (mardi 6/27 octobre 1159 ; Pontius de Montpesát, chanoine témoin, est omis par erreur dans l’édition Gérard), 396 (samedi 3/24 septembre 1160 : Poncius de Monte Pesad canonicus), 512 (samedi 5e jour de la lune, avec la date de 1140 dans l’édition Douais, et celle de 1160 dans l’édition Gérard : Poncius de Monte Pesato canonicus). Rappelons que, dans les actes toulousains du XIIe siècle, la date du jour est indiquée fréquemment par la seule férie, d’où la possibilité d’une série de quantièmes dont nous donnons seulement les deux extrêmes : 3e férie = mardi [6 ou 13 ou 20 ou 27] octobre 1159.
6. Cartulaire de Saint-Sernin, nos 691 (mercredi 5/26 avril 1172 : Poncius de Monte Pessato archidiachonus), 604 (mercredi 7/21 mars 1173* : Poncius de Monte Pesato archidiaconus eclesie sancti Saturnini).
7. Cartulaire de Saint-Sernin, n° 604 (mercredi 7/21 mars 1173* ; l’année 1172 est exclue du fait de la mention Vgone electo in episcopo).
8. Hugues, élu deuxième abbé de Saint-Sernin après le décès de Raymond Guillaume († 18 juillet 1140), le resta après son élection comme évêque de Toulouse en 1173 et jusqu’à sa mort en 1175 (CABAU 1999, p. 150). Il est mentionné à la fois comme abbé et comme évêque le jeudi 28 mars 1174 ou 3/24 mars 1175* et le mercredi 6/27 décembre 1174 (Cartulaire de Saint-Sernin, nos 49, 601). Le nécrologe de Saint-Sernin marquait son décès au 16 avril : XVI kalend. maii obiit dominus Vgo episcopus tolosanus, secundus abbas Sancti Saturnini (Claude ESTIENNOT DE LA SERRÉE, Excerpta ex necrologio inclytae domus Sti. Saturnini Tolosae, [vers 1680] = B.N.F., fonds latin, manuscrit 12771, n° CCXXIII, p. 442 = H.G.L.3 1876, p. 524), et l’obituaire de Saint-Étienne indique l’année 1175 : Eodem die obiit dompnus Hugo, bone memorie thol[osane] Sedis episcopus, anno Domini millesimo C°.LXXV°. (B.N.F., fonds latin, nouvelles acquisitions, ms. 3036, f. 153). Un acte daté du mardi 2/30 septembre 1175, relatif à une donation à lui faite plus d’un an auparavant, mentionne la vacance du siège épiscopal (Cartulaire de Saint-Sernin, n° 493 : hoc donum fuit factum uno anno transacto et amplius antequam ista carta scriberetur).
9. Cartulaire de Saint-Sernin, nos 696 (vendredi 6/27 juin 1175 : Poncius electus abbas eclesie sancti Saturnini), 697 (vendredi 6/27 juin 1175 : Poncius electus abbas ; d’après l’original, manifestement de même date que le n° 696), 602 (jeudi 4/18 mars 1176* : Poncius electus abbas eclesie sancti Saturnini).
10. Archives de Saint-Sernin (A.D. Haute-Garonne, 101 H) : DOUAIS 1887, Appendice, n° 9 (jeudi 25 mars 1176* : Pontius abbas ecclesie sancti Saturnini que in burgo tolosano sita est).
11. L’acte le plus récent transcrit pour les cartulaires de Saint-Sernin est un bref du pape Alexandre III du 15 juin 1182 ou 1183 (n° 683). Célestin Douais pensait que Pons de Montpezat avait eu l’initiative de cette compilation, mais Pierre Gérard a montré qu’elle fut entreprise du temps de l’abbé Hugues (DOUAIS 1887, p. VIII-IX, XII – GÉRARD 1999, p. 54-61, 70).
12. Outre les documents indiqués aux notes précédentes, voir : Cartulaire de Saint-Sernin, nos 699 et 699 bis (jeudi 7/28 et dimanche 10/24 octobre 1176), 698 (vendredi 8/29 octobre 1176), 700 (vendredi 8/29 octobre 1176 ; vraisemblablement postérieur aux nos 699 et 699 bis, et de même date que le n° 698), 63 (lundi 7/28 février 1177*), 694 (lundi 28 mars 1177 ou 6/20 mars 1178*), 695 (lundi 28 mars 1177 ou 6/20 mars 1178* ; certainement de même date que le n° 694), 51 (lundi 2/30 mai 1177), 690 (lundi 2/30 mai 1177 ; peut-être de même date que le n° 51, et à rapprocher du n° 693), 693 (jeudi 4/25 août 1177) — Archives de Grandselve : H.G.L.3 1879, nos DXVIII, c. 1820 (septembre 1178), DXIX, c. 1820 (septembre 1178), DXX, c. 1820 (septembre 1178 ; analyse présentant Pons comme « abbé de Saint-Sernin & archidiacre de l’église de Toulouse ») — Cartulaire de Saint-Sernin, nos 688 (mardi 2/30 janvier 1179), 52 (jeudi 7/28 juin 1179 ; erreur sur le quantième dans la notice de Pierre Gérard) — Archives de Saint-Sernin : DOUAIS 1887, Appendice, n° 27 (lundi de janvier, entre 1180 et 1194) — Archives de l’Hôpital (A.D. Haute-Garonne, H Malte) : lettre non datée de B[érenger Gaucelin ou Gaucelm], archevêque de Narbonne (de 1181 à 1191 ; PASQUIER 1927, p. 219, H 318, n° 1) — Cartulaire de Saint-Sernin : nos 686 (mardi 7/28 avril 1181 : Pontius de Montpesath abbas) — Archives de Saint-Sernin = DOUAIS 1887, Appendice, nos 67 (mercredi 2/30 septembre 1181), 68 (vendredi 25 mars 11[8]3 ou 2/23 mars 11[8]4* ; erreur sur la dizaine du millésime « 1173 », incompatible avec les mentions du roi de France Philippe II Auguste et de l’évêque de Toulouse Fulcrand : labat Poncius de Montepezat) — Archives de Grandselve : H.G.L.3 1879 (VIII), nos DCXLVIII, c. 1838 (« 29 mars 1184 ») — Archives de Saint-Sernin : DOUAIS 1887, Appendice, nos 58 (samedi 7/28 janvier 1184*), 29 (mardi 1er/29 mai 118[4], plutôt que 2/30 mai 1185), 26 (mercredi 2/30 mai 1184), 41 (mercredi 2/30 mai 1184 ; vraisemblablement de la même date que le n° 26), 34 (jeudi 2/30 août 1184), 42 (jeudi 2/30 août 1184), 10 (vendredi 28 sept. [1184] ou samedi 28 sept. [1185] : bref du pape Lucius III datum Veron. IIII. kal. octobris), 59 (mercredi 7/28 novembre 1184), 60 (jeudi 4/25 avril 1185), 30 (lundi 7/28 janvier 1191*), 31 (samedi 1er/29 juin 1191), 32 (mardi 31 mars 1192 ou 2/23 mars 1193*), 53 (mardi 6/27 octobre 1192), 24 (samedi 6/20 août 1194).
13. Le nécrologe de Saint-Sernin marquait son décès au 22 août : XI kal. septembris obiit dominus Pontius, tertius abbas Sancti Saturnini (Claude ESTIENNOT DE LA SERRÉE, Excerpta ex necrologio inclytae domus Sti. Saturnini Tolosae, [1680] = B.N.F., fonds latin, manuscrit 12771, n° CCXXIII, p. 443 = H.G.L.3 1876, p. 524).
14. Archives de Saint-Sernin = DOUAIS 1887, Appendice, n° 33 – GÉRARD 1999, p. 71.
15. Le dernier acte connu dressé par Arnaud de Tramesaygues est daté du mardi 6/27 octobre 1192 (Archives de Saint-Sernin = DOUAIS 1887, Appendice, n° 53).
16. Arnaud Guillaume [Raynaud] est mentionné comme consul de Toulouse en janvier-mai 1184, janvier-novembre 1189, octobre 1190, mars 1192 ou 1193* et février 1193 (MUNDY 1997, p. 391, 392).
17. Bertrand de Millau fut prieur de l’Hôpital de Jérusalem de Saint-Gilles en 1190-1195 (LE BLÉVEC, VENTURINI 1997, p. XIX).
18. Sicre de Léran fut prieur de l’Hôpital Saint-Remi de Toulouse en 1193-1194 ; il était remplacé en 1194 (DU BOURG, p. 23).
19. Tunc indictum est populo ut omnes pariter ad ecclesiam sancti Saturnini die altera conuenirent, audituri et uisuri solemniter quam penitentie formam Petrus [Moranus] ille susciperet obseruandam. Omnes igitur sequenti die, ut fuerant prenominati < premoniti >, conuenerunt, tanta utique multitudo, tam frequens ut uix remaneret secus ipsa altaris cornua locus uacuus, qui domino legato misse solemnia celebranti sine compressione nimia preberetur. Et ecce coram illa multitudine multa nimis Petrus ille, iam noster, per ipsas ecclesie ualuas nudus et discalceatus adducitur, cedentibus hinc inde eum episcopo tolosano et abbate Sancti Saturnini, donec ad pedes legati in ipsis altaris gradibus poneretur (Chronica magistri Rogeri de Houedene, II = STUBBS 1869, p. 164).
20. CABAU 1999, p. 150-152. Ainsi que nous le soupçonnions, Fulcrand appartenait au Chapitre de Maguelonne, qui l’avait élu archidiacre avant juin 1161, puis prévôt avant juin 1168 : Fulcrandus prepositus [magalonensis] qui nunc est episcopus tholosanus (lettre d’Henri de Marcy, devenu cardinal évêque d’Albano et légat du Siège apostolique, datée du Puy, 20 août [1181] = ROUQUETTE, VILLEMAGNE 1911, n° 105, p. 169-171).
21. Archives de Saint-Sernin = DOUAIS 1887, Appendice, n° 63 (dimanche 19 et jeudi 23 février 1195*) ; Célestin Douais a transcrit « consilio domini [Poncii] abbatis ecclesie Sancti Saturnini », alors que le parchemin porte nettement consilio domini R. abbatis ecclesie sancti Saturnini (A.D. Haute-Garonne, 101 H 674 = ancien XIX-LXIII-12 : copies successives de novembre 1257 et juin 1260) — Archives de Grandselve : H.G.L.3 1879, n° DCCXXXI, c. 1848 (jeudi 13 juin 1196).
Selon Marie Antoine Du Bourg, « Raymond, abbé de Saint-Sernin, » aurait été témoin d’un acte « passé au mois de février 1192 (1193) » (DU BOURG 1882, p. 129 ; cf. p. 145 ; annoncé parmi les pièces justificatives, le document n’a apparemment pas été imprimé), mais sa lecture est inexacte : l’acte, qui concerne Saint-Jean Thor-Boulbonne, membre de la commanderie des Hospitaliers de Caignac, mentionne très lisiblement Raymond, abbé de Saint-Antonin [de Frédelas = Pamiers ; …1188-1198…] (A.D. Haute-Garonne, H Malte Caignac 47, 1ère liasse sur Saint-Jean, pièce 6). Nous avons plaisir à remercier notre consœur Bernadette Suau, qui nous a grandement aidé à résoudre le problème que posait cette indication erronée.
22. Archives de Saint-Sernin = DOUAIS 1887, Appendice, nos 52 (dimanche 15 février 1198* : Willelmus de Cantes electus abbas eclesie sancti Saturnini), 61 (vendredi 14 avril et mardi 2/30 mai 1200 : dompnus Willelmus de Cantezio ecclesie sancti Saturnini abbas), 62 (vendredi 28 juillet et mardi 7/28 novembre 1200 : dompnus Willelmus de Cantezio abbas ecclesie sancti Saturnini).
BIBLIOGRAPHIE
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Régis de LA HAYE (éd.), Aymeric de Peyrac, abbé de Moissac de 1377 à 1406 - Chronique des Abbés de Moissac, Maastricht - Moissac, 1999.
Dominique WATIN-GRANDCHAMP, Patrice CABAU, Daniel et Quitterie CAZES, « Le coffret reliquaire de la Vraie Croix de Saint-Sernin de Toulouse », Les Cahiers de Saint-Michel de Cuxa, t. XXXVIII, Monde roman et chrétientés d’Orient, Codalet, 2007, p. 37-46.
Au titre des questions diverses, Daniel Cazes signale les travaux entrepris à l’église Saint-Nicolas de Saint-Cyprien : au-devant du grand portail gothique se trouvait une petite cour aménagée au XIXe siècle dans le style néogothique, qui vient de disparaître ; la base de la tour du clocher est apparue, révélant les éléments d’un décor gothique difficiles à interpréter. Il convient de surveiller les opérations en cours, qui posent une fois de plus la question de l’étude archéologique des vestiges, de leur conservation et de leur mise en valeur ; il paraît ainsi important d’identifier les éléments lapidaires – antiques ou classiques ? – remployés dans le tympan du portail occidental muré. Guy Ahlsell de Toulza indique la raison de la destruction de la cour néogothique : la municipalité a le projet d’aménager sur cet emplacement un espace de convivialité, avec arbre et bancs. Le Directeur conclut qu’au problème de l’étude archéologique s’ajoutera sans doute celui de l’esthétique monumentale et urbaine.
Maurice Scellès donne des informations sur les résultats des fouilles menées à Cahors, préalablement à l’aménagement du parc de stationnement souterrain prévu aux allées Fénelon : contrairement à ce que l’on croyait, ce quartier de la ville était occupé au Moyen Âge (XIIIe-XIVe siècles) ; les vestiges d’un amphithéâtre antique sont en outre apparus. Pour le Secrétaire général, cette découverte majeure met en évidence les limites de l’archéologie de sauvetage et montre la nécessité d’une réflexion globale en amont de tout projet. Alors qu’en Espagne, la ville de Tarragone a ainsi été capable de recouvrer son cirque romain, en France, il y a peu d’années, le théâtre et l’amphithéâtre d’Agen ont été rasés, l’amphithéâtre de Rodez a disparu sous un lotissement… Daniel Cazes illustre la nécessité d’une politique globale en citant le cas de la ville d’Arles, où il a fallu déplacer à deux reprises l’emprise projetée pour le parking que l’on voulait construire au début de la nécropole des Alyscamps. Guy Ahlsell de Toulza relève qu’à Cahors, la position des autorités est que l’amphithéâtre doit être conservé.
Le Trésorier note par ailleurs avec satisfaction qu’une politique culturelle régionale active semble se mettre en place, palliant la défaillance de l’État. Cette tendance, observable ailleurs en Europe (Catalogne, Lombardie, Toscane, Bavière, Prusse…), laisse bien augurer pour 2008, « année de la culture et du sport » en Midi-Pyrénées. Le Président de la Région, M. Martin Malvy, s’est déclaré personnellement investi dans l’« expérimentation » : il y a là une chance à saisir. Des membres abondent en ce sens, et soulignent le rôle que notre Société peut jouer comme force d’expertise et de proposition.
Puis on fait le bilan de la rénovation de l’ancien Collège de Foix : un « massacre ».
SÉANCE DU 17 AVRIL 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès,
Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ;
Mmes Cazes, Napoléone, MM. Bordes, Lassure, Peyrusse, Testard, membres
titulaires ; Mmes Barber, Bayle, Jaoul, MM. Garland, Mattalia, membres
correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Friquart, Krispin, le Père Montagnes, M. Pradalier.
Invitée : Mlle Martine Rieg.
La Présidente fait part à la Compagnie de la triste nouvelle du décès de Lucienne Domergue, professeur d’espagnol à l’Université de Toulouse-Le Mirail et épouse de Claude Domergue. Elle s’excuse de ne pas avoir la force d’évoquer la mémoire d’une amie proche.
La Présidente
annonce les candidatures au titre de membres correspondants que nous ont adressées
Mme Hiromi Haruna, dont la thèse a été tout récemment primée par notre Société,
et M. Jacques Dubois, maître de conférences à l’Université de Toulouse-Le
Mirail.
Nous avons
par ailleurs reçu des éditions Perrin, sans doute à la demande de notre confrère,
deux volumes de L’épopée cathare de Michel Roquebert : t. III, Le
lys et la croix 1216-1229, t. IV, Mourir à Montségur 1230-1244,
Perrin, 2007 (collection Tempus).
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 6 mars, qui est adopté.
Le Trésorier rend compte de l’assemblée générale de l’Union des Académies et Sociétés savantes de l’Hôtel d’Assézat et de Clémence Isaure, où il représentait, seul, notre Société. Il rapporte les plaintes et les débats sur la sonorisation et la remise en état, qui pourrait être un simple nettoyage, de la salle Clémence-Isaure, sur le remplacement des marches de l’escalier, l’état de la cour Pierre-de-Gorsse… Guy Ahlsell de Toulza a en outre proposé que l'Union achète des œuvres d’artistes toulousains de la fin du XIXe siècle ou du début du XXe siècle, qui pourraient orner la salle Clémence-Isaure. Une commission d’achat serait mise en place.
Louis Latour
signale à l’attention de la Compagnie un article paru dans Le Monde du
mercredi 11 avril 2007, sur Un trésor de l’âge du bronze trouvé par un
amateur en Franche-Comté. La fin de l’article s’attarde sur l’accord
qui a été passé entre le Service régional de l’archéologie et des
prospecteurs armés de « poêles à frire » regroupés au sein de
l’Association de recherche et d’études des sites archéologiques comtois.
Louis Latour fait le récit de ses expériences en la matière.
Jean-Michel
Lassure donne à son tour des exemples des pertes d’informations que peut
entraîner une attitude trop coercitive ; il ajoute que le vendeur avec
lequel il a été en contact disposait d’une collection mais également
d’une base de données de sites archéologiques. Lisa Barber explique comment
la récente réglementation anglaise encourage les fouilleurs clandestins et
comment la Société des antiquaires exerce une surveillance bénévole sur les
ventes qui s’opèrent par l’intermédiaire d’e.Bay.
La parole est à Emmanuel Garland pour des remarques À propos de la porte Miégeville à Saint-Sernin de Toulouse :
Les études sur la porte Miégeville sont légion – tout particulièrement depuis que Thomas Lyman et Marcel Durliat ont revisité le sujet il y a une trentaine d’années –, et l’objet de ce court exposé n’est pas ici de proposer une énième interprétation du décor iconographique du portail, mais quelques pistes de réflexion à partir d’observations directes, et ce dans deux domaines : la structure du portail, et l’iconographie de son tympan. C’est l’analyse d’Olivier Testard présentée ici même lors de la séance du 25 mars 2003 qui est à l’origine de cette réflexion.
Tout programme iconographique s’inscrit dans une structure monumentale : tantôt c’est la structure qui conditionne l’ordonnancement des images (comme c’est souvent le cas entre un tympan et son linteau) ; tantôt c’est le programme iconographique qui détermine la structure porteuse, ce qui implique alors que le programme préexiste aux travaux de construction ; tantôt enfin les réflexions constructive et iconographique progressent de pair et interfèrent. Qu’en est-il ici ?
SAINT-SERNIN, LA PORTE MIÉGEVILLE, parties hautes. Cliché E. Garland.
Première observation : la structure monumentale de la porte Miégeville s’inscrit dans la continuité de celle de la porte des Comtes. Les colonnes recevant les chapiteaux historiés et les pilastres intérieurs s’élèvent exactement de la même façon sur les deux portails, et rien ne permet donc d’anticiper l’introduction d’un tympan sculpté au centre des voussures de la porte Miégeville. Du moins jusqu’aux consoles de marbre qui supportent le linteau : à ce niveau, les pilastres intérieurs de la porte Miégeville, moulurés, s’interrompent brutalement. Cette rupture avec le plan nu, perpendiculaire, des consoles allongées, est pour le moins surprenante [1]. D’autant que la qualité de l’exécution du décor sculpté des consoles contraste avec la nudité du profil qu’elles offrent au regard, avec l’absence d’articulation entre ces consoles et les pilastres qui les soutiennent, et avec le piètre ajustement des pierres au niveau de la liaison entre elles et leurs supports.
D’autre part, le linteau repose sur les consoles par l’intermédiaire d’un mortier beaucoup plus épais que sur tout le reste de la structure et il est entièrement bordé de briques posées de chant et elles aussi entourées d’un épais mortier. D’autres briques ont été utilisées pour combler des interstices de part et d’autre de la frise sculptée qui sépare le linteau du tympan proprement dit et un dernier élément de brique apparaît au niveau du tympan. La couleur rouge et la texture de ces briques contrastent violemment avec celles des matériaux employés dans la sculpture et pour les colonnes. Or nous avons toute raison de penser que la porte Miégeville ne fut ni enduite ni peinte à l’origine, comme le laisse supposer l’absence de trace d’enduit ou de polychromie du haut Moyen Âge. Il est donc légitime de se demander si le projet primitif ne prévoyait pas une structure semblable à celle de la porte des Comtes, et si les consoles, le tympan et le linteau ne furent pas décidés en cours de construction, voire après le montage des voussures. Le projet primitif ressemblerait alors à celui que l’on peut imaginer en supprimant artificiellement le tympan, le linteau et les consoles, comme sur le photo-montage de la figure jointe, que l’on peut comparer à la photographie de la porte des Comtes.
SAINT-SERNIN, LA PORTE MIÉGEVILLE, sans son tympan ni son linteau.
Photomontage E. Garland.SAINT-SERNIN, LA PORTE DES COMTES.
Cliché E. Garland.Deuxième observation : certaines faces sculptées des chapiteaux historiés ne sont pas visibles. Deux hypothèses : soit ces chapiteaux étaient destinés à un autre emplacement, où toutes leurs faces sculptées auraient été visibles, soit ce sont moins les détails du récit qui figurent sur ces chapiteaux qui importent que le thème général qu’ils développent : les conséquences de la Chute à droite, l’Incarnation et ses conséquences à gauche. Nous privilégions cette seconde hypothèse.
Troisième observation. La porte Miégeville – peut-être le premier portail à tympan sculpté du Sud-Ouest élargi à l’Espagne du Nord – est sans doute la plus ancienne représentation monumentale, sculptée, du thème de l’Ascension, au portail d’une église. Certes le portail occidental de Charlieu est probablement antérieur de quelques années (d’une petite dizaine au plus, si l’on s’en réfère aux propositions de Walter Berry qui date de l’extrême fin du XIe siècle le portail occidental de Charlieu), mais son iconographie ne relève pas de la même tradition et il s’agit plus probablement de la Seconde Venue du Christ : le Christ y apparaît en Majesté, de face, et c’est seulement la présence des anges qui soutiennent la mandorle du Christ qui justifient le rapprochement avec l’Ascension.
Quatrième observation. Si le tympan figure bien l’Ascension du Christ, de nombreux détails montrent que ce n’est pas seulement l’Ascension qu’il figure :
- l’inscription sur le nimbe cruciforme du Christ est sans lien apparent avec l’épisode de l’Ascension et n’apparaît sur aucune autre représentation de ce thème : on y lit DEVS, PATER et REX. L’absence d’élément pouvant symboliser ou signifier la présence de l’Esprit Saint interdit de voir dans la représentation du Christ une représentation trinitaire, mais elle associe de manière explicite, voulue, le Père et le Fils qui se rejoignent ici dans un même corps et se partagent la royauté céleste. Toute lecture du tympan doit rendre compte de ces inscriptions et des intentions qu’elles traduisent ; leur relation avec l’Ascension est loin d’être évidente ;
- le linteau figure le collège apostolique, et non les apôtres présents à l’Ascension : on y remarque la présence de Paul et l’absence de Marie. Paul est ici représenté en vis-à-vis de Pierre alors que sa conversion est postérieure à la Pentecôte, elle-même postérieure à l’Ascension. Certes de très nombreux exemples antérieurs figurent Paul dans des scènes de l’Ascension, mais toujours en présence de Marie et ce depuis les Évangiles de Rabula, au VIe siècle : leur double présence avait alors une signification dogmatique bien précise : suite au concile de Chalcédoine (451), elle symbolisait l’universalité de l’Église des premiers temps et rappelait la double nature du Christ. Ici, à Toulouse, le linteau se contente, oserais-je dire, de figurer l’image idéalisée du modèle du collège canonial, c’est-à-dire le collège des apôtres selon un paradigme déjà observé aux portails occidentaux des abbayes de Cluny et de Charlieu, pour citer deux ensembles sculptés antérieurs à celui de Saint-Sernin. Sa présence est d’autant plus pertinente ici que le collège apostolique était perçu à cette époque comme le modèle des collèges canoniaux. Les chanoines de Saint-Sernin ne furent certainement pas étrangers à ce choix. À signaler en outre qu’au contraire de ce que l’on observe sur les linteaux bourguignons, le collège apostolique participe ici, à la porte Miégeville, pleinement à la scène qui se déroule au-dessus de lui : la disposition des personnages, debout et la tête tournée vers le haut, ne laisse aucun doute là-dessus ;
ÉVANGILE DE RABULA, fol. 13v. Florence, bibliothèque Laurentienne. Cliché E. Garland.
COLOGNE, SAINTE-MARIE-DU-CAPITOLE, vers 1040.
PLAQUE D'IVOIRE, vers 1040. Bruxelles, Musée Royal d’Art.
- la disposition même du Christ s’élevant sans effort aucun, mais sans vraiment être porté par les anges non plus, est une variante unique du thème ; elle exclut qu’on puisse y voir une préfiguration de sa Seconde Venue, à la différence de la plupart des représentations de l’Ascension où le Christ est figuré de face, en Majesté ;
- dans le contexte de l’Ascension, l’absence de Marie est exceptionnelle, dès lors que les apôtres sont représentés. À dire vrai, je ne connais pas de représentation de l’Ascension où figure le collège apostolique avec Paul, et sans Marie (il existe bien un petit groupe de représentations de l’Ascension en présence des apôtres seuls, mais ceux-ci sont généralement réduits à deux groupes de trois, et surtout, Paul n’y est jamais présent). Le concepteur de cette partie centrale de la porte Miégeville n’a donc pas hésité à se démarquer de la simple illustration des faits relatés par Luc (Luc 24, 50-52, et Actes des Apôtres 1, 9-12) [2] et à créer un unicum, unicum qui fut sans suite en ce qui concerne la représentation de l’Ascension. En revanche, le collège apostolique, avec Paul, fut maintes fois représenté au linteau des églises. Un exemple tardif, remarquable, est le portail occidental de la cathédrale Sainte-Marie à Saint-Bertrand-de-Comminges où le collège apostolique, au linteau, est associé à la représentation de l’Épiphanie au tympan : une double association a priori encore plus inattendue à Saint-Bertrand-de-Comminges qu’à la porte Miégeville, mais qui s’explique par ailleurs de façon assez simple ;
- le Christ brandit un livre, ce qui, dans le contexte de l’Ascension, est à première vue incongru et tout simplement inexplicable. Pourtant, il existe bien une tradition iconographique qui montre le Christ montant au ciel tout en tenant un volumen ou un livre. Et ce depuis le diptyque en ivoire de Munich (Rome ou Milan, vers 400) où le Christ tient un rouleau, jusqu’aux vantaux de bois sculptés de Sainte-Marie-au-Capitole, à Cologne (vers 1040), où le Christ s’élève, bénissant, de face. On a coutume de voir dans cet attribut le Livre de Vie où est inscrit le nom des élus en référence au retour glorieux du Christ. Mais il y a une différence entre le Christ tenant le Livre de Vie dans les représentations de l’Ascension aux époques préromane et romane, et dans celle de Saint-Sernin : partout où le Christ est figuré tenant le Livre de Vie, on le montre de face, comme il sied à la représentation de sa Venue dans la Gloire. La seule exception que je connaisse est cette extraordinaire plaque d’ivoire conservée au Musée Royal d’Art de Bruxelles, où le Christ est figuré de dos, debout, brandissant le Livre de Vie et tenant une hampe surmontée d’une croix, s’élevant dans les nuées au dessus des apôtres et de Marie (vers 1030-1050). Mais cette scène s’inscrit dans un tout autre contexte [3]. Il existe à Saint-Sernin même deux autres représentations sculptées, toutes deux situées dans le bras nord du transept de la basilique, où le livre prend un relief singulier : il s’agit d’un chapiteau des tribunes figurant le Christ dans une mandorle soutenu par deux anges et encadrée de deux autres anges, bibliophores, et du chapiteau placé au sommet du pilastre médian au revers de la façade du transept, qui représente un personnage de face, tenant un livre. Cela confirme que le livre revêtait à ce moment précis une importance particulière aux yeux du concepteur du programme iconographique de cette partie de l’édifice.Cinquième observation. Tout décor historié doit être intelligible. Nous avons montré il y a quelques années comment, dans le cas de Conques [4], toute l’habileté du concepteur du tympan fut de créer un ensemble iconographique qui permit à la fois une appréhension immédiate des images, une lecture savante éclairée par les inscriptions, et un troisième niveau de lecture qui nécessitait l’assistance des moines de l’abbaye. Nous sommes probablement ici dans une situation similaire : l’identification de l’Ascension (quand bien même elle se révèle approximative et insuffisante), du collège apostolique, de la Chute et de l’Incarnation (avec leurs conséquences), sont immédiates ; celle de Pierre, de Jacques, de Simon le Magicien parlent sans détour aux fidèles lettrés (en partie grâce aux inscriptions). L’interprétation des autres éléments, voire des incongruités que nous avons relevées (inscriptions sur le nimbe du Christ, livre qu’Il tient, absence de Marie, rôle des personnages aux extrémités du linteau, signification du relief sous les pieds de Jacques, interprétation des consoles) et dont tant de chercheurs ont tenté de percer le mystère, ne devait être accessible qu’à ceux à qui les chanoines donnaient les clés de lecture. Pour les retrouver, il est indispensable de tenir compte du contexte intellectuel, politique et religieux, local, au tout début du XIIe siècle.
Que peut-on déduire de ces observations ?
1. Qu’il n’est pas certain que le décor historié de la porte Miégeville doive être d’interprété comme un ensemble unifié. On ne saurait exclure qu’il ait été composé de deux ensembles distincts quoique interdépendants. Après tout, ne fut-ce pas le sort de la porte des Orfèvres, à Saint-Jacques-de-Compostelle, où la description de l’auteur du Liber Sancti Jacobi ne laisse planer aucun doute sur le fait qu’elle fut sinon conçue, du moins perçue ainsi dès les années 1137-1140 ? Pour comprendre ce que le commanditaire a voulu rendre immédiatement intelligible, ce qu’il a voulu transmettre au spectateur non averti, il faut tenir compte d’une possible dissociation entre tympan, linteau et consoles d’une part, chapiteaux et reliefs sculptés d’autre part, que leur contenu iconographique ait été articulé ou non autour d’une même idée génératrice. Ici comme à la porte des Comtes, le programme iconographique à forte connotation pédagogique et dogmatique serait d’abord porté par les chapiteaux et les reliefs sculptés ; la relation entre l’iconographie du tympan et de son linteau d’une part, et celle des chapiteaux et des plaques du portail d’autre part, serait de nature différente de celle que la vision globale de l’ensemble du portail induit.
La porte des Comtes montre l’homme face à ses responsabilités et à sa place dans la société (parabole de Lazare et du mauvais riche) et rappelle la vertu éminente de la basilique (à travers le rôle intercesseur de saint Sernin) ce qui, à y bien réfléchir, nous plonge dans le Mystère – et la grâce – du Salut, où comportement et foi sont indissociables. Le décor de la porte Miégeville, lui, illustre l’Histoire du Salut, à travers l’expulsion du Paradis (la Chute, condition sine qua non de l’Incarnation) – chapiteau de droite –, l’Annonciation et la Visitation, mais aussi le massacre des Innocents – chapiteau de gauche –, cette dernière scène s’opposant à l’expulsion du Paradis, elle sans violence. Dans cette lecture, les reliefs de Jacques et Pierre apparaissent complémentaires de celui de saint Sernin à la porte des Comtes. On se plaît à imaginer que si ce procédé avait été étendu à l’ensemble des portails de l’église, cela aurait conduit à la ceinturer d’une théorie de saints protecteurs, miroir des corps saints vénérés à l’intérieur, témoin du rôle d’église de pèlerinage qu’entendait jouer Saint-Sernin par opposition au lieu de pouvoir épiscopal que représentait la cathédrale Saint-Étienne.2. Que le décor du tympan de la porte Miégeville s’inscrit dans la lignée iconographique des époques carolingienne et préromane : non seulement il puise sa forme dans des modèles pré-existants (de l’ivoire de Narbonne au bénédictionnaire d’Ethelwold (Londres, British Library, Add 49 598), les représentations de l’Ascension avec le Christ de profil, tenant une hampe surmontée d’une croix et tendant sa dextre à une main sortant des nuées, sont très nombreuses, mais il les modifie, et ce d’une façon qui ne connaîtra pas de descendance [5], alors même que le thème de l’Ascension devint un thème récurrent de l’art roman, mais développé sous une autre forme, porteur d’un autre message : celui de la Seconde Venue du Christ, thème véritablement et étonnamment étranger à la porte Miégeville, si ce n’est – peut-être – à travers le Livre tenu par le Christ.
Ici le Christ est montré s’élevant au ciel à l’aide d’anges, Christ et Père, Dieu et Roi, comme le disent les inscriptions, juge peut-être également comme le signifie le livre qu’il tient, à tout le moins témoin. Témoin de quoi ? Manifestation sans être épiphanie, le tympan semble être une réponse à l’âpre débat théologique sur la double nature du Christ qui sévit alors. Y aurait-il eu à Toulouse une menace hérétique, pour que l’on prît soin d’y insister de cette manière ? L’adoptianisme ? Nous sommes trois cents ans après l’affaire de Félix d’Urgel, et cinquante ans avant sa renaissance avec Pierre Abélard. Le catharisme ? Représentait-il déjà une menace suffisante pour que les chanoines ressentent le besoin de combattre le dualisme et d’insister sur la double nature du Christ ? Et que dire de la royauté du Christ ? Le décor de la porte Miégeville serait-il un rappel à l’ordre à l’adresse des comtes ? Cela se comprendrait à la cathédrale Saint-Étienne, siège du pouvoir épiscopal, mais ici ? Quoi qu’il en soit, le décor du tympan est une affirmation dogmatique, qui rappelle, entre autres, le rôle essentiel du collège apostolique, témoin et garant en quelque sorte de la véracité et de l’orthodoxie de la Bonne Nouvelle transmise hic et nunc par les chanoines de Saint-Sernin.Si nous reprenons l’interrogation initiale concernant la relation entre programme iconographique et structure monumentale, nous parvenons à la conclusion que nous sommes dans le troisième cas de figure, le plus complexe, celui où le programme iconographique s’élabore en cours de construction. En l’absence de textes locaux convaincants, il faut se résoudre à admettre que la discussion ne sera jamais close. Même en s’appuyant sur les associations et les oppositions pour essayer de pénétrer dans une compréhension fine du portail (comme le fit Thomas Lyman), il restera une part de mystère.
Emmanuel GARLAND
[1] Le fait que les consoles sont anormalement allongées s’explique aisément : il fallait qu’elles se prolongent suffisamment pour soutenir la plaque médiane du linteau, lequel est constitué de trois plaques (une plaque centrale, large, encadrée de deux petites) dont on sait qu’elles proviennent de la cuve d’un sarcophage antique que l’on a découpé, remployé comme matériau brut, et sculpté après coup, à l’époque romane (les petites plaques latérales sont en fait tirées des petits côtés du sarcophage).
[2] À noter que l’imitation qui en fut faite au portail du Pardon de Saint-Isidore de León n’a retenu que quelques éléments du modèle toulousain.
[3] La figure principale de l’ivoire est la Crucifixion ; l’Ascension n’y occupe qu’une place périphérique, aux côtés des représentations des quatre évangélistes, de la Nativité et de la Résurrection des morts.
[4] E. GARLAND, « Le conditionnement des pèlerins au Moyen Âge : l’exemple de Conques », dans Les Cahiers de Saint-Michel de Cuxa, t. XXIX, 1998.
[5] À l’exception, déjà signalée, de la porte du Pardon à Saint-Isidore de León, où l’on copie la représentation de l’Ascension sans y associer les autres éléments signifiants rajoutés au tympan de la porte Miégeville.
La Présidente
remercie Emmanuel Garland pour cette relecture du tympan de la porte Miégeville,
dont le nettoyage nous a fait redécouvrir ou découvrir nombre de détails.
Elle en retient l’absence tout à fait déterminante de la Vierge, mais aussi
l’importance de l’inscription du nimbe dans cette annonce du Retour et le rôle
des deux petits personnages des extrémités du linteau. Pour ce qui est de
Charlieu, il convient d’en revoir la datation en plaçant l’œuvre au début
du XIIe siècle, avec une iconographie qui s’inscrit dans la suite
de Saint-Genis-des-Fontaines.
Emmanuel
Garland veut insister sur le fait que la Vierge est toujours représentée dans
les Ascensions du XIIe siècle, en conformité avec une tradition
iconographique ancienne, alors qu’elle est absente des représentations du
Jugement où figure le collège apostolique. Le tympan de Miégeville propose
quant à lui une formule syncrétique. Quitterie Cazes exprime son accord sur la
valeur polysémique qu’il faut attribuer au tympan, tout en faisant observer
que Pierre et Paul représentent déjà l’Église sur des sarcophages paléochrétiens,
et que les chanoines sont également l’Église.
Louis
Peyrusse constate qu’il y a donc unanimité sur la double signification de
l’image du tympan. Mais pourquoi notre confrère n’a-t-il pas traité des
autres parties du portail ? Pour Emmanuel Garland, la réponse est simple :
il a choisi le parti d’une communication courte, limitée à la question
centrale posée par le tympan, dont la signification est la clef de l’interprétation
des décors périphériques comme de l’ensemble du portail.
La parole est à Patrice Cabau pour une communication sur Le rayonnement de Saint-Sernin de Toulouse au Moyen Âge à travers les associations de prière.
La Présidente
remercie Patrice Cabau pour cette première recherche sur les associations de
prière, dont l’étude apporte en effet beaucoup sur le rôle de tous ces
grands personnages. Comme elle l’interroge sur l’évêque de Tarragone,
Patrice Cabau confirme qu’il s’agit en effet de celui de la première
restauration de l’archevêché en 1088, qui s’est fait donner la ville et
dont la sainteté a été très tôt proclamée.
Répondant à
une nouvelle question de la Présidente, Patrice Cabau indique que les liens
avec les bénédictins apparaissent par Moissac, ou encore avec Saint-Hilaire,
plus probablement Saint-Hilaire de Poitiers que Saint-Hilaire d’Aude, car on
est dans le monde des grands établissements, les liens avec le prieuré de
Saint-Pierre-Eynac (Haute-Loire) étant sans doute dus à des circonstances particulières.
Quitterie
Cazes dit avoir été très déçue, non par la communication, mais par le
catalogue qui donne l’impression d’être celui d’un cercle de proches et
d’amis plus que la traduction du rayonnement de Saint-Sernin. Patrice Cabau
fait observer que ce sont ceux qui détiennent le magistère. Relevant que
les lieux très éloignés de Toulouse sont finalement peu nombreux, Quitterie
Cazes se demande néanmoins si le projet de Saint-Sernin n’a pas échoué.
Comme Maurice
Scellès demande s’il existe d’autres études sur de telles associations de
prière, Patrice Cabau dit ne pas en connaître.
Louis
Peyrusse note l’absence de l’Italie. Patrice Cabau y ajoute celles des
comtes de Toulouse et de certaines grandes abbayes, ainsi que celle de Rome,
alors que Saint-Sernin relevait directement du pape. Apparaissent en revanche
quelques laïcs, dont un imprimeur qui a offert un grand calice d’argent. Répondant
à la Présidente, Patrice Cabau indique que l’association de prière n’a
pas été reprise par la Confrérie des Corps saints.
SÉANCE DU 15 MAI 2007
Présents :
Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de
Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Latour, Bibliothécaire-adjoint,
Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mme Napoléone,
le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Testard, membres titulaires ; Mmes
Barber, Fraïsse, Friquart, Krispin, MM. Burroni, Lassure, Laurière, Mattalia,
Stouffs, Surmonne, membres correspondants.
Excusés :
Mme Cazes, MM. Bordes, Pradalier.
Invitée :
Mlle Rieg.
La Présidente ouvre la séance à 17 h et donne la parole au Secrétaire-adjoint et au Secrétaire général pour la lecture des procès-verbaux des séances du 20 mars et du 17 avril, qui sont adoptés.
Guy Ahlsell de Toulza rend compte d’un reportage télévisé récemment diffusé sur la chaîne France 2 vantant les mérites de la « poêle à frire », laquelle a permis de découvrir en pleine forêt le « trésor » d’une princesse de l’Âge du bronze. Dans le même registre, Michèle Pradalier-Schlumberger résume un article paru dans la Dépêche du Midi (édition de l’Ariège du 28 avril), intitulé « Profession, chasseur de trésors », que lui a transmis Lisa Barber ; Louis Latour a communiqué ce « papier » au Service régional de l’archéologie.
La Présidente présente la correspondance reçue, qui comprend notamment une invitation de M. Jean-Luc Moudenc, Maire de Toulouse, conviant à assister, le jeudi 24 mai à 17 h 30, « au dévoilement et à la mise en place de la statue de la Renommée sur la colonne de la place Dupuy » ; il convient de préciser que la statue en question est une réplique, et que la figure originale du XVIe siècle sera déposée au Musée des Augustins.
Mme Pradalier-Schlumberger fait ensuite circuler une brochure sur le château de Laréole éditée par le Comité départemental du tourisme de la Haute-Garonne et dont le texte a été rédigé par notre confrère Bruno Tollon.
L’ordre du jour appelant l’examen de trois candidatures au titre de membre correspondant, la Compagnie entend les avis des rapporteurs, puis il est procédé au scrutin : Mmes Hiromi Haruna-Czaplicki, Sophie Duhem et M. Jacques Dubois sont élus à la majorité des votes des onze membres titulaires présents.
La communication de Jean-Michel Lassure se trouvant compromise par un problème technique, la parole est à Chantal Fraïsse pour une Nouvelle lecture de deux chapiteaux du cloître de Moissac.
Michèle Pradalier-Schlumberger remercie notre consœur pour ce renouvellement de l’interprétation de deux œuvres romanes. Pour le premier chapiteau, elle se déclare pleinement convaincue par la démonstration concernant l’association des scènes du festin d’Hérode et de la décollation de saint Jean-Baptiste, mais elle a quelque mal à admettre l’assimilation d’Hérodiade avec l’Épouse. Chantal Fraïsse répond qu’il y a dans les commentaires bibliques des rapprochements très surprenants, qui s’expliquent par le souci de passer d’une littera jugée mauvaise à une interprétation regardée comme plus véridique. Daniel Cazes s’intéresse à la petite face de gauche, dont la lecture lui paraît très judicieuse ; a priori cependant, il y voyait la représentation du moment de l’arrestation de Jean-Baptiste. Louis Peyrusse abonde en ce sens. Il a admiré la sophistication de l’exposé, mais il met la posture recroquevillée du Baptiste en rapport avec l’attitude d’un homme que l’on vient arrêter. Maurice Scellès et Daniel Cazes s’intéressent au costume du personnage qu’ils croient être un officier royal : son manteau ne paraît pas être un manteau de protection, mais un manteau gonflé par le vent. Chantal Fraïsse le concède, mais en insistant sur la polysémie des images. Olivier Testard pense quant à lui à un manteau que gonfle le souffle divin, la Parole. Par ailleurs, M. Ahlsell de Toulza fait observer que ce personnage paraît porter le même sceptre qu’Hérode.
Mme Fraïsse pose le problème des relations entre sculpteurs et commanditaire. M. Scellès incline à croire que, l’ensemble du programme étant prédéterminé dans le détail, les exécutants ne disposaient d’aucune autonomie. Sur le second chapiteau étudié, la trouvaille de la fusion de l’aile de l’ange et du bouclier de Goliath lui semble relever, non d’une invention de l’artiste, mais d’un sens de l’œuvre avalisé par l’autorité religieuse. Jean-Marc Stouffs rappelle qu’un tableau du Caravage fut refusé parce qu’il n’était pas valable aux yeux du commanditaire.
Mme Fraïsse conclut en précisant que ses propositions de lecture ne sont pas à prendre comme des absolus, mais qu’elle a cherché simplement à esquisser de nouvelles pistes, non exhaustives et non exclusives.
Le problème de projection des images numériques ayant été résolu grâce à l’efficacité du Trésorier, notre confrère Jean-Michel Lassure peut enfin présenter sa communication sur L’église Saint-Pierre de Baccarisse et son décor peint (commune de Gazax-et-Baccarisse, Gers) :
La commune de Gazax-et-Baccarisse est située dans le canton de Montesquiou. B. Cursente (Les castelnaux de la Gascogne médiévale, 1980, p. 132) fait figurer Gazax parmi cette catégorie de fondations villageoises mais note que l’habitat y est aujourd’hui dispersé et qu’« il ne reste rien du Castet de Gazax mentionné en 1254 ». Quant à Baccarisse, qui lui fut rattachée à une date indéterminée, rien n’indique qu’une agglomération y ait jamais existé. Son église, dédiée à saint Pierre, est à l’embranchement de deux chemins. Elle est désaffectée depuis 1981 mais le cimetière qui la borde à l’est et au sud est toujours utilisé.
L’édifice, construit dans la première moitié du XVIe siècle, avait primitivement la forme d’un simple rectangle (18,60 x 6,20 m) partagé en trois travées égales, celle de l’est servant de chevet. Il a été par la suite agrandi au nord par une sorte de bas-côté formé d’un appentis entre deux chapelles, l’une à l’est en bordure du chevet, l’autre en bordure de la travée ouest de la nef. À l’ouest, son clocher polygonal est desservi par un escalier en vis installé dans une tourelle rectangulaire. Des blocs de diverses dimensions liés par du mortier de chaux ou de terre ont été utilisés pour sa construction ; seuls les contreforts, les chaînages d’angle, les encadrements des ouvertures et, sur une partie de sa hauteur, le parement externe du clocher sont en pierres de taille. La toiture à deux versants est en tuiles canal.
D’importants travaux de consolidation ont été réalisés en 1982. La toiture qui s’appuyait sur les voûtains de la nef et avait provoqué la chute de certains d’entre eux fut déposée. Un chaînage en béton fut établi au sommet des murs et des poutres transversales, également en béton, mises en place. La couverture fut entièrement refaite. L’édifice a été classé Monument historique le 15 novembre 1993.La nef
Une porte à arc brisé placée à son angle sud-ouest et précédée par un vaste auvent permet de pénétrer dans la nef dont la travée ouest est légèrement désaxée vers le nord. Ses deux travées sont voûtées sur croisée d’ogives retombant sur de simples culots polygonaux. Leur clé de voûte circulaire a une bordure torsadée. Un carré encadrant un blason avec quatre-feuilles se détache sur celle de la travée ouest ; celle de la travée orientale porte un blason français sur lequel se détache une fleur de lis. Chaque travée est éclairée par une étroite fenêtre en plein cintre située au sud. Une fenêtre rectangulaire supplémentaire en hauteur éclaire cette travée où se trouvent les fonts baptismaux, cuve cylindrique ornée de larges cannelures verticales et portée par un pied de section carrée.
Le chevet
Sa voûte subsiste dans son intégralité mais est fissurée. La large bordure de sa clé circulaire est encadrée par quatre motifs (fleurs de lis et motifs énigmatiques formé d’un arc de cercle avec traverse verticale) opposés deux à deux. À l’intérieur, un écu triangulaire rectiligne encadré par un filet en relief porte une clé en relief. Les culots de part et d’autre du maître autel portent un blason triangulaire dont les armes, probablement peintes, sont dissimulées par l’enduit. Au-dessus de l’autel en maçonnerie, un tableau en mauvais état représente saint Pierre tenant deux clefs de la main gauche, un livre de l’autre. À sa droite, un coq est juché sur une colonne. Une armoire eucharistique, avec fronton triangulaire surmonté d’une croix, a été aménagée dans le mur à gauche de l’autel ; une seconde armoire, dépourvue de décor et sans doute plus récente, a été creusée dans le mur sud.
La chapelle est (sacristie)
Au nord du chevet, elle est de plan rectangulaire et plus large que profonde (3,69 x 4,56 m). Son arcade de communication a été murée. Ses ogives à deux cavets prennent appui sur des consoles qui présentent un blason aux angles nord-est et nord-ouest et sont polygonales aux deux autres. La clé de voûte circulaire a pour motif une fleur à six pétales au centre d’un écu français lui-même placé dans un trapèze. Les voûtains se sont en partie effondrés. L’éclairage est apporté par une fenêtre rectangulaire fortement ébrasée située dans le mur nord, au-dessus d’une armoire eucharistique. Une seconde armoire est aménagée dans le mur ouest.
La chapelle ouest
Établie en bordure de la première travée de la nef, elle est également de plan rectangulaire (3,74 x 4,67 m). Son arcade basse (h. 3,15 m), presque triangulaire et pauvrement moulurée a été également fermée et elle n’est aujourd’hui accessible que depuis l’extérieur, à partir de l’appentis aménagé entre les chapelles. Son voûtement est semblable à celui de la chapelle précédente. Le décor complexe de la clé est constitué de trois rosaces cernées pour deux d’entre elles par une large bordure circulaire plate. La troisième rosace, plus petite, est accompagnée d’une équerre et de deux étoiles. Les culots à la base des ogives sont en forme de cône tronqué. Une épaisse couche de matériaux provenant de l’effondrement des voûtes et de la réfection de la toiture recouvre le sol.
Le clocher
Le clocher semble être la partie la plus ancienne de l’édifice. Il est de plan hexagonal et présente un fruit sur une partie de sa hauteur. Sa face externe est en blocs de molasse de moyen appareil. Un rang de corbeaux dont la fonction reste énigmatique fait saillie aux deux tiers environ de sa hauteur. Reconstruite au XIXe siècle, la chambre des cloches a un plan plus simple puisque ses faces sont rectilignes sauf à l’ouest. La baie rectangulaire de sa face orientale est barrée de pièces de bois verticales et obliques. La toiture est en tuiles canal. Elle n’abrite qu’une seule cloche fondue au XIXe siècle et portant l’inscription SIT NOMEN DOMINI BENEDICTIS avec, au-dessous, Jn Bte DUPONT .
L’intérieur du clocher a également subi maints remaniements. Son rez-de-chaussée qui communique avec la nef par une large ouverture à arc brisé, était voûté à l’origine. Encore en place mais tronqués, ses sept arcs à deux cavets prennent appui sur des culots dont deux, à l’ouest, sont respectivement sculptés de rinceaux et d’une tête barbue accompagnée d’une crosse. Une tribune en bois élevée dans la travée ouest permettait d’accéder au premier étage, par une porte percée dans le mur au fond de la nef. Conséquence du mauvais état de la voûte du rez-de-chaussée ou, peut-être même, de son effondrement, une tour abritant un escalier en vis fut édifiée au XIXe siècle contre la face sud du clocher. Outre la disparition de la tribune devenue inutile et la condamnation de la porte existante, sa construction entraîna le percement de deux portes, l’une au rez-de-chaussée, l’autre au premier étage pourvu dès lors d’un plancher en bois. Cet escalier dessert le second étage du clocher ; une échelle permet ensuite de parvenir à la chambre des cloches.Le décor peint
Un décor peint qui, des sondages l’ont montré, concerne l’ensemble du chevet et de la nef été découvert en 1986. Il est à la détrempe sur enduit à la chaux. Le rouge, le brun, le jaune, le gris auxquels s’ajoutent le blanc et le noir ont été utilisés. Plusieurs panneaux ont été dégagés et restaurés en 1994 par l’atelier A. Lacoste.
Sur le mur nord, à gauche de l’arcade de la chapelle orientale, la Visitation est représentée dans une sorte d’encadrement de couleur brune constitué de deux montants et d’une traverse horizontale. Marie, à droite, tend les mains vers le ventre d’Élisabeth. Elle est vêtue de blanc et un voile couvre ses cheveux. Élisabeth, représentée de trois-quarts, se tient bien droite. Les traits de son visage sont à peine visibles. Elle porte une longue robe brune à décolleté carré. À l’arrière-plan, un paysage mal conservé rappelle que la scène eut lieu « vers la montagne, dans une ville de Juda ».
Sur le mur opposé, un sondage a en partie révélé une Adoration des mages. La surface dégagée est suffisante pour que la tête de la Vierge et deux des mages soient visibles. Le premier d’entre eux, représenté de profil, est agenouillé, le visage dirigé vers Marie. On distingue ses bras tendus mais le présent qu’il apporte n’est pas identifiable. Ses traits, à peine visibles, semblent être ceux d’un homme âgé. Il est coiffé d’un bonnet dont la pointe forme un enroulement. De somptueuses broderies ornent sa casaque et ses chausses. Une épée est suspendue à sa ceinture. Debout derrière lui, le second mage présente une coupe à couvercle qu’il tient à deux mains. Les traits de son visage ont presque disparu mais sa longue barbe en pointe est parfaitement visible. Il est, lui aussi, coiffé d’un bonnet et porte un long manteau blanc agrafé sur la poitrine.
Dans la travée ouest de la nef, un panneau représentant la Résurrection de Lazare a été dégagé sur le mur nord et restauré. Au centre de la composition et au premier plan, Lazare est encore dans son tombeau dont deux personnages écartent le couvercle au moyen d’une longue perche. Agenouillé et les mains jointes, il est tourné vers Jésus qui l’accueille en tendant les bras. Derrière lui, les apôtres forment un groupe serré ; ils inclinent leur visage vers le ressuscité et semblent exprimer leur stupéfaction. En partie dissimulé par le tombeau, un personnage féminin qui semble être Marthe, la sœur de Lazare, exprime sa surprise et sa joie en levant les bras. Elle porte une robe jaune à décolleté carré.
À l’opposé des apôtres, des curieux, coiffés pour certains du bonnet juif, assistent à la scène. D’autres sont installés sur le perron d’une habitation ou derrière un parapet surmontant un mur. À la partie supérieure du panneau, on aperçoit les toits du village de Béthanie. Vestige de litre funéraire peint au XVIIIe siècle, un blason est reproduit deux fois à la partie inférieure du panneau. Il est porté par deux lions et surmonté d’une couronne.Par ses caractéristiques architecturales mais aussi par son décor, l’église de Baccarisse se rattache à une période qui, à la fin du Moyen Âge et au cours de la Renaissance, a été marquée, en Gascogne notamment, par la construction, l’extension ou l’embellissement de nombreux édifices religieux. Son décor peint, que les vêtements de divers personnages permettent de dater des années 1550-1570, a été mis en place après l’agrandissement de l’église, comme l’emplacement de la Visitation qui tient compte de l’arcature à l’entrée de la chapelle bordant le chevet en apporte la preuve.
Sans les travaux réalisés en 1982 pour mettre hors d’eau l’édifice qui les abrite, ces peintures auraient sans doute disparu. Elles constituent pourtant un rare témoignage de l’art pictural religieux de la seconde moitié du XVIe siècle. Il faut souhaiter que cette église de Baccarisse et ses peintures murales, aujourd’hui presque à l’abandon, soient l’objet d’une réhabilitation.
Jean-Michel LASSURE
La Présidente remercie l’intervenant et note que l’édifice vaut surtout par ses peintures, qui montrent la prolongation du goût gothique à une date assez tardive du XVIe siècle. Maurice Scellès se fait confirmer qu’il n’y a dans la nef aucun vestige antérieur au voûtement, ainsi que l’indiquent déjà les contreforts ; seule la tour servant de clocher pose le problème de sa fonction première, liée à l’existence de corbeaux qui peuvent évoquer un ancien hourd. Jean-Michel Lassure répond que les dispositions de cette tour sont difficiles à interpréter. Louis Peyrusse s’enquiert de l’identification des litres funéraires armoriées. M. Lassure dit avoir avoir vainement consulté à ce sujet les généalogistes régionaux, et il rappelle que Gazax-et-Baccarrisse est une toute petite localité, sur laquelle on a bien peu de renseignements.
La parole est enfin à Olivier Testard pour la lecture de remarques sur L’Ascension du tympan de Saint-Sernin de Toulouse :
Comme le rappelle Emmanuel Garland, les filiations carolingiennes de l’iconographie du tympan ont déjà été évoquées, mais c’est, à mon avis, l’occasion de souligner la différence radicale des deux contextes. Jusqu’au IXe siècle nous sommes encore dans une atmosphère césaro-papiste, alors que dans la deuxième moitié du XIe siècle nous sommes dans la phase initiale de la réforme dite grégorienne qui modifie radicalement l’équilibre des pouvoirs. On souhaiterait donc voir étudié en quoi la récupération du motif carolingien diffère du dessein original, et si les modifications reflètent ou non l’évolution du contexte d’emploi.
Il ne me semble pas possible d’établir de simples continuités formelles (c’est la critique principale qui a été opposée à la méthode d’André Grabar). En matière d’iconographie, les rapprochements formels sont nécessaires mais pas suffisants.
Ensuite, la remarque de Louis Peyrusse est aussi la mienne. Peut-on analyser la signification de l’Ascension du tympan sans son contexte iconographique immédiat ? J’y ajouterai : qu’en est-il du contexte intellectuel ?Si l’iconographie médiévale se plaît à superposer les significations pour développer des discours complexes, ou pour représenter des simultanéités, il ne me semble pas connaître de cas où un même thème est répété deux fois dans le même programme roman homogène. Quand il y a répétition, elle n’est qu’apparente et exprime une nuance, voire une opposition.
À Saint-Sernin, il me semble donc peu probable que l’Ascension du tympan ait une connotation principale judiciaire au même titre qu’à Conques, et autre que le sous-entendu évident de l’Ascension donné par les deux êtres en blanc du linteau : le Christ reviendra à la fin des temps pour juger les vivants et les morts.
Il faudrait pour cela, comme à Conques, que l’ensemble du portail soit organisé suivant la droite-bien et la gauche-mal du Christ, ce qui ne me semble pas soutenable aussi bien à Toulouse qu’au portail de Moissac (cf. mon étude). Le livre me semble plutôt signifier « ce qui est écrit est advenu et adviendra », toujours comme à Moissac.Ensuite, le thème judiciaire est déjà exprimé ailleurs sur le portail-programme de Toulouse avec les deux pièces de la veuve au dessus de la tête de Pierre. Il y a bien une actualité « judiciaire » dans la deuxième moitié du XIe siècle. La papauté engage la rénovation du droit canon. Elle est perceptible également dans la controverse eucharistique avec la « querelle sur la présence réelle » qui réactive un débat carolingien entre Paschase Radbert et Ratramne de Corbie. D’où mon intérêt pour le texte de la rétractation de Pierre Maurand en 1178 qui en est issu et que nous a présenté Patrice Cabau. Ce texte, qui est une profession de foi, reprend la première formulation officielle du dogme eucharistique lors du synode de Rome en 1059 dictée à Bérenger de Tours et probablement rédigée par Humbert de Moyenmoutier (ou de Silva Candida). Il confirme d’abord que sa deuxième rédaction, qui est la deuxième profession de foi dictée à Bérenger en 1079, rapportée par Lanfranc de Pavie (puis du Bec, ancien abbé de Saint-Étienne de Caen, archevêque de Cantorbéry et primat des îles britanniques) qui diffère de celle de Humbert en ce qu’elle est moins crue, est un approfondissement et non une divergence comme le suggèrent des études, et que ce qui est en jeu alors structure la pensée ecclésiale également pendant le XIIe siècle, par delà le dépassement de la question par Anselme d’Aoste (abbé du Bec, un élève de Lanfranc, puis archevêque de Cantorbéry) à la fin du XIe siècle (dans notamment le Proslogion, un titre opportunément « grécisant », ou le Cur deus homo). Qu’est-ce qui est en jeu ? C’est un outil : la syllogistique, matière principale de la dialectique qui sert à la formation rhétorique des clercs. Il s’agit de remettre en cause la syllogistique laïque tirée des 1er et 2e analytiques d’Aristote, partie intégrante de ce que l’on a coutume d’appeler l’Organon, et transmis au Moyen Âge principalement par Boèce dans la logica vetus avant même le réensemencement aristotélicien arabe de la fin du XIIe et du XIIIe siècle, et la constitution de la logica nova. Les quelques bibliothèques ecclésiastiques du XIe siècle pour lesquelles nous avons des indications conservent bon nombre de livres de dialectique.
Quel rapport avec le « juridique » ? La technique des syllogismes est un des fondements de la construction des raisonnements et des plaidoiries judiciaires. Le danger pour l’Église est d’en faire un absolu qui peut servir alors à réfuter des dogmes (un homme mort ne peut pas ressusciter, les espèces ne peuvent être à la fois du pain et le corps du Christ, etc.). Le travail, entre autres, de Pierre Damien (Lettre sur la toute puissance divine, 1067), de Lanfranc (Livre sur le corps et le sang du Seigneur, v. 1063-67), et d’Othlon de Saint-Emmeran (Dialogue sur trois questions, 1053) sera, en relation étroite avec les papes, et à l’initiative de Léon IX, de désamorcer cette « bombe » païenne. La solution passe par l’édification d’un droit spécifique à l’Église, et d’une technique argumentative (donc syllogistique) chrétienne. La dialectique doit rester une servante. La métaphore ancillaire de Pierre Damien institue la nécessaire soumission du laïque au religieux. La logique séculière n’est pas imparable (par exemple Moïse voit un buisson brûler sans se consumer, ce qui ainsi met en échec le bon sens). La relation de contradiction décrite par la syllogistique ne doit pas être toujours considérée comme un absolu. En matière religieuse, c’est une manifestation divine qui relie le matériel au spirituel. Relation qui ne peut être reconnue et avalisée que par l’Église institutionnelle. Bérenger, qui écrit que Dieu est un dialecticien, voit dans la consécration eucharistique des espèces un simple ajout spirituel, voire symbolique, tandis que Lanfranc, pour qui Dieu est un dialecticien plus subtil, affirme que, derrière leur apparence, le pain et le vin deviennent les véritables corps et sang du Christ. La modification, ou conversion, se fait en substance (ou essence) et non en apparence. L’apparence (que l’on peut rapprocher de « l’accident » aristotélicien) est une sorte de véhicule de la substance qui, elle, n’est perceptible qu’avec les yeux de la foi. Autrement dit, le Christ dont le corps est monté aux cieux ne se réincarne pas dans l’eucharistie corporellement mais en substance. Dans ce contexte, l’Ascension du tympan montre que le Christ est bien, au-delà de son corps d’homme, le Deus Pater, que ce corps supplicié comme celui d’un simple larron est celui du Rex, et enfin que la mort sur la croix n’est pas une défaite mais une victoire comme l’indiquent les anges ailés successeurs des victoires antiques.
Tout ceci est donc d’une ardente actualité dans la deuxième moitié du XIe siècle. C’est le Christ qui transmet explicitement ce pouvoir « judiciaire » religieux supérieur au judiciaire laïque, à Pierre et à l’Église. C’est ce qui justifie, selon moi, la présence des deux pièces de la veuve de Marc 12, 41-44, et Luc 21, 1-4 interprétées par Jérôme (ancienne et nouvelle lois réunies dans l’Église), et placées au-dessus de la tête de Pierre. C’est une des bases de la construction théocratique (une autre se joue dans la « querelle des investitures ») qui est à l’œuvre avec la profession de foi imposée à Pierre Maurand comme en son temps à Bérenger de Tours et qui culminera avec Innocent III.
Olivier TESTARD
SÉANCE DU 29 MAI 2007
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Scellès, Secrétaire
général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste ; Mme Napoléone, MM.
Bordes, Boudartchouk, Catalo, Gilles, Prin, Testard, membres titulaires ;
Mmes Barber, Bayle, Friquart, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Krispin, MM. Barber,
Surmonne, membres correspondants ; M. Costa, membre libre.
Excusés : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Cabau, Secrétaire-adjoint,
Latour, Bibliothécaire-adjoint, Mmes Béa, Cazes, Duhem, le Père Montagnes,
MM. Garland, Pradalier, Tollon.
La Présidente confirme la modification intervenue dans l’ordre du jour de la séance, Bruno Tollon ayant finalement préféré une communication longue qui sera donc inscrite au programme de la prochaine année académique.
La correspondance imprimée comprend le programme du 58e congrès de la Fédération historique de Midi-Pyrénées : Toulouse, une métropole méridionale : vingt siècles de vie urbaine, qui se tiendra à l’Université de Toulouse-Le Mirail du 14 au 16 juin prochains.
La parole est à Georges Costa pour une communication sur les Travaux d’art aux Jacobins de Toulouse sous le règne de Louis XIII, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Georges Costa pour cet exposé passionnant qui, par l’imagination
tout au moins, nous a permis de remeubler l’église de Jacobins d’œuvres
magnifiques, dont le moins étonnant n’est certes pas le mausolée de saint
Thomas d’Aquin. La Présidente note que l’on retrouve nombre de noms connus
sur d’autres chantiers, comme ceux des menuisiers Morisot et Béhorri qui sont
également intervenus lors de travaux réalisés dans la cathédrale. Elle
souligne l’intérêt de la riche documentation textuelle et iconographique qui
a été collectée par notre confrère.
Comme Maurice
Prin évoque une statue de la Vierge déposée dans l’église des Chartreux,
Georges Costa dit qu’elle ne lui a pas paru être assez ancienne pour pouvoir
être celle de 1615, mais peut-être faudrait-il la réexaminer. Puis il demande
à Maurice Prin des précisions sur un tabernacle à tenture, avant d’observer
que des confusions peuvent toujours être introduites par des adjonctions postérieures
au règne de Louis XIII ou des architectures éphémères.
Georges Costa
étant obligé de nous quitter, la Présidente le remercie à nouveau en lui
souhaitant un bon retour à Nérac.
L’ordre du
jour appelle l’examen du nouveau règlement intérieur. La Présidente donne
la parole au Secrétaire général qui commente pour la Compagnie les quelques
amendements proposés depuis un mois, après l’envoi du projet de texte à
tous les membres. C’est principalement l’article 23, relatif aux modalités
de consultation des archives et des ouvrages de la bibliothèque qui a été
modifié : il est proposé de le réduire à des dispositions générales,
et de confier au Bureau la responsabilité d’édicter le règlement de la
bibliothèque. Le Secrétaire général donne lecture de la première version du
règlement de la bibliothèque, qui pourrait donc entrer en vigueur immédiatement,
dans l’attente d’une rédaction plus précise qui pourrait intervenir au
cours de l’été.
Une brève
discussion dans laquelle interviennent la Bibliothécaire-Archiviste et le
Directeur permet de rappeler les raisons pour lesquelles a été ressenti le
besoin de préciser par un règlement les conditions d’utilisation de la
bibliothèque.
La Présidente soumet au vote de la
Compagnie le nouveau règlement intérieur, qui est adopté à
l’unanimité des voix des membres présents.
Au titre des questions diverses, le Secrétaire général communique à la Compagnie deux articles de La Dépêche du Midi collationnés par Jacques Surmonne, articles qui rendent compte de la découverte des vestiges de l’amphithéâtre romain de Cahors. En regrettant de ne pouvoir en montrer des photographies, le Secrétaire général décrit rapidement le site et les structures mises au jour. L’État et la Ville auraient opté pour une conservation sans mise en valeur. Qu’est-ce que cela signifie exactement ? Il est à craindre en tout cas que la récupération du site de l’amphithéâtre, dont une partie des vestiges subsiste encore sous la cour du collège voisin, devienne à tout jamais impossible, privant Cahors d’un atout patrimonial et touristique supplémentaire dont l’économie locale aurait peut-être besoin. Maurice Scellès constate une fois de plus les effets pervers d’une politique archéologique fondée principalement sur des fouilles de sauvetage dites « préventives » qui portent en elles la condamnation des sites mis au jour, et il appelle de ses vœux la mise en place d’une archéologie programmée intégrée à une politique d’aménagement et de développement urbain : le site des allées Fénelon où ont été mis au jour les vestiges de l’amphithéâtre de Cahors est libre de toute construction depuis plusieurs siècles et il aurait pu être fouillé préalablement à tout projet d’aménagement. Il est fait observer que la France a une conception des Monuments historiques qui exclut presque toujours les parties cachées, alors que la plupart des autres pays protègent des ensembles archéologiques.
Puis on
signale à l’attention de la Compagnie deux sites toulousains où
d’importants travaux sont en cours.
À proximité
immédiate de l’amphithéâtre romain de Purpan, ce sont des travaux de
terrassement considérables qui sont réalisés dans l’enceinte de l’hôpital,
sans aucune fouille archéologique semble-t-il, alors que des fouilles ont été
effectuées il y a quelques années en contrebas de l’amphithéâtre.
D’autres
travaux de terrassement sont en cours sur la rive de la Garonne le long
de l’Hôtel-Dieu, et le long de l’hôpital de La Grave dont les parties
basses ont en outre été percées de grandes ouvertures. Nous ne disposons là
encore d’aucune information sur un éventuel suivi archéologique, qu’il
s’agisse de l’étude des bâtiments ou des aménagements de la berge. Or on
sait les nombreuses questions que se posent les historiens de Toulouse sur les
aménagements successifs des bords de Garonne.
En rappelant
l’existence d’un P.C.R. (Programme collectif de recherche) sur le Moyen
Âge à Toulouse, on confirme que l’aspect et les éventuels équipements
des rives de la Garonne pendant l’époque médiévale sont tout à fait
inconnus. Il est par ailleurs rappelé que si le Service régional de l’archéologie
est chargé de prescrire des diagnostics archéologiques, la situation actuelle
où est imposée une interdiction d’embauche se traduit par des prescriptions
limitées aux moyens disponibles. Dans le cas des rives de la Garonne, l’absence de
prescription serait motivée par le fait qu’aucune destruction n’était prévue par le projet d’aménagement.
On convient qu’il est du rôle de notre Société d’attirer
l’attention des autorités publiques en demandant des informations sur les
différents sites et les suivis dont ils font ou ne font pas l’objet. Quand
bien même nos courriers resteraient sans réponse, ils manifesteraient en tout
cas l’intérêt d’une partie au moins des Toulousains pour l’archéologie
et la connaissance de leur ville. La Présidente annonce qu’un courrier en ce sens sera adressé sans
délai au Directeur régional des Affaires culturelles.
François Bordes informe la Compagnie de l’ouverture de l’exposition consacrée à Pierre-Paul Riquet, architecte visionnaire, présentée pendant un mois aux Archives municipales de Toulouse : elle comprend de très nombreux plans et dessins du canal des deux mers, depuis le XVIIe siècle jusqu’à la fin du XIXe ; on y verra également un dessin original de 1831, dû à Griffoul-Dorval, pour la statue de Riquet.
SÉANCE DU 12 JUIN 2007
Présents : Mme Pradalier-Schlumberger,
Présidente, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste,
MM. Latour, Bibliothécaire-adjoint, Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Napoléone,
Watin-Grandchamp, le Père Montagnes, MM. Bordes, Peyrusse, Testard, membres
titulaires ; Mmes Barber, Débax, Friquart, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Jiménez,
Krispin, MM. Barber, Dubois, Mattalia, Séraphin, Stouffs, Surmonne, membres
correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Scellès,
Secrétaire général, Mme Cazes, MM. Garland, Le Pottier, Pradalier, Tollon.
La Présidente ouvre la séance à 17 h et donne la parole au Secrétaire-adjoint pour la lecture des procès-verbaux des séances des 15 et 29 mai, qui sont adoptés.
Guy Ahlsell de Toulza annonce qu’il a réalisé un reportage photographique de la mise en place de la réplique de la statue de la Renommée sur la colonne de la place Dupuy, le 24 mai ; il signale la confusion commise dans le magazine municipal Capitole Infos (n° 167, juin 2007, p. 22), qui attribue la sculpture originale du XVIe siècle à « Griffoul Dorval », alors que Bernard Griffoul-Dorval (1788-1861) est l’auteur notamment des quatre griffons assis à la base du monument érigé en 1832-1834 à la gloire du général Dominique Dupuy. Louis Peyrusse note que ces griffons, en fonte de fer, n’ont pas été compris dans la récente restauration. François Bordes précise que le montant des opérations atteint déjà quelque 300 000 €, et que l’atelier de restauration des musées de la Ville de Toulouse étudie le projet de restaurer les griffons.
Michèle Pradalier-Schlumberger présente le programme des XXXIXes « Journées romanes » de Saint-Michel de Cuxa, qui se dérouleront du 6 au 13 juillet 2007 sur le thème de l’« Actualité de l’art antique dans l’art roman ».
La Présidente donne ensuite la parole à Gilles Séraphin pour la communication du jour, intitulée Le château de Blanquefort-sur-Briolance, un castrum à deux tours féodales, publiée dans ce volume (t. LXVII, 2007) de nos Mémoires.
Mme
Pradalier-Schlumberger remercie notre confrère pour cette lecture historique
soutenue par une analyse archéologique très attentive. Elle observe que le
toponyme de Pujols est fréquent dans le pays de Foix et demande s’il y a un lien
avec la famille installée à Blanquefort. Gilles Séraphin aborde la question des
stratégies familiales développées au Moyen Âge, qui se traduisent par le fait
que l’on retrouve les mêmes noms dans des régions différentes : Pujols, Latour,
Larroque, Preyssac…
Louis
Peyrusse qualifie de « romanesque » le scénario historique présenté et
s’intéresse à la proximité surprenante de la tour et du donjon : y a-t-il
d’autres exemples d’antagonisme sur un espace aussi réduit ? M. Séraphin souligne
que la tour féodale, dont les espaces intérieurs sont parfois très exigus, n’est
pas un lieu où l’on est censé vivre ; c’est surtout un symbole. L’édifice en
effet doit être considéré comme une personne morale essentielle pour
matérialiser la relation qui lie le vassal à son suzerain : élément « rendable »
du castrum, elle est le théâtre des cérémonies d’inféodation ; elle est
également liée à l’exercice de la justice, et elle sert de prison. Parfois, les
tours sont complètement surprenantes, échappant au « fonctionnalisme », à notre
rationalité. Il existe un castrum à cinq tours, dont les plus proches
sont à 30 cm de distance !
M. Peyrusse
constate que les restaurations passées et projetées sont des catastrophes. M.
Séraphin répond que ces opérations sont irrémédiablement violentes, qu’elles
effacent une stratigraphie complexe, mais qu’elles sont utiles en ce sens
qu’elles sauvent les constructions de la ruine. La seule chance actuelle de
survie du monument, c’est être soumis à une logique utilitaire, et le programme
d’aménagement du donjon pour habitation peut paraître légitime.
Hélène Débax
demande des informations sur le village castral de Blanquefort. Gilles Séraphin
indique plusieurs sources documentaires, précise que quelques maisons peuvent
être attribuées au XVe siècle et qu’un moulin – stark restauriert
– remonte au XIIIe. Le statut co-seigneurial du castrum ne se
lit pas dans sa structure topographique, et il n’est pas sûr que la situation
géographique du village actuel corresponde à son emplacement d’origine ; au Caylar, voisin, le premier site castral était proche du prieuré. Les territoires
à la tête desquels se trouvaient ces petits castra paraissent avoir été
assez importants. M. Séraphin indique pour finir que l’on connaît des
prud’hommes à Blanquefort pour la seconde moitié du XIIIe siècle
Au titre des questions diverses, Louis Latour annonce qu’il vient d’acquérir pour notre bibliothèque le volume du Congrès archéologique de France de 1901 et qu’il a ainsi enfin terminé de compléter cette monumentale série.
Guy Ahlsell de Toulza fait état d’une correspondance avec notre confrère Jacques Lapart, qui lui fait savoir qu’il a publié dans le bulletin 2006 de la Société archéologique du Gers un petit article sur M. de Saint-Léonard, collectionneur de tableaux à Toulouse et propriétaire des Hôtels Delpech et Druilhet, ainsi que du château de Ramonville. M. Lapart signale par ailleurs qu’un membre de la Société archéologique du Gers a trouvé dans des archives notariales le bail à bâtir, daté de 1653, du château de Seguinville, près Cadours, puis il note qu’au château de Latour la rampe d’escalier en fer forgé est signée Bertin 1791, artisan de Samatan qui, entre 1775 et 1815, a signé dans le Gers plusieurs autres ouvrages : balcon, tables de communion…
L’ordre du jour étant épuisé, la Présidente prononce la clôture de l’année académique et convie les membres de la Compagnie à partager le verre de l’amitié.
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