Société Archéologique  du Midi de la France
FacebookFlux RSS

SÉANCE DU 7 JUIN 2016

separateur

Communication de Christian DARLES, avec la collaboration de Michel VIDAL

La restitution architecturale de la porte nord de l’enceinte antique de Toulouse

fig-114_m.jpg

La destruction sauvage des vestiges en élévation de la porte nord de l’enceinte de Tolosa, à l’emplacement de la place du Capitole, a néanmoins autorisé dans l’urgence une série de relevés et de notes par Michel Vidal et quelques bénévoles. La reprise de ces archives et de leur étude architecturale a été effectuée en parallèle à une réflexion sur les modèles encore conservés à Autun, Nîmes ou Aoste. En complément des dernières découvertes concernant le couronnement de l’enceinte antique de Toulouse, cette tentative de restitution scientifique permet aussi une reconstitution hypothétique qui rend à ce monument toute son importance historique.

 


Présents : MM. Cazes, Président, Pradalier, Directeur, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste ; Mmes Cassagnes-Brouquet, Cazes, Fournié, Haruna-Czaplicki, Napoléone, Pradalier-Schlumberger, MM. Boudartchouk, Garland, Lassure, Peyrusse, Surmonne, Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes Heng, Leduc, Queixalós, MM. Darles, Molet, Sournia, membres correspondants.
Excusés : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Balty, Benquet, MM. Augé, Balty, Penent, Garrigou Grandchamp.
Invités : M. Jean-Marie Pailler, professeur à l’Université Toulouse II – Jean Jaurès, Mme Jeanne Péligry.

Le Président ouvre la séance en souhaitant la bienvenue à Ingrid Leduc, tout récemment élue membre correspondant et qui prend séance ce soir.

Puis il a la tristesse de nous annoncer le décès de Denis Milhau, dont les obsèques auront lieu ce 9 juin à Belbéraud. Quitterie Cazes et lui-même y représenteront notre Société.

Denis Milhau (Jouars, 1933- Balaruc-les-Bains, 2016)

Denis Milhau, conservateur en chef honoraire du Patrimoine, membre titulaire de notre Société, avant d’en devenir membre libre lorsqu’il s’installa à Sète, est décédé après une longue période de maladie, le premier juin dernier.

Né en 1933 en Île-de-France, mais avec des attaches familiales à Sète et Toulouse, Denis Milhau a fait toutes ses études à Paris, notamment à l’École du Louvre, avant de devenir conservateur de musée. Après avoir travaillé au service éducatif du musée du Louvre, car la transmission des savoirs l’intéressait particulièrement, et des recherches sur la sculpture de Germaine Richier, il fut nommé en 1963 conservateur du musée des Augustins, à la suite de notre ancien confrère Paul Mesplé.

Il héritait d’un poste extrêmement difficile à assumer, étant donné l’état désastreux dans lequel se trouvait ce musée. L’humidité, aggravée par la pollution urbaine grandissante, rongeait depuis la fin du XIXe siècle ses extraordinaires collections de sculptures, des gouttières affectaient les toits et verrières, notamment à l’est, où se trouvait une réserve de peintures. Ces dernières en souffrirent évidemment beaucoup. Il eut donc à faire face à une situation peu commune pour un grand musée de France.

Denis Milhau était passionné d’art moderne et contemporain, et voulut développer à la fois les collections du musée et les expositions temporaires dans ce domaine, en préfiguration du futur musée d’art contemporain, qui, à ses yeux, manquait à Toulouse. Deux coups de maître furent les deux expositions « Picasso et le théâtre » et « Chagall et le théâtre », qu’il organisa en 1965 et 1967, grâce à l’aide de ces deux artistes et dans le cadre du festival Messidor. Les organisateurs de ce dernier, autour de son fondateur, Jean Gibert, souhaitaient donner à Toulouse une manifestation de haut niveau culturel, centrée sur la musique, mais aussi le théâtre et les arts plastiques.

Signalons, quelques années plus tard, en 1971, le dialogue assez étonnant de Denis Milhau avec le professeur Marcel Durliat dans le catalogue de l’exposition « Les grandes étapes de la sculpture romane toulousaine. Des monuments aux collections ». Il s’y était fortement engagé, à la recherche, personnelle et originale, des ressorts et effets de la création de ces sculpteurs. Avec la complicité de son ami architecte Pierre Debeaux, il devait donner en 1980 une nouvelle présentation, appréciée par les uns, décriée par les autres, de cette extraordinaire collection. On regrettera son démembrement et la destruction, finalement assez obscurantiste, des supports de Pierre Debeaux, la présentation actuelle étant loin de remplacer cette muséographie.

Pour aboutir à cela, Denis Milhau dut mener auparavant un combat en faveur de la rénovation complète du musée, qu’il gagna en obtenant des autorités de la Ville et de l’État une réflexion et un projet, développés de 1963 à 1976, puis, de 1976 à 1981, une réalisation presque complète. Malheureusement, vers la fin, furent abandonnées, pour des raisons budgétaires et autres, plusieurs choses pourtant essentielles pour la vie normale d’un tel établissement : la reconstruction de l’aile sud, celle des réserves, celle de l’auditorium et la climatisation. Malgré cela, deux inaugurations, en 1980 et 1981, rendirent au public la totalité des espaces existants aux Augustins, restaurés et réaménagés, notamment celui de l’église, en travaux depuis les années 1950.

Les architectes en chef des Monuments Historiques Sylvain Stym-Popper et Yves Boiret surent établir avec Denis Milhau une étroite collaboration, pour la réussite de cette grande opération. Avec Yves Boiret et Xavier Darasse, Denis Milhau joua un rôle capital pour que soit installé dans l’église des Augustins un orgue de type allemand, construit par le facteur d’orgue Jûrgen Ahrend et peint par Pierre Bellin. Il y a quelques jours, l’éminent organiste titulaire de Saint-Sernin et professeur des classes d’orgue des conservatoires de Toulouse et Paris Michel Bouvard a donné sur cet instrument un émouvant concert en hommage à Denis Milhau.

Mélomane, cinéphile, grand lecteur d’histoire de l’art, mais aussi d’histoire, de littérature, de sociologie et de philosophie, infatigable visiteur de musées, expositions et monuments, un peu partout, avec une phase italienne intense dans les années 1980, en relation avec de nombreux artistes vivants, Denis Milhau était un homme de contact. Au musée, il recevait chaleureusement et longuement tous ceux qui le souhaitaient, individus ou groupes, leur présentant lui-même, toujours avec enthousiasme, collections et expositions. Il jugeait cela essentiel pour un conservateur de musée et que celui-ci ne devait pas s’isoler dans ses recherches, ses travaux, dans un milieu refermé sur lui-même. Pour lui, le musée devait être pleinement intégré à l’ensemble de la vie sociale et ouvert sur le monde. De nombreux historiens de l’art étrangers trouvaient ainsi d’excellentes conditions de travail aux Augustins. C’est évidemment ce qui sous-tendait aussi son goût pour l’enseignement, au lycée Déodat-de-Séverac, à l’École du Louvre, à l’université du Mirail, et les nombreuses conférences qu’il donnait généreusement.

Il n’en a pas moins écrit, dans les catalogues des Augustins ou d’autres musées, les Actes des nombreux colloques auxquels il participa. Il conviendra d’établir sa bibliographie, qui montrera l’étendue de sa curiosité. Il avait eu le plaisir, en 2012, de publier un ouvrage intitulé « Du réalisme. A propos de Courbet, Baudelaire, Cézanne, Kandinsky, Apollinaire, Picasso », où se lit toute la profondeur de sa réflexion sur les mécanismes et mystères de la création artistique. Il préparait aussi un ouvrage sur la sculpture de Picasso, dont il faut espérer, même s’il est resté inachevé, la publication posthume, car il avait bien connu ce maître auquel il vouait une immense admiration.

Voilà quelques aspects d’une vie, choisis dans la précipitation de cette triste nouvelle, dont je devais vous faire part. Leur sélection ne saurait rendre compte des multiples facettes de l’action et de la personnalité de Denis Milhau, que d’autres, nombreux, qui furent ses élèves, collaborateurs, admirateurs, amis, pourraient développer.

Pour nous, Denis Milhau était un confrère. Il a compté pour Toulouse. Je vous propose de lui rendre un dernier hommage, en nous levant et respectant une minute de silence.

Daniel Cazes

Le Président donne la parole à Christian Darles, pour une communication préparée avec la collaboration de Michel Vidal, qui n’a pu se joindre à nous ce soir, consacrée à La restitution architecturale de la porte nord de l’enceinte antique de Toulouse .

Le Président remercie Christian Darles pour cette communication qui lui rappelle les conditions désastreuses de la mise au jour des vestiges de cette porte lors de la construction du parking de la place du Capitole. Ses dispositions ont donné lieu à des débats et la restitution graphique qu’en propose notre confrère a l’intérêt de mettre en évidence les hypothèses tout en précisant bien des points. Maurice Scellès insiste sur l’importance de ce type de restitutions, qui donnent à voir à des non spécialistes, ce qui n’est pas négligeable, mais imposent aussi aux chercheurs une très grande rigueur. La discussion aborde ensuite les parties hautes de la porte et le couronnement des courtines.

Après avoir fait le point sur le dossier du « Grand Saint-Sernin », le Président prononce la clôture de l’année académique 2015-2017, et invite la Compagnie à partager le verre de l’amitié.


Haut de page