Société Archéologique  du Midi de la France
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Jean ROCACHER (1928-2008)

Membre de la S.A.M.F. (1983-2008)
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Jean ROCACHER
1928-2008

Membre de la S.A.M.F.
(1983-2008)

 

 

ÉLOGE 
prononcé par Henri Pradalier lors de la séance du 21 octobre 2008 

 

« L’été 2008 a été marqué en Méditerranée par la mort de plusieurs baigneurs, événement rare. Nous avons le regret de compter parmi ces victimes notre confrère Mgr Jean Rocacher, mort accidentellement à Sète alors qu’il se baignait avec des amis sur les conseils de son médecin qui lui avait recommandé, après une alerte cardiaque, d’avoir une activité physique plus soutenue. Poussé par la houle sur des rochers, il est mort à 80 ans, un âge qu’il était loin de porter.

Né en 1928 à Tulle, Jean Rocacher fit sa scolarité au Petit Séminaire Toulouse. Entré au Grand Séminaire de la rue des Teinturiers, il fut ordonné prêtre, à la cathédrale Saint-Étienne le 29 juin 1953. Envoyé par le Cardinal Saliège à Strasbourg parfaire ses études de droit canonique et de théologie, il en revint diplômé de théologie.
 Pendant sa vie, il sut combiner sa vie de prêtre avec celle d’un d’intellectuel averti. C’est ainsi qu’il assuma l’aumônerie du Lycée Raymond Naves à Croix Daurade, la tâche de responsable éducatif à l’École Saint-Joseph et le vicariat de plusieurs paroisses.

Dans notre société, c’est en tant qu’historien de l’art que nous l’avons connu, fréquenté et apprécié. Il avait en effet entrepris des études d’histoire de l’art à partir de 1967 en suivant le séminaire de Marcel Durliat où beaucoup d’entre nous l’ont rencontré. Il faisait partie de la trilogie des trois abbés qui venaient régulièrement à ce séminaire : les abbés Cabanot, Carail et Rocacher.
 Sa passion pour l’histoire de l’art puis pour la défense du patrimoine, bien réelle, déboucha sur la rédaction d’une thèse consacrée aux sanctuaires de Rocamadour qui fait encore aujourd’hui autorité, puis sur une considérable quantité de publications dont certaines consacrées à Rocamadour. Je pense en particulier à l’ouvrage sur Les restaurations des sanctuaires de Rocamadour à l’époque de Louis-Philippe et de Napoléon III et à Rocamadour et son pèlerinage. Étude historique et archéologique. Dans la liste des ouvrages qu’il a écrits on retiendra un livre sur Saint-Bertrand de Comminges. Saint-Just de Valcabrère et l’ouvrage co-rédigé avec Maurice Prin sur Le Château Narbonnais. Le Parlement et le Palais de Justice de Toulouse.
 
 On ajoutera à cette liste les 10 plaquettes de la collection Découvrir Toulouse, aujourd’hui épuisées, qui décrivent les différents quartiers de la ville en y inventoriant les principaux monuments, sorte de reprise du Chalande Les Rues de Toulouse, mise à la portée de tous dans une édition allégée et pratique à manier.
 Outre deux ouvrages consacrés l’un à La basilique Saint-Nazaire et Saint-Celse, ancienne cathédrale de Carcassonne, l’autre aux Jacobins de Toulouse sous le titre Les Jacobins et les maisons dominicaines de Toulouse, on signalera deux titres sur Saint-Sernin.

Cet édifice, dans lequel il exerça la charge vicaire pendant un an, fut d’ailleurs au cœur de ses préoccupations lors du projet de dérestauration entrepris dans les années 90 du XXe siècle. Il fut le fer de lance de l’opposition farouche à un projet qu’il réprouvait au nom de la conservation des formes données au monument par les restaurateurs du XIXe siècle, craignant, à juste titre, qu’un prétendu retour à l’aspect antérieur aux restaurations, n’aboutissse à la création d’un Saint-Sernin nouveau qui n’avait jamais existé. Ce qui advint, consacrant une défaite dont il gardait un souvenir d’autant plus amer que toutes ses craintes avaient été justifiées.
 Sa passion pour la défense du patrimoine s’exerça dans un autre domaine : la commission d’art sacré. Il eut à ce titre la double tâche de repérer les trésors de toute sorte que recelaient les églises du diocèse de Toulouse et de sensibiliser le clergé de la Haute-Garonne à la qualité, l’importance et surtout la protection de celles-ci. Ce souci le poussa à créer une association, l’AREC, qui eut pour but de publier, canton par canton, un inventaire des églises. Plusieurs livres, dont deux de sa plume, ont été publiés dans ce cadre et l’impulsion qu’il donna à cette entreprise se poursuit aujourd’hui à travers l’activité éditrice de cette association.

À ces nombreuses activités s’ajouta un enseignement des plus apprécié, pendant 20 ans, à l’Institut Catholique où il professa non seulement l’histoire de l’Art mais aussi l’Art sacré. Ses cours étaient illustrés par des voyages qu’il organisait et dirigeait, voyages qui regroupèrent autour de lui de fervents adeptes auxquels il fit découvrir à la lumière de sa science l’importance et la grandeur du patrimoine médiéval de toutes les rives de la Méditerranée.
 Il était normal, dans ces conditions, qu’il participât à l’action scientifique menée par diverses associations toulousaines. C’est ainsi qu’il entra en 1983 à la Société archéologique du Midi de la France où il fut élu membre titulaire dès l’année suivante. Il en suivait régulièrement les séances jusqu’à 19h00, moment où il se retirait, tenu par une règle de vie stricte qui l’amenait à rentrer chez lui, Rue Sainte-Anne, pour le repas du soir, suivi d’un prompt coucher car c’était un « lève-tôt ». Il était aussi membre de l’Académie des Sciences, Inscriptions et Belles Lettres et vice-président des Toulousains de Toulouse dont il était un membre assidu et l’auteur apprécié de nombreux articles dans les colonnes de L’Auta.

Sa double carrière d’ecclésiastique et de lettré lui valut d’être nominé Prélat d’Honneur de sa Sainteté avec le titre de Monseigneur dont il ne tira jamais quelque gloire que ce soit, ne changeant en rien son comportement vis-à-vis de ceux qui le côtoyaient.

Il laisse derrière lui le souvenir d’un prêtre et d’un savant calme et discret qui ne s’éloigna jamais d’une activité intellectuelle soutenue et d’une action efficace sur le terrain. Je sais que pour tous ceux qui sont ici c’est un confrère qu’ils perdent et pour quelques-uns, un véritable ami. »

 

Henri PRADALIER
octobre 2008

 


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