Mémoires |
BULLETIN DE L'ANNÉE ACADÉMIQUE
2001-2002
établi par Patrice CABAU & Maurice SCELLÈS
Le Bulletin est intégralement mis en ligne sur le site Internet de la Société archéologique du Midi de la France : www.societes-savantes-toulouse.asso.fr/samf/memoires/t_62/bul20021.htm. Il peut également être consulté à partir d'un index des matières.
Séances du 2 octobre 2001 au 5 février 2002 | Séances du 20 février 2002 au 19 juin 2002 |
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 217
SÉANCE DU 2 OCTOBRE 2001
Présents : MM. Peyrusse, Président, Coppolani, Directeur
honoraire, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau,
Secrétaire-adjoint, Mmes Noé-Dufour, Pousthomis-Dalle, MM. labbé Baccrabère,
Nayrolles, Roquebert, Tollon, membres titulaires, Mmes Andrieu, Blanc-Rouquette,
Fronton-Wessel, Pujalte, MM. Balagna, Cranga, Manuel, Salvan-Guillotin, membres
correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur, Mmes Cazes, Pradalier-Schlumberger, MM. Bordes,
Garland, Garrigou Grandchamp, Ginesty, Laffont, Lapart, Pradalier, Mgr Rocacher.
Le Président déclare ouverte lannée académique 2001-2002. Nul doute que lon aurait souhaité des conditions différentes. Treize jours après la catastrophe qui a endeuillé Toulouse, notre première pensée va aux victimes de lexplosion : les 29 morts, les blessés graves, les accidentés et tous ceux qui, au-delà dune peur bien compréhensible, se trouvent encore sinistrés, dont lun des nôtres en la personne de Maurice Prin. Aux familles, aux proches, la Société Archéologique du Midi de la France dit sa compassion et elle partage la solidarité des Toulousains dans le drame.
Notre Société a perdu à la fin de lété, le 3 septembre dernier, lun de ses membres les plus prestigieux, Philippe Wolff, à lâge de 88 ans. Le Président évoque pour la Compagnie la figure de notre confrère disparu :
« Philippe Wolff avait souhaité devenir, avec le grand âge, membre libre et avait été élu membre honoraire en 1986, au moment où il se retirait en Andorre. Tout le monde autour de cette table a connu Philippe Wolff, soit lhomme et lenseignant, soit lauteur. Je retiendrai de lui trois aspects.
Le grand universitaire à la carrière exemplaire. Agrégé dhistoire (le deuxième de la promotion de 1936), Philippe Wolff a enseigné quelques années dans le secondaire (auquel il sintéressa en rédigeant des manuels en collaboration avec Charles Morazé), avant de passer au C.N.R.S. et à lassistanat à la Sorbonne. Il devait arriver à Toulouse en octobre 1945, pour y occuper la chaire dhistoire médiévale de Joseph Calmette, chaire quil occupa pendant près de trente ans. Noubliant pas le double intitulé de cette chaire dhistoire du Moyen Âge et de la France méridionale, Philippe Wolff fut un pionner du travail en équipe, invitant le chanoine Delaruelle ou Georges Duby, depuis Aix-en-Provence, ou le jeune Leroy-Ladurie, depuis Montpellier, pour les premières Journées de recherche méridionales, dans les bâtiments de la rue du Taur.
Lhistorien, qui a laissé des ouvrages qui resteront des outils pour les chercheurs. Sa thèse, Commerce et marchands de Toulouse (1350-1450), soutenue en 1952 et publiée en 1954 (740 pages !), dédiée à Marc Bloch qui avait été son premier directeur de thèse, conduisit Philippe Wolff à lhistoire urbaine. Mais ses curiosités furent diverses, comme le furent ses enseignements : on le vit bien lorsque, proche de la retraite, il publia sur Léveil intellectuel de lEurope, les Origines linguistiques de lEurope occidentale et Les révoltes populaires en Europe aux XIVe et XVe siècles (ce dernier ouvrage avec Michel Mollat).
La voie la plus féconde empruntée par Philippe Wolff sous la Ve République a été celle de lhistoire des villes et des provinces. Philippe Wolff signe tout seul chez Privat, en 1958, une Histoire de Toulouse, qui entendait remplacer celle
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dHenri Ramet en proposant une synthèse érudite, soucieuse de la dialectique des spécificités locales et du cadre général : réussite éclatante qui arrachait lhistoire locale à la lecture myope des annalistes. Le succès vint, sans doute amplifié par le mouvement régionaliste nourri par une centralisation politique excessive : les cartes des ventes des volumes dhistoire des villes et des provinces, dans les années 1960-1980, peuvent se superposer sans difficulté à celles des politologues. Philippe Wolff, en restant dans le cadre imposé par les éditions Privat et leur triste maquette , révéla toutes ses qualités danimateur déquipe : comme la deuxième Histoire de Toulouse co-rédigée avec cinq de ses collègues, villes et provinces se virent dotées de synthèses reflétant les dernières recherches universitaires. 33 provinces ou pays et 68 villes : un effort exceptionnel dans lhistoire régionale, qui restera un modèle.
Je nai personnellement connu Philippe Wolff que dans ses années de vieillesse, moment où tous les honneurs lui étaient venus, à commencer par un fauteuil à lAcadémie des Inscriptions et Belles-Lettres récompensant lun des meilleurs spécialistes de sa génération. Je préfère oublier lhomme très dépité par lingratitude de la maison Privat pour ressusciter la figure du grand savant et du grand professeur, infatigable artisan dun travail collectif qui assurera sa survie. »
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 19 juin dernier, qui est adopté, puis de la lettre qui a été adressée au Maire de Toulouse, conformément à la motion votée lors de cette même séance :
« Monsieur le Maire,
Les berges de la Garonne constituent lun des plus beaux sites de notre ville, heureusement mis en valeur au cours de ces dix dernières années. Un délicat équilibre entre le site lui-même et ses aménagements a été trouvé et lon a su à peu près mesurer les interventions.
La passerelle qui est aujourdhui proposée aux Toulousains rompt sans raison cet équilibre, sacrifiant à la spirale du suréquipement qui semblait pourtant avoir été évitée.Cest pourquoi la Société Archéologique du Midi de la France a adopté, dans sa séance du 19 juin dernier, la motion présentée par les Toulousains de Toulouse et dont vous trouverez la copie ci-joint.
La Société Archéologique du Midi de la France rejoint donc les Toulousains de Toulouse pour vous demander, Monsieur le Maire, de bien vouloir réexaminer le projet et renoncer à une réalisation aussi coûteuse que préjudiciable à lun des plus beaux sites de notre ville.Dans cette attente, je vous prie de recevoir, Monsieur le Maire, lexpression de ma haute considération.
Le Président
Louis Peyrusse »
Le Président rend compte de la correspondance
manuscrite.
M. Patrick Périn, conservateur du Musée des Antiquités nationales
nous remercie de lenvoi du t. LX de nos Mémoires.
Cecilia dErcole, en raison de sa récente nomination à
lUniversité de Paris I-Sorbonne, nous adresse sa démission de membre correspondant
de notre Société. Nous avons en revanche reçu les candidatures de Mme France
Félix-Kerbrat, chargée de mission daction culturelle auprès du rectorat, et de
Mme Michelle Fournié, professeur dhistoire médiévale à lUniversité de
Toulouse-Le Mirail : les rapports sur ces deux candidatures seront présentés à la
Compagnie respectivement par Bruno Tollon et Michèle Pradalier-Schlumberger le 6 novembre
prochain.
Un courrier du tribunal correctionnel de Saint-Gaudens nous informe que la date de laudience concernant la plainte déposée conjointement par le Service régional de larchéologie et la Société archéologique du Midi de la France à lencontre de M. E. B. pour « exécution de fouilles archéologiques sans autorisation » et « utilisation non autorisée dun détecteur de métaux pour recherche historique ou archéologique » a été fixée au 4 octobre 2001. Le Président donne lecture de la demande de dommages qui a été présentée au tribunal :
« [ ] la Société Archéologique du Midi, propriétaire du terrain contenant la majeure partie des vestiges de la villa de Chiragan, demande quil plaise au tribunal dordonner :
- que M. B. restitue tous les vestiges archéologiques quil a pu ramasser sur le site de Chiragan,
- que M. B. soit condamné, au titre de dommages, à payer une somme non symbolique, de lordre de 10 000 à 20 000 francs, ou celle qu'il plaira au tribunal de fixer.
Cette demande pourra paraître singulière car nous ne savons pas si un objet de valeur a été dérobé (M. B. ne lavouera pas) ; et il est par ailleurs difficile destimer la valeur des vestiges archéologiques (hors les monnaies et les fragments commercialisables). Par sa prospection illicite, M. B. a cherché sciemment à profiter des sondages officiels menés par le Service régional de larchéologie pour réunir un butin archéologique (destiné à la collection ou à la vente) ; il a faussé volontairement les résultats de la campagne scientifique en ramassant éléments ou indices qui manqueront à létude des archéologues et des historiens, causant ainsi un tort irréparable au patrimoine public et à la recherche.
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La Société sengage à affecter la somme ordonnée par le tribunal au financement de la publication (prévue en 2002) du bilan scientifique des connaissances sur la villa de Chiragan [ ] pour donner à cet argent sa pleine valeur de réparation. »
Notre bibliothèque senrichit dun nouveau don, de la part de notre confrère Pierre Garrigou Grandchamp : Une histoire de Vincennes. Mémoire pour lan 2000, Vincennes, Maury, 2000, 256 p.
Le Président informe la Compagnie quaprès avoir consulté dans lurgence les membres du Bureau quil a pu joindre, il a accepté au nom de notre Société de prêter notre salle des séances pour deux soutenances de thèse initialement prévues dans des bâtiments de luniversité qui ont été gravement endommagés par lexplosion du 21 septembre. Il a en outre autorisé certains de nos membres à utiliser notre salle de lecture pour la soutenance de mémoires de maîtrise. Le Président signale en outre que Mlle Martine Rieg a proposé douvrir plus largement aux étudiants de maîtrise et de D.É.A. les bibliothèques des Académies et Sociétés savantes, toutes les bibliothèques publiques de Toulouse étant actuellement fermées. La Compagnie approuve ces initiatives.
Lordre du jour appelle lélection dun membre correspondant. Maurice Scellès présente son rapport sur la candidature de Mme Sandrine Conan. On procède au vote : Mme Sandrine Conan est élue membre correspondant de notre Société.
La parole est à Louis Peyrusse pour une communication consacrée à Un projet dHenri Labrouste pour Saint-Aubin de Toulouse (1844), publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.
Au nom de la Compagnie, Jean Coppolani remercie
Louis Peyrusse de nous avoir fait découvrir ce projet très original, dont on ne peut que
regretter quil ait été contrarié. Louis Peyrusse le croit aussi, jugeant par
ailleurs que le projet de Labrouste était plus raisonnable que celui de Delort. Le projet
de Delort a, de plus, cristallisé la colère, ne suscitant de ce fait que peu de dons.
Bruno Tollon remarque que les références de Labrouste semblent plus
venir du quattrocento que de lItalie classique. On est tenté dévoquer Pavie.
La massivité attendue à lexamen du plan est déjouée par les articulations
extérieures. Louis Peyrusse est daccord pour considérer que les élévations sont
des chefs-duvre de légèreté. Bruno Tollon ayant demandé si le cahier des
charges imposait les matériaux de construction, Louis Peyrusse précise que seul était
défini le programme ; il pense, pour sa part, que, pour 400 000 francs, Labrouste
prévoyait une construction en brique enduite.
Maurice Scellès, relevant que linscription du fronton faisait
référence aux défunts, voudrait savoir si le choix dun plan centré pour le site
de Saint-Aubin était motivé. Louis Peyrusse ne le croit pas, le projet nétant pas
celui dune église funéraire, bien que cette hypothèse ait été sa première
pensée en raison aussi de la présence de la clôture. Dautres indications
pourraient apparaître dans les papiers de Labrouste, qui sont malheureusement très
dispersés.
Répondant à une question de Jean Nayrolles, Louis
Peyrusse précise que laide de lÉtat pour Saint-Aubin a été très peu
importante. Jean Nayrolles note quil est très étonnant que lavis du Conseil
des bâtiments civils, auquel étaient liées les aides financières, ait pu faire plier
la municipalité, ajoutant quune bonne synthèse sur cette institution manque
cruellement. Pour Jean Nayrolles, à cette époque, les avis du Conseil des bâtiments
civils nengagent que laide de lÉtat et ne valent pas interdiction. Il
dit avoir été frappé par limportance prise par le Conseil, au regard des aides
minimes qui étaient accordées, importance peut-être due à la qualité dexpert
qui lui était reconnue. Il faut sans doute admettre que certains des projets refusés
létaient parce quils étaient techniquement mauvais : cétait sans
doute le cas pour la flèche en fonte proposée par le projet de Virebent pour
Saint-Aubin, le refus dun projet néo-gothique à Toulouse faisant dailleurs
figure dexception. Louis Peyrusse croit plutôt que cest laspect
industriel des productions de Virebent qui a entraîné le refus du projet, et il souligne
que le procès-verbal ninsiste que sur les aspects techniques, ce qui permet de
taire le véritable motif du refus. Jean Nayrolles dit ne pas en être convaincu. Louis
Peyrusse ajoute que si lanonymat des projets est sans doute respecté, il nen
demeure pas moins que les auteurs finissent par être identifiés : ainsi le premier
avis sur le projet de Labrouste, très négatif, est-il finalement corrigé.
Maurice Scellès demande quels ont été les avis techniques sur le
projet de Labrouste. Louis Peyrusse précise que la seule critique absolue porte sur la
forme triangulaire du pilier de la rotonde et le mauvais rapport établi avec les colonnes
servant de clôture aux chapelles, mais lavis souligne en même temps lesprit
dinvention dont fait preuve larchitecte.
Jean Nayrolles ajoute une remarque sur la recherche des
références, quil convient de ne pas trop pousser dans le cas de Labrouste, dont
lécole de pensée signe les façades de la bibliothèque Sainte-Geneviève.
Contrairement à Viollet-le-Duc qui fige larchitecture dans des états de
perfection, Labrouste est le tenant dune pensée évolutive qui prend les
architectures dans leur dynamisme, dans la perspective de ce quEngels appellera le
socialisme utopique. Il y du romain, du roman, de la Renaissance, mais chercher des
modèles de référence précis est peut-être une fausse piste. Louis Peyrusse en
convient tout en remarquant quil est intéressant de noter ce que Labrouste a vu et
relevé en Italie, comme il est intéressant de voir ce quil en a fait, en
sappuyant en particulier sur les carnets de dessin du jeune architecte.
SÉANCE DU 16 OCTOBRE 2001
Présents : MM. Peyrusse, Président, Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Mmes Napoléone, Pradalier-Schlumberger, Sudre, MM. Hermet, le Père Montagnes, Roquebert, membres titulaires, Mmes Andrieu, Pujalte, MM. Manuel, Salvan-Guillotin, Veyssière, membres correspondants.
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Excusés : MM. Bordes, Garland, Tollon.
Invitées : Mme Latour, Mlle Rieg.
La séance se tient au Musée Paul-Dupuy. Le Président remercie Jean Penent, conservateur du musée, daccueillir la Société Archéologique du Midi de la France dans cette exposition qui a été lun des succès de lété, et il se félicite du programme très excitant qui est annoncé jusquà la fin de lannée. Tout le monde se souvient de lexposition sur les faïences de Toulouse. Cest aujourdhui le tour des Terres cuites vernissées de Giroussens, qui nous sont présentées par notre confrère Guy Ahlsell de Toulza, auquel le Président cède la parole.
Après avoir remercié Guy Ahlsell de Toulza de nous
avoir fait découvrir ces terres cuites vernissées de Giroussens, le Président relève
que les commandes pour la marine royale pourraient indiquer quil sagit de
pièces de service et non de montre. Guy Ahlsell de Toulza, se fondant sur lavis
dune personne particulièrement compétente, rappelle que, selon la législation de
Colbert, le roi devait au capitaine des bâtiments de la marine la vaisselle de service et
celle de prestige, et cette obligation de ladministration royale sétendait
aux commandements des forteresses dans les colonies. Des commandes de la marine royale ont
été retrouvées, mais il sagit de découvertes récentes qui attendent
vérification.
Après avoir indiqué quelle appartient à une famille de marins,
Mlle Sudre confirme que la vaisselle était effectivement due par le roi, étant entendu
que cela supposait tout un apparat et de grands services. Elle ajoute quelle
connaît un coffre de bois recouvert de cuir qui porte les mêmes armes que celles que
nous venons de voir sur un plat, et fait remarquer que les provenances étaient autant Nantes
et Brest que Rochefort. Guy Ahlsell de Toulza précise quil fait mention de
Rochefort parce cest le port qui est indiqué, avec dailleurs la mention
plus générale darrière-pays bordelais. Mais on sait aujourdhui que les
productions peuvent provenir de Cox ou de Giroussens.
À propos de la vaisselle de montre, Guy Ahlsell de Toulza évoque
lItalie et ses grands buffets dans les salles à manger, dont les tableaux de
Bassano rendent bien compte. En outre, les plats en terre cuite se rayent facilement quand
ils sont utilisés, et ceux-là ne portent aucune trace dusage. La vaisselle utile
est jetée quand elle est usée ou ébréchée, et les pièces que nous voyons
aujourdhui correspondent en fait à la plus belle production.
Le Président voudrait savoir si lon a dautres exemples de
vaisselle blasonnée et si les étudiants qui ont travaillé sur ces terres cuites ont pu
identifier des modèles pour les décors. Guy Ahlsell de Toulza ne connaît pas
dautres exemples de blasons estampés en dehors de la vaisselle détain dans
le Midi de la France. Pour le décor, il faut souligner que les bouquets sont un motif
courant partout mais que le hibou est particulier à Giroussens. En fait, le P.C.R.
(Programme collectif de recherche) na que trois ans dâge et la recherche
nen est donc quà ses débuts.
Le Président demande encore si lon a des indications sur les
cuissons. Guy Ahlsell de Toulza rappelle que lon connaît pour Cox un four
extérieur à une maison et un autre situé au rez-de-chaussée. Quant aux modes
denfournement, il fait remarquer que lon ne distingue sur les pièces de
vaisselle aucune trace de cales ou de séparation. En outre, aucun four nest connu
par fouilles à Giroussens.
Répondant à Maurice Scellès, il précise que les pièces sont
montées au colombin et reprises au tour. Maurice Scellès note encore quil est
gênant que les deux motifs de la feuille de fougère et de la feuille de chêne, qui
font le lien avec la pièce datée, soient aussi peu représentés.
Le Président ayant demandé si les archives de la marine avaient été
exploitées, Guy Ahlsell de Toulza répond que les recherches effectuées par des
étudiants de maîtrise ont porté sur les seules archives de Giroussens. Quant au bateau
retrouvé avec son chargement au Québec, seules quelques pièces ont été
publiées ; tout le reste est à faire, et on peut en attendre beaucoup, les
Canadiens procédant en outre à des analyses de pâte.
Mlle Sudre évoque Robert Mesuret, qui lui avait montré trois pièces
provenant de Giroussens en lui précisant quil ne sagissait pas de productions
hispano-mauresques. Le Président rappelle quil a fallu que quelques personnes
senthousiasment pour les faïences de Delft pour quelles soient reconnues.
Le Président remercie à nouveau Guy Ahlsell de Toulza et le félicite en lui souhaitant des suites fructueuses dans ses recherches et pour la publication du livre annoncé, qui est désormais attendu.
SÉANCE DU 6 NOVEMBRE 2001
Présents : MM. Peyrusse, Président, Cazes,
Directeur, Coppolani, Directeur honoraire, Cabau, Secrétaire-adjoint,
Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes
Napoléone, Pousthomis-Dalle, Pradalier-Schlumberger, labbé Baccrabère, MM.
Bordes, Gilles, Hermet, le Père Montagnes, MM. Nayrolles, Prin, Mgr Rocacher, MM.
Roquebert, Tollon, Vézian, membres titulaires ; Mmes Fronton-Wessel, Pujalte,
MM. Balagna, Macé, Salvan-Guillotin, Testard, membres correspondants.
Excusés : M. Scellès, Secrétaire général, Mmes Jimenez, Stutz, M.
Garland.
Le Président ouvre la séance à 17 heures. En raison de labsence du Secrétaire général, empêché, le rendu compte de la visite du 16 octobre, consacrée à lexposition organisée au musée Paul-Dupuy sur les « Terres cuites vernissées de Giroussens », est
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renvoyé à la prochaine séance. Louis Peyrusse dit que cette visite a été tout à fait passionnante, riche de questions, tant les terres cuites de Giroussens paraissent hors norme par rapport aux productions des
XVIIe et XVIIIe siècles ; la publication du volume que Guy Ahlsell de Toulza doit leur consacrer est attendue avec impatience.Au nom de la Compagnie, le Président remercie Daniel Cazes, le musée Saint-Raymond et Jean-Louis Laffont, chef de latelier de restauration des musées de la Ville de Toulouse, pour la restauration dun moulage ancien, appartenant à notre Société, dun relief en marbre figurant « Les deux Tetricus » et la mise en place de ce moulage dans la salle de lecture de notre Bibliothèque. Louis Peyrusse rappelle à ce propos que, dans les années 1830, Théodore Chrétin, sculpteur de Nérac et faussaire talentueux, parvint à abuser non seulement les membres de la Société archéologique du Midi de la France, au premier rang desquels Alexandre Du Mège, mais encore Prosper Mérimée, par la confection de cette uvre supposée antique ; cependant, les archéologues parisiens et les membres de lInstitut de France ne tardèrent pas à émettre les plus expresses réserves quant à la plausibilité des inscriptions et des représentations des deux Tetricus.
Le Président rend compte de la correspondance imprimée, qui comprend notamment :
une convocation de la Fédération historique de Midi-Pyrénées à la tenue de son assemblée générale ; procuration est donnée à Bernadette Suau pour représenter notre Société ;
un courrier de la Société généalogique canadienne française proposant léchange de sa revue avec nos mémoires ; lopportunité de cet échange sera examinée lors de la future réunion du Bureau.
Louis Peyrusse présente le bulletin de souscription annonçant la parution du prochain volume de la série consacrée aux églises et chapelles des cantons du département de Haute-Garonne. Il donne la parole au promoteur de cette publication, Mgr Rocacher. Celui-ci rappelle que la collection, éditée par une association culturelle, lAREC 31, comprend déjà les volumes relatifs aux cantons de Fronton, Revel, Muret et Aurignac ; le nouveau volume, dont la préparation a été assurée par notre confrère Louis Latour, concerne le canton dAuterive.
Le Président cède ensuite la parole au Directeur pour un bilan de lévolution de nos « affaires martraises ». Puis il indique les suites judiciaires des faits survenus à la fin de la campagne de sondages du printemps 2001 : au soir du 13 juin, un individu fut appréhendé sur le site alors quil procédait, muni dun détecteur à métaux, à une exploration clandestine devenue quotidienne ; plainte fut déposée au nom de notre Société, propriétaire des lieux, ainsi que par le Service régional de larchéologie, représentant lÉtat, pour non-respect de la réglementation en vigueur ; le 4 octobre, le Tribunal correctionnel de Saint-Gaudens a rendu un arrêt condamnant M. E. B. à une amende de 30 000 F pour « exécution de fouilles archéologiques sans autorisation » et « utilisation non autorisée dun détecteur de métaux pour recherche historique ou archéologique ». Le Directeur signale pour terminer que la publicité donnée par la presse locale à cette décision de Justice a suscité à Martres-Tolosane une prise de conscience des plus salutaires.
Lordre du jour prévoyant lélection de deux membres correspondants, le Président fait intervenir les rapporteurs désignés pour présenter les candidats. Bruno Tollon fait son rapport sur la candidature de Mme France Félix-Kerbrat, professeur dHistoire de lArt auprès du Service éducatif du Rectorat ; Michèle Pradalier-Schlumberger lit le sien sur celle de Michelle Fournié, professeur dHistoire médiévale à lUniversité de Toulouse-Le Mirail. Il est procédé au vote : Mmes Félix-Kerbrat et Fournié sont élues membres correspondants.
Le Président donne la parole à Laurent Macé pour la communication du jour, intitulée : Pouvoir comtal et autorité consulaire : analyse dune miniature du
XIIIe siècle, publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.Louis Peyrusse remercie Laurent Macé, puis il ouvre la discussion en lui demandant sil était dusage de figurer un viguier avec une épée en pal. Laurent Macé répond quune telle représentation convient tout à fait à un justicier dans lexercice du pouvoir délégué par le comte. Henri Gilles intervient pour souligner lintérêt politique de lenluminure initiale du cartulaire de la Cité de Toulouse, datable de 1205. Comme M. Macé, il reconnaît dans les figures des médaillons supérieur et médian le comte et son viguier. Sagissant du médaillon inférieur, où paraît un personnage barbu, juriste ou consul, M. Gilles rappelle que depuis 1189 les consuls toulousains exerçaient, conjointement avec le viguier comtal, la juridiction sur la ville ; ainsi le personnage doit-il bien être identifié comme un consul (plutôt que comme un « juriste », cest-à-dire à cette époque un praticien du droit). François Bordes félicite Laurent Macé davoir su mettre en relief lenluminure du cartulaire de la Cité (A.M.T., AA 2), sans doute beaucoup plus significative que celle du cartulaire du Bourg (A.M.T., AA 1), qui ne montre quun personnage coiffé dun chaperon (attribut dune position sociale relativement éminente) et tenant un rouleau. La prégnance de la représentation lui paraît sexpliquer par le fait que la Cité était par excellence, avant la fusion financière des deux parties de la ville (1269), le territoire du pouvoir politique. M. Bordes signale quon ne connaissait jusquici aucune image du viguier de Toulouse antérieure à la miniature ornant un manuscrit des coutumes de Toulouse datable de 1296 (B.n.F, ms. 9187) ; il suppose que le viguier devait être représenté dans le premier livre des Annales de la Ville, commencé en 1295 et malheureusement perdu. Revenant à lenluminure de 1205, il confirme quà cette date lautorité consulaire était considérable : depuis 1189, les consuls exerçaient la justice criminelle ; à partir de 1190, ils avaient acquis les terrains nécessaires à lédification dune Maison commune, siège et symbole du consulat ; au début des années 1200, ils sassurent par des expéditions militaires le contrôle du « pays toulousain ».
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Daniel Cazes se dit quant à lui très sensible à la qualité plastique de limage, révélée par lagrandissement dû à la projection. Analysant les motifs décoratifs, il montre quils sont identiques à ceux de la sculpture romane toulousaine du
XIIe siècle finissant : cette enluminure appartient de toute évidence au « style 1200 ». Sagissant des figures humaines, le personnage barbu du médaillon inférieur frappe surtout par son caractère antiquisant, un aspect byzantinisant que lon retrouve dans les peintures qui ornaient la salle capitulaire du monastère de Sigena, incendié pendant la guerre civile espagnole, et qui sont conservées à Barcelone au musée dArt catalan. Insistant sur les liens entre le Midi toulousain et la Catalogne à la fin du XIIe siècle et au début du XIIIe, Patrice Cabau rappelle que cest dans le monastère des moniales de Sigena que le roi dAragon Pierre II, tué à Muret en 1213, puis transporté à Toulouse dans la maison des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem, fut finalement inhumé.
SÉANCE DU 20 NOVEMBRE 2001
Présents : MM. Peyrusse, Président, Ahlsell de Toulza,
Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau,
Secrétaire-adjoint, Mmes Napoléone, Pradalier-Schlumberger, MM. labbé
Baccrabère, Gilles, Mgr Rocacher, MM. Prin, Tollon, membres titulaires, Mmes Andrieu,
Aribaud, Blanc-Rouquette, Conan, Félix, Fournié, Jiménez, Pujalte, MM. Balagna, Cranga,
Manuel, membres correspondants.
Excusé : M. Bordes.
Le Président salue la présence de Mme Sandrine Conan, quil navait pas eu encore loccasion de présenter à la Compagnie, et de Mmes France Félix et Michelle Fournié qui prennent séance ce soir, et il leur souhaite la bienvenue.
Le Secrétaire général donne lecture des procès-verbaux des séances des 2 et 16 octobre derniers et le Secrétaire-adjoint de celui de la séance du 6 novembre, procès-verbaux qui sont adoptés.
M. Henri Gilles apporte une observation en
complément à la discussion de la dernière séance sur la miniature du
cartulaire de la cité. Il rappelle que les trois personnages représentent
Alphonse Jourdain, le viguier et un consul, et que tous les intervenants ont été
daccord pour reconnaître la charte des franchises et libertés dans le rouleau
déployé que tient le comte. Le consul tient quant à lui un livre ouvert quil
désigne de lindex : un livre de Droit, et François Bordes pense quil
sagit du cartulaire lui-même. Pour M. Gilles, le miniaturiste a voulu montrer quels
étaient les avantages pour la municipalité de posséder un cartulaire qui était une
garantie contre la disparition des actes et en permettait une consultation facile. Mais le
propos va au-delà : le miniaturiste souligne que le texte du cartulaire a même
force probante que loriginal. Patrice Cabau abonde dans ce sens en rappelant que les
copies du cartulaire sont authentifiées par quatre notaires.
Le Président remercie M. Gilles pour ces précisions qui seront
transmises à notre confrère.
Le Président félicite Yves Cranga pour sa toute
récente intégration dans le corps des conservateurs du patrimoine. Puis il rend compte
de la correspondance manuscrite.
M. Robert Manuel offre à la Société un texte inédit pour servir à
lhistoire du puits de Cordes. Notre confrère précise quil sagit
dune compilation de textes, dont un inédit qui lui a été communiqué par le Père
Montagnes, quil lui a paru intéressant de rassembler au moment où le Musée de
Cordes consacre une salle à lhistoire de ce puits. Le Président et Guy Ahlsell de
Toulza lui ayant demandé sil songeait à une publication, M. Manuel dit quil
pourrait en effet le proposer à la Revue du Tarn. Répondant à Louis Latour, il
rappelle que plusieurs articles ont fait état des fouilles réalisées dans le puits, et
que la dernière expédition na été quune simple descente.
La parole est à labbé Georges Baccrabère pour une communication sur Les réchauds toulousains aux XVIe et XVIIIe siècles, publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.
Après avoir remercié labbé Baccrabère, le Président précise quen parlant de « trésor » il pensait bien sûr aux trésors archéologiques qui sont des trésors de mémoire. Puis le Président rappelle pour les plus jeunes membres de notre Compagnie que labbé Baccrabère était bien seul lorsquil sintéressait dans les années 1970 à la céramique commune du Moyen Âge et de
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lépoque moderne. Il le remercie de nous avoir donné
une fois de plus le privilège dexaminer les pièces, et note que notre confrère
est resté volontairement prudent dans ses conclusions sur lutilisation des
réchauds les plus beaux et sur la datation de certaines pièces.
Louis Latour remarque que les premiers réchauds qui nous ont été
présentés sont sans aucun doute de très belles pièces, dont on imagine quelles
ont peu servi. Les dernières sont au contraire communes et correspondent aux nombreux
tétons que lon retrouve lors des labours dans nos campagnes. Labbé
Baccrabère confirme que les pièces du XVIe siècle se
caractérisent par un caractère très décoratif et que les réchauds évoluent ensuite
vers des formes plus pratiques. Louis Latour se demande sil ne faut pas envisager,
comme lindiquait Guy Ahlsell de Toulza, un remplacement des terres vernissées par
des objets en faïence, et labbé Baccrabère précise que les datations proposées
reposent sur des comparaisons avec dautres types de vaisselle et quelques monnaies,
souvent « très fatiguées », retrouvées sur les sites.
Maurice Scellès demande si lon a une idée de la durée
dutilisation de ce type dobjet et il voudrait avoir des précisions sur leur
fréquence et sur leur répartition dans la ville, se souvenant que la verrerie dessinait
des quartiers dhabitat privilégié. Labbé Baccrabère indique que les
réchauds sont peu nombreux au regard de la très grande quantité de vaisselle quil
a recueillie dans Toulouse au cours de ses différentes fouilles.
Répondant au Président, labbé Baccrabère dit quil ne
peut être sûr de la datation du réchaud à décor de torsades, même si lensemble
lui paraît pouvoir être daté du XVIIe siècle. Le plus
important lui semble toujours de publier ces pièces, de les décrire, afin de les mettre
à la disposition des chercheurs. Le Président remercie à nouveau labbé
Baccrabère.
La parole est à Nicole Andrieu pour une communication brève consacrée à Un ostensoir du XVIIe siècle trouvé à Montesquieu-Volvestre :
Le pied ovale, comme de coutume, est bordé dune frise de godrons et cuirs ajourés. La tige est proche de celle des ciboires, constituée dun nud piriforme sobrement décoré entre deux collerettes de godrons. Au-dessus de la seconde bague, la tige se poursuit en balustre jusquà une troisième collerette à godrons. La jonction de la tige et de la custode est ornée dun panache de feuilles. La custode est entourée dune couronne de perles et de cartouches plats.
Les rayons sont ciselés et découpés. Manquent la croix sommitale et la lunule.
Ce soleil a été transformé en reliquaire-monstrance de la Croix, dune façon « hérétique », les reliquaires de la Croix devant toujours être cruciformes.
La visite des sacristies réserve parfois de petites surprises... Dans la plupart des cas, on y trouve les calice, ciboire, croix dautel en argent avec poinçon de Louis III Samson, orfèvre toulousain bien connu, actif de 1778 à 1822, et surtout, de 1798 à 1822, comme en témoignent les poinçons de titre et de garantie. Ces objets témoignent, eux, de la nécessité pour les fabriques nouvellement nommées après le Concordat de 1801 de reconstituer le "matériel" indispensable au rétablissement du culte catholique. De 1790 à 1794, toutes les églises de Haute-Garonne avaient dû livrer à la Monnaie de Toulouse toutes les pièces dargenterie ou dorfèvrerie quelles possédaient, pour quelles soient transformées en espèces sonnantes et trébuchantes. Certaines pièces, soustraites à lattention des commissaires par des paroissiens réfractaires aux mesures révolutionnaires, et parfois de nouveau absentes des inventaires de 1905, réapparaissent à loccasion des inventaires nettement plus sereins que nous réalisons avec les responsables locaux.
Cest le cas de lobjet que je vous présente aujourdhui : un
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petit ostensoir, un "soleil", selon la terminologie
dAncien Régime, transformé en reliquaire de la Croix, probablement au XIXe
siècle, et privé à ce moment-là de sa lunule et de la croix sommitale. Nous
lavons sorti du fond dune armoire de la sacristie de Montesquieu-Volvestre,
derrière plusieurs reliquaires-monstrances de laiton ou bronze doré, des modèles
industriels des années 1860/1880.
La sacristie devant être entièrement vidée de son contenu, dans la
perspective de travaux de mise hors deau et de réfection complète,
lAssociation des amis de léglise Saint-Victor a souhaité que soit fait un
inventaire du patrimoine mobilier avant demballer tous les objets pour les déposer
dans une salle de la mairie.
Étant donné la date donnée par le poinçon, je suis allée consulter
le procès-verbal de visite de Monseigneur de Johanne de Saumery, évêque de Rieux, le 27
mai 1725. Il ny avait pas de soleil dans léglise : "le soleil
na point de pied, on le met sur le reliquaire dargent", mais la chapelle
Notre-Dame-du-Bout-du-Pont et la chapelle des Pénitents bleus possédaient chacune un
soleil dargent. Ces deux chapelles ayant disparu conséquemment à la Révolution, il
nest pas interdit de penser que ce soleil en est un des rescapés.
Bien quen mauvais état, ce "soleil" est un objet rare.
Le catalogue de lexposition "Trésors des églises de France" (Paris 1965)
nen présentait quun, provenant dAups (Var). Les publications de
lInventaire Général des Richesses de la France sur les orfèvres régionaux les
comptent sur les doigts dune main
Il en existe un dans léglise de Ris
(Hautes-Pyrénées) à peu près contemporain, classé Monument historique en 1979.
Nicole ANDRIEU »
Le Président remercie Nicole Andrieu et la félicite de cette découverte qui mérite publication : luvre est en effet extrêmement intéressante et significative.
Au titre des questions diverses, Maurice Scellès présente les photographies dune tête dévêque retrouvée en remploi dans le mur dune maison de Cahors, dans le quartier de léglise Saint-Urcisse. La statuaire gothique nest quexceptionnellement représentée à Cahors : il subsiste dans la cathédrale le gisant de Raymond de Cornil, dont la tête a malheureusement disparu, et une Vierge, également sans tête, qui a sans doute appartenu à un groupe de lAnnonciation. La réapparition de cette tête dévêque, outre les qualités plastiques de luvre, est donc un événement pour notre connaissance de lart gothique à Cahors. Les dimensions indiquent quelle a appartenu à une figure presque grandeur nature ; elle est en calcaire blanc crème, très fin, qui tranche avec le grès qui prédomine pour le décor sculpté de Cahors au moins jusquau XIVe siècle.
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Michèle Pradalier-Schlumberger propose une première analyse de luvre à partir des photographies dont elle a pu disposer :
« Malgré labsence de nez et de menton, la tête dévêque, qui faisait sans doute partie dune statue en pied, présente un intérêt certain par sa facture et peut être datée du XIVe siècle. Le visage lisse, au front bombé à peine marqué par la ligne des sourcils, se caractérise par létirement des yeux, largement fendus et étirés vers les tempes ; la paupière supérieure dessine un bourrelet régulier et la paupière inférieure est rectiligne, un peu remontée dans sa partie centrale. La bouche, malheureusement très abîmée, laisse encore deviner un très léger sourire qui creuse les joues et dessine les commissures des lèvres. Lensemble du visage sinscrit dans un rectangle que le menton et la mâchoire un peu forte devaient accuser. On aperçoit limplantation de la chevelure sous la base de la mitre, les mèches de cheveux sont régulièrement alignées et dessinent une ligne un peu raide au-dessus du front.
Larrière de la tête, en assez bon état, laisse apparaître le cercle gemmé qui formait la base de la mitre ainsi que les deux pans de la mitre, mais la partie haute de la mitre a disparu. Le cercle gemmé est bordé de deux cercles ajourés, et le motif orfévré est encore lisible, le sculpteur a fait alterner des motifs circulaires, aux bords recreusés, et une superposition de deux petits médaillons intermédiaires. Sous la mitre, les cheveux, encore bien visibles sur les côtés de la tête, sorganisent en petites mèches ondées.
Les comparaisons que lon peut faire avec la statuaire languedocienne de la première moitié du XIVe siècle écartent les figurations dévêques de latelier du Maître de Rieux ; même si certains traits du visage, comme les sourcils peu marqués, les yeux étirés et la bouche souriante sont communs à la plupart des visages de latelier toulousain, le visage de Cahors est plus étroit et les cheveux très différents, par leur aspect lisse et bien ordonné. Les mitres du Maître de Rieux nont jamais de cercle gemmé à la base et on soriente plutôt vers des uvres un peu postérieures, datées de la décennie 1350-1360, par exemple la statue dévêque du musée de Carcassonne, dont les cheveux ont encore le caractère bouffant de latelier toulousain, mais dont la mitre est très proche de celle de Cahors (même cercle gemmé à la base). Le visage lisse, labsence de sourcils et les yeux étirés de lévêque du musée de Carcassonne peuvent évoquer le visage de lévêque de Cahors. Signalons également le gisant de lévêque Jean de Cojordan (mort en 1364), dans léglise de Belpech, qui a le même type de mitre. Ces mitres à motifs dorfèvrerie semblent avoir remplacé les grandes mitres à motifs de remplages rayonnants des années 1330-1340. On peut proposer le milieu du XIVe siècle pour la tête de Cahors, et un atelier méridional.Michèle PRADALIER-SCHLUMBERGER »
Maurice Scellès explique que la proximité de la
découverte permet de faire lhypothèse dune statue provenant de
léglise Saint-Urcisse : le saint évêque a-t-il éventuellement été
représenté sur le trumeau du portail ? Il conviendrait en tout cas de compléter la
recherche iconographique pour savoir si saint Urcisse est habituellement représenté
jeune. Aucune autre provenance ne doit cependant être exclue. Michèle
Pradalier-Schlumberger rappelle que la statuaire conservée en Quercy est peu nombreuse et
que les gisants y sont rares.
Le Président remercie les deux intervenants et demande quel est le
sort réservé à cette sculpture. Maurice Scellès précise qu'elle appartient à un
particulier qui serait disposé à la céder au musée de Cahors.
Louis Latour sinquiète du devenir de lhôpital Marchand, gravement endommagé par lexplosion du 21 septembre, alors que des rumeurs parlent de démolition. Il est précisé que lédifice nest pas protégé au titre des Monuments historiques, mais quil a fait lobjet dun dossier très complet dû à Odile Foucaud. Une éventuelle protection ne fait pas lunanimité dans les circonstances actuelles, et le directeur de lhôpital y était jusquici opposé.
Christine Aribaud propose de laisser quelque temps en consultation à la bibliothèque de notre Société le beau catalogue de lexposition Corsica christiana inaugurée le 2 juin dernier.
SÉANCE DU 4 DÉCEMBRE 2001
Présents : MM. Peyrusse, Président, Coppolani, Directeur
honoraire, Cazes, Directeur, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire
général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Mmes Napoléone, Noé-Dufour,
Pradalier-Schlumberger, MM. labbé Baccrabère, Catalo, Gilles, le Père Montagnes,
Mgr Rocacher, MM. Prin, Roquebert, membres titulaires, Mmes Andrieu, Blanc-Rouquette,
Jiménez, Watin-Grandchamp, MM. Garland, Ginesty, Manuel, Salvan-Guillotin, Testard,
membres correspondants.
Excusé : M. Ahlsell de Toulza, Trésorier.
Invitée : Mme Vidal.
Le Secrétaire général donne lecture du
procès-verbal de la séance du 20 novembre dernier, qui est adopté.
Le Président rend compte de la correspondance manuscrite, avec en
particulier les candidatures au titre de membres correspondants de notre Société de Mme
Jeanne Bayle et de Mme Virginie Czerniak. Les rapports sur ces candidatures seront
respectivement confiés à Henri Pradalier et à Anne-Laure Napoléone.
M. Romain Rico nous adresse pour le concours annuel de la Société le
mémoire de maîtrise quil a consacré à larchitecte Lebrun. Un rapporteur
devra être désigné.
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Le Président donne ensuite lecture dun courrier qui nous a été adressé, il y a déjà quelque temps, par le directeur des Archives départementales des Hautes-Pyrénées, M. Jean-François Le Nail, citant plus particulièrement le passage qui concerne nos Mémoires :
« Je saisis cette occasion pour vous redire tout lintérêt que je prends à la lecture des Mémoires de votre Société : non seulement bien sûr, des contributions que vous publiez, toutes de haute qualité et apportant de neufs et solides éléments de connaissance et de comparaison en matière darchéologie et dhistoire de lart au plan régional ; mais aussi des chroniques retraçant la vie académique de la Société archéologique, extrêmement intéressantes pour les détails quelles donnent sur lactivité, les projets, les avis et les prises de position significatives de votre compagnie et de ses membres en matière de protection et de conservation des édifices notamment. Ces chroniques constituent lorgane de la Société, instrument dinformation sans équivalent pour les lecteurs éloignés de Toulouse, et bien évidemment elles sont une mine infiniment riche pour nos successeurs. Me doutant de ce que représentent la constitution et lédition de ce volume annuel, je veux vous dire toute mon admiration pour votre magnifique publication. Et je vous livre mon sentiment pour valoir ce que de droit ! »
Deux dons viennent enrichir notre bibliothèque. De la part de Gabriel Manière, De la vénération historique à saint Jacques le Majeur dans le Volvestre, 44 p., et de celle de Quitterie Cazes et Maurice Scellès, Le cloître de Moissac, Éditions Sud-Ouest, 2001, 239 p.
La parole est à Christine Jiménez pour une communication sur Les couvents des Dominicains et des Franciscains à Rieux-Volvestre (Haute-Garonne) :
« La cité épiscopale de Rieux-Volvestre est située à 47 km au sud-ouest de Toulouse. Au Xe siècle, la première mention du site concerne léglise qui est donnée à labbaye bénédictine de Lézat. Les moines installèrent un prieuré mentionné en 1119. La population se regroupa autour de léglise et de son cimetière donnant naissance ainsi à un bourg ecclésial. À linitiative des Tersac, un autre bourg sorganisa à louest. Sous les comtes de Toulouse, elle est le siège dun bailliage et dun archiprêtré dépendant du diocèse de Toulouse. En 1249, à la mort de Raymond VII, Rieux passa à Alphonse de Poitiers, puis, en 1271, elle fut rattachée à la couronne et devint une Jugerie royale en 1272. Cest lépoque où les Dominicains et les Franciscains sinstallèrent dans la ville. Ces fondations confirment que le bourg est devenu une véritable ville. En 1317, Jean XXII démembra le diocèse de Toulouse et Rieux fut promue cité épiscopale. Au XVe siècle et jusquà la Révolution, elle fut le siège du diocèse civil. En 1801, la promulgation du Concordat supprima le diocèse religieux.
Les deux couvents ont aujourdhui quasiment disparu ; toutefois, les textes, un dessin de 1828 et létude de leurs vestiges permettent de retrouver les bâtiments (1).
Le couvent des Dominicains
Les Tersac introduisirent lordre à Rieux afin dutiliser le couvent comme lieu de sépulture (2). Dès 1272, six religieux furent chargés détudier le projet de cette fondation, puis, en 1273, les prieurs du Puy et de Prouille vinrent enquêter sur les conditions et les promesses détablissement ; il y eut une seconde visite en 1274, et en 1275 le couvent fut définitivement constitué (3) .
Un autre bienfaiteur du couvent, Arnaud Frédet ou Fradet, dominicain, prieur du couvent de Bordeaux en 1302, chapelain et confesseur du pape Clément V en 1305, évêque de Couserans en 1309, mort en 1329, y avait lui aussi élu sépulture (4). Il finança, de son vivant, la construction de léglise, et fit voûter le chur et la première travée de la nef (5).
Dès 1274, les Dominicains achetèrent au roi des maisons situées rue du Soulé du Comte (6). Peu de temps après, les Franciscains sinstallèrent dans le même quartier et un conflit éclata entre les deux ordres mendiants. Un texte daté de 1282, intitulé "accord entre les frères Prêcheurs et Frères Mineurs", nous apprend que les frères Mineurs acceptèrent en effet un emplacement trop rapproché du couvent des Dominicains. Ceux-ci, arrivés les premiers, revendiquèrent le privilège des cannes et imposèrent aux Cordeliers de déménager, au plus tôt, sur un nouvel emplacement situé à lextérieur des remparts ; eux-mêmes eurent droit de sétendre jusquà la rue dAuriac (7).
Dès 1277, le studium était organisé, preuve que certains bâtiments existaient déjà (8). Par la suite, les frères achetèrent ou reçurent des terrains et agrandirent leur couvent, petit à petit. En 1308, un chapitre provincial se tint à Rieux, ce qui suppose que le couvent avait la capacité de loger les participants. Il est probable quà cette date la plupart des bâtiments étaient achevés.
À la Révolution, les religieux quittèrent le couvent et léglise fut fermée ; rendue au culte catholique en juillet 1800, elle fut détruite entre 1801 et 1804 (9).
En 1554, les bâtiments et les jardins du couvent avaient pour limites, à louest, la place des Jacobins, et trois rues, au
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RIEUX-VOLVESTRE, VUE DE LA VILLE EN 1828, dessin anonyme.
Collection particulière.nord, la rue du Four, à lest, la rue de lOrt et au sud, la rue de Solé du Comte (10). Le terrain avait la forme dun quadrilatère se rapprochant dun rectangle régulier, ayant pour superficie 10000 m2 environ, plus de la moitié étant occupée par les jardins. Le côté sud du terrain avait à lorigine une forme plus régulière. En effet, lors des guerres de Religion les consuls empiétèrent sur les jardins afin dagrandir le chemin de ronde puis, en 1595, des particuliers construisirent des habitations sur ce terrain en sappuyant sur le mur de clôture du jardin (11).
Léglise
Léglise était placée sous le vocable de saint Dominique, puis sous celui de sainte Eugénie à la suite de la translation des reliques de la sainte à Rieux, au XVIIe siècle (12). Au cours des siècles, tous les documents la situent sur lemplacement actuel de la promenade publique (13). Daprès le dessin de 1828, léglise était orientée. Elle se composait dune abside polygonale, éclairée par quatre baies et dune nef à quatre travées éclairées chacune par une baie. Les fenêtres sinscrivaient dans des arcs bandés entre les contreforts comme aux Jacobins et aux Cordeliers de Toulouse. Le chur et deux travées étaient voûtés mais le reste de léglise ne létait pas (14). Le clocher, copié sur celui des Jacobins de Toulouse, sélevait au nord de la troisième travée : cétait une tour octogonale à trois étages, composée dun soubassement aux baies aveugles et de deux étages décorés de baies en mitre ; elle était coiffée dun toit. Léglise fut édifiée dans la campagne de travaux achevée en 1308 daprès le style de trois consoles qui peuvent avoir été exécutées entre 1280 et 1320.
Analyse archéologique des vestiges
J. Contrasty, qui ne connaissait pas le dessin de 1828 publié pour la première fois en 1976 (15), situait léglise sur
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lemplacement de la maison de Me Oziouls. À lintérieur de la cave, nous avons retrouvé les vestiges dune abside orientée à louest. Il ne sagit pas dune chapelle construite entre les contreforts de la nef de léglise car, sur le dessin de 1828, lédifice était nettement détaché de léglise. Les sondages effectués par Michèle François montrent lutilisation de plusieurs rangées de galets pour les fondations sur une hauteur de 1,20 m ; seule la dernière rangée est régulière et disposée en épi. Le reste de lélévation est construit entièrement en briques de 5 à 6 cm dépaisseur. Si le niveau de la cave est inférieur aux bases des colonnes, cest parce que le sol fut creusé en 1830 pour aménager une cave vinaire. Les colonnes en briques, à demi engagées, ont été réutilisées, au XIXe siècle, pour supporter le plancher du rez-de-chaussée.
RIEUX-VOLVESTRE, CAVE DE LA MAISON OZIOULS-ARNAULT. Relevé C. Jiménez.
À cause de ses dimensions modestes, 10,50 m sur 5,10 m, il pourrait sagir de la première église des Dominicains construite vers 1275 qui devint chapelle funéraire et prit le vocable de Notre-Dame du Rosaire. Nous avons retrouvé de nombreuses mentions dhabitants désirant se faire enterrer dès le début du XVIIe siècle dans cette chapelle (16). Les premiers bâtiments se situaient au sud de cette église ; après 1282 et suite à lacquisition de nouveaux terrains, les Prêcheurs demandèrent aux consuls lautorisation dempiéter sur la rue publique, afin de bâtir une église plus importante (17).
À lintérieur dune grange de la maison Pérez, construite au XIXe siècle, nous avons retrouvé le mur nord dun bâtiment médiéval, percé de deux oculi. Ces ouvertures donnant sur lextérieur, il sagit dun mur gouttereau, confirmé par la présence dun contrefort à langle est et des traces darrachement dun second contrefort au centre du mur actuel. Ces ouvertures devaient porter un décor de quatre-feuilles. Le cordon, intact, est composé de trois rangées de briques dont une seule porte un quart de rond. Au niveau du rez-de-chaussée, nous avons retrouvé le prolongement de ce mur avec les vestiges dun arc brisé.
RIEUX-VOLVESTRE, GRANGE DE LA MAISON PÉREZ :
le plan montre le mur conservé avec ses contreforts et deux oculi. Relevé A.-L. Napoléone, C. Jiménez.Le mur se prolonge dans une ancienne cuisine. Dessous, à 2,10 m, dans une petite cave aménagée au XIXe siècle, le mur médiéval est bâti avec des galets disposés sur une rangée entre trois assises de brique. Cette technique est utilisée pour les fondations, sur une hauteur de 1,65 m, le reste de lélévation étant construit en briques de 5 cm dépaisseur. Lélévation du mur se poursuit à létage de la maison, où elle est masquée.
Il sagit peut-être dune chapelle axiale et dune sacristie qui sappuyait sur le mur est du chur.
Les bâtiments conventuels
Nous ne savons rien des premiers bâtiments conventuels qui devaient se situer au sud de léglise primitive. Les bâtiments que nous voyons encore de nos jours à lest de lemplacement de léglise pourraient dater de reconstructions postérieures à la réforme du couvent au XVIe siècle. Les bâtiments de plain pied et assez longs pouvaient abriter le réfectoire, le dortoir des novices et servir de galeries pour accéder à léglise ; actuellement, les murs étant entièrement recouverts, aucun passage nest visible. Le bâtiment principal était probablement un édifice entièrement à pans de bois dont seule la façade méridionale fut reconstruite en briques au XVIIe siècle. Il se composait dune cave, dun rez-de-chaussée, dun étage dhabitation et dun grenier accessible par une trappe. Le sous-sol a été en partie comblé mais on voit encore des niches en bâtière et un placard qui pourraient dater du XIVe siècle. À lintérieur, lédifice a subi de nombreuses transformations. Au sud, dautres bâtiments, visibles sur le dessin de 1828, servaient sûrement de dépendances, cuisine, boulangerie, chai
Le cloître se trouvait au sud de léglise ainsi que la salle capitulaire qui ouvrait sur la galerie ouest ; sur la galerie méridionale, on voit encore des traces douvertures ; seul larc brisé à double rouleau pourrait dater du XIVe siècle (18).
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Dautres bâtiments dont nous ne connaissons pas la destination, visibles sur le dessin de 1828, ouvraient sur cette galerie. Létude de dix-sept chapiteaux et de huit bases provenant du cloître nous permet de dégager trois campagnes de construction : une première campagne vers 1277, une deuxième au tout début du XIVe siècle et une troisième vers le milieu de ce même siècle (19). Daprès les vestiges encore en place, la salle capitulaire était un bâtiment de 12 m de long à trois travées. Elle devait être achevée en 1308 car les bases de la porte et les chapiteaux des fenêtres sont très proches de ceux de la salle capitulaire du couvent des Jacobins de Toulouse, achevée en 1301.
Les Cordeliers
Nous avons peu de textes sur lhistoire du couvent. En 1347, Bernard Délicieux y fut détenu (20). En 1534, il passa à lObservance mais resta rattaché à lAquitaine Ancienne. En 1609, le couvent comptait huit religieux, entre huit et six au XVIIIe siècle, et seulement trois en 1790 (21). En 1792, le couvent servit de maison darrêt et, en 1798, tous les bâtiments et les jardins furent vendus : " le dit couvent et dépendances consistant en une église, un cloître, un logement pour les Religieux, un enclos et jardin de contenance denviron un arpent " (22).
Situé extra muros, le couvent était enclavé entre deux fossés et le rempart. Seule la façade nord ouvrait sur la ville. Ce sont les mentions des fossés de la ville, des remparts sud-ouest et de la rue de la Bastide, puis des casernes qui furent construites sur les fossés aliénés par le roi qui permettent de le localiser (23). En mars 1798, lacte de vente des bâtiments donne pour confronts, au nord, la rue du faubourg de la Bastide, au sud, lArize, à lest, le petit jardin de lhospice et la maison dAndré Baron, à louest, les casernes des gendarmeries. Le couvent occupait un quadrilatère dont trois côtés avaient 70 m de long ; le quatrième, en façade sur la rue de la Bastide, mesurait 25 m. Il est évident que les bâtiments sadaptèrent à la topographie du terrain. Une ruelle très étroite, dite des Cordeliers, longeait le fossé ouest dit du bout de la ville.
Léglise
Le dessin de léglise de 1828 montre quelle était orientée au sud. Elle se présentait comme un long édifice, avec de hautes fenêtres qui sinscrivaient dans des arcs bandés entre les contreforts. On compte dix ouvertures, une pour labside polygonale et neuf entre les contreforts signalant neuf travées. Au-dessus des fenêtres, des oculi aéraient les combles. Si nous comparons ce dessin à celui de léglise des Cordeliers de Toulouse, la ressemblance est frappante : une nef très allongée, d'allure massive et puissante, arcs bandés reliant les contreforts, fenêtres étroites et même type de clocher. En outre, les comptes de réparations attestaient la présence de chapelles construites entre les contreforts de la nef, trois à lest, et trois à louest (24).
Le cloître est signalé mais il semblerait quil était en bois.
La maison Vital nest pas portée sur le cadastre de 1823 et léglise était déjà démolie. Un mur traverse la maison du nord au sud, conservé sur une élévation est de 7 m, pour une profondeur de 70 cm ; les briques ont une épaisseur de 3,5 cm à 4 cm. Le mur se prolonge vers le sud où il a été arasé et sert de limite de propriété.
Un autre mur, daprès la tradition, appartenait au couvent. Il est visible sur 16 m, côté maison Lucas et sur 30 m côté jardin Cazarré. Il a été arasé sur 2 m et il a une épaisseur de 1 m. Il sagit probablement du mur ouest du grand bâtiment, à deux étages, que lon voit sur le dessin de 1828 et qui, daprès les baux à besogne, regroupait la cuisine, le réfectoire et les chambres. Dans un document de 1736, les religieux signalaient léglise, la sacristie, la bibliothèque, le dortoir, la dépense, la busquière (remise à bois ?), la cave, une grange et le jardin (25). Ce dernier bordait lArize, en contrebas des terrains occupés par le couvent. On voit encore une fontaine dite des Cordeliers. Un autre mur où lon remarque un cordon pourrait être celui de la salle capitulaire.
Nous avons retrouvé très peu de sculptures. Une clef de voûte quadripartite et une console portant le blason de la famille Lévis de Léran provenaient sûrement du voûtement de léglise, confirmant la participation de cette famille au financement de la construction. Les sculptures sont traitées dune manière assez fruste et bien que contemporaines de celles du couvent des Dominicains de Rieux, elles ne sont pas aussi raffinées. Yvette Carbonell-Lamothe a constaté que les établissements franciscains en Gascogne vers 1300, donnèrent la priorité à léglise qui était dune taille remarquable par rapport au reste de linstallation (26). Elle a constaté limportance du bois et cest le cas à Rieux avec une église où, seule, labside était voûtée et peut-être une travée. Les religieux avaient fait construire un cloître en bois, faute de moyens ou volonté daffirmer lesprit de pauvreté dicté par la règle de lordre. Ainsi, si léglise était conforme à ce qui se faisait à Toulouse dans le domaine de larchitecture : nef unique très allongée, arcs bandés reliant les contreforts, fenêtres étroites, oculi aérant les combles, chapelles entre les contreforts , dans le domaine de la sculpture, on constate une certaine retenue. Francesca Picou étudiant les plans des couvents constate que les dimensions restaient modestes, que les nefs étaient allongées, étroites et de faible hauteur avec des dimensions courantes de 50 m pour 9 à 10 m de largeur (27). Ce sont les dimensions approximatives que nous avons constatées pour léglise de Rieux.
Christine JIMÉNEZ »
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 230
1. Cet article est extrait de notre thèse de doctorat : La cité épiscopale de Rieux-Volvestre (Haute-Garonne), sous la direction de Michèle Pradalier-Schlumberger, Université de Toulouse-Le Mirail, 2000.
2. Maurice Vuillier, Histoire de la famille de Tersac de Montberaud des origines à la Révolution, t. V, Toulouse, 1998.
3. P. A. Amargier, O. P., Bernardus Guidonis, De fundatione et prioribus conventuum provinciarum Tolosanae et Provinciae ordinis Praedicatorum, Instituto Storico Domenicano, Rome, 1961, p. 189-192.
4. P. A. Amargier, op. cit., p. 87 ; B.n.F., Collection de Languedoc, Mémoire de Blaise Binet, vol. 20, fol. 180. A.D. Haute-Garonne, Q 593 1791.
5. B. Binet, op. cit., fol 180.
6. A.M. Rieux, S 4 : Vidimus par lofficial de Toulouse de lettres de 1274 du sénéchal Eustache de Beaumarchais vendant aux frères Prêcheurs des maisons appartenant au roi.
7. A.D. Haute-Garonne, 2 G 166.
8. Jean Contrasty, Histoire de Rieux-Volvestre et de ses évêques, 1936, p. 55.
9. A.D. Haute-Garonne, 2 O 1110 et A.M. Rieux, D 9.
10. A.D. Haute-Garonne, Q 264, A.M. Rieux, compoix G 1, G 2 et G 3, et repérage sur le terrain.
11. A.D. Haute-Garonne 2 G 166 : en 1595, les Dominicains portèrent l'affaire devant Johan Tamans, notaire royal ; la bande de terrain avait pour superficie 4 cannes sur 12, soit environ 150 m2. A.D. Haute-Garonne, 2 G 165 : en 1783, les Dominicains se plaignant que le jardin ne recevait plus les rayons de soleil nécessaires pour fertiliser les terres portèrent l'affaire devant le Parlement de Toulouse ; nous ne connaissons pas l'issue du procès.
12. B. Binet, op. cit.
13. A.M. Rieux, G 1, G 2 et G 3.
14. B. Binet, op. cit. Logiquement, dans son énumération, l'auteur aurait dit : « la troisième n'est point voûtée ». Il signale un don de lévêque de Rieux Hugues dEspagne (1487-1500) pour le voûtement dune travée. Nous avons retrouvé un fragment de clé de voûte portant une partie du blason du prélat confirmant le voûtement de la troisième travée à la fin du XVe siècle, cf. le volume III de notre thèse p. 5 et 6.
15. Raymond Houlès, Rieux-Volvestre, t. II Les Rivois (1780-Directoire-1842-1910), Muret, 1976, p. 12. Le dessin se trouvait chez le docteur Patte ; depuis, il se trouve chez sa petite-fille à Montauban. Une habitante de Rieux, E. Vital, avait elle aussi photographié ce dessin en 1974 ; elle nous a communiqué très aimablement le cliché.
16. A.D. Haute-Garonne, 2 G 139, Registre des obits et fondations avec copie des testaments faits par divers particuliers en faveur du clergé de Rieux de lannée 1544 à 1666. Avant 1620, le lieu de sépulture nétait pas précisé. Ajoutons que nous navons jamais trouvé mention de cimetière. En revanche, lors des travaux de voirie, de nombreux ossements furent mis au jour sur lemplacement de léglise.
17. Cette ruelle était mentionnée comme confront sur l'acte de vente d'une maison située rue du Four qui est dite « dépendante de la ruelle des Jacobins » ; elle n'apparaît sur aucun compoix : visiblement elle longeait la partie nord du couvent.
18. Archives des Monuments historiques, relevé de Maurice Prin.
19. La plupart appartenaient à la famille de Pardaillan : ils furent dispersés dans les années 1970. Voir le volume III de notre thèse p. 32-58.
20. François Gonzaga, De origine Seraphicae Religionis Franciscanae, eiusque progressibus, Rome, 1587, p. 728-729.
21. A.D. Haute-Garonne, 118 bis H 2, dossier Réforme ; L 4214, Département de la Haute-Garonne, district de Rieux, état nominatif des religieux.
22. A.D. Haute-Garonne, 2 O 1109, Préfecture, Procès-verbal dadjudication et vente des Domaines nationaux, conformément à larticle IV des lois du 28 Ventôse.
23. A.M. Rieux, D 3 : « La muraille du bout de la ville proche des Cordeliers menace totale ruine ». La tour que nous avons repérée sur le terrain est toujours signalée derrière les Cordeliers ; idem, G 1, G 2, G 3.
24. A.D. Haute-Garonne, 2 G 84 : Liste des recettes des couvents. Celles de lest étaient dédiées lune à saint Roch, lautre à saint François, saint Antoine, sur le mur ouest à sainte Anne, saint Joseph, et la dernière proche de labside dédiée à Notre-Dame.
25. Idem.
26. Yvette Carbonell-Lamothe, « Les établissements franciscains de Gascogne vers 1300 », dans Cahiers de Fanjeaux, n° 9, 1974, Privat, Toulouse, p. 166-183.
27. Francesca Picou, « Églises et couvents des frères Mineurs en France : recueil de plans », Bulletin Archéologique du Comité des Travaux historiques et scientifiques, n° 17-18, fasc. A, 1981-82, Paris, CTHS, 1984.
Le Président remercie Christine Jiménez de nous
avoir guidés à travers cette difficile lecture des vestiges archéologiques conservés
dans les maisons de Rieux. Il note le grand intérêt des fragments de décor sculpté,
très dispersés, qui montrent une grande diversité de qualité qui va des productions
communes à des uvres plus caractérisées.
Patrice Cabau attire lattention sur le plan de la chapelle des
dominicains, où il voit une chapelle funéraire dès lorigine plutôt quun
premier établissement, ajoutant quil faudrait bien sûr savoir si elle a fait
lobjet dune vénération particulière. Christine Jiménez précise que
lon demande à être enterré dans cette chapelle à partir du XVIe
siècle.
Patrice Cabau remarque que les armes de Gaillard de Preyssac sont
partie de Bertrand de Got parce quil sagit de lun de ses neveux par sa
mère Gaillarde de Got, et donc dans ce cas dun personnage de la plus noble
extraction.
Gabriel Manière sétant enquis de lactivité des frères,
le Père Montagnes dit que cest là lune des difficultés de létude de
ces couvents, car les archives ne disent en général rien de la vie de la communauté. Il
rappelle que les archives conservées sont en général celles qui concernent les revenus
de létablissement, puis il demande des précisions sur la vente des bâtiments
comme biens nationaux. Christine Jiménez indique que la vente sest faite en trois
lots, dont lun comprenait léglise et le cloître ; léglise a
ensuite été revendue puis rendue au culte en 1800.
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 231
Le Président ayant demandé si lon disposait de descriptions des
bâtiments, Christine Jiménez dit que les informations sont rares, les textes se bornant
à faire état dune église très vaste dont le chur est voûté et dun
grand bâtiment.
Sattachant à quelques détails archéologiques, Maurice Scellès
note que larc en partie dégagé présente un tracé qui semble correspondre à
celui dun arc segmentaire plutôt quà un arc brisé, la maçonnerie
environnante, très médiocre, ne lui paraissant pas médiévale. Quant au faux-appareil,
il peut être très tardif, ce type de décor, à fausses pierres de grandes dimensions
dessinées par des traits simples, étant encore employé du XVIe
siècle jusquau XIXe. Christine Jiménez fait cependant
remarquer que des comparaisons sont également possibles avec le décor de certaines
chapelles des Jacobins de Toulouse.
Au titre des questions diverses, Dominique Watin-Grandchamp attire lattention de la Compagnie sur un bâtiment médiéval de labbaye Saint-Sernin.
Ce bâtiment est aujourdhui en vente et pourrait faire lobjet dune opération de promotion immobilière. On s'accorde pour considérer qu'il mérite d'être protégé au titre des Monuments historiques, en insistant sur le fait quil est important de le faire connaître.
Le Secrétaire général annonce que les membres qui souhaitent publier un article dans le prochain volume de nos Mémoires devront lui indiquer le titre et le nombre de pages souhaitées avant le 31 décembre prochain. Il rappelle que la publication est soumise à lapprobation du Bureau et du Comité scientifique.
SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 2001
Présents : MM. Cazes, Directeur, Coppolani, Directeur
honoraire, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Ahlsell de Toulza, Trésorier ; Mmes
Napoléone, Noé-Dufour, M. labbé Baccrabère, MM. Bordes, Prin, membres
titulaires ; Mmes Félix, Fournié, Fraïsse, Pujalte, MM. Burroni, Testard,
membres correspondants.
Invité : M. Patrick Gironnet, architecte des Bâtiments de France du département du
Tarn.
Excusé : M. Peyrusse, Président.
La séance souvre à 17 heures sous la
présidence du Directeur. Après avoir constaté que la froidure a quelque peu réduit le
nombre ordinaire des membres de lassemblée, Daniel Cazes annonce lordre du
jour de la séance.
La parole est au Secrétaire général pour la lecture du
procès-verbal de la séance du 4 décembre 2001, qui est adopté.
Le Directeur rend compte de la correspondance, qui comprend notamment
une copie du jugement rendu en date du 4 octobre 2001 par le Tribunal
correctionnel de Saint-Gaudens à lencontre de M. E. B. pour infraction à
la législation sur les fouilles archéologiques et condamnant celui-ci à verser
une amende de 30 000 F, dont 5 000 sont attribués à notre Société à titre
de dommages et intérêts.
Daniel Cazes présente louvrage, tout récemment paru, de notre confrère Louis Latour : Le canton dAuterive (Empreinte éditions, 2001), cinquième volume de la série consacrée aux Églises et Chapelles de la Haute-Garonne, dont la publication est assurée par lAREC 31 sous la direction de Mgr Jean Rocacher. Le Directeur remercie M. Latour davoir offert pour notre bibliothèque un exemplaire de son travail, qui circule dans lassemblée.
La parole est à Anne-Laure Napoléone pour son rapport sur la candidature de Mme Virginie Czerniak, assistante de conservation à Moissac, au titre de membre correspondant de notre Société. Il est procédé au vote : Mme Czerniak est élue membre correspondant.
Le président de séance donne ensuite la parole à Chantal Fraïsse pour la communication du jour, intitulée Observations sur le fonctionnement du scriptorium de Moissac autour de 1100, publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.
Daniel Cazes remercie vivement Chantal Fraïsse, qui a su faire revivre parmi nous le scriptorium de Moissac, à la fois si familier et si énigmatique. Il évoque lextraordinaire qualité esthétique de ces lettres ornées où se mêlent entrelacs et rinceaux dévorés ou crachés par des créatures étranges, toutes images qui donnent à rêver. Sil rappelle les relations existant entre les jeux graphiques de ces enluminures et la plastique des chapiteaux du cloître de Moissac, cest pour souligner que le travail sur le parchemin est dune précision beaucoup plus grande que le travail dans la pierre, cela sexpliquant sans doute par des raisons techniques. Le Directeur fait ensuite appel aux questions et observations de la Compagnie.
Maurice Scellès revient sur le problème du rapport entre lettrines et rubriques. Chantal Fraïsse confirme que lanalyse des textes reste à préciser pour établir une relation didentité entre peintre des initiales ornées, scripteur des incipit et copiste du corps du texte. Puis elle exprime son sentiment que lapprentissage paraît se faire directement, au contact de la tâche, en quelque sorte sur le tas, tant il est manifeste que certains peintres évoluent au cours même de leur travail. M. Scellès indique avoir fait avec Quitterie Cazes le même constat pour ce qui est de la sculpture du cloître. Il note que les chapiteaux présentent de sensibles variations de qualité, juxtaposant des prestations dartistes de haut niveau et des productions dopérateurs moins doués. Relevant lutilisation du mot « artiste », Mme Fraïsse dit que ce terme dont nous nous servons à propos des peintres ou sculpteurs « principaux » ne doit pas laisser croire à une individualité spécialisée, isolée, possédant un statut à part : sagissant des lettres
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enluminées, elle est convaincue que leur auteur ne
se pensait pas comme un « artiste » singulier. Elle insiste sur le fait que,
manifestement, pour ceux qui travaillaient dans le scriptorium de Moissac,
lécriture était première. M. Scellès abonde en ce sens. Reprenant le parallèle
avec la sculpture, il montre que le cloître de Moissac est tout entier un discours,
illustré certes, mais avant tout un texte.
Mme Fraïsse rappelle que le peintre auteur du manuscrit illustré du
Traité des Vertus et des Vices, compilé à Moissac dans la première ou la deuxième
décennie du XIe siècle (B.n.F., ms. 2077 ; voir « Bulletin de
lannée académique 1999-2000 », dans M.S.A.M.F., t. LX, 2000, p. 213),
concevait limage comme un medium, un moyen de transmettre la parole de
Dieu ; aux environs de 1100, il ny a pas à Moissac de « grande
illustration », d« iconographie pure ». Daniel Cazes se demandant
si limage ne vient pas par le truchement du jeu épigraphique, particulièrement
élaboré dans les incipit, Mme Fraïsse déclare que les rubriques constituent une
forme intermédiaire entre texte et image. Maurice Scellès sinterroge sur la
disparition des illustrations au profit des lettrines, explicable par la primauté
accordée au texte : cet abandon de limage participe-t-il dun phénomène
général au XIe siècle, ou bien est-il propre à labbaye de
Moissac ? Chantal Fraïsse dit quune pareille évolution peut paraître
sesquisser pour le scriptorium de labbaye Saint-Martial de Limoges,
mais quelle y est beaucoup moins perceptible quà Moissac.
Un membre de lassemblée sétant intéressé à telle
grande initiale A réalisée en deux temps, « commencée par le maître » et
« achevée par un élève », notre consur précise quil
sagit, pour le scriptorium de Moissac, de la seule lettrine peinte à deux
(ou quatre) mains, puis elle exprime toute sa réticence à parler en termes de
« maître » et d« élève » : une telle
hiérarchisation lui apparaît comme peu conforme à lesprit dune communauté
monastique qui accueillait des individus sans doute divers, mais quil importait
dintégrer très vite dans une relation de confraternité. Olivier Testard
intervient en ce sens, qualifiant la relation entre peintres complémentaires de
« rapport de bonne compagnie », de « coup de main prêté à un
confrère ».
François Bordes revient sur limportance des textes, demandant si
la transcription dun ouvrage a été assurée, du début à la fin, par le même
scripteur, puis, de façon plus générale, il pose la question de savoir sil est
possible de parler dune « culture » du scriptorium de Moissac.
Mme Fraïsse souligne combien tout ce qui est systématique est étranger au scriptorium
moissagais : les manuscrits y sont des uvres plurielles, collectivement
élaborées, et aucun scripteur nest attaché à un ouvrage particulier ou
exclusivement affecté à un type douvrage ; quant à la notion de
« culture », elle est bien trop moderne, par trop contemporaine pour être
pertinente.
Daniel Cazes remercie une fois encore Chantal Fraïsse de nous avoir
offert une communication aussi passionnante.
Au titre des questions diverses, Guy Ahlsell de Toulza annonce quil a reçu de Mme Martine Rouche un message électronique daté du 5 décembre sollicitant le patronage de notre Société pour le Salon du livre dhistoire locale qui doit se tenir à Mirepoix en 2002. François Bordes présente en quelques mots cette manifestation, organisée chaque année et fort conviviale.
Lordre du jour étant épuisé, le Directeur, en son nom et au nom du Bureau, souhaite à tous de bonnes fêtes de Noël et de fin dannée.
SÉANCE DU 8 JANVIER 2002
Présents : MM. Peyrusse, Président, Cazes, Directeur, Ahlsell de
Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général,
Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Merlet-Bagnéris, Napoléone, Noé-Dufour,
Pousthomis-Dalle, MM. Prin, Tollon, Vézian, membres titulaires ; Mmes Conan,
Fronton-Wessel, Jiménez, Pujalte, Ugaglia, Watin-Grandchamp, MM. Burroni, Cranga,
Ginesty, Macé, membres correspondants.
Excusés : M. Coppolani, Directeur honoraire, Mme Cazes.
Invitées : Mme Latour, Mlle Rieg.
La Compagnie se retrouve à 17 h au Musée Saint-Raymond pour une visite de lexposition Lor de Tolosa. Le Président remercie Daniel Cazes et Évelyne Ugaglia de nous offrir ce premier bonheur de lannée civile en nous accueillant au Musée Saint-Raymond pour nous permettre de revisiter, non pas une exposition au titre accrocheur comme Lor des Scythes, Lor des Incas ou Lor des steppes, mais un vrai sujet dhistoire toulousaine. On sait quil y a là quelques points de discorde entre les historiens de lAntiquité, mais nous nentrerons pas dans ces débats, portant plutôt notre attention sur les études techniques très savantes qui nous sont proposées.
Évelyne Ugaglia, commissaire de lexposition,
présente alors à la Compagnie les sections successives de lexposition :
lor de Toulouse entre histoire et légende, lextraction du minerai et une
exceptionnelle série de parures dor, torques, bracelets et anneaux de chevilles,
rassemblés pour la première fois.
Le Président remercie Évelyne Ugaglia davoir su nous présenter
aussi prestement un ensemble qui comprend en fait trois expositions, et il demande
sil est possible de rêver à une grande exposition qui ne ferait justement pas
léconomie de tous les mythes. Évelyne Ugaglia abonde dans ce sens en estimant
quil faudra consacrer une grande exposition aux origines de Toulouse prenant en
compte jusquaux découvertes récentes faites à Vieille-Toulouse.
À propos des torques dune seule pièce, le Président
sétonne de leur taille et demande sil faut penser quils étaient
portés par des enfants. Évelyne Ugaglia le confirme en précisant que lon a des
exemples de sépultures denfant accompagnées darmes de dimensions réduites,
ou de défunts accompagnés des parures de tailles différentes portées pendant leur vie.
Le Président layant
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 233
interrogée sur les traces dusure que portent ces bijoux,
Évelyne Ugaglia indique quelles sont en particulier visibles sur les fermetures.
Le Président demande si lon a une idée des alliages et des
provenances de lor. Après avoir rendu hommage à lextraordinaire travail
réalisé par Mme Hélène Hautenove, spécialiste de lorfèvrerie, et Mme
Ambruster, orfèvre, Évelyne Ugaglia dit que les analyses des torques conservés au
Musée Saint-Raymond sont anciennes : de nouveaux matériels sont attendus, qui
devraient prochainement permettre des avancées. Elle souligne que lintérêt de
lexposition actuelle est en particulier de sattacher aux bijoux eux-mêmes,
alors quils sont toujours montrés comme objets dillustration.
Le Président remercie Évelyne Ugaglia en prenant rendez-vous au nom de la Compagnie pour la prochaine exposition.
SÉANCE DU 22 JANVIER 2002
Présents : MM. Peyrusse, Président, M. Coppolani, Directeur
honoraire, Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau,
Secrétaire-adjoint ; Mmes Cazes, Napoléone, Pradalier-Schlumberger, MM. Bordes, Catalo, Pradalier, Prin, Mgr
Rocacher, MM. Roquebert, Tollon, membres titulaires ; Mmes Blanc-Rouquette, Conan,
Czerniak, Fraïsse, Fronton-Wessel, Jiménez, MM. Geneviève, Ginesty, Salvan-Guillotin,
Testard, membres correspondants.
Excusés : Mme Pousthomis-Dalle, MM. Garland, Pousthomis.
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 8 janvier et le Secrétaire-adjoint de celui de la séance du 18 décembre : les deux procès-verbaux sont adoptés.
Le Président présente à la Compagnie Mme Virginie
Czerniak, nouvellement élue membre correspondant et qui prend séance ce soir. Puis il
rend compte de la correspondance manuscrite :
- Christian Mange, directeur de la section dHistoire de
lArt à lUniversité de Toulouse-Le Mirail, remercie notre Société de
laide quelle lui a apportée en lui permettant dorganiser les
soutenances de thèses et de maîtrises dans ses locaux après lexplosion
dA.Z.F. ;
- notre confrère Pierre Gérard nous adresse ses vux en
regrettant que sa santé ne lui permette pas dêtre plus souvent présent parmi
nous ;
- notre Président et notre Trésorier sont convoqués à la prochaine
réunion du Bureau de la Fédération des Sociétés savantes et académiques de
Toulouse ;
- la Fédération historique de Midi-Pyrénées lance un appel à
communication pour le 54e congrès régional qui se tiendra à Millau les 21-23
juin 2002.
Notre bibliothèque senrichit de plusieurs
dons :
- Louis Malet et Françoise Nobaut-Martin, préface de Louis Peyrusse, Pierre-Paul
Laclau, sculpteur Tarnais de mobilier déglise et autres artisans sur bois des
Ségalas au XIXe siècle, Archives et patrimoine, 2001, 141
p. (don des auteurs) ;
- de la part de Michel Roquebert, un épais dossier de photocopies du
fonds Doat concernant labbaye de Boulbonne ;
- de M. Pierre Carci, Villeneuve dAveyron, maison impasse de
Cavalier : étude de la charpente, 2001, 5 p. + 11 p. dillustrations,
photocopie, inédit.
Nous avons par ailleurs reçu deux candidatures pour le concours : Mlles Mélanie Chaillou et Nancy Moreno présentent leurs mémoires de maîtrise, respectivement sur les maisons médiévales de Puycelsi (Tarn) et de Lauzerte (Tarn-et-Garonne). Le premier rapport est confié à Quitterie Cazes, le second à Jean Catalo.
Lordre du jour appelle lélection dun membre correspondant. Le rapport dHenri Pradalier sur la candidature de Mme Jeanne Bayle entendu, celle-ci est élue membre correspondant.
La Compagnie se constitue en Assemblée générale et le Président présente le rapport moral de lannée 2001. La parole est ensuite au Trésorier pour le rapport financier. Le rapport moral est soumis à lapprobation de la Compagnie et approuvé. Le rapport financier est approuvé et il est donné quitus de sa bonne gestion au Trésorier.
Le Président rend compte de la dernière réunion
du Bureau et indique quil est envisagé de nommer plusieurs membres honoraires, en
vue daccroître le rayonnement de notre Société. Les membres du comité
scientifique des Mémoires, Mme Éliane Vergnole, M. Patrick Périn et M. Jean
Guyon seront proposés et le Président propose également M. Bruno Foucart. Leur
élection sera évoquée à la prochaine séance.
Puis le Président rappelle que les élections statutaires concernent
cette année les fonctions de Président, de Secrétaire général et de
Bibliothécaire-Archiviste. Le Bureau propose la candidature de Michèle
Pradalier-Schlumberger qui a bien voulu accepter de se présenter aux suffrages de la
Compagnie pour la fonction de Président. Il est bien difficile de faire son éloge devant
elle, mais chacun ici connaît la rigueur et lexigence avec lesquelles elle assure
son enseignement à lUniversité et suit le travail de ses étudiants. La Société
Archéologique du Midi de la France trouvera ainsi loccasion de montrer quelle
est ouverte aux femmes et capable de leur donner toute leur place. Notre consur ne
sera pas la première femme à exercer la présidence de lune des
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 234
Compagnies de
lHôtel dAssézat, venant après Mme Enjalbert élue à lAcadémie des
Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres, dont la présidence est cependant tournante,
mais la première à être élue à la Présidence de notre Société.
Après avoir souligné lénorme travail réalisé par le
Bibliothécaire-Archiviste et le Secrétaire général, le Président demande à la
Compagnie de leur renouveler sa confiance. Louis Latour annonce que ce sera son dernier
mandat de Bibliothécaire-Archiviste. Il souhaite être remplacé dans deux ans, en
assurant toutefois quil aidera son successeur.
On procède au vote. Au moment de dépouiller les
bulletins, le Président fait remarquer au Trésorier, pour la dernière fois
précise-t-il, que lurne est extraordinairement incommode.
Votent les dix-sept membres titulaires. Michèle
Pradalier-Schlumberger, Louis Latour et Maurice Scellès sont élus ou réélus
respectivement Présidente, Bibliothécaire-Archiviste et Secrétaire général. Louis
Peyrusse les félicite tous trois en leur prodiguant ses encouragements.
La parole est à Jean Catalo pour une communication sur Le couvent médiéval des Cordeliers de Castres (Tarn), publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.
Le Président remercie Jean Catalo davoir su
nous présenter, en respectant la contrainte de temps imposée, un exposé aussi
passionnant sur une fouille pourtant assez complexe. Jean Catalo dit quen effet il
sagit dun état du site difficile à percevoir, ne présentant que peu
déléments en élévation, les Protestants ayant récupéré tous les matériaux
pour construire un bastion ; les conditions de fouille ont en outre imposé
daller au plus rapide, sans que trop dinformations aient cependant été
perdues. Lun des principaux acquis est celui du plan des bâtiments du couvent
médiéval.
Le Président remarque la spectaculaire rencontre des données de
lhistoire sérielle et de larchéologie, et demande sil ne faut pas
sinquiéter dune aussi parfaite correspondance. Jean Catalo reconnaît que les
conclusions de létude ont été sur ce point surprenantes, considérant quune
telle coïncidence rendait dautant plus utile leur présentation.
Quitterie Cazes demande des précisions sur les éléments qui ont
imposé une orientation de léglise si peu conforme. Pour Jean Catalo, ce
sont sans doute le rempart du XIIIe siècle et la volonté
dutiliser le mur de la fortification tout en se plaçant au plus près dune
entrée dans la ville qui ont dicté limplantation des bâtiments du couvent.
Daniel Cazes layant interrogé sur déventuelles
découvertes déléments sculptés ou épigraphiques en liaison avec le cloître ou
la salle capitulaire, Jean Catalo indique que la seule sculpture mise au jour par la
fouille est la tête retrouvée dans la fondation du chevet de léglise. Il
précise que le sol de la salle capitulaire avait été excavé, peut-être pour
récupérer les dalles funéraires qui pouvaient sy trouver. Le Président demande
sil faut y voir la manifestation de liconoclasme des Protestants ou bien la
seule volonté de récupérer tous les matériaux disponibles. Pour Jean Catalo, il
sagit plutôt de récupération et il serait sans aucun doute intéressant de
pouvoir examiner le bastion qui, aujourdhui, se trouve sous la place.
Quant à la tête sculptée qui a été présentée, Michèle
Pradalier-Schlumberger dit quelle la situerait plus volontiers dans la première
moitié du XIIIe siècle, proche donc de la fondation du
couvent, et pas au-delà du milieu du siècle. Sa facture est élaborée et montre un
traitement très décoratif. Jean Catalo dit avoir eu limpression dêtre en
présence dune sculpture juste ébauchée. Daniel Cazes remarque quelle
évoque des types antiques, celui dun Silène ou encore le type socratique si
lon se réfère au profil encore perceptible en dépit de la cassure. Elle
appartiendrait ainsi à un répertoire bien représenté dans la sculpture gothique et
plus particulièrement utilisé dans les parties hautes des édifices.
Henri Pradalier sinterroge sur la pertinence de
lattribution de cette sculpture, si lon en remonte la datation au début du XIIIe
siècle, au premier couvent des Cordeliers, dont les constructions devaient être bien
modestes. Jean Catalo confirme que le site nétait auparavant occupé par aucun
autre édifice.
À propos du cimetière, Henri Pradalier demande où étaient
enterrées les femmes puisquelles y sont aussi nettement sous-représentées. Jean
Catalo explique que la clientèle des Franciscains est surtout recrutée parmi les
artisans et les marchands et que lélection de sépulture suppose un testament. Les
analyses de Marie-Claude Marandet sur le Toulousain, le Lauraguais et le pays castrais à
la fin du Moyen Âge ont montré quil y avait une relation étroite entre la
rédaction dun testament et le niveau de richesse, les femmes ayant de fait moins
souvent les moyens de tester que les hommes. Henri Pradalier en convient mais fait
remarquer que cela nexplique pas que les épouses soient enterrées ailleurs, la
même interrogation valant pour les enfants, comme le note Quitterie Cazes. Jean Catalo
précise que dans 60 % des volontés exprimées, les hommes demandent à être enterrés
auprès des parents hors le conjoint, mais que dans bien des cas on choisit de se faire
inhumer auprès dun confrère ou dun ami, signe peut-être dun certain
relâchement des liens familiaux au profit de liens autres. Les femmes, elles, demandent
majoritairement à être enterrées auprès de leur conjoint.
Après une question sur le statut de ce cimetière, Bruno Tollon
demande si la fouille des sépultures a été exhaustive. Jean Catalo répond par la
négative, en affirmant toutefois que lon dispose dun bon échantillon puisque
ce sont 135 individus qui ont été identifiés à lintérieur de lenclos, ce
qui représente à peu près la moitié de lemprise probable du cimetière. On se
trouve dans un contexte particulier où les données statistiques sont donc
significatives. Daniel Cazes voudrait savoir où étaient inhumés les frères. Jean
Catalo indique quà son corps défendant, il ne lui a pas été possible de fouiller
la galerie du cloître et la salle capitulaire, excepté un caveau familial. On ne peut
donc exclure quelles aient été le lieu privilégié des premières sépultures des
frères ; la question reste posée dun éventuel mélange, par la suite, des
sépultures des frères et de personnes extérieures au couvent.
Au titre des questions diverses, le Président annonce que la livraison davril 2002 de la Lettre des Amis de lHôtel dAssézat sera consacrée à la présentation de la Société Archéologique. Par ailleurs, le concert organisé par les Amis de lHôtel dAssézat aura lieu le 8 février.
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 235
Est ensuite évoqué le projet dagrandissement du bâtiment du catéchisme sur lemplacement du cloître de la cathédrale de Saint-Étienne. Le projet est surprenant si lon se rappelle que les déclarations dintention depuis les interventions de Stym-Popper ont toujours affirmé la nécessité du dégagement de lespace du cloître afin den permettre la fouille et une présentation un peu plus digne. Il faut relever quil vient au jour après que lon a, sur le site voisin de la rue Sainte-Anne, évacué toute possibilité de fouille et de mise en valeur des vestiges de lancienne église Saint-Jacques et que lon a masqué le rempart romain, pourtant conservé jusquà son crénelage que lon est en train de recrépir consciencieusement. Il est clair quil ny a aucune réflexion sur la sauvegarde et la mise en valeur de lenvironnement de la cathédrale. Un membre renchérit en relevant que lon constate une fois de plus labsence de toute vision densemble. Un autre précise que, s'il a bien lu le panneau de travaux, cest larchitecte en chef qui intervient sur ces bâtiments déplorables, presque du préfabriqué, au lieu de les démolir comme on pouvait raisonnablement lattendre de ladministration des Monuments historiques.
Le Secrétaire général rend compte de
lentrevue quil a eue, en compagnie de M. Féron, avec ladjoint au Maire
de Toulouse chargé de la culture, Me Bouscatel. Lobjet était
linformatisation des catalogues des bibliothèques des Académies et Sociétés
savantes de lHôtel dAssézat et leur éventuel intégration dans le réseau
des bibliothèques et de la médiathèque de la Ville de Toulouse. Me Bouscatel a
confirmé que le Maire de Toulouse était très favorable au projet, comme lui-même, et
que cela allait dans le sens de la politique culturelle de la Ville. En levant toute
éventuelle ambiguïté sur le sens de lexpression « politique
culturelle », le Secrétaire général saisit loccasion pour rappeler que
toute discussion politique ou religieuse est interdite par les statuts de notre Société.
Le Secrétaire général brosse à grands traits le tableau des implications que pourrait
avoir lentrée de la bibliothèque de notre Société dans le réseau des
bibliothèques de la Ville et conclut son propos en souhaitant un débat en séance sur ce
sujet.
Mme Blanc-Rouquette rappelle que ce projet de réseau est déjà un
très vieux projet. Le Bibliothécaire-Archiviste exprime un accord de principe.
Maurice Scellès présente ensuite à la Compagnie un document acheté tout récemment sur le marché Saint-Sernin, parmi divers actes notariés privés, dune importance très secondaire mais qui peut être ajouté au dossier de la fabrique de faïence Fouque et Arnoux. Il sagit dune procuration, établie sur papier timbré :
Je soussigné Jean Monthieu Propriétaire demeurant à Ardiège déclare constituer par ces présentes pour mon mandataire général et spécial, le sieur Léon Arnoux Manufacturier demeurant à St Gaudens auquel je donne pouvoir pour et moi et en mon nom, de me représenter à lassemblée générale des créanciers de la Société Fouque et Arnoux et Cie qui doit avoir lieu le 25 du courant à Toulouse, et de faire valoir mes droits relativement à ma créance sur cette société laquelle créance lélève à la somme de f 1521 signer les concordates et généralement faire relativement à ce que dessus tout ce qui sera utile et nécessaire, promettant de ratifier les engagements qui seront contractés en mon nom par mon mandataire.
Fait à Ardiège le 15 septembre 1848
Monthieu
SÉANCE DU 5 FÉVRIER 2002
Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes,
Directeur, Coppolani, Directeur honoraire, Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste ; Mmes Napoléone, Noé-Dufour, M. Gilles, le Père
Montagnes, MM. Peyrusse, Pradalier, Prin, Mgr Rocacher, M. Vézian, membres
titulaires ; Mmes Bayle, Czerniak, Fronton-Wessel, Pousthomis-Dalle, Rousset, MM.
Balagna, Burroni, Ginesty, membres correspondants.
Excusé : MM. Scellès, Secrétaire général, Ahlsell de Toulza, Trésorier,
Garland, membre correspondant.
La séance souvre à 17 heures sous la
présidence de Michèle Pradalier-Schlumberger, qui se déclare très impressionnée en
prenant ses nouvelles fonctions. Après avoir exprimé son regret que Louis Peyrusse
nait pas souhaité continuer danimer notre Société, dune façon dont
le rapport dactivité rend compte éloquemment, elle remercie ses collègues pour la
confiance quils lui ont témoignée par leur vote. Mme Pradalier-Schlumberger se dit
très heureuse dêtre la première femme à présider notre Compagnie, novation qui
lui paraît porteuse despoir ; elle indique quelle sest fixé pour
programme de continuer à faire vivre notre vieille institution.
La Présidente accueille Mme Jeanne Bayle, récemment élue membre
correspondant, qui prend séance ce soir.
La parole est au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal
de la séance du 22 janvier, qui est adopté.
Jean Rocacher intervient à propos de la cour Sainte-Anne,
dénonçant la « gestion bâtarde » de cet espace, labsence de tout plan
concerté : léglise Sainte-Anne et le terrain de la cour appartiennent à la
Ville de Toulouse ; la cathédrale et les bâtiments de la préfecture sont
propriété de lÉtat ; les lieux sont occupés par le clergé, qui a
constitué une association sous le régime de la loi de 1901, chargée de la gestion.
Concernant le bâtiment de la manécanterie, le projet élaboré par larchitecte de
la Ville vise à créer un corps unique comportant deux niveaux, dont un en rochelle. Les
travaux en cours consistent à le consolider et à le surélever
M.S.A.M.F., t. LXII, p. 236
légèrement de
0,30 ou 0,40 m , ainsi quà supprimer les constructions adventices en
appentis. Sagissant de la cour elle-même, Mgr Rocacher déplore quelle serve
de dépôt, voire de décharge. Il rappelle que lentreprise Réal y avait entassé
les éléments sculptés provenant de la dépose de la balustrade du portail occidental de
la cathédrale, quune autre entreprise les a déplacés devant lentrée de la
chapelle Sainte-Anne, actuellement fermée pour travaux, et que des tas dordures se
sont depuis agrégés au dépôt lapidaire. Inquiet de cette dérive, il a adressé dans
le courant de la semaine précédente un courrier à larchitecte en chef des
Monuments historiques, M. Bernard Voinchet.
Henri Pradalier constate avec amertume que les fouilles et les
publications de notre consur Quitterie Cazes ne paraissent pas avoir provoqué la
nécessaire prise de conscience de la haute valeur historique et archéologique des lieux.
Il demande par qui sont financés les travaux qui vont pérenniser un bâtiment tout juste
bon à démolir. Jean Rocacher répond quils sont intégralement à la charge de la
Ville, maître douvrage. M. Pradalier envisage la possibilité dune
intervention auprès des autorités paroissiales et diocésaines. Mgr Rocacher dit que le
problème qui sest posé à elles était celui de trouver un lieu de réunion
commode pour les groupes de la paroisse, et que la rénovation du bâtiment de la cour
Sainte-Anne est apparue comme la solution la plus appropriée. Sans doute est-il trop tard
pour empêcher la réfection de cette « misérable bicoque ».
Un membre souligne que nous avons maintes fois posé
le problème des opérations menées sur le site du quartier canonial de la cathédrale
Saint-Étienne, dans un secteur où le rempart romain est conservé sur toute son
élévation ; cependant, les comptes rendus de nos séances nétant publiés
que plusieurs mois après lactualité, il se trouve que les personnes
décisionnaires intéressées ne sont pas informées en temps utile. Dans ces conditions,
il lui paraît souhaitable de faire passer immédiatement dans la presse la teneur de nos
discussions.
Jean Rocacher objecte la grande complexité de dossiers où
interviennent des entités multiples et très diverses, la lenteur des négociations, et
la difficulté dobtenir des informations valables. À ce sujet, Henri Pradalier se
demande si lArchitecte en chef des Monuments historiques a été prévenu des
travaux projetés dans lenvironnement du monument classé quest la cathédrale
Saint-Étienne.
On propose de sassurer un relais dans la presse, ce qui serait le
seul moyen efficace pour faire passer rapidement les informations, en dehors bien entendu
de tout esprit de polémique. Louis Peyrusse concède que la Société manque assurément
dun attaché de presse, mais il fait observer que les procès-verbaux de nos
séances sont publiés dans le mois qui suit sur le réseau Internet et quils sont
accessibles à tous ceux qui désirent sinformer ; il est en loccurrence
à noter que le site de notre Société est cité en exemple par les membres de la
Société française dArchéologie.
La Présidente présente un ouvrage collectif offert par notre consur Virginie Czerniak : Groupe de Recherches sur les Peintures murales, Vifs nous sommes , morts nous serons La rencontre des trois morts et des trois vifs dans la peinture murale en France, éditions du Cherche-Lune, Vendôme, 2001, 173 p., 118 photographies en couleurs.
La parole est à Valérie Rousset pour la communication du jour, consacrée à des Maisons jumelles médiévales de Mayrinhac-Le-Francal (Lot), publiée dans ce volume (t. LXII, 2002) de nos Mémoires.
La Présidente remercie lintervenante pour
cette étude dune maison rurale du Lot, qui vient compléter les recherches menées
sur les maisons urbaines de Cahors, Figeac, Gourdon et Martel. Après voir insisté sur
lintérêt présenté par les éléments en place dans leur état originel ou quasi
originel : placards, éviers, foyers
, Mme Pradalier-Schlumberger relève que la
reconstruction du mur de façade donne à lédifice un aspect très sec. Puis elle
fait appel aux questions et observations de la Compagnie.
Anne-Laure Napoléone incite à la prudence quant à la datation du
monument. Il semble en effet difficile de raisonner sur labsence de cheminée :
on construisait encore au XIVe siècle des maisons où il
ny en avait pas. Sans doute est-il nécessaire dattendre les résultats de
lanalyse dendrochronologique. Valérie Rousset précise à ce sujet que cette étude
portera sur des éléments fiables : il sagit des linteaux de bois surmontant
les éviers, ainsi que de lextrémité de corbeau incluse dans la façade.
Concernant lutilisation du bois dans la construction, elle souligne que
lespace intérieur de cette maison double devait être divisé non par un mur de
refend (pas de traces darrachement dans les maçonneries), mais par une structure
légère, certainement en pan-de-bois. Pour la datation, elle dit sêtre également
référée à labsence de chanfrein sur lencadrement des fenêtres. Anne-Laure
Napoléone fait observer que ce critère est discutable, étant donné que la taille
darêtes vives ou abattues paraît être liée à la nature du matériau mis en
uvre.
Louis Peyrusse se déclare « spectaculairement frappé »
par la brutalité des opérations de restauration et pose la question de la protection du
monument. Valérie Rousset répond quil nexiste aucune disposition en ce sens,
et quaucune procédure na été engagée pour en obtenir une. M. Peyrusse
demande sil ny avait pas moyen de procéder autrement que par démolition et
reconstruction du mur de façade. Mme Rousset indique que le démontage et le remontage
sont apparus comme la solution la plus expédiente, tout à la fois pour des raisons de
délai, de coût et defficacité technique. Louis Peyrusse sétant enquis de
lexistence dautres maisons aussi ajourées dans la partie centrale de leur
façade, Valérie Rousset dit quelle nen connaît pas dautres exemples.
Nelly Pousthomis-Dalle sinterrogeant sur le point de savoir si
lirrégularité de lappareil peut suggérer une date plutôt tardive, Valérie
Rousset précise que les maçonneries, bien montées, mais non assisées, liées à
largile, paraissent correspondre à un milieu particulier, dont la connaissance
demande à être approfondie.
Patrice Cabau relève la proximité dun prieuré bénédictin
dépendant de labbaye de Tulle et pose la question dune relation
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possible entre cet établissement religieux et larchitecture particulière des maisons à double module. Mme Rousset répond quil y a là certainement une voie de recherche à explorer ; elle dit avoir prévu en ce sens une analyse du bourg dans son ensemble.
Séances du 20 février 2001 au 19 juin 2001
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