Mémoires
de la Société Archéologique
du Midi de la France

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Tome LXVIII (2008)


BULLETIN DE L’ANNÉE ACADÉMIQUE
2007-2008

établi par Patrice CABAU & Maurice SCELLÈS  


Les parties non reproduites dans l'édition papier apparaissent en vert dans cette édition électronique.

 

Version de pré-publication

Séances du 2 octobre 2007 au 22 janvier 2008 Séances du 5 février 2008 au 10 juin 2008

 

SÉANCE DU 2 OCTOBRE 2007

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Labrousse, Merlet-Bagnéris, Napoléone, MM. Bordes, Gilles, le Père Montagnes, Mgr Rocacher, M. Roquebert, membres titulaires ; M. Hermet, membre libre ; Mmes Barber, Duhem, Friquart, Fronton-Wessel, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Jiménez, Krispin, MM. Barber, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Lapart, Pradalier, Tollon.
Invitée : Mme Martine Rieg.

 

La Présidente déclare ouverte l’année académique 2007-2008, et elle souhaite la bienvenue à notre consœur Sophie Duhem qui prend séance ce soir.

La fin de l’été a été endeuillée par la disparition de l’abbé Georges Baccrabère, décédé dans la maison de retraite de Nailloux où il s’était retiré. La Présidente gardera le souvenir de la très forte personnalité de notre confrère ; elle rappelle que nous avons été assez heureux pour l’entendre toutes ces dernières années, en particulier lors des communications qu’il nous faisait à l’automne et qu’il illustrait des nombreux objets qu’il apportait et que nous pouvions examiner à loisir. La dernière période de sa vie n’aura certes pas été la moins riche.

La Présidente donne la parole à Mgr Rocacher à qui revient de prononcer l’éloge de l’abbé Georges Baccrabère :

Georges BACCRABÈRE
(1920-2007)

L’abbé Baccrabère nous a quittés le 15 août de cette année à l’âge de 87 ans. C’était une personnalité peu banale et la conduite de sa vie n’est pas facile à cerner. Georges Baccrabère, en effet, a réalisé au cours de sa longue existence trois vocations en apparence contradictoires. J’ajouterai qu’il les réalisa avec une force qui le transfigura totalement. Il a été curé de Quint-Fonsegrives pendant 47 ans. Il a été archéologue et historien. Il a été aussi passionné de sports aériens.

Né le 3 mai 1920 à Francon, dans le canton de Cazères-sur-Garonne, il est entré au Petit Séminaire de Toulouse en 1932 ; au témoignage de ses camarades de classe, il ne possédait pas complètement la langue française du fait que sa famille parlait habituellement l’occitan.
            Je ne suis ni psychologue ni psychiatre, mais je me suis parfois demandé si son acharnement à étudier pour aller de l’avant n’était pas une sorte de compensation à une forme de blessure qui tiendrait de la non-reconnaissance de sa personne par son entourage. J’ai eu souvent le sentiment que G. Baccrabère a été hanté tout au long de sa vie par le souci de n’être pas réellement reconnu.
            Au cours de ses recherches archivistiques en vue de la préparation de sa thèse sur les visites pastorales des XVIe et XVIIe siècles dans le diocèse de Toulouse, il avait retenu comme devise une pensée trouvée dans une lettre de Jacques Choppin, curé de Pechbusque, adressée au cardinal de Joyeuse, le 8 octobre 1596: « Je suis né pour travailler comme un poisson pour nager. Je suis content de mon sort ». Cette affirmation figure en exergue de sa thèse soutenue en 1956.
            Sous une apparence plutôt rude, parfois même un peu gauche, G. Baccrabère dissimulait un feu intérieur. Sa persévérance dans le travail arrivait jusqu’aux limites de l’obstination. Doué d’une solide santé, il a toujours poursuivi avec passion des centres d’intérêt apparemment divergents, avec le souci constant de laisser la trace de ses travaux.

Ayant terminé ses études secondaires au Petit Séminaire, il entre au Grand Séminaire de Toulouse en octobre 1940 (ayant redoublé la classe de Première, il avait passé huit ans au Petit Séminaire). Mais la guerre de 1939-1945 va perturber le rythme normal des cinq années d’études des séminaristes nés comme lui entre 1920 et 1923.
            G. Baccrabère est astreint à ce qui remplaçait le service militaire, les Chantiers de Jeunesse, créés par le Gouvernement de Vichy dès l’été 1940 ; il fait son temps légal au Chantier d’Arudy en Béarn. Ce qu’il va faire par la suite n’est pas clairement attesté, car lui-même n’a jamais voulu en parler de façon précise. D’après le témoignage de ses anciens collègues, il aurait échappé au départ en Allemagne avec le S.T.O. en se faisant embaucher comme surveillant au collège des Maristes de Blancotte, près de Cazères-sur-Garonne. En octobre 1944, il revient au Grand Séminaire pour deux ans. Je l’ai souvent entendu parler de cette période avec une sorte de ressentiment. À cette époque-là, le Séminaire de Toulouse était plein à craquer du fait du retour de ceux qui avaient connu les tribulations de la guerre. Il y avait aussi les séminaristes de Carcassonne, provisoirement privés de leur maison.
            G. Baccrabère se croyait surveillé par les Sulpiciens et redoutait particulièrement le regard d’Étienne Delaruelle, qui se montrait beaucoup plus exigeant que les autres en matière de travail intellectuel. Ordonné prêtre le 29 juin 1946, il est nommé Vicaire à Notre-Dame-la-Dalbade. Heureusement pour son caractère indépendant, il est nommé curé de Quint en 1948. Il va le rester pendant 47 ans, jusqu’au moment où Mgr Collini lui imposera de prendre sa retraite (1995).
            Je l’ai entendu bien des fois brandir ces 47 ans comme une sanction de l’autorité diocésaine ou comme une humiliation. Mais il s’est toujours gardé d’avouer qu’il avait plusieurs fois refusé de quitter ce poste... car il était passionné de sports aériens, et il avait tout de suite vu que sa paroisse était idéalement bien située du côté de Balma, commune sur laquelle se trouve l’Aéroclub de Languedoc, donc le petit aérodrome de Lasbordes. G. Baccrabère nous a souvent raconté qu’il avait envisagé, au cours de son adolescence, de devenir pilote. En 1935, par un concours de circonstances absolument inattendu, il avait rencontré à la gare Matabiau le célèbre pilote Jean Mermoz et avait réussi à lui parler. Il en était resté définitivement ébloui.
            L’année suivante, exactement le 5 décembre 1936, Mermoz avait disparu dans l’Atlantique Sud, au large de Dakar, aux commandes de son hydravion Croix du Sud. Mermoz faisait partie, avec Guillaumet, de ces pionniers qui, sous l’autorité inflexible de Didier Daurat, avaient créé les lignes aériennes Latécoère entre Toulouse, l’Espagne, le Maroc et le Sénégal. Mermoz lui-même avait réalisé, en mai 1930, la première liaison aérienne Dakar-Amérique du Sud. Autrement dit, c’était un demi-dieu pour le jeune Baccrabère, comme pour beaucoup de ses contemporains. La proximité de l’aérodrome de Lasbordes lui permit donc de s’initier au vol à voile et de persévérer longuement dans les sports aériens. En 1952, il commença par le brevet de pilote de planeur.
            Mais simultanément, profitant de ses loisirs, il allait suivre les cours de Droit Canon à l’Institut catholique. Il obtint la licence en 1953. Encouragé par l’abbé Noubel (1893-1971), il entreprit alors une thèse sur L’exercice du droit de visite dans les paroisses rurales du diocèse de Toulouse au lendemain du Concile de Trente qui fut soutenue le 4 juin 1956 à la Faculté de Droit canonique. Il apportait un éclairage nouveau sur le rôle réformateur du cardinal de Joyeuse et de l’archevêque Charles de Montchal. Ce travail fut tout de suite remarqué par les canonistes et les historiens et lui valut l’indéfectible amitié du professeur Paul Ourliac, grand historien du Droit et éditeur du cartulaire de l’abbaye de Lézat. Le professeur Philippe Wolff  l’invita à collaborer à l’histoire du diocèse de Toulouse.
            En 1957, G. Baccrabère reçut, à la suite de sa thèse, le prix de l’Académie de Législation et la médaille d’argent de la Société archéologique du Midi de la France. Il fut reçu comme membre correspondant de notre Société en 1959 et membre titulaire en 1963. Sa thèse ne fut pas éditée en tant que telle, mais servit de base à des articles bien documentés dans L’année canonique, la Maison-Dieu, les Annales du Midi et le Dictionnaire de Droit canonique. Son auteur fut invité à prendre part au répertoire des visites pastorales de l’Église de France publié par le CNRS. 

On peut alors se demander comment ce bon curé de campagne pouvait concilier des activités aussi divergentes que l’aviation et le Droit canonique, avec toute la concentration qu’exige la recherche historique. Mais on peut également se poser la question avec une acuité encore plus poussée lorsqu’on découvre que ce même curé avait une troisième corde à son arc : il faisait de l’archéologie, et de l’archéologie « tous azimuts ». Fréquentant régulièrement l’Institut Catholique, il était entré en contact avec Pierre Fort qui avait construit en 1933 la terrasse flanquant la façade occidentale de ce qui avait été autrefois le monastère des Clarisses du Salin et la fonderie de canons de l’époque révolutionnaire. Les travaux de l’architecte Fort avaient mis au jour les fondations de cette façade, c’est-à-dire les bases d’un rempart antique conservées sur une longueur de 70 mètres. La découverte n’avait guère excité les archéologues de l’époque.
            Passionné par l’étude de ces éléments archéologiques, G. Baccrabère finit par comprendre que les Romains de Toulouse du IIIe siècle avaient détruit, pour construire le rempart de la rive droite de la Garonne, un certain nombre de monuments funéraires situés hors les murs, comme l’exigeaient les lois antiques. Il avait même réussi à définir une typologie de ces monuments que l’exposition du Musée Saint-Raymond Palladia Tolosa (hiver 1988-1989) allait merveilleusement mettre en valeur. Il avait également réalisé l’inventaire du fonds Joulin aujourd’hui en dépôt au musée Saint-Raymond.
            Mais entre temps, G. Baccrabère avait fait plusieurs avancées en matière archéologique, malgré le scepticisme de certains professionnels qui le considéraient comme un franc-tireur ou un farfelu. En 1963, il avait repéré le tracé d’une voie romaine secondaire en Lauragais d’une façon vraiment nouvelle pour l’époque. Il survolait en avion, au soleil couchant, les collines du Lauragais et les photographiait en lumière rasante. Après avoir soigneusement repéré certains reliefs de type tumuli, il allait faire des sondages sur place. S’il découvrait des débris de tuiles romaines en terre cuite (ou imbrices), il en concluait à l’existence probable de villae gallo-romaines. Ce qui induisait avec vraisemblance la présence d’une voie antique traversant le Lauragais. En même temps, il attirait l’intérêt des cultivateurs sur l’intérêt de ces mini-découvertes.
            En 1978, il avait repris la même méthode en longeant la rive droite de la Garonne, dans le secteur de Saint-Jory, Saint Caprais et Ondes. Mais à cette époque-là, il se faisait transporter par hélicoptère, car, depuis 1952, il avait diversifié ses activités aériennes. Avec l’Aéroclub du Languedoc, en effet, il s’était lancé dans le parachutisme. En 1957, il obtenait le brevet de parachutisme après 140 sauts. En 1958, il décrochait la licence de pilote privé d’avion. En 1959, il devenait président de la section parachutiste de Lasbordes et sautait de manière remarquable, en présence d’un général américain en visite à l’Aéroclub du Languedoc. L’officier lui avait alors offert une de ses décorations pour lui manifester son admiration. Améliorant sans cesse ses performances, il obtenait en 1960 le certificat d’instructeur parachutiste et, en 1962, la médaille d’argent du vol à voile. Et, comme l’histoire de l’aviation l’intéressait vivement, il publia, en 1966, en collaboration avec Georges Jorré, Toulouse terre d’envol, qui lui valut en 1967 un prix de l’Académie française.

Mais l’hiver 1988-1989 allait apporter à notre archéologue une nouvelle reconnaissance. L’hôpital militaire Larrey ayant pris possession de ses nouveaux locaux à Pouvourville, on avait affecté son site en partie au Conservatoire régional de musique et en partie à un promoteur immobilier. À cet effet, on avait prévu de libérer totalement l’espace en supprimant l’ancienne matelasserie de l’hôpital, une bâtisse adossée à une section de rempart romain comprise entre deux tours, non loin de la place Saint-Pierre. Déjà G. Baccrabère s’était fait remarquer en publiant dans le volume de l’année 1973 des Mémoires de l’Académie des sciences, inscriptions et belles lettres de Toulouse un article d’apparence très modeste, sur un ton très modéré... mais vraiment troublant dans ses conclusions : Observations sur une tour du rempart antique de Toulouse et du tracé de l’enceinte.
            Ayant visité systématiquement la quasi-totalité des caves et des sous-sols des immeubles élevés sur le tracé du rempart antique de la ville, et bénéficiant simultanément des percées du tout-à-l’égout alors en construction, il avait situé rigoureusement les 53 tours et remarqué une différence typologique qui avait échappé jusqu’alors à tous les archéologues : 38 d’entre elles étaient circulaires et les 15 autres étaient des tours à talon, c’est-à-dire carrées dans la partie tournée vers l’intérieur de la cité. Les mêmes Observations de G. Baccrabère proposaient de situer le Château Narbonnais disparu au XVIe siècle, à l’emplacement de la Porte Narbonnaise, donc sous le Tribunal de grande instance. À l’automne 2005, les fouilles pratiquées à cet endroit lui ont donné raison.
            De plus, G. Baccrabère datait l’ensemble des tours et du rempart antique de l’époque augustéenne... contre l’avis de la majorité des archéologues. Il se basait alors sur une étude du magnétisme thermorémanent des briques romaines (méthode mise au point par le professeur Thellier, de la Faculté des sciences de l’Université de Paris VI). Plus tard, il avait repris la question en se basant sur le phénomène de la thermoluminescence. Indirectement, c’était une contestation partielle de la thèse du professeur Michel Labrousse, directeur de la circonscription archéologique de Midi-Pyrénées et président de la Société archéologique du Midi de la France. En 1968, celui-ci avait publié sa thèse d’État : Toulouse antique, des origines à l’établissement des Wisigoths. Non seulement il proposait de dater l’enceinte romaine de Toulouse du IIe au IIIe siècle, mais encore il en donnait un tracé que le travail de G. Baccrabère obligeait à considérer comme inexact.
            J’eus, hélas, à lui donner un coup de téléphone le 13 juillet 1990 pour lui apprendre que le musée archéologique qu’il avait lui-même aménagé, entre 1972 et 1974, dans les locaux de l’Institut catholique, avait été détruit par le feu et par les torrents d’eau que les pompiers avaient lancés pour l’éteindre. L’incendie avait été malencontreusement déclenché par un employé qui avait fait maladroitement brûler un tas de feuilles mortes juste devant la porte du musée... alors que soufflait violemment le vent d’autan ! G. Baccrabère pleura son musée. Heureusement, l’année suivante, un don de 10000 F. de la banque Petrofigaz lui permit de faire restaurer les locaux et les collections.
            Les fouilles du site de l’hôpital Larrey, durant l’hiver 1988-1989, achevèrent de mettre du baume sur son cœur en corroborant nettement sa datation de l’enceinte romaine : les monnaies découvertes par Raphaël de Filippo et son équipe appartenaient bien à l’époque de Tibère et d’Auguste. Donc l’enceinte date bien du début de l’ère chrétienne et se présente comme un « rempart de prestige ». Entendons par là une structure défensive élevée sans aucune urgence, en temps de paix.

Le panorama des activités archéologiques de G. Baccrabère a quelque chose de stupéfiant... Entre 1964 et 1970, il étudie le site romain de Saint-Martin-du-Touch... autrement dit le domaine autrefois occupé par le château d’Ancely, au-dessus du confluent du Touch et de la Garonne. Travaillant envers et contre tous, au milieu du chantier de la future cité d’Ancely, il réussit à convaincre le chef de travaux de conserver une salle d’exposition archéologique et une piscine romaine dans les sous-sols des immeubles. Car ses trouvailles l’avaient convaincu qu’il s’agissait d’un important sanctuaire rural antique du Ier siècle (volume publié en 1988). 
            Il faudrait également énumérer ses recherches sur l’aqueduc romain dit de «  la reine Pédauque », sur les puits funéraires du quartier du Férétra, sur le temple du forum de Tolosa dont la localisation place Esquirol a été confirmée lors du creusement de la station de métro (1992).
            Bien sûr, il n’agissait pas seul. Il était entouré d’une petite cohorte de fidèles collaborateurs dont le plus dévoué était incontestablement Gérard Villeval. Cependant, toutes les intuitions et toutes les audaces relevaient de sa seule « tête chercheuse »... ce qui parfois venait embarrasser certains chantiers de fouille dont il n’était pas directement responsable.

On comprend, dans un tel contexte, qu’il ait été fait Chevalier dans l’Ordre national du Mérite (21 novembre 1980, parrain Paul Ourliac) et ensuite Officier dans le même Ordre (24 septembre 1992, avec cette fois comme parrain le prestigieux pilote d’essai du Concorde, André Turcat). Dominique Baudis lui-même avait tenu à l’honorer en lui décernant la médaille d’or de la Ville de Toulouse (25 avril 1991). Malgré cela, il avouait parfois une secrète déception, celle de n’avoir pas obtenu la Légion d’Honneur.

Alors se pose maintenant la question centrale : au milieu de tous ces chantiers, comment a-t-il pu se situer comme curé de Quint pendant 47 ans ?
            Je ne connais pas le point de vue de ses paroissiens. Je n’ai jamais eu l’occasion de travailler avec lui au plan pastoral. Je pense qu’il était marqué par ses origines rurales et qu’il avait le contact facile avec tout le monde. D’un naturel plutôt méfiant vis-à-vis des autorités, il se tenait à distance de l’archevêché. Il s’abstenait des réunions de Doyenné. Mais il observait l’évolution rapide des paroisses de la périphérie de la ville.
            Se rendant compte que le peuplement de Quint augmentait régulièrement aux abords de la route de Castres, et que les nouveaux venus ne montaient pas vers la vieille église, il se préoccupa de bonne heure de créer un nouveau lieu de culte dans le quartier de Fonsegrives, en bas de la colline. Bien lui en prit... Il réussit alors à se faire donner un terrain de 1800 m par le couple Yvonne et François Dutruel. Mais il n’avait rien en caisse pour entreprendre la construction. Le diocèse n’avait pas encore un fonds commun pour les créations de nouveaux lieux de culte. Mgr Garrone lui avait prodigué ses encouragements, tout en lui affirmant qu’il n’était pas à même de lui assurer un financement. Rentré chez lui, G. Baccrabère décida de faire appel aux bonnes volontés locales et alla s’inscrire à un stage accéléré de maçonnerie au Centre de Formation professionnelle de Bordelongue. Il souhaitait mettre concrètement la main à la pâte et diriger lui-même le futur chantier.
            Et puis, de longue date, il manifestait une confiance illimitée en la Vierge Marie, une sorte de piété enfantine. Il surprenait les gens en l’appelant « ma copine ». Louis Treil, qui avait été son condisciple au Grand Séminaire, lui avait demandé un jour ce qu’il agitait sans cesse dans sa poche. Il lui avait répondu que c’était son chapelet et que ce contact était un rappel constant de la protection maternelle de la Vierge.
            En 2002, lorsque le professeur Jacques Arlet lui proposa de répondre à ses questions en vue de prendre place dans son livre Des Toulousains remarquables, G. Baccrabère répondit : « Oui, à condition que vous me permettiez de parler de ma copine »... Et ce qui fut dit fut fait. Le professeur Arlet a raconté comment fut construite pendant l’été 1965 l’église Notre-Dame de l’Annonciation de Fonsegrives, grâce à l’arrivée providentielle d’une quinzaine de jeunes Hollandais appartenant au Mouvement international des Compagnons bâtisseurs.
            Une fois élevée l’assise de béton, les constructeurs mirent en place les éléments d’un hangar agricole récupéré par G. Baccrabère. Et Mgr Garrone vint bénir l’édifice le 5 septembre 1965 et admirer la statue de la Vierge installée à l’extrémité du parvis. Malheureusement, au bout de trois décennies, on fut obligé de constater que la construction vieillissait de plus en plus mal. Après 1995, les successeurs de G. Baccrabère et les paroissiens se trouvèrent affrontés à ce dilemme : ou bien réhabiliter fondamentalement la chapelle... ou bien tout rebâtir de fond en comble. Le 23 mai 2002, Christophe Vairon, deuxième successeur de G. Baccrabère, exposa le problème au cours d’une réunion publique. On se rendit compte tout de suite que le coût de la réhabilitation était exorbitant et qu’il valait mieux faire du neuf.
            Au printemps 2003, le projet de l’architecte ayant été approuvé et le financement assuré, on décida de reconstruire sur le même terrain en augmentant la superficie du lieu de culte. En novembre 2003, L’Auta publiait un long article de Marc Davancens, un jeune architecte qui, pendant ses études, avait présenté, en 1995, un dossier de fin d’année d’architecture intitulé Itinéraire d’un homme de science et de foi : Georges Baccrabère. Il s’en prenait au projet de reconstruction au nom du respect de la mémoire collective. Le jour de la Toussaint 2003, G. Baccrabère offrit à Mgr Marcus le numéro de L’Auta dans un geste de défi. Il est certain que Marc Davancens ne pouvait pas ne pas soutenir celui qu’il avait découvert et admiré, au cours de son étude. Mais l’archevêque, de son côté, ne pouvait pas ne pas répondre à une telle provocation. Il fit usage du droit de réponse dans le numéro de L’Auta de février 2004. Malheureusement, Georges Baccrabère conserva comme une blessure secrète jamais cicatrisée la disparition de la chapelle de 1965 et la construction de la nouvelle église.

Après avoir longuement réfléchi à son sujet, je m’interroge : Ai-je bien saisi cette forte personnalité ? en ai-je fait le tour ? Je reste avec mes interrogations. Alors je vais conclure en citant la lettre qu’adressait Mgr Collini, le 4 août 1995 à M. Davancens pour le remercier de lui avoir offert son mémoire : « À 75 ans, l’abbé G. Baccrabère vient d’être autorisé à se retirer du ministère paroissial. Mais il a encore beaucoup à nous faire partager de ses recherches savantes. Il restera à découvrir le secret d’une vocation dont les aspects spirituels relèvent d’un mystère que sa pudeur ne tient pas à dévoiler ». On ne saurait mieux dire !

Jean ROCACHER

Louis Latour précise encore le portrait avec des souvenirs personnels, avant de souligner l’importance de l’apport scientifique de Georges Baccrabère. La Présidente donne lecture du courrier de Gabriel Manière qui s’associe à l’hommage rendu à notre confrère. Daniel Cazes rappelle que l’abbé Baccrabère était un homme très gai, et Jacqueline Labrousse qu’il était d’une grande humanité.

Le Directeur attire l’attention sur l’héritage que nous a laissé l’abbé Baccrabère : nous devons être très vigilants quant au devenir du Musée de l’Institut catholique, qu’il s’agisse du site, des collections ou des réserves. Notre confrère en était très inquiet. Il faudra en effet donner un statut à ce lieu. Il a été envisagé de le faire classer parmi les musées de France, ce qui suppose le respect de normes très précises.

Le Secrétaire-adjoint donne lecture du procès-verbal de la séance du 12 juin dernier, qui est adopté.

Des dons viennent enrichir notre bibliothèque :
            - Bernard Montagnes O.P., Magister in sacra Theologia, Leçon solennelle et hommages fraternels, 16 juin 2007, 36 p. (don de Bernard Montagnes) ;
            - Metropolis. Transport souterrain et archéologie urbaine à Toulouse 1990-2007, Musée Saint-Raymond-Tisséo-SMTC, 2007, 196 p. (don du Musée Saint-Raymond) ;
            - Hier et aujourd’hui : des poteries et des femmes. Céramiques traditionnelles du Mali, Genève, 1996, Document du Département d’anthropologie et d’écologie n° 22, 144 p. (don de Martine Rieg).

La parole est à Louis Latour pour une contribution aux Recherches campanaires : La cloche ancienne d’Auterive (suite)

Nous avons présenté ici, en 1999, la cloche ancienne d’Auterive et la cloche disparue de Beaumont-sur-Lèze (1). Cette étude a été complétée, en 2004, par celle de Lherm, aujourd’hui fêlée, déposée dans la nef de l’église Saint-André (2).
            Bien que dotées de textes différents, ces trois cloches présentent des cartouches historiés très semblables sortis des mêmes moules. Il en est de même pour les lettres, de belles onciales finement ciselées, qui proviennent vraisemblablement d’un même atelier.

Une découverte fortuite, en juin 2007, dans les réserves de notre Société, nous a incité à rouvrir notre dossier campanaire. L’objet, de taille modeste mais bien lourd (15 x 7 x 2 cm ; 1,600 kg), portait au revers la mention suivante :

Fragment de cloche
trouvé à Auterive
(Hte-Gne)
Don de Mr L. Deloume

Les recherches, dans notre Bulletin, nous ont permis de retrouver mention du don dans le compte-rendu de la séance du 25 avril 1899, sous la présidence de M. de Lahondès : « La Société a reçu de M. Louis Deloume, un fragment de cloche trouvé dans les fouilles faites sur l’emplacement de l’ancien château d’Auterive, sur lequel doit s’élever la nouvelle église » (3).
            La construction d’une nouvelle église à Auterive (4), sur le site du Castela où s’élevait jadis le château médiéval des Montaut, avait donné lieu, en effet, à des fouilles suivies par Léon Joulin, mais surtout pat Casimir Barrière-Flavy qui en avait donné un compte-rendu détaillé accompagné d’un plan aujourd’hui disparu (5).

A. LES LETTRES X ET P sur les cloches d'Auterive, Beaumont et Le Lherm. 
B. FRAGMENT DE CLOCHE trouvé à Auterive, donné par L. Deloume en 1899. Dessins L. Latour.

Le fragment donné par Louis Deloume est décoré d’une crucifixion symbolique très semblable à celles des cloches d’Auterive, de Beaumont et de Lherm, sortie sans doute des mêmes moules. En revanche, les lettres X et P – peut-être le monogramme du Christ – dont on n’aperçoit que la base, sont très différentes des mêmes lettres de nos trois cloches anciennes. Dans celles-ci, en effet, les jambages sont cloisonnés d’une fine résille et le fond est décoré de motifs végétaux ou géométriques. Dans le fragment de Louis Deloume, au contraire, sur un fond uni, les jambages sont nervurés et s’élargissent à leurs extrémités. La boucle du P se raccorde à la barre verticale par une sorte d’anneau.
            Dans un premier temps, au vu de la crucifixion semblable à celle de la vieille cloche d’Auterive, nous avions émis l’hypothèse que les fondeurs, travaillant sur place, auraient raté une première épreuve puis, l’ayant cassée pour récupérer le bronze, auraient fondu une nouvelle cloche, celle toujours en place dans l’église Saint-Paul. Le fragment retrouvé serait l’unique vestige de la cloche ratée…
            L’examen des lettres, très différentes de celles des trois cloches précédentes, remet en cause cette hypothèse : pourquoi changer de lettres – donc de moules – pour passer de la première épreuve à la cloche enfin réussie ?

La solution du problème se trouve peut-être en Ariège où des éléments semblables ont été signalés par Henri Ménard (6) : crucifixions identiques ou semblables sur les cloches du Carla-Bayle et de Dufort, lettres à jambages élargis à la base à Durfort, même succession de scènes figurées à Durfort et à Auterive, mais aussi quelques différences significatives entre les cloches ariégeoises et celles d’Auterive.
            Le clocher de Durfort attend notre prochaine visite …

Louis LATOUR

Notes

1. Communication du 5 janvier 1999, publiée dans le tome LIX des M.S.A.M.F., p. 177-187.
2. Communication du 4 mai 2004, publiée dans le Bulletin de l’année académique 2003-2004, M.S.A.M.F., t. LXIV, p. 262-266.
3. B.S.A.M.F., 1899, fasc. n° 24, p. 97.
4. Louis Latour et AREC 31, « Églises et chapelles de la Haute-Garonne, le canton d’Auterive », Toulouse, 2001, p. 64-68.
5. Casimir Barrière-Flavy, « Les fouilles de l’église de Saint-Paul d’Auterive », B.S.A.M.F., 2e série, nos 29-31, séance du 10 février 1903, p. 201-294.
6. Henri Ménard, « Cloches du Volvestre », Carbonne [1989].

 

La Présidente remercie Louis Latour de nous avoir fait connaître ce nouvel épisode d’une recherche qui prend la forme d’un véritable feuilleton que nous suivons avec beaucoup d’intérêt. Comme elle l’interroge sur le lieu de fonte, Louis Latour rappelle que si l’on retient l’hypothèse d’une matrice en buis, comme certains ateliers en ont conservées, pour la fabrication des décors en cire, alors il faut conclure à un seul atelier ; en revanche un moule métallique pourrait avoir été reproduit en plusieurs exemplaires. 
            Répondant à une question de Nicole Andrieu, Louis Latour précise que la cloche d’Auterive n’est pas elle-même datée, mais que les mêmes motifs se retrouvent sur des cloches du XVe siècle ; le moule a cependant pu être encore utilisé au XVIe siècle voire au XVIIe. Nicole Andrieu ajoute que le fiche établie par Faucher en 1914 date la cloche d’Auterive du XVe siècle et qu’elle mentionne l’existence d’une photographie.
            Maurice Scellès voudrait en savoir plus sur les conditions de la découverte du fragment de cloche. Louis Latour résume les différentes étapes de démolition et de reconstruction des édifices religieux d’Auterive et indique que c’est sur le site du château qu’a été trouvé ce fragment. Une discussion s’ensuit sur la possible attribution de la cloche au couvent des clarisses ou à la chapelle du château. Louis Latour est plutôt en faveur de l’attribution à la première église d’Auterive, elle aussi détruite en 1574, et dont le site n’est séparé que de 500 m de celui du château. Louis Latour précise encore que Deloume a ainsi récupéré de nombreux objets dont il a fait don à notre Société.

Au titre des questions diverses, la Présidente indique qu’elle n’a pas eu de réponse au courrier qu’elle a adressé au Directeur régional des Affaires culturelles au début de l’été pour demander des informations sur les travaux réalisés à Purpan, à proximité donc du site de l’amphithéâtre romain, et sur la rive gauche de la Garonne entre l’Hôtel-Dieu et le musée des Abattoirs. François Bordes rapporte, selon une source sûre, que les travaux de Purpan ont fait l’objet d’une surveillance archéologique. Maurice Scellès juge les travaux d’aménagement de la berge de la Garonne très considérables et inutiles.

Le Secrétaire général et la Bibliothécaire-archiviste rendent compte de la rencontre avec MM. Tournet et Laurens, de l’Académie des Sciences, concernant la mise en réseau de l’Hôtel d’Assézat et, surtout, la participation des académies au catalogue en ligne des bibliothèques de la Ville de Toulouse. Tous deux se disent convaincus de l’intérêt du projet et rassurés par les garanties relatives à l’indépendance de notre Société. Une convention devrait en tout état de cause être signée entre la Ville et notre Société. Le projet sera très précisément examiné par le Bureau.

Guy Ahlsell de Toulza et François Bordes font part à la Compagnie de leurs impressions après le lancement de la candidature de Toulouse au titre de capitale européenne de la culture en 2013. Hélas ! il semble que rien ne soit prêt, et que, d’ailleurs, personne ne soit vraiment dupe. La comparaison avec le travail réalisé par Lille pour sa candidature a été édifiante : on a vu la différence entre une démarche de projet et l’annonce d’un projet.

 

SÉANCE DU 16 OCTOBRE 2007

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mme Napoléone, M. Bordes, le Père Montagnes, Mgr Rocacher, MM. Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes Fournié, Friquart, Haruna-Czaplicki, Krispin, Pujalte, MM. Le Pottier, Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : Mmes Barber, Cazes, Duhem, MM. Barber, Garland, Lapart, Pradalier.

Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du  2 octobre, qui est adopté à l’unanimité.

En demandant à la Compagnie d’excuser l’absence de Lisa et Giles Barber, la Présidente donne des nouvelles de la santé de notre confrère. Elle compte sur un prochain retour parmi nous.

La Présidente annonce la parution du livre tant attendu de Maurice Prin sur les Jacobins. Illustré de photographies de Jean Dieuzaide, l’ouvrage publié par les Amis des Archives de la Haute-Garonne réunit la somme des souvenirs et des observations de Maurice Prin sur cet édifice majeur de Toulouse. Notre confrère signera son ouvrage le 17 novembre prochain, dans la salle Clémence-Isaure de l’Hôtel d’Assézat.

La correspondance se limite à quelques invitations et programmes de manifestations diverses.

L’ordre du jour appelle l’élection d’un membre correspondant. Le rapport de la Présidente entendu, on procède au vote : Mme Caroline de Barrau est élue membre correspondant de notre Société.

 

La parole est à Bruno Tollon pour une communication sur Le château de Laréole.

La Présidente remercie Bruno Tollon de nous avoir donné la primeur d’un ouvrage en cours de préparation, dont la forme devrait être semblable à celle du livre collectif qui a été consacré à l’Hôtel d’Assézat.
            En évoquant les dispositions du château de Maurémont, Guy Ahlsell de Toulza voudrait savoir comment restituer le perron de Laréole. Après avoir précisé que Maurémont a fait l’objet de travaux très importants au XVIIIe siècle, Bruno Tollon confirme que le perron était décentré à Laréole, selon un parti qui donne la préférence à la fonctionnalité. De la même manière, la composition n’est pas symétrique à l’Hôtel d’Ulmo, la régularisation étant réalisée par les fenêtres, et l’Hôtel d’Assézat offre un bel exemple d’escalier dans l’angle. Maurice Scellès observe que dans le cas de l’Hôtel d’Assézat, la question principale n’est peut-être pas celle de la symétrie mais plutôt celle de la mise en scène de la circulation dans la cour, depuis le portail d’entrée jusqu’à l’escalier.

 

Au titre des questions diverses, Guy Ahlsell de Toulza signale le vol de 91 pièces d’orfèvrerie dans la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse. Jean Le Pottier confirme que c’est toute l’orfèvrerie depuis le Concordat qui a été dérobée. Il s’agit surtout d’objets de série, mais l’inventaire exhaustif réalisé dans les années 1980 ainsi que les inscriptions et les poinçons permettraient néanmoins de les identifier.
            Pour Daniel Cazes le vol qui vient d’être commis, presque en même temps que celui survenu à Perpignan, pose la question des édifices de culte qui ne sont pas gardés. Il faudrait au moins trois gardiens à Saint-Étienne. De nombreux vols y ont déjà été commis. La situation est d’autant plus paradoxale que la cathédrale est l’édifice de culte le plus facile à surveiller à Toulouse, puisqu’elle est située immédiatement à côté de la Préfecture installée dans l’ancien palais épiscopal.
            Pour Louis Latour la protection doit être l’affaire de tous, et de rappeler le rôle qu’a eu et a encore l’Association des Amis de l’église d’Auterive dans ce domaine, pendant les travaux, en veillant par exemple à ce que les œuvres soient fixées, et après la restauration en ouvrant l’édifice sous la surveillance des paroissiens.
            Louis Latour indique que de nombreux diocèses disposent d’une commission pastorale touristique, mais que celle de Toulouse est actuellement en sommeil.
            Pour Jean Le Pottier, la cathédrale est très mal connue ; chaque visite est pour lui l’occasion de le constater en mesurant le travail considérable de mise en valeur qui devrait être fait. Daniel Cazes confirme l’extraordinaire qualité du mobilier conservé dans l’édifice : œuvres sculptées, tapisseries, reliquaires, etc. Puis il rappelle que de nombreux projets de mise en valeur ont été élaborés mais sont tombés à l’eau. Aucun plan d’ensemble ne conduit actuellement les travaux réalisés sur le site de la cathédrale – pourtant, l’un des grands sites monumentaux de Toulouse. La reprise des fouilles sur l’emplacement du cloître roman et sa mise en valeur n’intéressent personne ; l’espace paraît tout juste bon à recevoir un parking. Mieux : l’Architecte en Chef des Monuments historiques reconstruit en dur la manécanterie alors que, dans une véritable logique de Monument historique, c’est un bâtiment qu’il fallait faire disparaître.
            Guy Ahlsell de Toulza fait également remarquer l’état de saleté et de vétusté dans lequel se trouve la cathédrale. La Présidente note que l’on ne trouve même pas sur place une carte postale ; peut-être faudrait-il commencer par une petite publication de présentation de l’édifice ?

François Bordes signale à l’attention de la Compagnie le prochain colloque organisé par la Chambre régionale des comptes pour le 25e anniversaire de sa création. Puis il indique que les Archives municipales viennent de recevoir en don le fonds de l’entreprise du maître verrier Échaniz, successeur de Saint-Blancat dont des maquettes sont effectivement conservées. Il s’agit d’une suite favorable de la récente exposition sur les archives privées.

Jean Le Pottier informe la Société que la C.R.P.S. a rendu un avis favorable à la proposition d’inscription à l’Inventaire supplémentaire des Monuments historiques des bâtiments du XIXe siècle de l’hôpital Marchand.

Guy Ahlsell de Toulza dit avoir retrouvé chez lui des photographies de monuments de la région, prises vers 1900, dont des vues de Toulouse, de l’église Sainte-Matrone, du château de Montpezat… Il se propose de les numériser et de les inventorier.

La Présidente rappelle qu’il nous faut, sans tarder, mettre sur pied la commission de publication de nos Mémoires, qui doit être installée au plus tard début 2008. La plupart d’entre nous ont en effet reçu au cours de l’été le courriel par lequel notre Secrétaire général manifestait son intention de ne plus se charger de l’édition des Mémoires à partir du volume 2008. La Présidente souligne le travail très important accompli depuis près de vingt ans, qui a largement contribué à faire de nos Mémoires une publication dont la qualité est aujourd’hui reconnue en France et à l’étranger. Ce travail doit être poursuivi et la Présidente renouvelle l’appel à toutes les bonnes volontés.

 

SÉANCE DU 13 NOVEMBRE 2007

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Cazes, Napoléone, Pousthomis-Dalle, Watin-Grandchamp, MM. Boudartchouk, Catalo, Bordes, Gilles, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Tollon, membres titulaires ; Mmes de Barrau, Bayle, Béa, Friquart, Fronton-Wessel, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Krispin, MM. Laurière, Mattalia, Molet, Pousthomis, Surmonne.
Excusés : M. Daniel Cazes, Directeur, Mme Barber, MM. Barber, Garland.
Invités : Mmes Ondine Jouve, architecte, coordinatrice de la mission de l’Inventaire pour le Tarn, Diane Joy, du Service de la connaissance du Patrimoine de la Région Midi-Pyrénées, Sonia Servant, chargée d’inventaire pour Sorèze et La Bruguière.

 

La Présidente ouvre la séance à 17 h. Elle commence par annoncer la sortie publique de l’ouvrage de Maurice Prin sur L’ensemble conventuel des Jacobins de Toulouse (avec des photographies de Jean Dieuzaide, Toulouse, Association des Amis des Archives de la Haute-Garonne, 2007, 280 p.), qui aura lieu dans la Salle Clémence-Isaure de l’Hôtel d’Assézat, samedi prochain 17 novembre à 15 h  ; la présentation du grand œuvre, tant espéré, de notre confrère sera assurée par Bernadette Suau et illustrée de films d’archive projetés par Jean Le Pottier. Puis elle rappelle que la réunion du mardi 27 novembre se tiendra au musée Saint-Raymond, pour la visite de l’exposition Metropolis, dirigée par Daniel Cazes, guidée par Évelyne Ugaglia, Jean-Luc Boudartchouk et Jean Catalo.

La Présidente accueille ensuite Caroline de Barrau, nouvellement élue membre correspondant, qui prend séance ce soir.

Mme Pradalier-Schlumberger remercie Jacqueline Labrousse du don important qu’elle avait fait en 2005 et qui vient de rentrer dans notre bibliothèque : la série des Fasti archeologici de 1946 à 1970 (t. I-XXV).

La Présidente donne alors la parole à Mme Suau pour le compte rendu de la réunion qui s’est tenue jeudi 8 novembre au sujet de la mise en réseau informatique des fichiers de la bibliothèque. La Bibliothécaire rappelle la consistance de l’opération et annonce que le répertoire des périodiques est maintenant quasi achevé. Jacques Surmonne précise que le réseau sera accessible sur Internet en 2008. Le Secrétaire général se félicite de l’aboutissement de ce projet, déjà ancien, dont la réalisation se heurtait notamment au problème d’une évolution technique très rapide ; la solution de l’hébergement sur un site municipal offre la garantie de conditions optimales pour l’actualisation et la maintenance du système. Il est rappelé que le nouveau règlement des conditions d’utilisation de la bibliothèque est entré en vigueur à la suite de la séance du 29 mai 2007.
            La Présidente fait enfin le point sur la constitution de la Commission de publication des Mémoires de notre Société : elle a pour l’instant reçu les réponses favorables de Mmes Napoléone et Barber, ainsi que de M. Surmonne.

La parole est à Maurice Scellès pour la communication inscrite à l’ordre du jour, présentée en collaboration avec les dendrochronologues du laboratoire de Besançon : Résultats du programme d’analyse de dendrochronologie en Midi-Pyrénées (DRAC, 2004-2007), publiée dans ce volume (t. LXVIII, 2008) de nos Mémoires.

La Présidente adresse ses félicitations à l’équipe de l’Inventaire, tant pour la documentation réunie que pour les premières conclusions, et en particulier pour ce qui concerne l’étude de l’archidiaconé de Cahors. Elle souligne combien la prudence doit être de mise en matière de datation par le bois  : les remplois constatés à Sorèze sont des exemples probants. Quitterie Cazes s’associe à cet éloge : la méthode mise en œuvre et la réflexion de fond sont exemplaires ; elle veut savoir en quoi la courbe en construction sera « plus juste ». Maurice Scellès explique que la courbe ne sera pas « plus juste » mais publique, et donc a priori vérifiable par tous les laboratoires : la qualité des prélèvements et des mesures et les protocoles appliqués doivent pouvoir être contrôlés. Il ajoute que les données collectées concernent presque uniquement  le chêne, alors qu’à partir du XVIe siècle, notamment à Toulouse, on utilise des résineux. Il faudra également combler le  « trou » des XVIIe et XVIIIe siècles.
            Henri Molet intervient en évoquant l’aspect économique de la question : il conviendrait de retracer les circuits de commercialisation du bois ; il importe ainsi de savoir d’où provenaient les arbres mis en œuvre à Sorèze : du versant méridional de la Montagne noire, ou de la région de Castres ?
            Jean Catalo pose quant à lui le problème de la confirmation de l’étalonnage dendrochronologique par le recours au carbone 14. L’idéal serait de croiser les résultats de méthodes variées : analyse formelle de l’architecture et de la sculpture, analyse dendrochronologique, analyse du C14. M. Scellès constate, sur le plan de la pratique, que ce ne sont pas les mêmes laboratoires qui procèdent aux deux derniers types d’étude. Il note de plus qu’on a dans les différentes disciplines l’habitude d’appliquer des méthodes différentes : archéologie du sous-sol, archéologie monumentale ou histoire de l’art.
            M. Catalo conclut à l’opportunité de constituer une base de données pluridisciplinaire. François Bordes abonde en ce sens, ajoutant au faisceau des données à confronter celles fournies par les recherches dans les archives ; M. Molet acquiesce.
            Maurice Scellès rappelle que le programme en cours sur Midi-Pyrénées se terminera à la fin de 2008, mais il ajoute que la poursuite prévue du projet devra nécessairement intégrer des compléments. Ceux-ci seront en effet indispensables dans le cas de Toulouse, pour laquelle il s’agira identifier les provenances des essences de résineux. Henri Molet précise que les bois utilisés dans la ville venaient de trois régions différentes.
            Guy Ahlsell de Toulza se plaît à relever que les maisons médiévales de Sorèze n’ont donc pas disparu, comme les historiens ont accoutumé de le répéter, dans la tourmente des Guerres de Religion.

Au titre des questions diverses, on signale sur le site de La Tribune de l’Art (www.latribunedelart.com/Patrimoine/Patrimoine_2007/Restauration_Fontainebleau_522), une note de Didier Rykner, « Fontainebleau n’est pas Schönbrunn » : la partie du château connue sous le nom de « Quartier Henri IV », restaurée récemment, a été badigeonnée en jaune, y compris l’appareillage de grès ; or il est sûr qu’« à l’origine ce bâtiment n’a jamais été peint de cette manière là, et qu’aucun état historique documenté ne le montre ainsi »...

Jean-Luc Boudartchouk offre pour la bibliothèque un exemplaire de l’article qu’il vient de consacrer avec divers spécialistes à « La “charte de Nizezius” : encore un faux de l’abbaye clunisienne de Moissac » (Annales du Midi, t. 119, n° 259, juillet-septembre 2007, p. 269-308), étude essentielle dont il donne un résumé.

 

SÉANCE DU 27 NOVEMBRE 2007

Présents : Mme Pradalier, Présidente, Cazes, Directeur, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Labrousse, Napoléone, MM. Boudartchouk, Catalo, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, membres titulaires ; Mmes Barber, Bayle, Friquart, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Jiménez, Krispin, Sudre ; MM. Macé, Mattalia, Molet, Pousthomis, Surmonne, membres correspondants.
Invités : Mmes Diane Joy, Michèle Latour, MM. Georges Cugulières, Jean-Pierre Suau.

La Compagnie est accueillie au Musée Saint-Raymond à 17 heures par Daniel Cazes, conservateur en chef du musée, pour la visite de l’exposition Metropolis.
   
         Après une présentation de M. Michel Vaginay, conservateur régional de l’archéologie, Jean Catalo, Jean-Luc Boudartchouk, Henri Molet et Évelyne Ugaglia commentent tour à tour les différentes sections de l’exposition.

La Présidente remercie M. Michel Vaginay et tous les intervenants et elle adresse également ses remerciements au personnel du Musée Saint-Raymond et de l’Inrap pour le travail accompli. Après que notre Société a été accueillie sur les chantiers de fouilles de la place des Carmes et du palais de justice, il est particulièrement agréable et intéressant de retrouver avec cette exposition les résultats de dix-sept années de recherches archéologiques liées à la construction du métro de Toulouse. La Présidente conclut en se demandant s’il faut souhaiter une troisième ligne de métro pour avoir de nouvelles découvertes.

 

SÉANCE DU 4 DÉCEMBRE 2007

Présents : M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Latour, Bibliothécaire-adjoint ; le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Roquebert, Tollon, membres titulaires ; Mmes Bayle, Barber, Haruna-Czaplicki, Krispin ; MM. Burroni, Le Pottier, Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : Mme Pradalier, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Mme Friquart, MM. Bordes, Garland.

En l’absence de la Présidente Mme Pradalier, M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, ouvre la séance et donne aussitôt la parole à Bruno Tollon pour une communication sur Une architecture en papier, deux dessins signés Bernard Nalot.

Guy Ahlsell de Toulza remercie Bruno Tollon d’avoir présenter deux plans contemporains (1540 et 1543), signés tous les deux par Bernard Nalot, et qui concernent deux édifices toulousains : le collège Saint-Martial et l’hôpital Saint-Jacques (Hôtel-Dieu). Puis il ouvre la discussion en demandant si des vestiges des constructions de cette époque  subsistent encore. Le collège Saint-Martial, situé entre la Place du Capitole et la rue Saint-Pantaléon, ne semble guère avoir conservé d’éléments anciens, sauf peut-être au n° 12 de rue Saint-Pantaléon qui abrite le Centre méridional de l’Architecture, dépendant du CAUE.
            Quant à la partie de l’Hôtel-Dieu, représentée sur le plan, parallèle à la Garonne, elle n’a pas résisté au projet et devis de Jean-Pierre Rivals et aux travaux de reconstruction réalisés à la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle.
            Ces deux documents, poursuit Bruno Tollon, conservés aux Archives départementales de la Haute-Garonne sont isolés et pour le moment, il n’a pas fait des recherches permettant de savoir dans quel contexte ils ont été commandés. Il ne sait pas non plus s’ils ont été véritablement suivis d’effet. Lui-même n’est pas spécialiste des édifices hospitaliers et les publications qui existent à ce jour sur les hôpitaux toulousains contiennent surtout des études sur les soins pratiqués et les fonctionnalités assumées. Il s’est plutôt attaché à tenter de mieux connaître Bernard Nalot qui a travaillé à Toulouse entre 1533 et 1550, qui a participé notamment aux préparatifs des entrées royales (1533 et 1535) et que l’on trouve associé à Jean Rancy et à Nicolas Bachelier pour les grands travaux réalisés ou prévus dans la ville.
            Bernadette Suau rappelle qu’un arrêt du parlement de Toulouse daté des années 1515-1520 a supprimé tous les petits hôpitaux répartis dans la ville (une vingtaine) pour n’en conserver que cinq, dont l’hôpital Saint-Jacques, situé sur la rive gauche de la Garonne, dans le quartier Saint-Cyprien. Il est donc normal que cet hôpital ait eu besoin de s’agrandir et de se doter, comme on le voit sur le plan, de vastes salles, réparties de part et d’autre d’une grande cour.
            Guy Ahlsell de Toulza et Louis Peyrusse posent ensuite un certain nombre de questions sur l’orientation du plan, sur les petites salles dessinées à la partie supérieure droite du plan, non loin de la chapelle, salles destinées sans doute au personnel et sur l’entrée du bâtiment qui n’apparaît guère. Bruno Tollon pense que l’entrée pouvait correspondre à un passage couvert donnant sur la galerie qui longe la cour. Puis la discussion a porté sur l’emplacement du compas qui occupe une place non négligeable. Pouvait-il y avoir une salle supplémentaire ou des jardins ? B. Tollon fait remarquer que le compas est accompagné d’un encadrement qui se présente comme un cartouche, complété par l’inscription qui a permis d’identifier l’auteur du plan.
            Il est possible, selon Bruno Tollon, que le collège Saint-Martial ait eu un projet ambitieux d’aménagement des locaux, avec une vaste salle de délibérations au rez-de-chaussée et une librairie à l’étage, comme dans des collèges parisiens de la même époque.

À titre d’information, Guy Ahlsell de Toulza fait savoir que Sylvie Desachy, directrice des Archives départementales du Tarn, lui a téléphoné pour lui faire savoir que les anges volés du maître-autel de l’église Notre-Dame du Bourg de Rabastens venaient d’être retrouvés à Nîmes. Jean Le Pottier le confirme et ajoute que d’autres objets ont été retrouvés au même endroit : la Piétà de Saint-Martory, les anges de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse et d’autres encore à identifier avec certitude (anges de Villefranche, reliquaire de Montauban, semble-t-il). On ne peut que s’en réjouir, déclare Guy Ahlsell de Toulza, qui clôt ainsi la séance.

 

SÉANCE DU 18 DÉCEMBRE 2007

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, MM. Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mme Napoléone, MM. Bordes, le Père Montagnes, M. Peyrusse, membres titulaires ; Mmes Bayle, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Krispin, MM. Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Cazes, Friquart, Watin-Grandchamp, MM. Garland, Pradalier.
Invité : M. Georges Cugulières.

La Présidente ouvre la séance et en souligne le caractère un peu exceptionnel puisque notre Compagnie entendra ce soir en communication principale M. Hubert Delpont, qui nous fera part de ses recherches sur « l’affaire Chrétin ». Si le Bureau a accepté de déroger à l’usage selon lequel les communications sont faites par des membres de notre Société, c’est que le sujet dont notre conférencier nous entretiendra concerne au plus haut point la Société Archéologique du Midi de la France, et en particulier l’un de ses membres les plus fameux, Alexandre Du Mège, puisqu’il s’agit de l’affaire des reliefs de Tétricus découverts à Nérac.

Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 16 octobre 2007. Daniel Cazes regrette que ne soit pas consignée son intervention sur l’aménagement du site de la cathédrale et en particulier de l’espace du cloître. Concernant la restauration de la cathédrale de Tarragone, le Directeur ajoute qu’actuellement en Espagne on procède pour les chantiers de restauration à l’établissement de plans directeurs portant sur une vingtaine, voire une trentaine, d’années et comportant des prévisions de financement à hauteur d’un million d’euros par an. Le Secrétaire général reconnaît volontiers la lacune du compte rendu et propose de rédiger un complément qui sera présenté à la Compagnie lors de la prochaine séance. Dans cette attente, l’adoption du procès-verbal est reportée.

Louis Latour signale l’article de La Dépêche relatant l’arrestation des membres d’un réseau de cambrioleurs qui avaient opéré dans de nombreuses églises du Midi. Guy Ahlsell de Toulza complète l’information en indiquant que les anges qu’il a pu voir à Montpellier ne sont pas ceux de Rabastens qui doivent, eux, se trouver entre l’Aude et l’Hérault.

Plusieurs ouvrages viennent enrichir notre bibliothèque :
            - Histoire du catharisme, trimestriel du Centre d’Études cathares René-Nelli, n° 5, 2007, avec un dossier sur L’affaire Pierre Maurand, de Patrice Cabau ;
            - Pascal Foucher, Christina San Juan-Foucher, Yoan Rumeau, La grotte de Gargas, 2007, 126 p. (don des auteurs) ;
            - Hubert Delpont, Maximilien Théodore Chrétin et l’empire de Tétricus. Histoire d’une arnaque, Nérac, Éditions d’Albret, 2006, 197 p. + planches hors texte (don de l’auteur) ;
            - Hubert Delpont, Parade pour une infante. Le périple nuptial de Louis XIV à travers le Midi de la France (1659-1660), Éditions d’Albert, 2007, 238p. (don de l’auteur) ;
            - Maurice Prin, Jean Dieuzaide, Les Jacobins de Toulouse, Les Amis des Archives de la Haute-Garonne, 2007, 279 p. (don de l’auteur) ;
            - Le scriptorium d’Albi. Les manuscrits de la cathédrale Sainte-Cécile (VIIe-XIIe siècles), sous la direction de Mathieu Desachy, Éditions du Rouergue, 2007, 174 p. (don de Hiromi Haruna-Czaplicki).

La Présidente remercie les donateurs.

Guy Ahlsell de Toulza rend compte du Conseil d’administration de l’Union. Il signale que le tableau de Louis Boulanger (1806-1867) intitulé Les trois amours poétiques, que l’on attendait pour décorer la salle Clémence-Isaure, a été accroché ; il s’agit d’un dépôt du Musée des Augustins.

 

La Présidente donne la parole à M. Hubert Delpont qui expose avec beaucoup de talent les étapes et les résultats de son enquête sur « l’affaire Chrétin », devenue la matière d’un livre paru en 2006 : Maximilien Théodore Chrétin et l’empire de Tétricus. Histoire d’une arnaque.

« L’affaire Chrétin » (ou « affaire Tétricus »), est une des plus célèbres affaires de faux en archéologie, qui, à ce jour, n’avait pourtant jamais été complètement démêlée. Construit à la manière d’une enquête policière, l’ouvrage reconstitue les rocambolesques épisodes de l’Affaire qui tint en haleine le monde savant entre Nérac, Toulouse et Paris de 1832 à 1835. Si chacun s’accorde à dire que toutes les pièces « inventées » par Chrétin sont des faux qu’il a lui-même fabriqués grâce à ses talents de graveur et de sculpteur, restait à dénouer les fils de la supercherie. L’enquête de l’historien (aidé de celle d’un contemporain de Chrétin, le Toulousain Saint-Paul) permet de confondre formellement le faussaire, grâce au procès-verbal de la commission d’enquête de la Société Archéologique du Midi de la France, du 18 juillet 1835, qui, ayant relevé l’existence du morceau de marbre manquant au coin du célèbre « triomphe », souligne que la virginité de ce morceau atteste la modernité du bas-relief. Il faut se demander ensuite pourquoi les conclusions de cette commission n’ont jamais été entérinées ni publiées, entraînant la naissance d’une légende qui perdure à Toulouse jusqu’en 1940, selon laquelle « le Triomphe » serait une pièce authentique, moins ses inscriptions.
            On en trouve la raison dans une note de Du Mège, (p. 209 du t. I des Mémoires de la S.A.M.F.) dans laquelle l’archéologue prend sur lui l’antériorité de la découverte de Néra, épouse de Tétricus Ier qu’il dit avoir découverte dès 1828 à Valcabrère, alors que Chrétin ne la « découvre » qu’à la fin de 1832. Cette note, longuement argumentée (date, lieu, nom de l’inventeur, texte de l’inscription, lieu de dépôt, etc.) constitue la preuve matérielle de la complicité de Du Mège, le personnage de Néra étant la plus belle création des faussaires. Il est alors possible de reconstituer l’ensemble de « l’affaire », qui ne prend véritablement corps qu’à partir de la rencontre des deux hommes à Nérac en novembre 1832, les talents de graveur de Chrétin nécessitant les (médiocres) lumières du latiniste Du Mège.
            Le livre évoque ensuite les autres grands épisodes de la vie de Chrétin, bien dans « l’esprit » du personnage : mosaïste à Germigny-des-Prés, sculpteur au Louvre et déporté politique sur les pontons de Brest après les journées de juin 1848.

Hubert DELPONT

La Présidente remercie M. Hubert Delpont de ce récit qu’il a su rendre aussi amusant qu’intéressant, ayant retrouvé en l’entendant le plaisir et l’intérêt qu’elle avait eus en lisant son ouvrage. Avant de revenir sur le rôle d’Alexandre Du Mège, elle souhaite insister sur les qualités artistiques de Maximilien Théodore Chrétin, sculpteur talentueux mais aussi peintre, graveur, mosaïste… M. Hubert Delpont souscrit totalement à ce jugement et souhaite que les talents de Chrétin soient en effet reconnus, alors que celui-ci ne figure toujours pas dans les dictionnaires d’artistes.
            Louis Latour prend la défense de Léon Soulé qui, selon lui, ne plaide pas systématiquement en faveur de Du Mège mais propose un exposé des faits. M. Delpont rappelle qu’il ne prend en compte que sa relation de l’affaire Chrétin, pour laquelle on n’avait alors pas de preuve de la complicité de Du Mège.

Cette accusation de complicité gêne Louis Peyrusse : il n’y a de faussaire que lorsqu’il existe une demande, et c’est Alexandre Du Mège qui se fait rouler par Chrétin. Entièrement dans l’enthousiasme de la découverte, et sans s’en rendre compte, Du Mège donne au faussaire tous les éléments dont il a besoin. Le texte publié en 1865 ne prouve rien, si ce n’est que ceux qui avaient conclu à l’authenticité du relief du triomphe de Tétricus n’ont jamais voulu perdre la face. La commission d’enquête savait, mais la Société Archéologique du Midi de la France n’a jamais voulu convenir qu’elle avait été grugée et qu’elle avait fait acheter pour 3000 F. un faux marbre antique pour le Musée de Toulouse. Pour Louis Peyrusse, c’est une dialectique plus sophistiquée qui régit les rapports entre Du Mège et Chrétin. M. Delpont partage le même avis sur l’attitude de la Société Archéologique, mais quant au couple Chrétin-Du Mège, on a affaire à deux roués, le plus roué des deux n’étant pas celui qu’on pense ; et il n’est pas possible que Du Mège ait été naïf aussi longtemps.
            Daniel Cazes félicite à son tour M. Hubert Delpont pour son livre qu’il déclare avoir lu avec passion. Il lui paraît cependant nécessaire de replacer « l’affaire Tétricus » dans l’ensemble de la carrière d’Alexandre Du Mège, en rappelant aussi que l’on a voulu lui régler son compte. Le Du Mège enthousiaste qui constitue alors les collections du Musée de Toulouse est parfois dépassé par ses activités. Il faut se rendre compte que lorsque est mis au jour le site antique de Nérac, il y a tout lieu de penser qu’il s’agit d’une découverte très importante. Du Mège lui consacre quatre articles successifs. Le premier article, qui compte près de soixante pages, est rédigé par un Du Mège enthousiaste mais qui explique qu’il écrit d’après des dessins envoyés par Chrétin. Le dernier article, consacré au Bas-relief représentant le second triomphe des deux Tetricus, n’en compte que neuf, auxquelles il faut ajouter les planches : Du Mège n’y a pas véritablement cru.

Maurice Scellès fait cependant remarquer que c’est Du Mège qui invente le personnage de Néra, en fabriquant une fausse preuve ; il rapporte encore, parmi d’autres exemples possibles, comment Du Mège « enrichit » un site de Tarn-et-Garonne en y rattachant des dessins de chapiteaux provenant de la Daurade, dans un rapport manuscrit il est vrai seulement destiné à la Préfecture.
            Comme Martine Jaoul observe que les marbres ont cependant bel et bien été découverts sur place, M. Hubert Delpont explique que les témoignages recueillis indiquent qu’ils étaient enfouis pendant la nuit.
            Maurice Scellès voudrait savoir si l’on connaît le modèle du triomphe de Tétricus. Daniel Cazes et Louis Peyrusse expliquent qu’il n’y a pas un seul modèle, mais qu’il existe de nombreuses représentations de chars et de triomphes, qui ont alors été reproduites par la gravure et auxquelles Chrétin pouvait donc avoir accès. Daniel Cazes confirme qu’il n’y aucun anachronisme dans la représentation elle-même alors que les inscriptions ne sont pas crédibles, et il rappelle que le professeur Lebègue, membre de l’École française de Rome, défendait encore en 1890 l’authenticité du relief. Pour Louis Peyrusse les faux célèbres correspondent à une attente et c’est la raison pour laquelle les plus savants sont trompés. Chrétin était à l’évidence très malin, et il était sûr du succès. Daniel Cazes confirme que pour Du Mège, le relief de Tétricus venait compléter à point nommé, et magnifiquement, la série du musée de Toulouse.
            Daniel Cazes propose un parallèle avec l’affaire des dalles funéraires des archevêques de Toulouse, une affaire tout aussi embrouillée et mystérieuse. Les dalles, qui ont existé, disparaissent dans les travaux et Du Mège, embêté, fait alors fabriquer des pastiches. Daniel Cazes considère que M. Delpont a d’ailleurs fort bien décrit ce milieu où se côtoient les « antiquaires », les entrepreneurs et les professeurs de l’École des Beaux-Arts ; mais pour ce qui est de Nérac, à son sens, Du Mège y a moins de responsabilité que ne le pense notre conférencier. Convaincu au contraire de la complicité active de Du Mège, M. Hubert Delpont fait observer que celui-ci s’en est, en outre, bien sorti, bien mieux en tout cas que son alter ego. Louis Peyrusse rappelle que « l’affaire Chrétin » lui a cependant fait beaucoup de tort.

Daniel Cazes souhaite profiter de l’occasion pour revenir sur les fouilles de Nérac. Peut-être Du Mège n’avait-il pas tout à fait tort quand il comparait Nérac et Pompéi ? En tout cas, lorsqu’en Italie on trouve un site archéologique, on le classe et y met un gardien pour le protéger. En France, chaque fois que l’on trouve quelque chose d’un peu exceptionnel, on l’oublie. Ainsi de Nérac, où les découvertes des années 1830 sont aujourd’hui complètement oubliées. Or, si les inscriptions sont fausses, les vestiges des bâtiments qui ont été mis au jour sont vrais, et ils appartiennent à l’évidence à un ensemble exceptionnel, qui n’est peut-être pas sans similitudes avec le palais des rois wisigoths de Toulouse. L’affaire Chrétin a malheureusement jeté le discrédit sur le site. Daniel Cazes souhaiterait la reprise des fouilles et il rappelle que des mosaïques tout à fait extraordinaires ont été mises au jour sur le site. M. Hubert Delpont confirme que ce sont des centaines de m2 de mosaïques qui sont conservés. Il ajoute que le chantier a été fermé une dizaine d’années après la première découverte, et qu’il n’a jamais été rouvert depuis, en précisant cependant que les archéologues considèrent généralement que le site antique n’était pas plus qu’une villa comparable à celle de Séviac.
            La Présidente conclut la discussion en émettant le souhait que des fouilles archéologiques soient reprises à Nérac et que le site soit mis en valeur. Daniel Cazes souligne une nouvelle fois les talents de sculpteur de Maximilien Théodore Chrétin que M. Hubert Delpont voudrait voir figurer dans le Bénézit.

 

SÉANCE DU 8 JANVIER 2008

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, MM. Daniel Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, MM. Latour, Bibliothécaire-adjoint, Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Napoléone, Pousthomis-Dalle, MM. Boudartchouk, Bordes, le Père Montagnes, M. Roquebert, membres titulaires ; Mmes Andrieu, Balty, Barber, Bayle, Félix, Fournié, Friquart, Haruna-Czaplicki, Krispin, MM. Balty, Garland, Mattalia, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : Mme Cazes, M. Pradalier.

La Présidente ouvre la séance à 17 h et présente à la Compagnie ses vœux les meilleurs pour l’année civile qui vient de commencer. Elle annonce le calendrier de quelques manifestations importantes pour la vie de notre Société : la séance publique qui se tiendra le 15 mars 2008 dans la Salle Clémence-Isaure de l’Hôtel d’Assézat, la journée foraine qui aura lieu le 21 juin 2008 à Saint-Lizier et qui sera consacrée aux deux cathédrales de la ville.

Michèle Pradalier-Schlumberger présente ensuite le volume LXVI de nos Mémoires, fraîchement sorti de l’imprimerie.

La parole est à Maurice Scellès pour la lecture de procès-verbaux des séances des 16 octobre, 4 et 18 décembre 2007, dont le deuxième a été rédigé par Bernadette Suau. Les trois comptes rendus sont adoptés après amendements. 

La Présidente rend compte de la correspondance manuscrite, qui comprend notamment :
            - une lettre de Mme Moulins-Fossés, Présidente de l’Association des Amis des Archives de la Haute-Garonne, qui remercie la Société archéologique d’avoir patronné la sortie publique de l’ouvrage notre confrère Maurice Prin sur le couvent des Jacobins de Toulouse ;
            - les vœux de notre confrère Gabriel Manière, qui vient d’atteindre sa 99e année ; Daniel Cazes révèle à la Compagnie que M. Manière n’est autre que le petit-neveu de l’abbé Breuil, qui lui communiqua sa passion pour l’archéologie.

Mme Pradalier-Schlumberger présente ensuite le volume sur Le château de Laréole publié sous la direction de nos confrères Louis Peyrusse et Bruno Tollon, édité par les Amis de l’Hôtel d’Assézat, qui l’offrent pour notre bibliothèque.

La Présidente annonce que la Société aura au cours de la prochaine séance à se prononcer sur les candidatures de MM. Patrice Georges et Pascal Capus au titre de membre correspondant.

La parole est à notre confrère Jean-Luc Boudartchouk pour la communication inscrite à l’ordre du jour, réalisée en collaboration avec Patrice Cabau et intitulée Autour de l’évêque Saturnin : disciples, compagnons et martyrs.

Mme Pradalier-Schlumberger adresse à l’intervenant ses félicitations pour la présentation de ce beau dossier, qui ouvre des pistes de recherche nouvelles. Elle se demande s’il ne faut pas voir sur le chapiteau du cloître de Moissac figurant le martyre de Saturnin un pot à onguent plutôt qu’une boîte à reliques. M. Boudartchouk justifie son interprétation en expliquant que la dernière hypothèse s’accorde davantage avec le récit que la sculpture illustre et dont les versions successives glissent vers un fractionnement du corps du martyr.
            Michelle Fournié s’interroge quant à elle sur l’identité du compagnon sculpté sur le bloc de Saint-Hilaire d’Aude : s’agit-il de saint Firmin, ou bien de saint Papoul ? Jean-Luc Boudartchouk argumente, sur la base de références textuelles, en faveur de l’identification avec saint Firmin. François Bordes veut savoir si ce Firmin est le même que le Fermìn honoré à Pampelune. M. Boudartchouk répond par l’affirmative.
            Daniel Cazes relève la concordance chronologique des textes amplifiés rédigés au XIe siècle et de l’iconographie sculptée à la même époque à Moissac aussi bien qu’à Saint-Sernin de Toulouse.

Au titre des questions diverses, Nicole Andrieu se réjouit de la réapparition toute récente d’œuvres d’art volées dans la région : la Pietà de Saint-Martory, les anges de Rabastens, ceux de l’autel de paroisse de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse, deux statues de Castanet… L’Office central de lutte contre le trafic des biens culturels (O.C.B.C.) vient de procéder à l’arrestation du malfaiteur dans l’hôtel de Paris où il entassait le produit de ses rapines.
            Daniel Cazes évoque les travaux de restauration qui mettent magnifiquement en valeur le rempart que longe le boulevard Armand-Duportal. Patrice Cabau émet des réserves quant à la qualité scientifique de cette intervention ; il lui paraît par ailleurs peu probable qu’elle s’étende pour l’immédiat de la section qui limite le campus de l’Université des sciences sociales à celle qui borde la Cité administrative.

La Compagnie apprend que les vestiges apparus à Cahors, qui sont ceux d’un énorme amphithéâtre antique, sont promis au ré-enfouissement et qu’ils ne bénéficieront d’aucune protection au titre des Monuments historiques. Daniel Cazes regrette qu’il ne se soit pas produit à Cahors ce qui s’est passé à Aix-en-Provence, où existe depuis des années un Service municipal de l’archéologie animé par une archéologue de grande valeur. Maurice Scellès fait remarquer qu’à Cahors le Service du Patrimoine n’a qu’un an d’existence.

 

SÉANCE DU 22 JANVIER 2008

Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Mme Suau, Bibliothécaire-Archiviste, M. Cabau, Secrétaire-adjoint ; Mmes Cazes, Napoléone, MM. Bordes, Boudartchouk, le Père Montagnes, M. Peyrusse, membres titulaires ; M. Hermet, membre libre ; Mmes Barber, Balty, Bayle, Friquart, Haruna-Czaplicki, Jiménez, Krispin, MM. Balty, Surmonne, membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Directeur, Latour, Bibliothécaire-adjoint, M. Barber.

La Présidente annonce à la Compagnie le décès de notre confrère Henri Blaquière, ancien inspecteur général des Archives de France, qui était membre de notre Société depuis 1952. En attendant l’éloge qu’elle prononcera lors de la séance publique, la Présidente donne la parole à la Bibliothécaire-Archiviste qui évoque la personnalité et la carrière de notre confrère disparu.
            Bernadette Suau dit tout le respect qu’elle avait pour celui qui avait été l’un de ses prestigieux prédécesseurs, et dont l’action a été tout à fait exemplaire aussi bien dans le domaine de la recherche que dans celui des archives. Après un début de carrière dans l’Aude, Henri Blaquière a pris la direction des Archives départementales de la Haute-Garonne, poste qu’il a occupé jusqu’en 1973, date à laquelle il a été nommé inspecteur général des archives de France. C’est à lui que l’on doit le magnifique bâtiment élevé au bord du canal, un bâtiment conçu pour les archives et qui était exemplaire en 1955. Henri Blaquière s’est attaqué au classement des archives postérieures à 1940, et il a développé un service éducatif dès les années 1955-1960. Il avait la réputation d’un homme sévère, mais c’était un homme que tout le monde respectait, à juste titre. Bernadette Suau se souvient aussi de sa grande simplicité, et du plaisir des visites qu’il lui faisait régulièrement alors qu’elle était directrice des Archives départementales.

La correspondance manuscrite comprend une lettre du maire de Toulouse levant définitivement le malentendu survenu quant à la mise en vente de l’ouvrage de Maurice Prin dans l’Ensemble conventuel des Jacobins.
            Messieurs Jean-Claude Richard et René Souriac nous adressent leurs vœux pour la nouvelle année.

Deux candidats nous adressent leurs travaux pour le concours :
            - Alexis Corrochano, Des nécropoles au cimetière médiéval, mémoire de master 2 sous la direction de Nelly Pousthomis-Dalle. Le rapport est confié à Jean-Luc Boudartchouk.
            - Anaïs Charrier, Les églises en grès du canton de Lacapelle-Marival, mémoire de master 1 sous la direction de Quitterie Cazes, 2007. Michèle Pradalier-Schlumberger se chargera du rapport.

De nouveaux dons viennent enrichir notre bibliothèque :
            - De grandes espérances : Toulouse entre les deux guerres. Les écrivains, les artistes et le livre, 22 janvier-22 mars 2008, Bibliothèque de Toulouse, 2008, 128 p. (don de Louis Peyrusse) ;
            - La Préfecture de la Haute-Garonne. Histoire, institution, architecture, s.l.n.d. [Toulouse, 2008], 236 p. (don de Louise-Emmanuelle Friquart et Laure Krispin).

C’est également la presque totalité de la collection de l’Archéologie tarnaise qui a été offerte par Guy Ahlsell de Toulza.
           
Et nous avons encore reçu 43 ouvrages offerts par les éditions Sud-Ouest, en échange d’une page de publicité insérée dans nos Mémoires, échange négocié par notre Secrétaire général. Ce sont principalement des ouvrages d’histoire ou d’histoire de l’art, le plus souvent dus à de bons auteurs même lorsqu’il s’agit de guides de visite.

L’ordre du jour appelle l’élection de membres correspondants et titulaires.
            La Présidente donne la parole à Jean-Luc Boudartchouk pour son rapport sur la candidature de M. Patrice Georges au titre de membre correspondant, puis à Quitterie Cazes qui donne lecture du rapport établi par Daniel Cazes sur la candidature de M. Pascal Capus. On procède au vote : MM. Patrice Georges et Pascal Capus sont élus membres correspondants de notre Société.
            Sur proposition du Bureau, Jeanne Bayle, Emmanuel Garland et Nicole Andrieu sont élus membres titulaires. Jeanne Bayle remercie la Compagnie de cette marque de confiance.

La Compagnie s’étant constituée en assemblée générale, la Présidente présente le rapport moral pour l’année 2007.
            La Bibliothécaire-Archiviste apporte quelques précisions sur un fonds d’archives du baron de Rivières (1835-1919), acheté la semaine dernière par notre Société et qui comprend des carnets, des dessins, de la correspondance… L’intérêt de ce fonds est certain pour l’historiographie de la première moitié du XIXe siècle.
            Le Trésorier présente le rapport financier. Louis Peyrusse juge très encourageants les échanges de service avec l’Université et l’accroissement des ventes de nos publications. La Présidente constate qu’il sera nécessaire de procéder une nouvelle fois à une campagne de rappel auprès des trop nombreux membres ayant des cotisations en retard.
            À l’unanimité des membres présents, le rapport moral est adopté et quitus est donné au Trésorier pour sa bonne gestion. La Présidente remercie le Trésorier qui est salué par des applaudissements.

Il est procédé aux élections statutaires qui concernent cette année les fonctions de Président, de Secrétaire général et de Bibliothécaire-Archiviste. La Présidente s’enquiert d’éventuelles candidatures nouvelles. Faute d’autres candidats, Michèle Pradalier-Schlumberger, Maurice Scellès et Bernadette Suau sont candidats à leur propre succession, et sont tous trois réélus. Michèle Pradalier-Schlumberger remercie la Compagnie de cette confiance renouvelée.

La parole est à Jean-Charles Balty pour une communication intitulée : Chiragan et Montmaurin : villas « impériales » ?, publiée dans ce volume (t. LXVIII, 2008) de nos Mémoires.

L’identification d’un groupe statuaire d’époque tétrarchique comprenant des effigies de Maximien Hercule, de son épouse Eutropia, de leur fils Maxence et de la jeune femme de celui-ci Maximilla relance toute la problématique relative à la fameuse villa de Chiragan, à Martres-Tolosane (Haute-Garonne). À la lumière de cette identification – proposée dès 1995 à l’occasion de l’exposition Le regard de Rome, qui se tint successivement à Tarragone, à Mérida, à Toulouse, puis à Rome –, l’extraordinaire série de reliefs des Travaux d’Hercule et celle des médaillons de dieux de cette même villa, réalisées par une même équipe de sculpteurs et dans un même marbre pyrénéen, acquièrent une signification nouvelle, en relation directe avec la propagande diffusée par les revers des émissions monétaires du moment, et s’en trouvent datées à quelques années près (293-296 de notre ère), années de la préparation de campagnes militaires dans la péninsule Ibérique et en Afrique après les succès remportés en Gaule sur les Bagaudes. Il y a là un ambitieux programme iconographique, dans cette villa qu’une impressionnante suite de portraits d’empereurs situait déjà hors du commun et qu’on ne peut qu’imaginer avoir été la propriété d’un des plus hauts personnages de l’Empire, d’une famille très proche du pouvoir en tout cas.
            Or, Chiragan pourrait bien être, par ailleurs, l’endroit où furent exilés, au début du règne de Constantin, les demi-frères et demi-sœurs de l’empereur, enfants de Constance Chlore et de Théodora – Théodora, que Dioclétien avait obligé Constance à épouser en répudiant Hélène ; d’où la vindicte de celle-ci à l’égard de ces princes, réfugiés à Toulouse où ils fréquentèrent les rhéteurs locaux (dont Aemilius Magnus Arborius, l’oncle d’Ausone). Ils ne résidaient toutefois vraisemblablement pas en ville, mais dans les environs et sur le territoire de celle-ci; et l’on se demandera s’ils n’ont précisément pas pu passer cette période dans la villa de Chiragan, qui abritait cet impressionnant ensemble iconographique destiné à glorifier Maximien et sa famille. N’étaient-ils pas, par leur mère Théodora, les petits-enfants d’Eutropia ?
            Un autre indice nous est fourni par la villa de Montmaurin, exceptionnelle, elle aussi, par ses dimensions et sa richesse. Elle est située, en effet, dans la haute vallée de la Save, un terroir qui porte aujourd’hui encore le nom de Nébouzan, que l’on fait remonter à un certain Nepotius qui aurait été le propriétaire de la villa – d’où l’appellation de Nepotianum donnée à celle-ci et au domaine qui l’entourait. Or, on l’a entièrement perdu de vue, le mari d’une des sœurs des princes exilés et leur fils, le futur et éphémère empereur de 350, portent le nom de Nepotianus ; c’est d’eux, plus vraisemblablement, que la région garderait le nom.

Dans la villa de Montmaurin et dans celle de Chiragan, à quelque 30 km de là à vol d’oiseau, les demi-frères et demi-sœurs de Constantin auraient ainsi passé sur le territoire de Toulouse ces années de semi-exil loin de Rome et de la cour impériale. Les données archéologiques s’accordent également à dater de l’époque constantinienne l’âge d’or de Montmaurin.

Jean-Charles Balty

 

La Présidente remercie Jean-Charles Balty pour cette brillante présentation de ces deux ensembles romains qui nous tiennent beaucoup à cœur, et elle espère que la démonstration tout à fait convaincante que propose notre confrère s’imposera aux sceptiques.
            Quitterie Cazes félicite à son tour Jean-Charles Balty pour cette démonstration très rigoureuse. Elle y ajoute un argument supplémentaire fourni par les récents sondages archéologiques qui ont permis de montrer que le plan de Léon Joulin était exact, mais pas sa chronologie relative : des monnaies du début du IVe siècle ont été retrouvées dans les fondations des grandes galeries. Jean-Charles Balty se déclare très heureux de cette précision. Il note par ailleurs que la liste des monnaies recensées par la publication de Joulin montre une forte prépondérance des monnaies de la première moitié du IVe siècle, ce qui est tout à fait significatif : c’est le moment où l’on agrandit et monumentalise ces villae. Reste la question de savoir à qui elles appartiennent : on ne peut exclure aussi facilement qu’il s’agisse de propriétés impériales.
            Maurice Scellès demande quel est le rapport de grandeur avec une villa comme celle de Séviac. Jean-Charles Balty confirme que les villae de Chiragan et de Montmaurin se distinguent nettement par leurs dimensions, d’autant qu’il faut tenir compte des agrandissements importants qu’ont connus la plupart de ces édifices dans le courant du IVe siècle.
            Louis Peyrusse se dit séduit par la très belle construction présentée par notre confrère et Patrice Cabau juge l’ensemble ainsi créé tout à fait suggestif ; le rapprochement avec le texte d’Ausone est intéressant. Jean-Charles Balty rappelle que le texte d’Ausone et l’étymologie du Nébouzan sont bien connus des historiens, mais qu’ils n’ont jamais été utilisés dans cette optique.

 


Séances du 5 février 2008 au 10 juin 2008


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