Mémoires
de la Société Archéologique
du Midi de la France

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Tome LXIV (2004)


BULLETIN DE L’ANNÉE ACADÉMIQUE
2003-2004

établi par Patrice CABAU & Maurice SCELLÈS  


Les parties non reproduites dans l'édition papier apparaissent en vert dans cette édition électronique.

Séances du 7 octobre 2003 au 24 février 2004 Séances du 2 mars 2004 au 1er juin 2004

M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 250

SÉANCE DU 2 MARS 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Scellès, Secrétaire général, Latour Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Noé-Dufour, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, MM. l’abbé Baccrabère, Bordes, Gilles, Hermet, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Pradalier, Testard, Tollon, Vézian, membres titulaires ; Mmes Bayle, Marin, Pujalte, MM. Manuel, Molet, Stouffs, membres correspondants.

La Présidente rend compte de la correspondance manuscrite. Ce sont tout d’abord deux courriers en réponse au dossier consacré à l’affaire de l’ancien collège de Périgord qui a été adressé avant publication dans nos Mémoires aux personnes intéressées en offrant la possibilité d’user d’un droit de réponse. Le Président du Conseil régional, M. Martin Malvy, nous assure qu’il en a pris connaissance avec intérêt et nous propose de prendre contact avec le Directeur Général Adjoint des Services pour compléter notre information. La Direction régionale des Affaires culturelles nous fait savoir par courriel qu’elle compte user du droit de réponse proposé, mais pour le volume de l’année prochaine, l’échéance du 10 mars lui paraissant irréaliste.
         Un courriel du Canada demande des renseignements sur l’origine du toponyme « Soupetard » : François Bordes propose de répondre.
         Par ailleurs, la Présidente est très heureuse d’avoir reçu l’annonce de la parution du colloque de Narbonne auquel avaient participé de nombreux membres de l’Université de Toulouse et de notre Société ; le volume est disponible à la Mairie de Narbonne.
         La Présidente signale également à l’attention de la Compagnie le dernier numéro (n° 15) de Momus, toujours aussi intéressant. Il faudra communiquer le dossier de l’affaire de l’ancien collège de Périgord à la rédaction de Momus.

Notre bibliothèque s’enrichit de l’ouvrage de Bruno Phalip, Auvergne et Bourbonnais gothiques. Le cadre civil, Paris, Picard, 2003, 263 p. (don de l’auteur).

La parole est à Louis Peyrusse et Bruno Tollon pour une communication consacrée à La colonne Dupuy et Dame Toulouse, qui sera publiée dans le prochain volume (t. LXV, 2005) de nos Mémoires.

La Présidente remercie nos deux confrères pour ce complément d’information sur Dame Toulouse et pour cette lecture du monument à Dupuy qui nous en a révélé des qualités insoupçonnées. Quant au portrait du général Dupuy, elle se demande si l’on doit vraiment considérer qu’il s’agit d’un portrait idéalisé alors que sont représentés des détails très concrets de la chevelure. Louis Peyrusse rappelle que l’idéalisation néo-classique insiste sur le portrait


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intérieur, qui n’a pas nécessairement à voir avec le portrait réel ; Bruno Tollon dit que les cadenettes, bien connues des armées napoléoniennes, étaient très appréciées des artilleurs.
         François Bordes confirme l’analyse du contexte développée par Louis Peyrusse et rappelle que trois monuments assez symboliques ont été réalisés dans les années 1833-1834 à Toulouse : la colonne Dupuy, le médaillon à Napoléon au Capitole et l’obélisque de Jolimont. Louis Peyrusse précise qu’en effet on utilise alors le sentiment bonapartiste pour faire pièce aux républicains : c’est dans ce contexte qu’est réalisé le portrait sculpté du général Dupuy. 
         Après avoir revu les photographies de Dame Tholose, Daniel Cazes s’interroge sur les sources d’inspiration de Jean Rancy. Son état actuel, s’il n’est pas le résultat de trop grandes modifications, permet d’évoquer un grand modèle classique créé à Athènes au Ve siècle avant J.-C., celui de la Victoire en plein vol, le bras droit levé brandissant une couronne, une palme dans la main gauche. Bruno Tollon rappelle qu’une description du XVIIIe siècle indique que la main droite tient la girouette et que la main gauche est posée sur un écu, et qu’un relief de l’Hôtel du Vieux-Raisin réinterprète un dessin de Raphaël présentant une Minerve à l’écu. Daniel Cazes relève qu’il pourrait s’agir dans ce cas d’une contamination par le thème de la Victoire à l’écu. Il ajoute que, quant au canon de la statue de Jean Rancy, le point de vue de Griffoul-Dorval s’explique par référence à la Grèce classique. Le canon assez trapu, la poitrine généreuse de la statue se réfèrent plutôt à des modèles hellénistiques qui perdurent au IIe siècle avant notre ère et pendant toute l’époque romaine. En revanche, la draperie ne se rattache en aucune manière à l’Antiquité classique ou hellénistique mais appartient encore à l’art de l’extrême fin du Moyen Âge. Le mode d’élaboration de cette statue est donc très intéressant, mais une autre question se pose : pourquoi avoir représenté une allégorie de Toulouse sous la forme d’une Victoire alors que le modèle de l’allégorie de la ville existe ? C’est aussi la question de l’idée que les gens de la Renaissance se font de la ville. Bruno Tollon souscrit pleinement à cette analyse et il se déclare très impatient de lire la thèse de Mlle Géraldine Cazals qui apporte de nouveaux éclairages sur la pensée politique dans la Toulouse de la Renaissance. Des monarques couronnés par une Victoire apparaissent dans les gravures contemporaines et en 1565, c’est une déesse debout qui figure la Ville de Toulouse lors de l’entrée de Charles IX et de Catherine de Médicis ; des Victoires sont également représentées par des petits bronzes dont on ne connaît ni le lieu de fabrication, ni la date d’entrée dans les collections toulousaines. Bruno Tollon rappelle que c’est aussi la date de sa réalisation, 1550, qui fait de Dame Tholose une œuvre exceptionnelle, puisque l’on s’attendrait plutôt à une œuvre des années 1580.
         Réitérant le vœu déjà émis par notre Société, Daniel Cazes insiste sur la nécessité absolue de descendre Dame Tholose de la colonne Dupuy et de la placer dans un musée. Louis Peyrusse propose que notre Présidente adresse un courrier à la Mairie de Toulouse en ce sens. Pour François Bordes, cela n’est peut-être pas nécessaire car il semble que la décision soit près d’être prise. 
         Guy Ahlsell de Toulza fait remarquer que la position en hauteur de la figure de Dame Tholose et sa fonction de girouette conviendraient mal à une statue assise. Il s’interroge encore sur le lien qu'il faut peut-être établir entre la figure en bronze et le lieu auquel elle a été destinée : en effet, ce n’est pas sur le Capitole qu’on la place, mais sur la tour des archives de la Ville, c’est-à-dire le trésor de la Ville.
         Bruno Tollon rappelle que pour Guillaume de La Perrière la mémoire de papier est celle qui a la plus longue durée. S’agissant des figures placées au sommet des monuments, il précise qu’elles étaient beaucoup moins rares que l’on a pu le penser. Henri Pradalier l’interroge sur les statues de Mars à Arles et de la Giralda à Séville. Bruno Tollon répond que la statue arlésienne est de 1555, et donc postérieure de cinq ans à celle de Dame Tholose, mais surtout qu’elle est moins intéressante d’un point de vue technique, car il s’agit en fait d’une œuvre de dinanderie. La Giralda de Séville a été réalisée en 1568 et il faut préciser qu’elle mesure 3,80 m de haut ; elle a été déposée vers 1986 et remplacée sur le monument par une copie.
         En réponse à une question de Louis Peyrusse et d’Annie Noé-Dufour sur un dessin récemment acquis par le Musée Paul-Dupuy, François Bordes affirme qu’il n’apporte rien de neuf sur le sujet de la colonne Dupuy.

L’ordre du jour appelle l’examen des rapports pour le concours. La Présidente donne la parole à Nelly Pousthomis-Dalle pour son rapport sur le travail présenté par Mlle Karine Madiès : 

« Mlle Karine Madiès a soutenu à Toulouse, en septembre 2003, une thèse sur Les clochers « limousins » : origine, filiation et signification liturgique, sous la direction de Michèle Pradalier-Schlumberger et de Henri Pradalier. Le jury était également composé de Mmes Éliane Vergnolle et Claude Andrault-Schmitt. 
            Ce travail comprend cinq volumes : un volume de texte (520 p.), un catalogue de monographies (298 p.), un volume de figures et graphiques (282 p.) et deux volumes de photographies totalisant 1152 illustrations. Le texte est bien écrit, agréable à lire, la documentation est abondante et de qualité. 


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Le premier volume constitue le corps de l’étude qui, partant de l’historiographie, revisite la théorie d’un type « limousin » de clocher, en propose une nouvelle chrono-typologie à partir de la définition de caractères discriminants et une synthèse sur les fonctions de ces clochers.
            Sans pouvoir entrer dans le détail d’un travail très fouillé, on retiendra quelques points forts.
            Un gros travail historiographique montre comment s’est forgée cette théorie d’un type bien précis de clochers « limousins », notamment à partir de René Fage et Jean Valléry-Radot. Le corpus initial comprenait 14 clochers (Brantôme en Périgord, Collonges-la-Rouge, Uzerche, Saint-Martial et Saint-Étienne de Limoges, Saint-Léonard de Noblat, Saint-Junien en Limousin, Gardes, Pérignac, Blanzac en Charente, Notre-Dame et Saint-Michel de l’Aiguilhe au Puy, Valence et Die dans la vallée du Rhône). Karine Madiès reprend avec minutie l’étude de chacun d’eux, non seulement leur architecture, mais aussi leur décor sculpté, sans oublier une étude systématique des travaux de restauration des XIXe et XXe siècles. 
            Une analyse fine du bâti révèle les techniques de construction particulières à ce type d’ouvrage. L’auteur redéfinit cette famille de clochers à partir de critères architecturaux qui la conduisent à en écarter certains, notamment les deux clochers de la vallée du Rhône, et à opérer une nouvelle classification en trois groupes. La tour, sans localisation prédéfinie, est composée de plusieurs niveaux en retrait, au-dessus d’un soubassement carré ou plus souvent rectangulaire, généralement voûté. Aux premiers niveaux de plan carré succèdent des niveaux de plan octogonal, un gâble encadrant une fenêtre unique masquant la transition entre les deux plans. Ces caractères communs n’excluent pas de nombreuses variantes. Le noyau proprement « limousin » comprend les six clochers de l’ancien diocèse de Limoges, dont les prototypes ne sont pas les deux clochers limougeauds, désignés par J. Valléry-Radot, mais plutôt celui de Collonges-La-Rouge. Karine Madiès se démarque aussi de ses prédécesseurs en écartant Brantôme, qui paraît le plus ancien, antérieur au milieu du XIe siècle, et porteur de particularités architecturales qui seront diversement exploitées par les ouvrages ultérieurs. Elle ne retient pas non plus celui de Notre-Dame du Puy. Enfin, les clochers de Charente semblent devoir constituer une nouvelle série (Gardes, Pérignac, Blanzac). 
            Outre cette nouvelle thèse, on retiendra quelques révélations parmi lesquelles le décor sculpté de ces clochers, tellement négligé qu’il en est souvent inédit, et parfois surprenant par sa qualité (Blanzac). Le patient dépouillement des dossiers de restauration a permis d’identifier les parties authentiques parfois considérées comme refaites. Il en est ainsi du clocher de Notre-Dame du Puy qui n’a pas été reconstruit en totalité, comme on s’est plu à le dire jusque là. On soulignera aussi l’intérêt du chapitre consacré à la représentation sculptée du clocher limousin, témoin du succès esthétique de cette forme architecturale dans les sculptures des porches de Beaulieu-sur-Dordogne, Moissac et La Graulière, tandis qu’il n’est jamais représenté dans les arts de la couleur. 
            Enfin, la synthèse accorde une place importante aux fonctions possibles de ces clochers au travers de questions sur leur emplacement, leurs accès, leur visibilité, leurs divisions intérieures et leurs vocables.
            Par sa qualité et ses aspects novateurs, cette thèse mérite d’être récompensée par la Société Archéologique du Midi de la France. »

La Présidente rend compte de l’étude sur La Vierge dans l’ancien évêché de Comminges au Moyen Âge, présentée au concours par M. Jean-Claude Carsalade. Il s’agit du travail d’un amateur éclairé, qui ne peut être comparé avec les deux thèses universitaires présentées cette année au concours.

On s’inquiète de l’absence du Secrétaire-adjoint, chargé du rapport sur la thèse de Mlle Géraldine Cazals. M. Henri Gilles, qui a dirigé cette recherche, propose à la Compagnie d’en donner, de mémoire, un aperçu.  La matière est extrêmement riche et notre Compagnie a pu juger lors d’une séance récente de tout ce que l’historien de l’art pouvait en tirer. La première partie est constituée d’une bibliographie remarquablement conduite, fruit d’un travail considérable. La seconde est consacrée aux idées politiques de Guillaume de La Perrière. Mlle Cazals présente des idées assez nouvelles, par exemple sur la conception et l’attitude qu’une municipalité pouvait avoir à l’égard du pouvoir royal. S’y ajoute toute une analyse de la vie toulousaine, intellectuelle et artistique.

La Présidente remercie M. Henri Gilles de ce rapport improvisé. Elle souligne que les deux thèses présentées pour le concours peuvent difficilement être comparées, étant tellement différentes : d’un côté une recherche d’histoire de l’art, de l’autre une recherche d’histoire du droit. Pour Henri Pradalier l'attribution des deux prix ne doit pas pouvoir être interprétée comme un classement et il faut bien affirmer que les deux thèses sont de grande qualité. Il est proposé d’attribuer les prix en fonction de la personnalité de leur fondateur. La Présidente soumet la proposition au vote. À l’unanimité des voix des membres présents, les prix de Champreux et Ourgaud, dotés de 450 € et 300 € et accompagnés d’une médaille d’argent, sont respectivement décernés à Mlle Karine Madiès et à Mlle Géraldine Cazals. 

Rapport de Patrice Cabau sur le travail présenté au concours par Mlle Géraldine Cazals :


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« Mlle Géraldine Cazals a soutenu en décembre 2003, à l’Université des Sciences sociales - Toulouse I, une thèse de doctorat d’histoire du droit consacrée à Guillaume de La Perrière (1499-1554) - Un humaniste à l’étude du politique. Le jury comprenait Mlle Marie-Bernadette Bruguière, MM. Henri Gilles, Gérard Guyon, Michel Magnien, Jean-Louis Thireau, et Jacques Krynen, qui a dirigé la recherche.
            Cette thèse est formée de deux volumes. Le premier, fort de 713 pages et illustré de nombreuses planches, contient un texte de synthèse très construit organisé en deux grandes parties : l’une consiste en un essai biographique sur Guillaume de La Perrière, l’autre est consacrée à l’analyse de sa philosophie politique. Le second volume, qui compte 331 pages, renferme un important corpus documentaire : la transcription de huit œuvres manuscrites inédites et la reproduction du dernier des douze ouvrages imprimés que l’humaniste composa ou auxquels il contribua.
            Fondé sur une très abondante et solide documentation, bibliographique autant qu’archivistique, ce travail témoigne de grandes qualités d’analyse et de synthèse ; agréablement rédigé, il manifeste en outre un réel souci littéraire.
            L’auteur révèle une figure singulière, jusqu’ici mal connue, de l’humanisme toulousain, et elle la replace dans le contexte français, voire européen, de la Renaissance.
            L’essai biographique confirme la réputation dont Guillaume de La Perrière jouissait de son vivant. Ce Toulousain, né vers 1499 et mort en 1554, fit des études de droit, à Toulouse puis à Avignon, et obtint la licence, mais la science juridique ne paraît l’avoir intéressé que le temps de sa formation. De retour à Toulouse, ayant rapidement trouvé les faveurs de certains patrons et obtenu quelques bénéfices ecclésiastiques, il se consacra aux belles-lettres. Ses premiers pas dans la littérature lui ouvrirent les portes de la Respublica litteraria et il se trouva impliqué dans d’importants enjeux intellectuels du premier seizième siècle français, notamment dans la Querelle des femmes. C’était le type même du polygraphe : sa retraite, dans le vétuste collège de Saint-Mathurin, rue de la Porterie-Basse, dont il était le prieur, puis dans une maison de la rue de Villeneuve, fut mise au service des occupations littéraires les plus éclectiques. Curieux de tout, il écrivit sur les sujets les plus divers, s’exerçant aux rimes comme il se plaisait à la prose, poussé par ce même souci didactique qui relie, au-delà des différences thématiques et formelles, la grande majorité de ses œuvres. Il fut un pionnier de l’emblématique en langue vulgaire avec le Theatre des Bons Engins et un précurseur de l’emblématique bilingue avec la Morosophie. Passionné d’histoire, il participa à la restitution d’écrits historiques, telle la première édition de la Chronique de saint Louis du sire de Joinville, et il s’y essaya lui-même avec la publication des Annales de Foix, qu’il dédia à Marguerite de Navarre. Dès 1533, il mit sa plume au service des magistrats municipaux de Toulouse, fort curieux d’humanités. Commandité par les capitouls, il s’activa à la mise en ordre des archives et des privilèges de la ville, conférant à l’écriture de l’histoire municipale un lustre nouveau avec une Dissertation historique à la gloire de Toulouse, rédigée en 1538, ainsi que par les chroniques des Annales manuscrites de Toulouse pour les années 1538-1539, 1541-1542, et de 1548 à 1553.
            L’étude des idées politiques de Guillaume de La Perrière nous montre un moraliste tout entier préoccupé de l’éducation de ses contemporains. Nourrissant un véritable goût pour l’art politique et ses méthodes, il composa un manuel de gouvernement destiné à guider ses mécènes dans la conduite des affaires publiques : Le Miroir Politicque, entrepris en 1540, repris vers 1550, fut achevé en 1553 et publié en 1555, un an après le décès de son auteur. S’inspirant très largement des théoriciens de l’Antiquité, d’Aristote notamment, La Perrière s’y révèle très informé des écrits contemporains, étant l’un des premiers en France à citer Machiavel. Avec le Stagirite aussi bien qu’avec les humanistes italiens, il prône une éthique civique invitant chacun à servir, selon ses propres capacités, la République. Négligeant les questions qui passaient pour cruciales aux yeux de ses contemporains, il envisage bien des aspects de la République que ceux-ci passaient sous silence. La théorie de la souveraineté ne l’intéresse pas : ce sont les règles concrètes régissant le politique qu’il recherche et la vision de la "gouvernementalité" qu’il développe apparaît pour le moins originale. En ce qu’il a uni dans ses commentaires les théories politiques les plus anciennes à la description de la société de la Renaissance, notre " Tolozain" a fait de son Miroir Politicque une œuvre d’un très grand intérêt.
            Sa conception politique procédait d’un idéal religieux ou philosophique d’harmonie et de modération. À l’instar des stoïciens, il considérait manifestement que le sage n’agit pas sur le monde, mais qu’il en suit l’harmonie. L’existence retirée qu’il mena dans la ville où il était né, loin du monde des offices et des courtisans, paraît refléter cette sagesse.
            Au soir de sa vie, Guillaume de La Perrière nous a laissé de lui une image qu’il fit graver en tête de sa Morosophie et que Mlle Cazals commente en ces termes : "[l’image] d’un homme aussi habile


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qu’énigmatique. Sous un bonnet de quatre boules formant saillie sur la partie supérieure, il montre un visage aux arêtes marquées, au regard méditatif fixé sur une main droite tendue vers une balance hésitant étrangement entre une marotte de folie et un objet mal identifié, un livre sans doute. Des lèvres minces et closes, cachées par une longue barbe, une peau que l’on imagine blême révèlent l’acuité du combat que l’esprit mène avec le corps. Celui de la civilité contre la brutalité. De la sagesse contre la folie." Et de citer ces quatre vers de Guillaume : " Comme chascun sait par usage, / Que n’est si bon vin qui n’ait lye, / Aussi n’est il homme si sage, / Qui n’ait contrepois de folie".
            Ainsi le parcours singulier de Guillaume de La Perrière témoigne-t-il de l’effervescence intellectuelle qui agitait la "République de Toulouse" comme l’Europe occidentale à l’époque de la Renaissance ; son œuvre nous édifie sur la manière dont l’humanisme redécouvrait et réinventait le politique. 

Par ses apports substantiels et sa grande qualité, le travail de Mlle Géraldine Cazals est digne d’être distingué par la Société Archéologique du Midi de la France. »

La Présidente clôt la séance après avoir demandé aux membres de notre Compagnie de prendre connaissance du dossier consacré à l’affaire des bâtiments de l’ancien collège de Périgord, pour un dernier examen lors de notre prochaine séance.

 

SÉANCE DU 16 MARS 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Cazes, Watin-Grandchamp, MM. l’abbé Baccrabère, Gilles, le Père Montagnes, MM. Prin, Testard, membres titulaires ; Mmes Béa, Bayle, Noé-Dufour, Fronton-Wessel, M. Balagna, membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Scellès, Secrétaire général, MM. Bordes, Garland, Pradalier, Mgr Rocacher.

La Présidente ouvre la séance à 17 h 15 et prie la Compagnie d’excuser ce retard. Elle annonce le programme de nos prochaines réunions, dont, le vendredi 2 avril à 15 h, la visite du chantier de fouilles du cimetière Saint-Jean, à l’angle des rues Saint-Jean et Saint-Remézy. La Présidente signale à propos du site de Saint-Jean que les archéologues ont reconnu à ce jour près d’un millier de sépultures médiévales et qu’ils vont atteindre les niveaux antiques.

La parole est au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal de la séance du 24 février, qui est adopté après amendement.

La Présidente fait circuler des bulletins de souscription pour l’édition du Cartulaire de la Cathédrale de Dax (Liber Rubeus), qu’accompagne un volume d’actes intitulé L’Église et la société dans le diocèse de Dax aux XIe-XIIe siècles – ces bulletins ont été procurés par Bernadette Suau.

Puis elle présente la correspondance reçue :  un courrier de l’Union des Six Académies et Sociétés savantes de l’Hôtel d’Assézat, en date du 8 mars, notifiant le renouvellement de son Bureau et présentant le texte d’une convention réglant les conditions d’utilisation des locaux dont elle dispose dans l’Hôtel, en particulier de la Salle Clémence-Isaure ; le programme d’une série de conférences consacrées aux bastides du Rouergue. Concernant l'affaire de l'ancien collège de Périgord, nous avons reçu un courrier en forme de droit de réponse de la part du cabinet d'architectes Atelier 13, maître d'œuvre de l'opération, dont la Présidente donne lecture.

La parole est à Mme Adeline Béa pour une communication consacrée à L’église paroissiale de Fanjeaux, publiée dans ce volume (t. LXIV, 2004) de nos Mémoires.

La Présidente remercie notre collègue et la félicite pour sa présentation d’un édifice pour la construction duquel on dispose de jalons chronologiques exceptionnellement précis. S’agissant des dimensions stipulées dans l’acte de commande de 1276 (22 cannes de longueur, soit environ 39 m, sur 7 cannes de largeur et 7 de hauteur), elle relève que d’autres églises de l’Aude, celle de Montréal ou Saint-Vincent de Carcassonne par exemple, présentent un système de proportions où hauteur et largeur sont égales. Elle se demande si le plan et le volume de ces édifices correspondaient à un souci de standardisation. Adeline Béa croit qu’il existe en effet un module architectural caractéristique de cette région à la fin du XIIIe siècle et dans la première moitié du XIVe.


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Le Père Montagnes déclare que Mme Béa est la première à avoir étudié l’église paroissiale de Fanjeaux, qu’il connaît fort bien lui-même, sous l’aspect de son architecture. Ayant constaté que le côté nord montre des maçonneries d’une grande irrégularité, il veut savoir si l’on a des précisions sur la construction des chapelles latérales. Mme Béa se réfère à un travail de Bernadette Ferradou, qui a établi la chronologie de ces chapelles, ajoutées aux XIVe et XVe siècles ; l’église présentait à l’origine des murs latéraux à contreforts saillants, et le portail ouvert dans le gouttereau méridional a été ultérieurement déplacé vers le Sud. Le Père Montagnes signale que le plan présenté uniformise l’édifice : les irrégularités sont nombreuses pour les chapelles, qui diffèrent notamment par leur profondeur. Adeline Béa confirme ces observations. Elle ajoute que les murs latéraux, qui avaient été exhaussés au XIXe siècle pour établir une fausse voûte, ont été ramenés lors de la restauration de 1921 à leur ancienne hauteur.
         Louis Latour se rappelle avoir lu que la construction des chapelles latérales avait été fréquente à l’époque des Guerres de religion. Mme Béa dit que cela n’a pas été le cas en pays audois, où ces adjonctions commencent dès le début du XIVe siècle.
         Quitterie Cazes se montre très vivement intéressée par le cadrage chronologique du chantier : passation du contrat de commande de l’édifice le 17 novembre 1276 et pose de la première pierre le 9 juin 1278. Elle note que la préparation de la construction a été rapide, s’étant faite sur environ un an et demi, puis elle souligne l’importance d’une étude des matériaux pour comprendre le fonctionnement du chantier. Il conviendrait d’effectuer des mesures systématiques, de relever les hauteurs des assises, la longueur des blocs… Adeline Béa indique que l’appareillage présente une certaine homogénéité. Interrogée sur l’existence de marques de tâcherons, elle répond ne pas en avoir vu.
         Christophe Balagna fait observer qu’il existe manifestement une rupture d’assises entre la nef et le clocher-porche. Il juge le clocher nettement plus tardif que le reste de l’église.
         Bernadette Suau et Jeanne Bayle objectent que la date du 8 septembre 1281 portée par l’inscription comme étant celle de la célébration de la première messe ne signifie pour autant l’achèvement de l’édifice. Puis Mme Suau demande des précisions sur la transmission de l’acte de 1276 ainsi que sur les parties contractantes. Cette pièce, qui avait été consignée dans le registre du notaire Jean d’Auriac, est connue par la transcription que le Père Cambefort en a faite dans un manuscrit daté de 1646. D’après ce contrat, c’est le commanditaire qui paraît jouer le rôle d’architecte ; le Frère Arnaud Séguier, représentant le monastère de Prouille, serait ainsi le concepteur de l’édifice.
         Guy Ahlsell de Toulza rappelle que les cérémonies de célébration de première messe étaient souvent destinées à stimuler les offrandes permettant de financer la continuation de travaux encore inachevés. Puis il met en évidence le problème stylistique que posent les chapiteaux du portail occidental de l’église, qu’il paraît très difficile de placer au XIIIe siècle. Michèle Pradalier-Schlumberger admet qu’ils ne peuvent être antérieurs par exemple à la réalisation du portail de la salle capitulaire des Jacobins de Toulouse, élevé en 1309-1310, mais elle note que les bases des piédroits de Fanjeaux portent de petites consoles ou modillons que l’on retrouve à Saint-Nazaire de Carcassonne. M. Ahlsell de Toulza objecte que les bases peuvent se perpétuer, alors que les chapiteaux évoluent plus vite. Mme Pradalier-Schlumberger concède que les chapiteaux formant frise montrent des feuilles boursouflées qui doivent appartenir au XIVe siècle. Finalement, M. Ahlsell de Toulza et Mme Pradalier s’accordent à constater le décalage existant entre les sculptures des parties orientale et occidentale de l’église de Fanjeaux.

Au titre des questions diverses, la Présidente fait appel à d’éventuelles remarques suggérées par la lecture du document de synthèse sur l’affaire du collège de Périgord. Ce document est considéré comme adopté et c’est dans cette forme définitive qu’il sera publié dans le volume LXIII de nos Mémoires. Seront également publiées les réponses qui nous sont parvenues. 
         Analysant les prises de position provoquées par le dossier que nous avons diffusé, plusieurs membres notent que nous n’avons obtenu aucune réponse sur le fond du dossier – la question de la protection des éléments archéologiques –, mais seulement des justifications « techniques » en forme de plaidoyer : « Nous avons suivi les procédures et l’avis des spécialistes ». On suggère que remarque en soit faite dans la publication sous forme d’avertissement de l’éditeur. Il sera également utile de dresser un bilan des réponses reçues et de montrer comment le problème patrimonial et archéologique a été systématiquement éludé. On fait encore observer que la réaction des architectes peut s’expliquer par le souci de défendre leurs possibilités d’intervention sur des marchés ultérieurs.

 


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SÉANCE PUBLIQUE DU 27 MARS 2004

Elle se tient dans la grande salle de l’Hôtel d’Assézat. 

Allocution de la Présidente :

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, mes chers confrères,

La Société Archéologique se réunit deux fois par mois, le mardi après-midi : nous avons eu en 2003 16 séances, souvent très denses, puisqu’à côté d’une communication principale, presque toutes les séances ont comporté une seconde intervention, qui faisait en général le point sur l’état du patrimoine ou l’actualité des découvertes archéologiques : par exemple La Daurade au Moyen Age, par Quitterie Cazes, le rappel des objets mobiliers classés, par Nicole Andrieu, la redécouverte du tronc des pèlerins de Saint-Sernin par Bruno Tollon et Louis Peyrusse, la découverte de peintures murales du XIIe siècle dans une maison de Périgueux, par Agnès Marin. Dans le cadre de ces « questions d’actualité » Jacques Lapart et Christophe Balagna nous ont parlé du retour du cloître de Berdoues dans le Gers, un véritable feuilleton à rebondissements multiples qui garde une partie de son mystère. 
            Le hasard a voulu que la plupart des communications aient porté en 2003 sur l’archéologie ou l’histoire de l’art médiéval. En ce qui concerne Toulouse,  Nelly Pousthomis a fait le point sur Les recherches à l’hôtel Saint-Jean (avec le résultat des premières fouilles et des premières recherches historiques). Pierre Gérard a étudié le collège de Foix, le père Montagnes et Maurice Prin le tombeau des martyrs d’Avignonet aux Jacobins ; on retrouve comme chaque année un intérêt constant pour Saint-Sernin avec une relecture de la porte Miégeville par Olivier Testard et l’art gothique à Saint-Sernin par Henri Pradalier. 
            Pour le Midi de la France : Marie-Laure Fronton-Wessel a présenté la charpente peinte de l’église de Trèbes, dans l’Aude, Emmanuel Garland la restauration de l’église N.-D. de Cap d’Aran, Mme Jeanne Bayle les livres liturgiques de Philippe de Lévis, évêque de Mirepoix. Françoise Bagnéris a fait une communication sur l’histoire du chapitre de la cathédrale d’Auch, Françoise Galés sur le château de Sauveterre, en Béarn et Sandrine Conan sur la Casa Julia à Perpignan, une maison patricienne du XIIIe au XVIe siècle.
Les recherches sur l’Antiquité et l’Antiquité tardive ont été moins nombreuses : Céline Piot nous a parlé d’une inscription romaine de la cité des Nitiobroges, l’abbé Baccrabère a rappelé le résultat de ses recherches dans une fosse gallo-romaine du quartier Saint-Georges, découverte dans les année 1970, au moment de la reconstruction du quartier. Jean-Luc Boudartchouk a fait le point sur Toulouse à l’époque mérovingienne et Patrice Cabau s’est demandé, avec son habituelle érudition, si saint Saturnin avait bien été le premier évêque de Toulouse.
   
         Enfin rappelons pour le XVIIIe siècle, la communication d’Yves Cranga sur le parc du jardin de Pompignan (Tarn-et-Garonne) dont les curieuses fabriques sont un reflet de la culture du siècle finissant. 
   
         La Société Archéologique, comme elle le fait chaque année, est sortie de ses murs, pour la visite, aux Archives municipales, de la belle exposition Fontaines toulousaines, sous la direction de M. François Bordes, directeur des Archives. Nous avons également circulé sur le chantier de fouilles de la place des Carmes, que nous a présenté Jean-Luc Boudartchouk.

Le volume 63 des Mémoires de la Société Archéologique, qui paraîtra le mois prochain, rappellera ces différentes activités, avec la publication d’une dizaine d’articles, et, en seconde partie, le Bulletin de l’année académique, où sont réunis les comptes rendus des séances, transcrits avec beaucoup de soins par Maurice Scellès, Secrétaire général, et Patrice Cabau, Secrétaire-adjoint. Rappelons également le rôle du site Internet de la Société, où les comptes rendus sont régulièrement mis en ligne.

C’est dans le t. 63 que paraîtra également tout le dossier que la Société a consacré aux travaux faits par l’Université de Toulouse-Le Mirail dans les bâtiments situés au 56 de la rue du Taur, pour y installer l’ESAV. Je rappellerai, comme je l’avais fait l’année dernière, que ces bâtiments contiennent l’Hôtel Maurand, l’une des plus anciennes maisons médiévales de Toulouse, dont seule la tour est classée Monument historique, et les restes de l’ancien collège de Périgord qui date du XIVe siècle. Le dossier que nous publions réunit les courriers échangés avec les différentes autorités responsables du chantier, Université, Conseil régional, DRAC et, sous le titre « L’ancien collège de Périgord victime du vandalisme officiel », le point de vue de la Société Archéologique sur des travaux menés sans étude préalable et sans tenir compte de la valeur patrimoniale d’un des plus anciens monuments historiques de Toulouse. 


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Sur le plan scientifique, l’année 2003 a été exceptionnelle pour nous, puisque la Société a édité, sous forme d’un numéro spécial, le volume des actes du colloque La maison au Moyen Âge dans le Midi de la France. Ce colloque, qui a eu lieu en mai 2001 sous la direction de mon prédécesseur, Louis Peyrusse, a comme particularité d’être une réflexion thématique sur la maison médiévale, à la suite des très nombreux inventaires de maisons médiévales menés depuis une vingtaine d’années dans le Sud-Ouest. Maurice Scellès et Anne-Laure Napoléone se sont chargés de l’édition, aidés par les membres du Bureau et les bénévoles de la Société. Vous trouverez au fond de la salle cet ouvrage, qui devrait être suivi d’un second colloque en 2006, dont l’initiative revient à Anne-Laure Napoléone.
            Au mois d’octobre auront lieu des journées d’études sur la Maison urbaine à l’époque moderne, sous la direction de Bruno Tollon, avec la participation de chercheurs venus d’universités françaises et catalanes. Ces journées d’études seront ouvertes au public, auront lieu à l’hôtel d’Assézat et nous serons heureux d’y recevoir un maximum de participants.

Il faut enfin parler de la vie de la Société : il y a eu cette année un renouvellement notable du bureau puisque Louis Latour, qui occupait le poste de Bibliothécaire-Archiviste depuis onze ans, a souhaité le laisser pour celui de Bibliothécaire-adjoint. Je voudrais rappeler, et tous ceux qui fréquentent la bibliothèque de la Société Archéologique le savent bien, l’énorme travail qu’a fait Louis Latour en une dizaine d’années, pour transformer une bibliothèque de société savante, difficilement accessible, en une bibliothèque moderne, informatisée, ouverte au public, un merveilleux outil de travail pour les chercheurs toulousains et un lieu de grande convivialité. Nous devons le remercier aujourd’hui d’avoir tant donné à la bibliothèque : beaucoup d’érudition, un grand amour des livres et une disponibilité sans limites à l’égard des lecteurs. C’est Bernadette Suau qui a été élue Bibliothécaire-Archiviste, et beaucoup d’entre vous la connaissent pour l’avoir rencontrée dans son dernier poste. Je rappelle cependant qu’après une carrière d’archiviste-paléographe à la direction des Archives départementales de l’Eure, puis des Landes, Bernadette Suau est venue à Toulouse en tant que conservateur général du patrimoine, Directrice des Archives de la Haute-Garonne. Bernadette Suau est également conservateur des A.O.A., c’est-à-dire des Antiquités et Objets d’Art de la Haute-Garonne, et nous nous réjouissons de l’accueillir dans notre nouveau Bureau. Je voudrais enfin profiter de l’occasion pour remercier également notre directeur, Daniel Cazes, qui partage toutes les charges du Bureau (et qui est donc de toutes les corvées) et notre trésorier, Guy Ahlsell de Toulza, qui a le grand mérite de maintenir notre trésorerie à flot, ce qui n’est pas facile.

Je vous remercie.

 

Rapport sur le concours présenté par Patrice Cabau. Le prix de Champreux est remis à Mlle Karine Madiès, le prix Ourgaud à Mlle Géraldine Cazals.

Conférence de Jean Catalo : Le Château-Narbonnais dans le quartier Saint-Michel.

 

SÉANCE DU 30 MARS 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, M. l’abbé Baccrabère, le Père Montagnes, Mgr Rocacher, MM. Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes Bayle, Conan, Fournié, MM. Burroni, Macé, membres correspondants.
Excusés : M. Latour, Bibliothécaire-adjoint, Mme Cazes, MM. Peyrusse, Pradalier.

La Présidente ouvre la séance en rappelant que notre Compagnie est conviée à une visite des fouilles de l’Hôtel Saint-Jean, sous la conduite de M. Francis Dieulafait, le vendredi 2 avril prochain. À la demande de Guy Ahlsell de Toulza, Nelly Pousthomis-Dalle propose d’en faire un compte rendu résumé pour les absents.

Le Secrétaire-adjoint donne lecture des procès-verbaux des séances des 24 février et 16 mars, qui sont adoptés après un complément apporté par la Présidente et des corrections. La présentation du compte rendu de la séance du 2 mars est reportée.

La Présidente rend compte de la correspondance manuscrite. Le Président du Conseil Régional, M. Martin Malvy, s’excuse de ne pouvoir assister à notre séance publique. Notre confrère Bruno Tollon nous communique le pré-programme des journées d’étude consacrées à La demeure urbaine dans le Midi de la France et la Catalogne,


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XVIe XVIIe siècles, qui se tiendront à l’Hôtel d’Assézat les 8 et 9 octobre 2004 ; un colloque international sur le même thème est en préparation pour l’année 2005, dont les actes pourraient prendre la suite du volume sur La maison au Moyen Âge dans le Midi de la France, publié en 2003 par la S.A.M.F., l’Université de Toulouse-Le Mirail et l’U.M.R. FRAMESPA.

Suite à un échange de courriels, M. Vincent Bachelot nous apporte de précieux renseignements sur le photographe G. Sommer, dont un album en notre possession et mis en ligne sur notre site Internet contient quelques clichés : « Voici le résultat de mes recherches à la bibliothèque Montesquieu de Bordeaux. Il s'agirait de Giorgio Sommer (Francfort 1834-Naples 1914), qui était un passionné d'archéologie et qui aurait réalisé des albums photographiques des monuments italiens, ainsi que des reproductions de statues grecques et romaines des musées de Rome et Naples. Ces renseignements ont été trouvés dans The Dictionnary of Art, edited by Jane Turner, Growe 1996, vol. 29, p. 61. Ces photos étaient aussi signées "G. Sommer Napoli" et certains de ses albums sont répertoriés ».
        Un autre courriel nous demande notre avis sur un fragment peint trouvé à Dellys, à l’est d’Alger. Sous toutes réserves, Guy Ahlsell de Toulza propose de regarder du côté des décors islamiques des Xe-XIIe siècles.
        C’est enfin M. Roland Chabbert, animateur du patrimoine, qui nous adresse la toute récente publication de l’étude que notre confrère Olivier Testard a réalisée sur un édifice de Montauban. Maurice Scellès explique qu’il s’agit d’une nouvelle collection lancée par le Service du patrimoine de Montauban pour faire connaître des édifices méconnus mais remarquables à un titre ou un autre ; Olivier Testard précise que deux autres monographies sont déjà prévues et que la prochaine mettra en particulier en évidence une rue disparue, témoin d’une organisation peut-être moins régulière à l’origine que celle que l’on connaît aujourd’hui.

La parole est à Dominique Watin-Grandchamp, Patrice Cabau et Laurent Macé pour une communication consacrée à Deux inscriptions de l’ancienne Maison de l’Hôpital de Jérusalem à Toulouse (XIIIe siècle), publiée dans ce volume (t. LXIV, 2004) de nos Mémoires.

La Présidente remercie les trois orateurs pour cette communication passionnante, au cours de laquelle ils ont su entretenir un suspense intolérable avant de lever une partie du voile, pour finalement nous proposer des inscriptions largement révélées.
        Michelle Fournié se dit troublée de constater qu’un Pierre de Toulouse qui épouse une Gailharde fille de Blanche nous ramène à une hypothèse qui avait été proposée puis rejetée. Pour Laurent Macé, les tableaux établis par John Hine Mundy sont sans doute à reprendre et il fait remarquer que, par exemple, n’apparaît pas un Pierre de Toulouse prieur du Temple. Le tableau 25 de Mundy paraît assez cohérent à Patrice Cabau qui note que Mundy signale de nombreux personnages qu’il ne peut situer dans ses généalogies, surtout dans le cas de carrières ecclésiastiques.
        Michelle Fournié pense que la famille de Lauraco pourrait être une piste à suivre, car si elle descend effectivement des Latour et des Toulouse, ses armes pourraient en témoigner. Laurent Macé dit que cette voie n’a pas encore été exploitée.
        Dominique Watin-Grandchamp précise que la présence d’un autre écu, sans doute installé dans un quadrilobe, a été reconnue dans le deuxième enfeu ; on peut espérer que la poursuite du dégagement des peintures permettra de gagner d’autres indications. La Présidente demande si d’autres éléments sont apparus dans la peinture où figure saint Jacques. Dominique Watin-Grandchamp indique qu’un bon éclairage a permis de distinguer d’autres détails : le second personnage tient ainsi un livre, ce qui pourrait écarter l’hypothèse d’une représentation de saint Rémy. Faut-il penser à saint Jean ?
        Nelly Pousthomis-Dalle rappelle que la fouille doit se poursuivre jusqu’en juillet ou jusqu’en août et que le nettoyage des peintures des enfeus ne sera pas engagé avant l’automne. Toute l’équipe est bien sûr très impatiente.
        Daniel Cazes demande si l’on dispose des résultats des fouilles des tombeaux. Nelly Pousthomis-Dalle indique que seul le tombeau à la gisante a été à ce jour entièrement fouillé. La fouille du deuxième tombeau n’est pas achevée, mais on est déjà assuré que les os ne sont pas en connexion.

La Présidente rappelle que des journées « porte ouverte » sont organisées les 24 et 25 avril prochain sur le site de la fouille de l’Hôtel Saint-Jean.

 

SÉANCE DU 20 AVRIL 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone,


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Watin-Grandchamp, MM. Boudartchouk, le Père Montagnes, Testard, membres titulaires ; Mmes Bellin, Piot, M. Laurière, membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Bordes, Garland, Tollon.
Invitée : Mlle Laurence Alberghi.

La Présidente ouvre la séance en annonçant qu’en raison des obligations de notre consœur, la présentation des procès-verbaux est reportée en fin de séance et elle donne la parole à Céline Piot pour la communication du jour, consacrée aux Importations d’amphores dans le sud-ouest de la Gaule au Bas-Empire et pendant l’Antiquité tardive

« Les très nombreuses découvertes d’amphores vinaires italiques Dressel 1 ont parfois occulté les trouvailles des récipients datant du Bas-Empire et de l’Antiquité tardive. Néanmoins, depuis une vingtaine d’années, on s’intéresse de plus en plus aux amphores allant du IIIe au VIIe siècle. Si la présence d’amphores ibériques ne surprend pas, celles venant d’Afrique, puis d’Orient, sont intéressantes, car elles sont très rares pour le Haut-Empire. Le vin est le produit le plus massivement diffusé (il vient surtout du nord de l’Afrique et de Syrie-Palestine), mais les découvertes d’amphores à huile (de Bétique) et à garum (de Lusitanie et de Byzacène) montrent la progression de l’acculturation des populations du Sud-Ouest à la "mode" romaine. Leur étude montre aussi que les circuits économiques se diversifient, semblant se traduire par un changement des voies commerciales empruntées, avec un certain abandon de l’axe Aude-Garonne pour une route maritime qui contourne le détroit de Gibraltar. »

La Présidente remercie Céline Piot pour cet exposé si clair et logique et, tout en s’excusant de son ignorance dans ce domaine, elle s’étonne qu’il n’y ait pas eu de commerce du vin avec l’Espagne. Céline Piot explique que les vins espagnols, importés pendant le Haut-Empire, subissent ensuite la concurrence des vins d’Aquitaine.
         Maurice Scellès voudrait avoir des explications sur le changement des routes commerciales qui ferait que les amphores africaines transiteraient désormais par Bordeaux de préférence aux ports méditerranéens.
         Jean-Luc Boudartchouk attire l’attention sur le fait que ce type d’amphore n’est identifié que depuis dix ans, et pas par tous les archéologues, et que des confusions sont d’ailleurs possibles entre amphores hispaniques et africaines ; les propositions actuelles pourraient être inversées à l’avenir. Maurice Scellès constate qu’il s’agit donc avant tout, comme pour d’autres sujets, d’une carte de répartition des archéologues.
         Jean-Luc Boudartchouk pense que la rupture est provoquée dans le Midi par la conquête franque. Les quelques amphores orientales ou byzantines retrouvées pour la période mérovingienne correspondent à des produits de luxe : le vin de Gaza était ainsi très prisé pour un usage surtout liturgique. La recension que nous propose Céline Piot a le grand intérêt de rassembler pour la première fois des données éparses et de faire apparaître sur la carte les villes où sont implantées des communautés orientales et les grandes villae. Quant à l’utilisation des spatheion pour les sépultures des périnataux, Jean-Luc Boudartchouk rappelle que l’on a l’habitude de considérer que ces amphores avaient l’avantage de présenter une gaine adaptée à la taille des corps.
         Louis Latour ayant évoqué tout ce que les fouilles d’épaves en Méditerranée ont apporté à la connaissance des amphores hispaniques, Céline Piot dit ne connaître aucune épave comparable en Gironde. Jean-Luc Boudartchouk ajoute que si les datations sont en effet bien étalonnées par les fouilles des sites de production et des épaves, il reste néanmoins très difficile d’identifier précisément ce type de matériel quand les tessons sont trop petits.
            Guy Ahlsell de Toulza s’intéresse au goût que pouvait avoir le vin mentionné par Grégoire de Tours. Céline Piot dit que c’était un vin très corsé, dont le goût était encore renforcé par du miel et éventuellement du sel que l’on ajoutait pour les transports lointains. Jean-Luc Boudartchouk relève que la documentation carolingienne fait état de vignobles et qu’il en allait probablement de même à l’époque mérovingienne. Il y avait donc une production courante et des importations en petite quantité de vins de provenance lointaine, à usage liturgique ou médical. Céline Piot rappelle qu’Ausone possédait 260 ha de vignes dans le Bordelais. Jean-Luc Boudartchouk réaffirme son hypothèse d’une césure qui intervient à la fin du Ve siècle : Toulouse est alors coupée du commerce méditerranéen, ce qui n’est pas vrai de Bordeaux. 

Le Secrétaire général donne lecture des procès-verbaux des séances des 2 et 30 mars et de la visite du 23 mars : les trois procès-verbaux sont adoptés.

En complément à la discussion du 30 mars, Patrice Cabau confirme que John Hine Mundy a exploité toute la documentation disponible pour ses travaux sur la société toulousaine au Moyen Âge, qui sont malheureusement très mal connus à Toulouse. À la demande de la Présidente, Patrice Cabau précise que l’historien américain, qui a mené


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ses recherches à partir de 1946, a principalement publié ses travaux à New-York et Toronto ; sa bibliographie, qui comporte en outre de très nombreux articles dispersés sur les collèges, les hôpitaux, les familles…, est d’une utilisation assez difficile si l’on ne pratique pas couramment l’anglais, car Mundy est peu traduit, et quand elles existent, les traductions sont souvent médiocres. Philippe Wolff avait cependant donné quelques traductions, mais résumées et simplifiées. La Présidente atteste que Philippe Wolff maîtrisait en effet l’anglais. Pour Dominique Watin-Grandchamp, Mundy est celui qui connaît le mieux les familles toulousaines au Moyen Âge ; elle évoque la possibilité de lui demander communication de ses fiches et souligne combien il serait utile de disposer de sa bibliographie. Le Secrétaire général propose que celle-ci soit intégrée au procès-verbal.

Interrogée par le Trésorier, la Bibliothécaire-Archiviste affirme qu’il serait en effet souhaitable d’acquérir les ouvrages de Mundy. Une discussion s’ensuit sur les exemplaires éventuellement disponibles dans les bibliothèques toulousaines et sur la manière de se procurer ces ouvrages.

Concernant la visite des fouilles de l’Hôtel Saint-Jean, la Présidente dit qu’il faudrait en faire un compte rendu et elle suggère de le demander à Daniel Cazes, qui a été très intéressé par la partie antique.

À propos de la communication d’Adeline Béa sur l’église paroissiale de Fanjeaux, du 16 mars dernier, Patrice Cabau fait observer que l’inscription commémorant la pose de la première pierre et la célébration de la première messe ne saurait dater la progression des travaux et, pour appuyer sa remarque, il donne l’exemple des Jacobins de Toulouse où les deux événements interviennent en 1203, à peu de temps de distance, voire peut-être le même jour, d’après le témoignage de Guillaume Pélhisson précisé par Bernard Guy. Répondant à une question de la Présidente, Patrice Cabau rappelle que la date de 1234 est celle de l’achat de la parcelle où sera construit le portail occidental des Jacobins. Bernadette Suau l’interroge alors sur la fonction qu’occupe alors Pierre de Toulouse : Patrice Cabau indique qu’il est viguier à partir de la fin de l'été 1235.

La correspondance manuscrite comprend deux courriers de nos confrères MM. Manière et Blaquière, en réponse à leur élection au titre de membres d’honneur de notre Société. Par ailleurs M. Manuel nous annonce son départ de Toulouse pour Albi et nous dit son regret de ne plus pouvoir assister désormais à nos séances. 
         Le Secrétaire général ajoute que notre confrère Claude Péaud-Lenoël a signalé son changement d’adresse électronique, manifestant son intérêt constant pour les activités de notre Compagnie.
         Nous avons également reçu une lettre de candidature au titre de membre correspondant de Mme Hélène Guiraud, professeur d’art antique à l’Université de Toulouse-Le Mirail. La Présidente propose de se charger du rapport.

Deux courriers concernent l’affaire de l’ancien collège de Périgord. L'un de nos correspondants explique pourquoi il considère que notre Société fait fausse route en faisant porter, dans ce genre d’affaire, toute la responsabilité sur les Services du Ministère de la Culture. Des membres de la Compagnie adhèrent au pessimisme exprimé par l'auteur du courrier, d’autres considèrent surtout que l’argumentaire est par trop corporatiste. On rappelle par ailleurs que l’article que nous nous apprêtons à publier ne met pas en cause les personnes et on fait observer que les Services du Ministère de la Culture pourraient au contraire être satisfaits de voir notre Société défendre des idées qu’ils partagent a priori mais qu’ils ne peuvent exprimer publiquement.

La Présidente donne lecture de la lettre que M. Remplon a adressée au Ministre de la Culture pour demander que le chevet de l’église Notre-Dame-de-la-Dalbade reste libre de toute construction, les Toulousains de Toulouse proposant à notre Société d’appuyer leur démarche. Le chevet que la Dalbade était en effet masqué par le bâtiment de l’École de commerce qui a été récemment démoli pour être remplacé par un bâtiment neuf à construire pour la Direction régionale des Affaires culturelles. Un membre rappelle qu’il y a de cela quelques années, notre Société n’avait pas soutenu une démarche semblable visant à empêcher la reconstruction d’un îlot jouxtant l'église Saint-Vincent dans la ville basse de Carcassonne, considérant qu'il n'y avait pas lieu aujourd'hui de systématiquement dégager les abords des édifices religieux.

Est ensuite évoquée la récente interruption des travaux qui étaient en cours dans l’Hôtel dit « des Coffres », situé à l’angle des rues de Metz et des Couteliers à Toulouse. En jouant sur une autorisation donnée pour de petits travaux, le promoteur a fait de grands travaux. À la suite de deux procès-verbaux dressés par la Mairie et par l’Architecte des Bâtiments de France, le chantier a été arrêté. D’après l’article de La Dépêche, l’Architecte des Bâtiments de France s’est appuyé sur la réglementation du « secteur sauvegardé » ; il s’attend à une ou deux affaires de ce genre par an et considère que quelques épreuves de force seront nécessaires. Notre Société prend acte de la nouvelle attitude de l’Architecte des Bâtiments de France.

 


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SÉANCE DU 4 MAI 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Noé-Dufour, Watin-Grandchamp, MM. Bordes, Hermet, le Père Montagnes, M. Prin, Mgr Rocacher, MM. Pradalier, Testard, membres titulaires ; M. Costa, membre libre ; Mme Andrieu, MM. Garland, Ginesty, Gironnet, membres correspondants.

La Présidente ouvre la séance en indiquant que, faute d’avoir été annoncée par la convocation du jour, l’élection d’un membre correspondant est reportée à la séance du 18 mai.

La correspondance manuscrite comprend une lettre de M. Lucien Vieillard, Vice-Président de l’Association des anciens élèves du Lycée Pierre-de-Fermat, qui demande que soit excusée son absence à notre séance publique.
         L’archevêque de Toulouse, Mgr Marcus, nous annonce que le Père Pierre Debergé a été nommé recteur de l’Institut catholique de Toulouse.
         Le professeur Richard A. Sundt, de l’Université de l’Oregon (États-Unis), fait appel aux membres de notre Société qui seraient intéressés par une participation au colloque Brick and Brickwork in the Medieval World : forms, production, construction, decoration, historiography, qui se tiendra du 5 au 8 mai 2005 à la Western Michigan University à Kalamazoo. Les propositions de communication devront être adressées aux organisateurs avant le 1er août 2004.
         Notre confrère Bruno Tollon nous communique le programme du colloque des 13-16 mai prochain, dont les séances se tiendront partie à la médiathèque José-Cabanis, partie à l’Hôtel d’Assézat.

La parole est à M. Georges Costa pour une communication sur La chapelle Notre-Dame du Rosaire aux Jacobins de Toulouse, publiée dans ce volume (t. LXIV, 2004) de nos Mémoires.

Au cours de la communication, Georges Costa cède la parole à Maurice Prin pour qu’il présente lui-même à la Compagnie les croquis des vestiges apparus pendant la restauration de la chapelle par Sylvain Stym-Popper.

La Présidente remercie M. Georges Costa pour cette communication étonnante qui nous a entraînés une fois de plus sur les traces de Pierre Levesville, dont le catalogue est ainsi enrichi. À sa demande, Georges Costa donne des précisions sur les entrées successives de l’église.
         Patrick Gironnet remarque que le texte a été dicté par l’architecte et qu’il montre parfaitement la nature et les limites de l’intervention du maître d’œuvre. Le texte dit en effet très bien qu’une part est laissée aux entrepreneurs et aux artisans. L’ouvrage final n’est pas seulement le résultat d’un dessin de cabinet, il est la synthèse des deux formes de la connaissance architecturale. Le regard que nous portons sur les monuments anciens doit en tenir compte.
         Le Père Montagnes demande s’il est possible de connaître les mesures des briques employées pour les fondations, les murs, les voûtes… Georges Costa dit qu’en général les murs sont de deux tuiles de pointe, soit 0,70 m ; dans le cas de la chapelle Notre-Dame du Rosaire, la voûte est également composée de deux épaisseurs de briques, celles qui constituent l’extrados étant taillées. Le Père Montagnes observe que l’on peut considérer que les nervures font office d’échafaudage pour la construction de la voûte. Georges Costa rappelle que Levesville a construit sans nervures d’autres voûtes en arc de cloître. À son sens, la forme de celle de la chapelle du Rosaire lui a été dictée par la nervuration en étoile de la travée droite qui la précède : l’architecte ne s’en est d’ailleurs pas tenu à quatre, six ou huit nervures, mais il en a disposé douze, aboutissant ainsi à une coupole côtelée. Le choix de la brique pour la couverture du dôme témoigne d’un souci analogue de respecter, pour l’adjonction qu’il réalise, le matériau des constructions existantes. Ce n’est qu’après la mort de Levesville en 1632 que l’on fait couvrir le dôme de feuilles de plomb pour protéger les peintures de la chapelle. On est aujourd’hui revenu à l’état initial et Georges Costa se souvient très bien de Stym-Popper louant l’intervention de son prédécesseur du XVIIe siècle.
         Daniel Cazes voudrait avoir des précisions sur le décor intérieur de la chapelle au moment de sa création : peinture, retable, décor sculpté… Georges Costa dit que cet aspect, qu’il n’a pas encore abordé, suscite de nombreuses questions. Il serait en tout cas possible de l’étudier, en particulier grâce à la gravure du tabernacle, et il rappelle que Mesuret a pu donner des peintures une description très précise. Maurice Prin ajoute qu’un morceau de balustrade a été retrouvé dans les années 1950.
         Henri Pradalier remarque que le texte ne fait nullement apparaître les idées des commanditaires. Georges Costa explique que ce qui importait pour eux, c’était que la nouvelle chapelle soit au plus près des deux autres de façon à ce que des portes facilitent la circulation, mais il pense que le plan carré est un choix de l’architecte. Reprenant la comparaison avec la voûte rayonnante de l’église, Henri Pradalier note que celle de la chapelle donne l’impression


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d’un palmier pleureur. Georges Costa acquiesce en soulignant que son œuvre montre combien Levesville est imprégné par la culture architecturale du Moyen Âge.
         Daniel Cazes ayant demandé s’il y avait du nouveau concernant les pérégrinations de Notre-Dame de Grâce, Georges Costa répond par la négative tout en disant tout l’intérêt qu’il a pris à la lecture des recherches réalisées par Maurice Prin.
         Patrice Cabau se demande si les douze nervures peuvent être mises en rapport avec le rosaire, et plus généralement avec la Vierge, et le Père Montagnes évoque les douze étoiles.
         En réponse à une question de Patrick Gironnet, Georges Costa précise que le plan est en fait celui d’un quadrilatère à quatre côtés inégaux. Patrick Gironnet pense que le projet de l’architecte de l’architecte prévoyait un plan carré et que ce sont des raisons de chantier qui ont conduit à la transposition.
         Après avoir affirmé que Maurice Prin était trop modeste, Henri Ginesty souligne combien les observations faites par notre confrère dans la chapelle ont été importantes, et il prend pour exemple la barre de rideau qui authentifie la représentation donnée par la gravure.
         La Présidente remercie à nouveau Georges Costa en lui souhaitant un bon retour à Nérac.

La parole est alors à Louis Latour pour une communication consacrée à des Recherches campanaires : la cloche ancienne de Lherm (Haute-Garonne)

« Dans notre communication du 5 janvier 1999, nous avions présenté la cloche ancienne de l’église Saint-Paul d’Auterive et, d’après les moulages conservés dans notre Société, la cloche aujourd’hui disparue de l’église Saint-Martial de Beaumont-sur-Lèze (1).
            Nous avons eu l’occasion d’étudier récemment une troisième cloche de même facture, celle de l’église Saint-André de Lherm, gros village proche de Muret.
            Cette cloche ancienne, fêlée vers 1970, fut prêtée par la municipalité au Musée campanaire de L'Isle-Jourdain et, en compensation, remplacée en 1993 par une nouvelle cloche offerte par le Conseil régional, baptisée Maria par Mgr Collini, archevêque de Toulouse. Les habitants de Lherm, émus de son éloignement prolongé, signèrent une pétition qui aboutit à son retour dans l’église Saint-André où on peut la voir aujourd’hui, sur un socle, au fond de la nef (2).

Comme sur la cloche d’Auterive, le cerveau de la cloche est orné d’une inscription en belles majuscules onciales très décorées qui composent le texte suivant :

+ XPS : REX : VENIT : IN PACE :DEUS : HOMO : FACTUS EST

(Christ Roi vient dans la paix ; Dieu s’est fait homme)

Deux inscriptions semblables ont été relevées dans le Volvestre par le général Henri Ménard :

- celle de Durfort (Ariège) : texte identique ;
- celle de Pailhès (Ariège) : même inscription mais complétée par l’invocation à la Vierge : AVE   MARIA   G[RATIA…], cloche ancienne datée de 1405 (3).

Marie-Agnès Winter signale la même inscription dans l’église de Saint-Julia de Gras-Capou (Haute-Garonne), sur une cloche non datée, accompagnée de deux bas-reliefs représentant l’Ecce homo et une Vierge à l’Enfant (4) : Christus : rex : veniet : in : pace : deus : homo : factus : est.

Un texte très proche se retrouve enfin sur une cloche de Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne) : Christus rex venit in pace Deus homo est, cloche datée de 1591 (5).

Au-dessous de l’inscription court une frise d’une douzaine de petits cartouches historiés semblables à ceux d’Auterive et de Beaumont représentant dans un ordre aléatoire six scènes tirées de la Bible : l’Arbre de Jessé, le songe des rois mages, le bain de l’Enfant Jésus, la fuite en Égypte, la crucifixion symbolique et le Christ en majesté entouré des symboles des quatre évangélistes (6).

L’examen attentif de la cloche de Lherm confirme l’analyse technique que nous avions donnée en 1999. Les cinq premières scènes proviennent d’un moule unique, sans doute une planchette gravée en creux, dont l’impression sur une bande de cire donne les premiers motifs en relief dans l’ordre suivant, très peu logique : Bain de l’Enfant Jésus / Fuite en Égypte / Songe des rois mages / Arbre de Jessé / Crucifixion.


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 263

LHERM, CLOCHE, L'Arbre de Jessé. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, Le songe des rois mages. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, La fuite en Égypte. 
Cliché H. Améglio
.


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 264

LHERM, CLOCHE, Le bain de l'Enfant Jésus - La fuite en Égypte. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, La crucifixion symbolique. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, Le Christ en majesté. 
Cliché H. Améglio
.


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 265

LHERM, CLOCHE, inscription et cartouches historiés. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, lettre S serpentine. 
Cliché H. Améglio
.

LHERM, CLOCHE, croix introductrice. 
Cliché H. Améglio
.


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 266

Un ouvrier découpait ensuite la bande de cire et fixait les divers morceaux sur la fausse cloche. Mais ce découpage, fait par un ouvrier ignorant ou maladroit, ne respectait pas l’unité de chaque scène : dans un cartouche on voit souvent la fin du motif précédent et le début de la scène suivante. Un cartouche contient même en entier le Bain de l’Enfant Jésus et la majeure partie de la Fuite en Égypte…

La sixième scène, enfin, représentant le Christ en majesté dans une mandorle, est tirée d’un moule unique indépendant de la planchette précédente. Nous l’avions déjà noté pour Auterive et Beaumont. Des symboles des évangélistes, seuls l’ange et l’aigle sont bien reconnaissables ; le taureau et le lion sont plus stylisés et évoquent le bestiaire "cubiste" des monnaies gauloises.

L’accès facile de la cloche de Lherm, sur le sol de la nef de l’église Saint-André, a permis à notre ami Henri Améglio de prendre les très belles photos que nous vous présentons aujourd’hui : photos des scènes bibliques mais aussi de la croix introductrice et d’une lettre serpentine de l’inscription.

Lettres et sujets historiés proviennent des mêmes moules que ceux des cloches d’Auterive et de Beaumont datées, rappelons-le, du début du XVe siècle. Dernière parenté : la cloche de Lherm a été classée Monument historique, comme celle d’Auterive, le 30 octobre 1914.

Louis LATOUR »

Notes

1. M.S.A.M.F., t. 59, 1999, p. 177-187.
2. Renseignements tirés de l’ouvrage Lherm ou le Collier dispersé, monographie sur Lherm, par Suzanne DOUZAN-PECH, Rieumes, 1998, et précisés par H.-L. PETIT, initiateur des démarches qui ont permis le retour de la cloche à l’église Saint-André.
3. Henri MÉNARD, Cloches du Volvestre, SIVOM de Carbonne, 1988.
4. Marie-Agnès WINTER et AREC 31, Églises et chapelles du Canton de Revel, Toulouse, 1999, p. 198.
5. Bulletin Monumental, 1863, p. 345.
6. B. FAUCHER, ancien conservateur des A.O.A. de la Haute-Garonne, cité dans le Collier dispersé, avait cru y reconnaître « Le Christ au tombeau – Le Christ entre la Vierge et Saint-Jean – L’Église et la Synagogue – Le Christ de majesté sous une gloire, accompagné des symboles des évangélistes – enfin, la Fuite en Égypte ».

 

La Présidente remercie Louis Latour et lui demande si des rapports peuvent être établis avec la cloche de Cornebarrieu. Louis Latour dit que les deux cloches sont très différentes, mais que la parenté peut en revanche être établie avec des cloches de l’Ariège. La Présidente précise que la Crucifixion symbolique ne disparaît pas au XIVe siècle et elle confirme que le décor des cloches d’Auterive, de Beaumont et de Lherm est encore très médiéval.
         Louis Latour indique que M. et Mme Suau et lui-même ont fait tout récemment l’ascension du clocher de Grépiac pour observer une cloche qui offre une grande parenté avec celle de Montgaillard-Lauragais : sur un fond de petites roses, chaque lettre inclut une scène tirée de la Bible. Bernadette Suau rappelle l’article de Paul Barrau de Lorde, publié en 1939 dans les Mémoires de notre Société, et Louis Latour indique qu’avec la cloche de Grépiac, on dispose maintenant d’un alphabet presque complet.
         Guy Ahlsell de Toulza se demande si la scène identifiée comme un Arbre de Jessé ne serait pas plutôt une Vierge de la Nativité, avec Joseph à côté et peut-être une grosse lampe « hollandaise ». Emmanuel Garland note que cet Arbre de Jessé serait en effet très curieux et il fait en outre remarquer que ce thème n’est en général pas associé à des scènes de l’Enfance du Christ.

Au titre des questions diverses, Guy Ahlsell de Toulza signale le récent décès de John Hine Mundy et la notice nécrologique qui lui a été consacrée dans Le Monde.

JOHN HINE MUNDY
(Londres, 1917 - New-York, 13 avril 2004)

Bibliographie établie par Patrice Cabau

- Liberty and Political Power in Toulouse, 1050-1230, Columbia University Press, New-York, 1954 (xiii-402 p.) ;
- J. H. Mundy, R. W. Emery et B. N. Nelson éd., Essays in Medieval Life and Thought Presented in Honor of Austin Patterson Evans, New-York, 1955 ;
- J. H. Mundy ; Philippe Wolff trad., « Un usurier malheureux », dans Annales du Midi, 68 (1956), Édouard Privat, Toulouse, 1956, p. 217-225 = Hommage à M. François Galabert, Édouard Privat, Toulouse, 1957, p. 117-125 ;
- J. H. Mundy et P. Riesenberg, The Medieval Town, Princeton (New-Jersey), 1958 ;
- J. H. Mundy et K. M. Woody éd. ; Louise R. Loomis trad., The Council of Constance: the unification of the Church, New-York, 1961 ;
- Charity and Social Work in Toulouse, 1100-1250, dans Traditio, 22, 1966, p. 203-288 ;


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 267

- « La Croisade contre les Albigeois et l’interdiction de l’usure à Toulouse », dans Archeologia, n° 19 (nov.-déc. 1967), Montségur : naissance d’un mythe au XXe siècle, Paris, 1967, p. (29), 30-33 ;
- Europe in the High Middle Ages, 1150-1309, Londres, 1973 (XVI-611 p.) ; Longman, Londres, 1980 ; Longman, Harlow, 1991.
- « Noblesse et hérésie - Une famille cathare : les Maurand », dans Annales E.S.C., 29, 1974, p. 1211-1223 ;
- « The Origins of the College of Saint-Raymond at the University of Toulouse », dans Philosophy and Humanism, Edward P. Mahoney éd., Leyde, 1976, p. 454-461 ;
- « The Farm of Fontanas at Toulouse: Two Families, a Monastery, and a Pope », dans Bulletin of Medieval Canon Law, n. s. 11, 1981, p. 29-40 ;
- « Village, Town, and City in the Region of Toulouse », dans Pathways to Medieval Peasants, J. A. Raftis éd., Toronto, 1981, p. 142-190 ;
- recension : M. T. Clanchy, From Memory to Written Record: England, 1066-1307, dans Speculum, 56, 1981, p. 109 ;
- « Urban Society and Culture: Toulouse and Its Region », dans Renaissance and Renewal in the Twelfth Century, Robert L. Benson, Giles Constable et Carol D. Lanham éd., Cambridge (Massachusetts), 1982, p. 229-247 ;
- « The Financing of the Cistercian Order », dans The Journal of European Economic History, Banca di Roma, Rome, 12e année, n° 1, 1983, p. 203-209 ;
- The Repression of Catharism at Toulouse - The Royal Diploma of 1279, série Studies and Texts, 74, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, Toronto, 1985 (XIV-336 p.) ;
- « Des hommes et des femmes : le procès de Pierre de Dalbs, abbé de Lézat », dans Médiévales : langue, textes, histoire, 12, 1987, p. 85-99 ;
- « In praise of Italy: the Italian republics », dans Speculum, 64, 1989 ;
- Men and Women at Toulouse in the Age of the Cathars, Toronto, (1984 et) 1990 ;
- « The Parishes of Toulouse from 1150 to 1250 », dans Traditio, 46, 1991, p. 171-204 ;
- « Medieval Urban Liberty », dans The Origins of Modern Freedom in the West, Richard W. Davis éd., Stanford (Californie), 1995, p. 101-134 ;
- Society and Government at Toulouse in the Age of the Cathars, série Studies and Texts, 129, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, Toronto, 1997 (xiii-528 p.) ;
- « Philip Jones and the Medieval Italian City-State », dans The Journal of European Economic History, Banca di Roma, Rome, 28e année, n° 1, 1999, p. 185 ;
- recension : Jorg Oberste, Der ‘Kreuzzug’ gegen die Albigenser: Ketzerei und Machtpolitk im Mittelalter, Primus Verlag, Darmstadt, 2003 (222 p.), dans English Historical Review, Oxford University Press, Oxford, vol. 119, fasc. 480, 2004, p. 166-168.

Nécrologie

Jean-Claude Schmitt, « John Mundy - Historien de Toulouse au Moyen Âge », dans Le Monde, 28 avril 2004, p. 14.

 

Le Secrétaire général souhaite que soit examinée la question du statut de nos archives. Il rappelle que les procès-verbaux des séances enregistrent des informations qui concernent des personnes ou la vie de notre Société et qui ne peuvent être rendues publiques sans précautions. Il conviendrait sans doute de se donner des règles claires. Il s'ensuit une discussion que la Présidente conclut provisoirement en chargeant le Bureau de faire des propositions qui seront soumises à la Compagnie.

 

SÉANCE DU 18 MAI 2004

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Coppolani, Directeur honoraire, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Cazes, Noé-Dufour, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, le Père Montagnes, MM. Bordes, Gilles, Peyrusse, Prin, Testard, membres titulaires ; Mmes Bayle, Fournié, Fraïsse, membres correspondants.
Excusés : Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier.
Invitée : Mme Foucaud.


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 268

La Présidente ouvre la séance et indique une modification de l’ordre du jour : notre consœur Anne-Laure Napoléone, empêchée par des obligations professionnelles, présentera la communication annoncée pour aujourd’hui lors de la séance du 1er juin, à la suite de l’exposé de François Bordes ; la Compagnie entendra ce soir une communication de Maurice Scellès, puis une intervention de Mme Odile Foucaud.

La lecture des procès-verbaux des deux séances précédentes, que le Secrétaire général n’a pu finir de rédiger, est renvoyée au 1er juin.

Michèle Pradalier-Schlumberger annonce pour le vendredi 28 mai, en début d’après-midi, une nouvelle visite du chantier de fouilles du cimetière Saint-Jean. Puis elle présente le dernier numéro de la revue Patrimoine Midi-Pyrénées (n° 3, avril-juin 2004), qui contient un intéressant dossier sur les Sociétés savantes, dont un article sur la Société Archéologique du Midi de la France dû à notre confrère Louis Peyrusse. Elle montre ensuite un ouvrage tout frais sorti de l’imprimerie, don de notre confrère Daniel Cazes : Gaulois des pays de Garonne, IIe-Ier siècle avant J.-C., guide de l’exposition à voir au musée Saint-Raymond du 22 mai 2004 au 9 janvier 2005, puis au musée des Beaux-Arts d’Agen de mars à fin septembre 2005 (92 p.).

Le Directeur fait circuler des photocopies de la notice nécrologique du Professeur John Hine Mundy, rédigée par le médiéviste Jean-Claude Schmitt et parue dans Le Monde du 28 avril.

L’ordre du jour appelant l’élection d’un membre correspondant, la Présidente donne lecture de son rapport sur la candidature de Mme Hélène Guiraud, puis elle fait appel à d’éventuels commentaires. Il est procédé au vote. La candidate est élue au titre de membre correspondant.

La parole est à notre confrère Maurice Scellès pour sa communication, consacrée à La propriété multiple à Cahors au Moyen Âge :

Cahors, 88 rue des Soubirous. La cuisine disposée sur la galerie relève du corps de bâtiment arrière. Dessin G. Chiha.

« Cahors n’est pas une ville neuve au Moyen Âge. La ville que nous tentons de connaître à travers les très nombreux édifices encore conservés a été façonnée par onze siècles d’histoire, dont elle a hérité l’essentiel de sa structure : une partie de sa voirie, son enceinte, le site de la cathédrale et la plupart des églises paroissiales. Il faudrait y ajouter un nombre non évaluable d’édifices privés qui subsistent probablement au début du XIIe siècle et seront remplacés au cours de l’ample reconstruction que connaît la ville jusqu’au milieu du XIVe siècle. 
            À l’intérieur de la vieille enceinte du Haut Moyen Âge, où le bâti devient sans cesse plus dense, les propriétés sont constamment divisées ou recomposées au rythme des ventes et des héritages, concernant aussi bien les emprises au sol que les étages. Les servitudes et les imbrications de propriété qui peuvent découler de ces processus déterminent bien des aspects de la construction : elles sont parfois suggérées par les dispositions particulières qu’offrent certains bâtiments.

Au 46 rue Donzelle, nous supposons que la rupture de niveau de près d’un mètre constatée à l’étage est la conséquence d’une propriété indépendante de la boutique, portant à la fois sur l’emprise au sol et sur la hauteur sous plafond. Le rez-de-chaussée du 62-68 rue Saint-Urcisse fige probablement un parcellaire antérieur, avec deux propriétaires différents, tandis que l’aula de la maison du début du XIIIe siècle se développe sur tout l’étage. Au 35 rue de Lastié ce sont trois propriétés distinctes, assorties d’une servitude de passage à travers le couloir et la première cour, qui peuvent justifier la structure du rez-de-chaussée et la séparation des deux


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cours par un mur montant jusqu’au troisième niveau. Dans ces trois cas la multi-propriété affecte les dispositions du rez-de-chaussée sans remettre en cause la composition la plus habituelle de la demeure familiale. Au 62-68 rue Saint-Urcisse comme au 35 rue de Lastié, les fenêtres sur la rue signalent l’aula à laquelle conduit directement l’escalier qui peut être restitué ; au 35 rue de Lastié, un bâtiment secondaire au fond de parcelle complète le programme.

Les conclusions auxquelles on parvient pour le 88 rue des Soubirous sont tout autres, bien que l’édifice ne se distingue pas à première vue du modèle de la demeure familiale à deux corps de bâtiment séparés par une cour. L’étude, assez précise, a montré un décalage systématique entre les campagnes de construction et de réaménagement des corps avant et arrière : XIIe, XIIIe et XVe siècles pour

Cahors, 43 rue Nationale. Les trois teintes distinguent les différentes propriétés. Dessin M. Scellès.

le corps sur rue, fin du XIVe et XVIIe siècle pour le bâtiment en fond de parcelle. L’escalier construit à la fin du XIVe siècle et prolongé par une vis en bois au XVIIe dessert tous les étages des deux bâtiments, mais la cuisine établie dans la galerie dépend exclusivement du corps arrière. Il faut encore remarquer que l’habitation du premier étage du corps sur rue, du XIIe siècle, s’étend au XIIIe en se développant à l’horizontale par annexion d’une partie au moins de l’étage de la maison voisine. Les documents cadastraux des XVIe et XVIIe siècles confirment que les deux bâtiments relèvent de deux propriétaires distincts qui ont en copropriété le passage et la cour, qui comprend donc l’escalier de distribution extérieur.

Notre propos est parfaitement illustré par un second exemple, apporté par l’un des derniers édifices qu’il nous a été donné d’étudier dans la ville médiévale, au 43 rue Nationale. C’est aujourd’hui – dans un état qui résulte de travaux réalisés principalement aux XVe, XVIIe et XVIIIe siècles – un ensemble constitué d’un corps de bâtiment sur rue à deux étages, desservis par un escalier en vis demi hors-œuvre placé dans la cour, relié au bâtiment arrière par un corps de galerie. Les aspects principaux de l’état du XIIIe siècle peuvent être restitués. Le corps sur rue, élevé au siècle précédent, ne présente très probablement qu’un seul étage en pan-de-bois sur un rez-de-chaussée en pierre de taille ouvert par deux grandes arcades de boutique et un portail donnant accès au passage qui conduit à la cour. Le corps arrière, en brique, est en double profondeur. Son élévation sur la cour n’est pas connue, mais nous savons qu’il comportait trois étages auxquels il faut ajouter un comble utile ou un couronnement masquant la toiture (comme à la tour d’Arles à Caussade ?) auquel on accédait par une échelle de meunier. La façade sur la rue secondaire, l’actuelle impasse Catonne, superposait deux fenêtres géminées et un jour haut pour le premier étage, et quatre fenêtres géminées pour chacun des deuxième et troisième étages.

Le contraste est tel entre les deux bâtiments qu’il est difficilement concevable qu’ils forment un ensemble. En outre, l’actuelle rue Nationale est l’ancienne grand-rue médiévale sur laquelle s’affichent habituellement les grandes demeures, et en particulier les séries des fenêtres de leur aula. Il faut donc faire l’hypothèse que le modeste bâtiment sur rue à un étage et l’imposant logis arrière aient appartenu au XIIIe siècle à deux propriétaires distincts, le second ayant d’ailleurs peut-être acquis le droit de construire plus haut de son voisin, l’empêchant ainsi de surélever son bâtiment. On remarquera encore que la boutique du


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rez-de-chaussée sur la grand-rue se développait sur la parcelle voisine, côté sud, puisqu’un grand arc mettait en communication les deux espaces. 

Quelles conclusions tirer de ces quelques exemples ? La plus évidente, et elle était attendue, est que la complexité d’une ville multi-séculaire se retrouve dans la structure des propriétés, exprimée par les bâtiments eux-mêmes. Pour ce qui est des méthodes appliquées à leur analyse, la principale conséquence est que le divorce constaté entre la forme et la fonction doit inciter à la prudence vis-à-vis des approches fondées sur des typologies formelles. 

Si le principal modèle de la demeure familiale, à corps principal sur rue et aula en prise directe avec l’espace public, n’est pas remis en cause, il s’avère néanmoins insuffisant pour rendre compte de la totalité des édifices d’habitation. Les bâtiments établis en fond de cour ne sont pas en contact direct avec la rue et n’entretiennent pas le même rapport avec l’espace public. Le palais de Via, bâti en retrait de la grand-rue où il ne dispose même pas d’une entrée, se signale par sa haute tour qui domine la vallée du Lot ; le bâtiment en fond de parcelle du 43 rue Nationale ne se retourne pas sur la ruelle arrière, l’actuelle impasse Catonne, où il ne montre que des niveaux indifférenciés de fenêtres. Dans un cas comme dans l’autre, la salle n’est plus immédiatement identifiable et l’organisation générale de la demeure nous échappe. Faute de textes, c’est exclusivement d’une étude très précise des bâtiments que l’on peut attendre la reconnaissance de ce type de programme. 

Maurice Scellès »

La Présidente remercie notre collègue pour cette lecture nouvelle de l’architecture des maisons médiévales de Cahors à la lumière d’une problématique stimulante, celle de la multiplicité des propriétaires. Elle souligne que l’on manque ici de textes, contrairement à la Provence, où les actes des notaires, notamment les inventaires après décès, témoignent de l’imbrication des propriétés.
         Maurice Scellès note à cet égard que la logique des notaires diffère sensiblement de la nôtre concernant la description des circuits à l’intérieur des ensembles de bâtiments et que les circulations paraissent souvent fort curieuses.
         Dominique Watin-Grandchamp signale pour Saint-Antonin-Noble-Val des actes de vente portant seulement sur une salle ou une chambre.
         Quitterie Cazes s’intéresse aux maisons-tours jumelles de Cahors. Maurice Scellès répond qu’il s’agit là en effet de cas typiques posant le problème de la compréhension des édifices lorsqu’il n’y a plus adéquation entre architecture et habitat. Pour l’instant, on n’a pas trouvé de schéma explicatif valable pour la maison-tour.
         La discussion s’engage alors sur une question de méthode pour l’étude des maisons médiévales : on a certainement besoin d’élaborer un modèle théorique, mais il y a sans doute danger à rester prisonnier de ce schéma ; il faut donc en permanence soumettre le modèle à l’épreuve de la réalité. Louis Peyrusse souligne tout l’intérêt des écarts et impasses par rapport au modèle. Maurice Scellès constate qu’il posent des problèmes vraiment intéressants : la recherche des explications pertinentes permet de mieux appréhender les édifices.
         Jean Coppolani s’interroge sur l’utilisation de la brique dans les maisons médiévales de Cahors, ville où l’architecture est en principe de pierre : répond-elle à des raisons économiques ou culturelles ? Maurice Scellès montre que le phénomène peut avoir ces deux dimensions : la pierre utilisée à Cahors est un calcaire froid très difficile à tailler et donc moins employé lorsque se généralise le goût pour les appareils réguliers ; la brique, pour laquelle on dispose de gisements d’argile situés à 5 ou 6 km de la ville, est moins coûteuse et elle permet de réaliser des appareils très soignés. Il convient de noter la fidélité à la pierre pour les grands édifices comme la cathédrale, ainsi que pour les palais, tel celui de la famille Duèze ou celui de la famille de Via.

Au titre des questions diverses, la Présidente donne la parole à Mme Odile Foucaud pour une intervention concernant Le devenir de l’hôpital Gérard-Marchant  [images en ligne : www.societes-savantes-toulouse.asso.fr/samf/archsite/arch01/marchant.htm] : 

« Les bâtiments des malades du XIXe siècle sont menacés en raison du coût élevé de leur restauration par rapport à une construction nouvelle. L’importance de ce patrimoine reconnu comme un modèle dépassant le cadre national doit faire réfléchir le Conseil d’administration de l’établissement afin d’éviter une décision irréversible et catastrophique au plan patrimonial. La sauvegarde d’un patrimoine représente un coût mais sa destruction, constitue une perte – y compris économique – irréparable. L’hôpital tire sa beauté et ses


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qualités reconnues de la cohérence de l’ensemble bâti, l’amputer serait fatal. L’hôpital ne bénéficie actuellement d’aucune protection au titre des Monuments historiques.

L'Asile de Braqueville

Architecte : Jacques Jean Esquié ; avant-projet 1850 ; construction 1852-1864.
            C'est le seul édifice du XIXe siècle de Haute-Garonne qui ait une telle importance historique, artistique et patrimoniale.

Deuxième prix, en 1867, à l’Exposition universelle de Paris, pour l’architecte et son chef-d’œuvre.

En 1865 et 1866, l’asile à peine achevé fut érigé en modèle international par la célèbre Revue Générale de l’architecture et des Travaux publics, la plus importante du XIXe siècle, vendue dans de très nombreux pays, en Europe comme en dehors d’elle, qui lui réserva un nombre considérable de planches.

Dominique Esquirol, père de l'hôpital psychiatrique français, qui fit voter la loi de 1838 obligeant chaque département à se doter d'un hôpital spécialisé, était né à Toulouse. L'hôpital psychiatrique de Toulouse a été réalisé selon les directives d’un de ses disciples, le psychiatre Gérard Marchant, et lui est dédié.

État actuel : exceptionnellement satisfaisant, seuls deux pavillons et les doubles galeries centrales furent rasés pour permettre la circulation automobile peu après la dernière guerre. L’explosion du 21 septembre 2001 a détruit des bâtiments du XXe siècle mais pas ceux du XIXe siècle dont seuls les faux plafonds, vitres, etc. ont été abîmés, pas les maçonneries. Les toitures ont été soulevées par le souffle de l’explosion et, par une négligence coupable, la chapelle, en particulier, n’a plus de toit depuis trois ans, et personne n’a songé à la bâcher. Que sont devenues aujourd’hui les peintures de Denuelle ?

Analyse architecturale

L’asile est structuré par un axe principal de symétrie reliant l’entrée, la cour d’honneur de l’Administration, la chapelle, l’arrondi des Services généraux, le château d’eau. De part et d’autre se développent les deux sections affectées aux deux sexes. Chacune comprend sept pavillons établis sur deux lignes liés par des galeries couvertes à l’Administration, améliorations inventées par l’aliéniste Brière de Boismont. Recommandée par Esquirol mais généralement abandonnée pour son coût, la séparation thérapeutique absolue des quatorze quartiers a ici été obtenue.

Ce beau plan symétrique et hiérarchisé, parangon de rationalisme, fut allié à des façades colorées d’une grande qualité architecturale. Les deux bâtiments de l’Administration relèvent des classicismes français et italiens avec leur double hauteur d’arcades en plein cintre et leur composition en cinq parties dont trois avant-corps abritant les principaux éléments de la circulation. Classiques aussi les arcades en plein cintre qui les relient tandis que la chapelle romano-gothique a reçu un décor peint du célèbre peintre parisien Alexandre Denuelle. Les pavillons des malades et leurs jardins à l’anglaise relèvent du vocabulaire pittoresque. Ce modèle d’éclectisme recèle quelques formes toulousaines telles que les "mirandes", le souvenir du plan des Jacobins de Toulouse pour la chapelle. Les matériaux locaux très économiques et très colorés la brique "foraine" de grand format et de tonalité rose-orangé, les tuiles creuses caractérisent cet exceptionnel ensemble architectural toulousain.

L’établissement fut dédié à l’aliéniste toulousain J.-E.-D. Esquirol, qui en inspira la réalisation. Son portrait, un médaillon, domine l’arc d’entrée à la cour d’honneur.

Odile FOUCAUD
Maître de conférences d’Histoire de l’Art moderne
à l’Université de Montpellier »

 

Bibliographie

J.-B. DELAYE, G. MARCHANT, Programme pour la construction d’un asile d’aliénés dans le département de la Haute-Garonne, Toulouse, 1850, 55 p., plan de J. Esquié.
J. ESQUIÉ, « Construction d’un asile d’Aliénés aux environs de Toulouse », dans Revue Générale de l’architecture et des Travaux publics, t. 23, 1865, col 107-116, 147-150, pl. 24-32 suite par C. DALY, t. 24, 1866, col. 18-19, pl. 9-13.
O. FOUCAUD, Jacques-Jean Esquié, 1817-1884, architecte toulousain, Doctorat, Université de Toulouse II, 1989.
O. FOUCAUD, Jacques-Jean Esquié, architecte de fonction toulousain, 1817-1884, Toulouse, catalogue d'exposition, musée Paul-Dupuy, 1992, 112 p.


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La Présidente remercie Mme Foucaud, dont l’exposé met en évidence l’intérêt des bâtiments du Centre hospitalier spécialisé Gérard-Marchant construits en 1853-1864 selon le projet de l’architecte Jacques-Jean Esquié, et leur bon état actuel, malgré l’explosion de l’usine AZF située à proximité.
         Louis Peyrusse insiste sur le fait que l’asile de Braqueville est « le chef-d’œuvre absolu de l’architecture hospitalière du XIXe siècle français » ; les constructions sont de bonne qualité, elles ont été bien entretenues et leur réhabilitation est possible sans frais énormes. Il demande si la décision de démolition a été prise. Odile Foucaud ne croit pas que le Conseil général de la Haute-Garonne, qui est prépondérant dans le Conseil d’administration de l’hôpital, ait encore fait connaître sa décision.
         Mme Foucaud note qu’un dossier de classement avait été élaboré, mais que la procédure a été abandonnée après changement de la Direction de l’hôpital ; les autorités responsables ont actuellement une vision toute fonctionnelle de l’architecture de l’établissement et elles refusent de prendre en compte sa valeur patrimoniale. On abonde en ce sens : il n’y pas de volonté de protection ; du reste, il paraît plus facile de protéger les édifices privés que les édifices publics. On rappelle encore que l’hôpital Marchant était « honteusement absent » des listes de classement des édifices modernes dressées en 1974 à la demande du ministre de la Culture Michel Guy.
         Plusieurs membres se déclarent horrifiés devant le projet de restructuration de l’hôpital Marchant, qui pose une fois encore le problème de la politique menée en matière de conservation du patrimoine. Quid de la cohérence des décisions, alors que l’on veut convertir l’ancienne maison d’arrêt Saint-Michel en établissement culturel ? Quid du rôle de l’Administration des Monuments historiques ? Quid de la culture historique, architecturale et urbanistique des architectes auteurs de projets d’aménagement ? La liste est longue des bâtiments sacrifiés qui relevaient d’une Administration (hospitalière, militaire ou universitaire) et le contraste est grand avec les réhabilitations admirables que l’on a voulu et su réaliser à l’étranger, en Espagne par exemple avec le musée d’Alicante. En France, la population croit que les édifices publics sont protégés : c’est une illusion. La situation requiert plus que jamais la vigilance des Associations de défense du patrimoine et des Sociétés savantes ; mais quels sont leurs moyens d’action ? On indique qu’un moyen très efficace serait la constitution par les Associations et Sociétés d’une cellule d’action judiciaire, mais qu’une telle création n’a pas dépassé à Toulouse le stade de la déclaration d’intention.
         Concernant l’hôpital Marchant, Odile Foucaud se déclare convaincue que tout peut être encore sauvé. On préconise une demande d’instance de classement relayée par des courriers aux autorités compétentes et des communiqués à la presse. Pour Louis Peyrusse, une demande de classement serait parfaitement justifiée, car l’édifice a fait déjà l’objet de plusieurs publications. Un membre constate cependant que les Administrations publiques ne répondent guère aux courriers qui leur sont adressés.

Louis Peyrusse intervient à propos des travaux exécutés dans la cour de l’Hôtel d’Assézat : l'Architecte en chef des Monuments historiques en a profité pour faire gommer par un badigeon le jeu de la brique et de la pierre alternées sur la façade de l’aile ouest.

 

SÉANCE DU 1er JUIN 2004

Présents : MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Cazes, Napoléone, Noé-Dufour, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, MM. l’abbé Baccrabère, Bordes, le Père Montagnes, M. Prin, Roquebert, Testard, membres titulaires ; Mmes Andrieu, Bayle, Bellin, Conan, Fournié, Jiménez, Marin, MM. Garland, Macé, Stouffs, membres correspondants.
Excusés : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, Mme Galés, MM. Peyrusse, Pradalier, Tollon.
Invitée : Mlle Martine Rieg.

Le Directeur ouvre la séance en demandant à la Compagnie d’excuser l’absence de notre Présidente, en voyage d’étude.

Le Secrétaire général donne lecture des procès-verbaux des séances du 20 avril et du 4 mai, qui sont adoptés, le second après deux corrections. En complément à ces procès-verbaux, Patrice Cabau présente la bibliographie de John Hine Mundy, telle qu’il a pu l’établir : le Directeur le remercie en rappelant que cette bibliographie sera publiée dans le Bulletin.

Le Secrétaire-adjoint donne alors lecture du procès-verbal de la séance du 18 mai, qui est adopté.

Un membre fait remarquer qu’il ne faudrait pas attendre pour se manifester que les bâtiments de l’ancien hôpital de la Grave soient vendus. Elle constate que les protestations concernant l’hôpital Marchant viennent un peu tard,


M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 273

alors que l’on sait depuis trois ans qu’il y a un risque de démolition. Il en va de même de la caserne Niel alors que la réaffectation des bâtiments de La Grave, très bien placés au centre de Toulouse, est encore à l’état de projet. Il faudrait relancer l’idée d’une association de défense du patrimoine, regroupant en particulier les Toulousains de Toulouse et notre Société, qui aurait vocation à agir en justice.

La parole est à François Bordes pour une communication sur les Cortèges et processions à Toulouse aux XVe et XVIe siècles, publiée dans ce volume (t. LXIV, 2004) de nos Mémoires.

Le Directeur remercie François Bordes pour cet exposé très vivant et cette approche tout à fait nouvelle de la topographie urbaine. Il remarque que certains quartiers sont systématiquement évités : ce sont les quartiers proches de la Garonne, avec les églises Saint-Pierre, Notre-Dame la Daurade et Saint-Nicolas. Le plus surprenant est que la grande église dédiée à la Vierge qu’était la Daurade ne soit jamais incluse dans le circuit des processions. François Bordes le confirme pour les processions générales, sans pouvoir expliquer pourquoi leur itinéraire ne va pas jusqu’aux extrémités de la ville. Bien sûr, la Daurade est incluse dans toutes les processions rogatoires en relation avec l’eau. Guy Ahlsell de Toulza fait observer que la circulation devant l’église de la Daurade n’était pas facile, François Bordes qu’il y a toujours des problèmes de droits de passage.
         Répondant à une nouvelle question de Guy Ahlsell de Toulza, François Bordes dit qu’il n’a pas calculé la longueur des cortèges.
         Michelle Fournié fait observer que si Saint-Pierre-des-Cuisines et la Daurade sont laissées à l’écart, c’est qu’elles n’ont pas de fonction civique à la fin du Moyen Âge, à la différence de Saint-Sernin, qui est inévitable. Elle note en outre qu’il pourrait être intéressant de savoir pourquoi les processions de Pentecôte et des Corps-Saints sont identiques. La confrérie des Corps-Saints de Saint-Sernin entretient des rapports étroits avec le pouvoir municipal et Michelle Fournié croit se rappeler que la zone de recrutement de la confrérie ressemble assez à celle circonscrite par le 8 tracé par les processions.
         Dominique Watin-Grandchamp se demande si le circuit n’a pas également une valeur sociale, les parlementaires cherchant à faire passer la procession dans leur quartier, et elle évoque des situations semblables en Espagne et au Portugal. François Bordes rappelle que des villes comme Aix-en-Provence ou Montpellier témoignent d’organisations très différentes. La difficulté est que l’on ne sait pas qui, exactement, décide des parcours ; en outre, la documentation analysée n’a pas permis de constater de changements de parcours lors de la consultation du bayle ou des capitouls. Toute la bibliographie relative aux autres villes montre qu’il existe un trajet par type de procession, alors qu’il y en a plusieurs à Toulouse, avec un jeu subtil entre Saint-Sernin, Saint-Étienne et Notre-Dame-du-Taur pour la Fête-Dieu et que toutes tournent à l’intérieur de certaines limites.
         Après avoir rappelé que les basiliques martyriales semble parfois avoir joué le rôle de cathédrale primitive, Michelle Fournié observe que la procession d’intronisation de l’archevêque passe par Saint-Sernin pour gagner seulement ensuite la cathédrale Saint-Étienne, selon un schéma que l’on connaît aussi à Agen. Pour Quitterie Cazes il faut aussi avoir à l’esprit que l’archevêque affirme à cette occasion son autorité sur Saint-Sernin. Michelle Fournié précise que la procession passe par Saint-Sernin et Notre-Dame du Taur, qui lui est liée, avant de se rendre à la cathédrale.
         L’abbé Baccrabère intervient pour souligner l’importance de l’église Notre-Dame la Daurade au Moyen Âge, en raison de son antiquité mais également de son emplacement au bord de la Garonne.

La parole est à Anne-Laure Napoléone pour une communication consacrée au Collège de Périgord, qui sera publiée dans le prochain volume (t. LXV, 2005) de nos Mémoires.

Le Directeur remercie Anne-Laure Napoléone et lui exprime la gratitude de notre Compagnie pour avoir ainsi entièrement repris l’étude de l’ancien collège de Périgord. La Société Archéologique du Midi de la France ne peut que regretter qu’une plus grande attention n’ait pas été accordée aux vestiges du collège médiéval. Le Directeur rappelle qu’aucun des collèges médiévaux de Toulouse n’a jusqu’à présent été étudié et il prodigue tous ses encouragements à note consœur pour la poursuite de son travail, en espérant qu’elle puisse le mener à terme avant la fin de l’été.

Le Directeur prononce la clôture de l’année académique 2003-2004 après avoir souhaité à tous des vacances riches en découvertes et en promesses de communication pour la rentrée.

 


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