Mémoires |
BULLETIN DE LANNÉE ACADÉMIQUE
2002-2003
établi par Patrice CABAU & Maurice SCELLÈS
Les parties non reproduites dans l'édition papier apparaissent en vert dans cette édition électronique.
Séances du 1er octobre 2002 au 21 janvier 2003 | Séances du 31 janvier 2003 au 11 mars 2003 |
Séances du 25 mars 2003 au 3 juin 2003 |
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 225
SÉANCE DU 1er OCTOBRE 2002
Présents : MM. Coppolani, Directeur
honoraire, Cazes, Directeur, Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire
général, Cabau, Secrétaire-adjoint ; MM. labbé Baccrabère, Bordes,
Boudartchouk, Gérard, Hermet, le Père Montagnes, membres titulaires ; Mmes Andrieu,
Blanc-Rouquette, Czerniak, MM. Salvan-Guillotin, Testard, membres correspondants.
Excusés: Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, Mmes Bayle, Cazes, Napoléone, MM.,
Garland, Molet, Peyrusse, Pradalier, Tollon.
Invités : Mme Michèle Latour, M. et Mme Crevon.
Le Directeur prononce louverture de lannée académique 2002-2003 en demandant à la Compagnie dexcuser labsence de notre Présidente, empêchée par un voyage détude dont les dates ont dû être modifiées au dernier moment. En souhaitant conférer à cette séance de rentrée toute la solennité requise, il fait le vu que la nouvelle année académique soit riche de nouvelles recherches et de communications. Rappelant que tous les membres ont dû recevoir avant lété appel à communication, le Directeur demande que soient signalées les éventuelles erreurs ou les modifications souhaitées dans le programme provisoire des séances tout récemment communiqué.
Le Secrétaire général donne lecture du procès-verbal de la séance du 4 juin dernier, qui est adopté à lunanimité.
Plusieurs dons viennent enrichir notre bibliothèque, parmi lesquels trois volumes consacrés aux vitraux du Moyen Âge, offerts par Pierre Garrigou Grandchamp et un tiré-à-part de François Bordes : « Pouvoir municipal et gastronomie au XVe siècle : les festins des capitouls de Toulouse », dans Du bien manger et du bien vivre à travers les âges et les terroirs, Fédération historique du Sud-Ouest, Société historique et archéologique du Périgord, Maison des Sciences de lHomme dAquitaine [2002], p. 95-116. Le Directeur remercie les donateurs au nom de la Compagnie.
Le Directeur présente
la correspondance imprimée, puis il donne la parole à Jean-Luc Boudartchouk pour une
information sur le chantier archéologique des
Carmes à Toulouse et son ouverture au public lors des journées du patrimoine.
Jean-Luc Boudartchouk
distribue quelques exemplaires de la plaquette de présentation du site réalisée à
cette occasion, puis, après avoir rappelé les difficultés liées à la nécessaire mise
en sécurité du chantier, il indique que le succès a été au-delà de lattente
puisque ce sont quelque 1700 visiteurs qui ont été accueillis. Puis notre confrère
précise que ce sont les niveaux médiévaux qui sont actuellement en cours de fouille ;
ceux de la fin de lAntiquité seront fouillés dans le courant de lautomne et
le chantier sachèvera en décembre avec légout romain que lon souhaite
fouiller « à la main ».
Le Directeur remercie Jean-Luc Boudartchouk et
incite les membres de notre Société à visiter le site dont les vestiges seront
inévitablement détruits. Il souligne néanmoins les progrès réalisés, se souvenant
que lors de la construction du parking des Carmes, seul Maurice Prin avait pu sauver
quelques informations et faire quelques croquis, y compris sur des monuments antiques.
Le Directeur informe alors la Compagnie de louverture au public du chemin de visite du site de la villa de Chiragan à Martres-Tolosane, dont laménagement a pu être réalisé au cours de lété. En différents points des champs appartenant à notre Société, des poteaux donnent des indications complétées par des fiches. La formule retenue est dune présentation un peu pauvre pour des raisons économiques, mais on espère quelle pourra être améliorée dans les années à venir.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 226
La parole est à Marc Salvan-Guillotin pour la communication du jour : Les peintures murales de Mont, dAranvielle et de Ris (Hautes-Pyrénées).
Le Directeur remercie
Marc Salvan-Guillotin de cette communication qui complète celle de lan dernier sur
les décors peints de ces petites églises pyrénéennes et il fait appel aux questions.
Virginie Czerniak
demande sil faut conclure à lexistence de plusieurs ateliers ou sil
faut au contraire croire à un seul atelier constitué autour de Melchior Rodiguis. Marc
Salvan-Guillotin souligne combien la notion datelier peut être dans ce cas
difficile à cerner et constate que le maître est pour nous celui qui signe le prix-fait
; lidentité de style peut être constatée mais le maître nest quun
nom dont la personnalité nous échappe. Le terme « atelier » peut en effet être mis au
pluriel.
Patrice Cabau voudrait
savoir si loriginal du prix-fait est conservé et sil a été cancellé, et
rappelle quun acte non cancellé peut signifier que le contrat na pas été
réalisé, ce qui pourrait expliquer les différences avec les décors observés. Marc
Salvan-Guillotin dit ne pas avoir pu consulter lacte, conservé dans les archives de
la Société des Études de Comminges, mais quil a fait lobjet dune
étude très complète par Henri Gilles. Maurice Scellès fait remarquer que des
variations de programme peuvent également avoir été introduites en cours de chantier
par le commanditaire et le peintre.
Marc Salvan-Guillotin
rappelle que tout le fond de labside reste caché par le retable et quen outre
il manque lArbre de Jessé prévu par le contrat. Virginie Czerniak mentionne celui
qui se trouve dans le chur de léglise de Lachapelle-Faucher en Périgord, il
est vrai sur la travée droite, Marc Salvan-Guillotin faisant remarquer quil
sagit dune scène que lon nattend pas sur le mur du fond du
chur.
Louis Latour voudrait
savoir si lanalyse de lacte permet de dire qui propose le décor, des
marguilliers ou du peintre. La relecture du texte confirme que ce nest pas le cas.
François Bordes ayant
demandé si le nom de sainte Catherine était écrit en occitan, Marc Salvan-Guillotin
répond par laffirmative et cite également lexemple de Bourisp, faisant
remarquer que lon a quelquefois des mélanges étonnants et que la graphie ne permet
pas de dater les décors.
Répondant à une
question de Maurice Scellès, Marc Salvan-Guillotin précise que lagrandissement des
gravures servant de modèles est obtenu par une mise au carreau, puis il rappelle que le
recours à ces modèles exclut évidemment de dater les peintures daprès les
costumes des personnages. Maurice Scellès souligne combien les tracés noirs rehaussés
de quelques aplats des peintures de Mont évoquent en effet des gravures et il demande si
lon dispose dun inventaire des gravures éditées à cette époque. Marc
Salvan-Guillotin cite lexemple de léglise de La Nata en Aragon, où
cest une gravure dune uvre dHolbein qui a été utilisée, et
François Bordes indique que des corpus nexistent que pour les débuts de la
diffusion des planches imprimées, linventaire nétant pas fait pour la
seconde moitié du XVIe siècle, période qui nous occupe.
Olivier Testard dit
avoir observé des traces de peintures extérieures, cachées par un enduit, à Armenteule
ou Estarvielle. Marc Salvan-Guillotin le remercie de cette information et assure
quil se rendra sur place.
Louis Latour signale
que les églises des vallées dAure et du Louron ayant été victimes de vandales et
de voleurs, leur fermeture complète aurait été inévitable si la Commission du tourisme
de ces deux vallées pyrénéennes navait organisé des horaires de visite et des
circuits sur rendez-vous. Il souhaiterait que des mesures semblables soient prises en
Haute-Garonne. Nicole Andrieu indique que loffice du tourisme de Bagnères organise
des visites. Elle doit cependant constater que, devant la multiplication des vols, les
maires de plus en plus soucieux de la conservation du patrimoine sont en effet contraints
de fermer les églises de leur commune ; le relais est de plus en plus souvent pris par
des associations qui assurent louverture des édifices au moins pendant
lété.
Daniel Cazes fait
remarquer que cette situation nest malheureusement pas propre aux vallées
pyrénéennes. À Toulouse, Saint-Nicolas et Saint-Pierre-des-Chartreux sont
habituellement fermées, Notre-Dame du Taur aussi parfois; un édifice comme Saint-Sernin
demande un renforcement du gardiennage et des systèmes dalarme. Des solutions
devront être trouvées pour ce patrimoine.
Nicole Andrieu décrit
le système adopté à Troyes, ville très riche en églises gothiques, où ont été
installées des guérites fermées pour les personnels chargés de renseigner les
visiteurs avec des permanences variables selon les édifices.
À lissue de cette séance consacrée à des peintures murales, le Directeur fait part à la Compagnie du décès de Pierre Bellin, survenu à la fin de lété après une longue maladie. Daniel Cazes évoque le restaurateur qui a développé une activité incroyable avec une extraordinaire passion. On lui doit la restauration des fresques romanes de Saint-Sernin, et cest à Saint-Sernin quil a conduit son dernier grand chantier avec les peintures du XVIe siècle du chur. Sa réputation était telle quil était appelé à létranger pour donner conseils et avis. On dira sans doute plus tard que Pierre Bellin a été un très grand restaurateur.
SÉANCE DU 15 OCTOBRE 2002
Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Coppolani,
Directeur honoraire, Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint ;
Mme Napoléone, M. Gilles, le Père Montagnes, MM. Peyrusse, Prin, Mgr Rocacher, M.
Roquebert, membres titulaires ; Mmes Bayle, Boussoutrot, Czerniak, Marin, MM. Macé,
Manuel, Rebière, Salvan-Guillotin, Testard, membres correspondants.
Excusés : Mmes Cazes, Galés, MM. Bordes, Garland, Gérard, Lapart.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 227
La Présidente exprime ses regrets de navoir pu participer à la séance de rentrée de notre Société et présente ses excuses au conférencier. Elle ne doute pas que notre Directeur ait su ouvrir avec beaucoup de chaleur cette nouvelle année académique et souhaite à son tour que celle-ci soit pleinement fructueuse.
Le Secrétaire général nen ayant pas achevé la rédaction, la présentation du procès-verbal de la séance du 1er octobre est reportée.
La Présidente rend compte de la correspondance manuscrite. Ce sont en particulier les réponses aux courriers adressés cet été à la Préfète du Lot et au Directeur régional des Affaires culturelles de Midi-Pyrénées à propos du devenir de lancien palais de Via à Cahors :
« Toulouse, le 12 août 2002
Madame la Préfète,
Cahors a la chance de posséder un patrimoine architectural du Moyen Âge exceptionnel, parmi lequel figure le palais de Via, palais du début du XIVe siècle devenu « château du roi » au XVe siècle et aujourdhui occupé par la Maison darrêt. Le Ministère de la Justice a récemment confirmé son intention dabandonner le site et la question du devenir de ce monument majeur du département du Lot ne peut plus désormais être éludée.
La Société Archéologique du Midi de la France, dont la vocation est depuis sa création en 1831 la connaissance et la sauvegarde des monuments du Midi, sen est inquiétée et a adopté dans sa séance du 23 avril dernier la motion dont vous trouverez le texte ci-joint.
La COREPHAE de Midi-Pyrénées a proposé, en 1996, le classement en totalité du site de la maison darrêt de Cahors, prenant ainsi en compte les bâtiments de lancien palais de Via du début du XIVe siècle et le potentiel archéologique de son sous-sol. Or, six ans plus tard, le dossier na toujours pas été présenté devant la Commission supérieure des Monuments historiques, faute, sans doute, de laccord du Ministère de la Justice au classement.
Je ne doute pas que votre intervention soit à même de lever les obstacles qui ont jusquici empêché le classement de lensemble du site.
En vous remerciant par avance de lattention que vous voudrez bien porter à ce dossier, et de limportante contribution qui sera ainsi la vôtre à la sauvegarde du patrimoine médiéval de la capitale du Quercy, je vous prie de recevoir, Madame la Préfète, lexpression de mes respectueuses salutations.
La Présidente
Michèle Pradalier-Schlumberger »
« Cahors, le 26 août 2002
Madame la Présidente,
Par correspondance du 12 août 2002, vous avez appelé lattention de Madame la Préfète sur le devenir des bâtiments occupés actuellement par la Maison dArrêt de Cahors et plus particulièrement sur le classement de son site au titre des Monuments Historiques.
Je vous informe que je saisis ce jour Monsieur le Ministre de la Justice et le Directeur Régional des Affaires Culturelles sur ce dossier.
Je ne manquerai pas bien entendu de vous tenir informée de la suite qui sera réservée à votre demande.
Je vous prie dagréer, Madame la Présidente, lexpression de ma haute considération.
Pour la Préfète absente,
Le Secrétaire Général
Jean-Philippe Trioulaire »
« Toulouse, le 12 août 2002
Monsieur le Directeur,
La COREPHAE de Midi-Pyrénées a proposé, en 1996, le classement en totalité du site de la maison darrêt de Cahors, prenant ainsi en compte les bâtiments de lancien palais de Via du début du XIVe siècle et le potentiel archéologique de son sous-sol. Or, depuis, le dossier na toujours pas été présenté devant la Commission supérieure des Monuments historiques, faute, sans doute, de laccord du Ministère de la Justice au classement. Or, celui-ci a récemment confirmé son intention dabandonner le site de la maison darrêt de Cahors.
Lémotion suscitée par cette annonce a conduit la Société Archéologique du Midi de la France à adopter, au cours de sa séance du 23 avril dernier, la motion dont vous trouverez le texte ci-joint.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 228
Lintérêt de lédifice, tant pour lui-même que pour le patrimoine de la ville de Cahors, ne peut vous échapper. La question de son devenir ne peut plus être éludée et une partie de la réponse tient à son classement au titre des Monument historiques.
Je vous demande donc, Monsieur le Directeur, de bien vouloir relancer la procédure de classement conformément à lavis donné par la COREPHAE en 1996.
Vous en remerciant par avance, ainsi que vos services, je vous prie de recevoir, Monsieur le Directeur, lexpression de mes salutations respectueuses.
La Présidente
Michèle Pradalier-Schlumberger »
« Toulouse, le 26 septembre 2002
Madame la Présidente,
Par lettre en date du 12 août, vous me demandez de réactiver la procédure de classement de lancien palais Via qui abrite la maison darrêt de Cahors.
Pour être présenté en commission supérieure des monuments historiques, le dossier doit comme vous le savez comporter un accord au classement du propriétaire de lédifice.
Jenvisage de proposer à nouveau à M. le Préfet de région de saisir le Ministère de la Justice afin dexaminer les voies et les moyens permettant un réexamen de ce dossier.
Je vous prie dagréer, Madame la Présidente, lassurance de mes très respectueux hommages.
Le Directeur Régional des Affaires Culturelles
Richard Lagrange »
La correspondance imprimée comprend lannonce de la séance publique de lAcadémie de Législation, qui aura lieu le 16 octobre prochain, plusieurs invitations à des colloques et le bulletin de souscription à louvrage sur lHôtel dAssézat, de nos confrères Louis Peyrusse et Bruno Tollon, édité par lAssociation des Amis de lHôtel dAssézat.
Plusieurs dons
viennent enrichir notre bibliothèque :
- Enrique Cerillo
Martín de Cáceres, La basílica de época visigoda
de Ibahernando, Cáceres, 1983, 151 p. (don de Maurice Scellès) ;
- Museos arqueológicos para siglo XXI. Museo nacional de
Arte Romano, Mérida 18-19 mayo 2001, 152 p. (don de Daniel Cazes) ;
- Robert Forichon, Quelques observations pour une biographie de saint
Exupère, étude inédite, multigraphié, mai 2002, 54 p. ;
- Statues-menhirs : des énigmes de pierre venues du fond
des âges, Rodez, Éditions du Rouergue, 2002, 270 p. (envoi du Musée Fenaille) ;
Notre Société a par ailleurs reçu les catalogues des deux dernières expositions du Musée des Augustins.
La parole est à Virginie Czerniak pour une communication sur Les peintures murales de la chapelle de lancien logis abbatial de Moissac, publiée dans ce volume (t. LXIII, 2003) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Virginie Czerniak pour cette analyse dun décor que lon voyait très
mal et qui se trouve ainsi réhabilité, et elle la félicite davoir
considérablement élargi le sujet en nous présentant une construction très séduisante.
La comparaison avec les peintures de la salle capitulaire de Sigena est tout à fait
convaincante, dautant plus quelle est appuyée par des arguments techniques.
En réponse à Laurent
Macé, Virginie Czerniak indique que, daprès Ernest Rupin, cest un certain
Bertrand, sur lequel on na malheureusement aucun autre renseignement, qui est abbé
de Moissac de 1135 à 1197. Elle ajoute que Richard Cur-de-Lion aurait résidé à
Saint-Nicolas de la Grave, dans le château appartenant à labbaye de Moissac, et
quil est tentant dy voir la marque de ses bonnes relations avec labbé.
Louis Peyrusse se
déclare très admiratif devant la démonstration, mais se propose dêtre un instant
lavocat du diable. Cette méthode à la Morelli entretient une ambiguïté entre la
miniature, le vitrail et la peinture murale pour rejoindre ce qui pourrait bien être une
série de hasards historiques : les faits historiques pour aussi existants quils
soient ne construisent pas une causalité. Pour la démarche morellienne, on remarquera
que les visages de la peinture de Moissac sont très effacés et on peut se demander
devant ces formes expressionnistes si des contacts ont pu avoir lieu par le truchement des
seuls livres enluminés. En outre, Louis Peyrusse ne croit guère à largument des
pigments qui voyagent plus facilement que les peintres. Virginie Czerniak reconnaît
volontiers la part morellienne que comportent des rapprochements où la subjectivité joue
un grand rôle, et elle admet que la prudence doit rester de mise. Les analyses de
pigments sont dailleurs encore trop peu nombreuses.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 229
Pour Daniel Cazes, si lorigine
anglaise des peintures de Sigena paraît prouvée, comment placer les relations avec
lart byzantin et des formes fréquentes de lautre côté de la Méditerranée,
en Toscane par exemple ? Virginie Czerniak précise que les études sur les peintures de
Sigena les attribuent à des peintres anglais qui auraient travaillé en Sicile, puis à
Winchester, avant dêtre appelés en Aragon. Reste la difficulté quil y a à
attribuer aux mêmes artistes des enluminures et des peintures monumentales. Lart de
1200 fait en tout cas référence à Byzance et on en a des exemples clairs en Angleterre.
Virginie Czerniak
rappelle encore que pas un seul Arbre de Jessé ne figure dans les manuscrits moissagais.
Les peintures de la chapelle abbatiale introduisent donc dans le Sud-Ouest un thème
nouveau qui est en revanche déjà connu en Angleterre.
Se méfiant des
comparaisons stylistiques sur une aussi grande échelle, un exercice périlleux, Marc
Salvan-Guillotin croit quil serait plus intéressant de creuser la piste aragonaise.
Virginie Czerniak fait cependant remarquer que Sigena occupe une place tout à fait à
part dans la peinture aragonaise.
Marc Salvan-Guillotin
sétonne que lArbre de Jessé débute sur la paroi du mur pour se poursuivre
sur la voûte et il demande des précisions sur la cohésion stylistique de
lensemble du décor. Après avoir rappelé que Raymond Rey avait en effet proposé
de distinguer lArbre de Jessé et le Christ entouré des apôtres, Virginie Czerniak
indique que létude stylistique est confirmée par les observations techniques et
quil sagit donc dun seul ensemble, également cohérent dun point
de vue iconographique, présentant une liaison symbolique clairement affirmée avec
lautel.
Au titre des questions diverses, Agnès Marin présente à la Compagnie des photographies dune découverte de peintures murales, faite la veille, dans une maison médiévale de Périgueux.
Répondant à Maurice Scellès, Agnès Marin indique que la maison appartient au Temple avant dêtre vendue en 1332 à un bourgeois.
Virginie Czerniak observe que le décor est peint directement sur la pierre, technique que lon rencontre dès le milieu du XIIIe siècle. Agnès Marin précise que la scène figurée sinsère parfaitement dans la composition dorigine du décor, entièrement géométrique pour le registre inférieur.
Le Secrétaire général donne ensuite lecture dune note sur Les cloches anciennes de Cornebarrieu (Haute-Garonne) que nous a adressée Mme Françoise Zannese :
« Jusquà la fin du XVIIIe siècle, deux églises ont coexisté à Cornebarrieu. Il est difficile, à partir des documents exploités, de bien distinguer les deux édifices, tous deux ayant eu pour patron saint Clément. Léglise paroissiale primitive, attenante au cimetière et proche de la rivière Aussonnelle, signalée dès 1129, a été démolie en 1794. On ne connaît pas lépoque de construction de léglise actuelle située non loin du château (la tradition orale rapporte que ce serait lancienne chapelle castrale) ; cest vers 1650 quelle est devenue paroissiale (1).
Le clocher-mur de léglise Saint-Clément de Cornebarrieu est constitué dun pignon triangulaire sur murs à retraits à baies cintrées simples (2). Il est doté de quatre cloches : les deux petites portent la date de 1867 et sont luvre du fondeur toulousain Louison, les deux autres font lobjet de cette note (3).La cloche de 1558
Suspendue dans une baie dont lencadrement a été entaillé dans sa partie inférieure pour placer un beffroi en bois qui permet damortir les vibrations (4), elle est accrochée à un joug en acier par six anses en couronne qui portent sur leur face externe un décor de corde entre deux filets. Cette cloche large (H. à laxe 82 cm ; d. extérieur 97,5 cm), dont le poids est estimé entre 500 et 600 kg, est la plus grosse des cloches en place.
Au niveau du vase supérieur, des filets délimitent trois zones. Les deux premières portent une dédicace et une invocation constituées de lettres sur dossiers individuels (H. 4 cm) et suivies dune inscription laudative (H. 0,9 cm) ; la troisième a des décors figurés (H. 5 à 7 cm). Deux croix axiales, dans le sens de la volée, une à lest et lautre à louest, sont situées au niveau de la faussure. Quant à la marque du fondeur, elle apparaît dans un rectangle (H. 2,6 cm ; l. 5,6 cm), au-dessous de la troisième zone.
La dédicace (1ère ligne) et linvocation (2e ligne) sont composées donciales. Six mots sont surmontés dun tilde en forme doméga. Cinq lettres, dont un N tenant lieu de V, ont été inversées (en gras dans le relevé infra) ; un P à la jambe écrasée remplace un O (en gras également). Linscription laudative, en minuscules gothiques de petite taille, fait suite à linvocation.Inscription relevée :
+ IHS*MA*L*M*VC*LVIII FNT*FETO*LA*CAMPANO*DE*CORNOBI*
S*CLEMES*ORA*PRONPBIS te deum laudamusInscription restituée :
+ IH[ESV]S M[ARI]A L[AN] M VC LVIII FVT FE[C]TO LA CAMPANO DE CORNOB[ARR]I[LLO]
S[ANCTE] CLEME[N]S ORA PRO NOBIS te deum laudamus
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 230
Une partie du décor est liée aux onciales. Une croix grecque, aux extrémités fleuronnées et sur fond ornementé, indique le premier mot de la dédicace. Une rosace, avec fleur, feuilles et boutons sur fond nu, sépare la plupart des mots et termine la dédicace. Les lettres, placées sur un fond de végétaux aux lignes épurées (graminées, lys, trèfles ), sont ornées dun chevron ou dune résille et leur contour est souligné par un filet de perles. Ces formes et ces ornements, qui évoquent les lettres enluminées, sont présents sur les cloches dès le milieu du XVe siècle.
Deux croix axiales aux extrémités biseautées ont pour socle un degré de quatre marches à lest et de cinq marches à louest. Croix et socles sont ornés dun même motif de rinceaux.
CORNEBARRIEU. Cloche de 1558. Vase supérieur, côté est : croix grecque, rosaces, onciales et Christ de la messe de saint Grégoire.
Cliché Alain Toppan.CORNEBARRIEU. Cloche de 1558. Médaillon de saint Jacques le Majeur ou saint Roch de Montpellier, au nord-est.
Cliché Alain Toppan.CORNEBARRIEU. Cloche de 1558. Côté ouest, médaillon de sainte Barbe.
Cliché Alain Toppan.CORNEBARRIEU. Cloche de 1558. Marque du fondeur.
Cliché Alain Toppan.
Une autre partie du décor est formée de cinq figures susceptibles de protéger les paroissiens de divers fléaux (feu, maladie, guerre). Celle de sainte Barbe apparaît dans un médaillon oblong bordé dun tore de feuillage ; le Christ, saint Michel et la Vierge sont sous un dais Renaissance.
Sainte Barbe, à louest (H. 5 cm ; l. 4,4 cm)
La sainte, vêtue dune robe aux lignes souples accusant ses formes rebondies, tient la palme de martyre dans la main droite et un livre dans la main gauche ; une tour sélève sur sa gauche. Réputée pour protéger de la foudre, sainte Barbe était fréquemment représentée sur les cloches, notamment dans le sud de la France.
Christ de la messe de saint Grégoire, à lest (H. 6,8 cm ; l. 5 cm)
Le Christ, efflanqué, à mi-corps au-dessus du tombeau, les mains croisées sur le ventre, est entouré des instruments de la Passion (à gauche de la Croix : un marteau, une lanterne, un dé, la lance, les verges ; à droite : les tenailles, le coq, un dé, la lance porte-éponge ; en partie haute : les trois clous, la couronne dépines). Cette iconographie, diffusée en France à la fin du XIVe siècle, est devenue traditionnelle au XVe siècle (5).
Saint Roch de Montpellier ou saint Jacques le Majeur, au nord-est (H. 5,8 cm ; l. 4,1 cm)
Le saint est représenté en buste, coiffé du chapeau de pèlerin, avec un nimbe perlé surmonté dune couronne fleurdelysée, une coquille Saint-Jacques en partie inférieure et deux bourdons en sautoir. Dans diverses églises du Languedoc et du Quercy, le jour de la Saint-Roch, les prêtres bénissaient les animaux et les troupeaux, parfois depuis le clocher, ce qui leur permettait datteindre la campagne environnante. Cette tradition régionale et lexistence dun quartier Saint-Roch dans Cornebarrieu nous permettent de supposer que la figure représente saint Roch plutôt que saint Jacques le Majeur.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 231
Saint Michel terrassant le dragon, au nord-ouest (H. 6,8 cm ; l. 4,8 cm)
Larchange, en pied, vêtu dune armure, tient un bouclier orné dune croix et placé au-dessus de la balance servant à la pesée des âmes. De la main droite il tient une lance enfoncée dans la gueule ouverte du dragon cloué au sol. Cest le gardien de la porte des sanctuaires. Au Moyen Âge, on lui consacrait souvent les églises situées sur des sommets (le Mont-Saint-Michel, lAiguilhe du Puy). Par ailleurs, une statue de larchange couronnait fréquemment les flèches des clochers.
Vierge à lEnfant, au sud (H. 6,7 cm ; l. 4,7 cm)
Sur un fond de végétaux similaire à celui des onciales, la Vierge est vêtue dune robe au plissé régulier qui lui couvre les pieds. Au niveau des cuisses, le manteau forme un drapé au plissé semi-circulaire. Sur le côté gauche de la Vierge, lEnfant Jésus debout lève la main gauche surmontée dun globe ou dune pomme.
La marque du fondeur (I, deux étoiles, V % ) na pas permis didentifier ce dernier. Les deux lettres (I ou J, V ou U ou B ou P en occitan ), suivies dune cloche, sont séparées par deux étoiles superposées à cinq branches. Une marque similaire, sans les étoiles, apparaît sur une cloche bordelaise de 1541 (6). La variante entre les deux marques pourrait provenir du fait quun fils de I. V. aurait pris sa succession et aurait modifié la marque, comme le font les orfèvres.
La comparaison entre ces deux cloches permet de penser que ce sont les mêmes matrices qui ont servi aux inscriptions et à une partie du décor : ainsi le médaillon avec sainte Barbe, les onciales et la rosace séparant les mots sont identiques (7). Par ailleurs, les anses portent un décor qui paraît être le même, sans les filets. La finesse et la qualité du décor de la cloche de Cornebarrieu indiquent que le fondeur intervenu en 1558 maîtrisait mieux la technique que celui qui a travaillé en 1541 (8).
La cloche de 1617
Placée tout en haut du clocher, elle sonne les heures et les demi-heures par le biais dun marteau de tintement extérieur électrique dont la frappe fait vibrer la maçonnerie de briques. Lencadrement de la baie où elle est suspendue a lui aussi été entaillé dans sa partie inférieure ; cependant, contrairement à la baie à laquelle est accrochée la cloche de 1558, il na pas été placé de beffroi. Pourvue de six anses en couronne, la cloche est accrochée à un joug en bois par lintermédiaire de ferrures plates clouées (9). Elle a une hauteur à laxe de 84 cm et un diamètre extérieur de 80 cm ; son poids est estimé entre 250 et 350 kg.
Au niveau du vase supérieur, des filets délimitent deux zones. Celle du haut porte la dédicace et la date, celle du bas la marque du fondeur.
La dédicace est constituée de lettres sur dossiers individuels (H. 3,6 cm) ; les deux premières lettres (IH) forment un seul dossier posé à lenvers (HI). Lécriture est en capitales romaines.Inscription relevée : IHS MARIA LA COMMVNOMA FEFERO LAN I6X7
Inscription restituée : IH[ESV]S MARIA LA COMMVNO M[]A FE FERO L[]AN 1617Outre les anses simples ornées dune tête humaine (10), le seul décor de la cloche est une croix sans socle formée de deux dossiers, un T surmonté dun I ; le dossier inférieur empiète sur un filet : la croix, décalée vers la droite, aurait dû être dans laxe du H de IHS.
La marque du fondeur a pu être restituée grâce à un bail passé entre les consuls et un maître fondeur de Toulouse ; un second bail a été passé entre les consuls et un maître fustier de Lévignac, Hugues Christian, pour la descente dune cloche et la pose de la nouvelle (11).
Marque relevée : M I LA T M F
Marque restituée : M[AITRE] J[AQVES] LA T[RILLE] M[E] F[ECIT] (ou M[A] F[AITE])Cette cloche, actuellement sans battant, montre une usure très large au niveau de la pince : au lieu davoir deux points dimpact est-ouest, elle porte des traces dusure sud-est nord-ouest (le battant navait pas une frappe équilibrée,
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 232
le baudrier étant probablement gêné par une bélière trop étroite). Par ailleurs, cette cloche présente de nombreux défauts de fonte (12).
De nombreuses cloches ont disparu au cours de la Révolution ; certaines ont été déplacées. En ce qui concerne les deux cloches objets de cette note, et pour lesquelles nous possédons la date de fonte (13), nous avons la certitude quelles étaient destinées à Cornebarrieu comme lindique linscription sur la cloche de 1558 et comme le prouve le bail de celle de 1617. Les documents exploités ne permettent pas de savoir à quelle église du village elles étaient destinées ; cependant, leurs dimensions nous laissent penser quelles ont été fondues pour léglise paroissiale, en loccurrence léglise primitive.
Françoise ZANNESE »
1. A.D. Haute-Garonne : Fonds de lordre de Malte (visites et procès-verbaux daméliorissements) ; A.M. Cornebarrieu : Registres BMS.
2. Jean COPPOLANI, « Les Clochers-Murs du pays Toulousain », dans B.S.A.M.F., t. XLVI, 1985-1986, p. 49-73.
3. Toutes deux ont été classées parmi les Monuments Historiques par arrêté du 9 mai 2001. Merci à Alain Toppan qui nous a signalé ces cloches, nous a donné accès à sa documentation et nous a permis, grâce à sa collaboration, deffectuer les relevés. Merci également à Jean-Bernard Faivre pour ses observations campanaires.
4. Cette cloche ne sonne plus : une importante fêlure partant de la première ligne traverse tout le décor situé à lest, notamment le Christ et une croix axiale.
5. Jean NOUGARET, « Iconographie campanaire médiévale dans lactuel diocèse de Montpellier », dans Mémoires de la Soc. archéol. de Montpellier (Hommages à Robert Saint-Jean), t. XXI, 1993, p. 222-228 : ill. ; Jean NOUGARET, « Liconographie campanaire du XIVe au XVIIe siècle », dans Chants des cloches, voix de la terre , Montpellier : les Presses du Languedoc, 2000, p. 59-64 : ill.
6. Jean-Bernard FAIVRE, Régis SINGER, « Église Saint-Michel de Bordeaux : deux cloches anciennes retrouvées », dans Rev. archéol. de Bordeaux, t. LXXXIX, 1998, p. 190.
7. Le dessin de certaines lettres et dune partie du décor de cette cloche figure dans louvrage de Jean-Pierre Rama (Cloches de France et dailleurs. Paris : éd. Pierre Zech/Le Temps Apprivoisé, 1993, p. 194-195). Cependant, il y a eu une erreur dans le relevé : le végétal situé entre les deux premiers jambages du M représenté est mal orienté comme le prouve une photographie de cette même lettre.
8. En raison de lanalogie et de la précision du décor, il paraît improbable que les matrices aient pu être refaites à lidentique.
9. Joug et ferrures ont été classées en même temps que la cloche. Cependant, au cours de lété 2002, les ferrures plates clouées ont été remplacées par des ferrures rondes boulonnées, sans consultation du service des M. H.
10. Laccès à cette cloche étant périlleux, seule a été observée lanse simple située à lest ; lanse simple ouest porte certainement le même décor.
11. A.D. Haute-Garonne : 3E 8304, notaire Taverne. Bail à fere la cloche (entre les consuls de Cornebarrieu et le maître fondeur), 26 mai 1617, f° 59-60 r°, suivi dun contrat entre les consuls de Cornebarrieu et le maître charpentier, 26 mai 1617, f° 60 v°-61 r°.
12. Plusieurs explications sont possibles : les conditions atmosphériques au moment de la fonte, la qualité et la proportion des matériaux, la maîtrise de son art par le fondeur. Il est probable que pendant les Guerres de Religion il ny ait eu que peu de fonte de cloches, et quainsi une génération ait perdu le savoir-faire, et peut-être aussi le matériel. Il a fallu renouveler les matrices ; les lettres utilisées pour les cloches du XVIIe sont en règle générale des capitales romaines (introduites dans les textes dès le XVIe siècle) alors que les onciales sont utilisées pour de nombreuses cloches du XVIe siècle.
13. La lecture de la date « 16X7 » qui associe un chiffre romain et des chiffres arabes a été clarifiée par la découverte des baux (le chiffre X pouvait être pris pour un 8).
La Présidente note liconographie très riche de lune des deux cloches et elle fait observer quen effet le médaillon de la Vierge, par exemple, nest plus médiéval, même sil se rattache encore à des modèles de la fin du XVe siècle.
Le Secrétaire général annonce que le prochain volume des Mémoires est en bonne voie et quune parution avant la fin de lannée est envisageable.
Louis Latour rappelle les horaires douverture de la bibliothèque. Il indique par ailleurs quun bénévole lui a proposé son aide : M. Georges Cugulière dépouille ainsi des dossiers qui étaient jusquà présent inaccessibles faute den connaître le contenu.
SÉANCE DU 5 NOVEMBRE 2002
Présents : Mme Pradalier-Schlumberger,
Présidente, MM. Cazes, Directeur, Scellès, Secrétaire général, Ahlsell de Toulza,
Trésorier, Cabau, Secrétaire adjoint, Latour, Bibliothécaire-Archiviste ; Mme
Pousthomis-Dalle, MM. labbé Baccrabère, Gérard, Gilles, Ginesty, Hermet, Prin,
Mgr Rocacher, membres titulaires; Mme Fronton-Wessel, MM. Garland, Testard, membres
correspondants.
Excusés : Mmes Czerniak, Galés, Napoléone, M. Boudartchouk, Peyrusse.
La Présidente ouvre la séance à 17 heures. La parole est au Secrétaire général pour la lecture du procès-verbal de la séance du 1er octobre, adopté après ajout dune précision demandée par Louis Latour, puis du compte rendu de la séance du 15 octobre, entériné sans modification.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 233
Michèle Pradalier-Schlumberger présente la correspondance « manuscrite », qui comprend lannonce de divers colloques, notamment :
128e
congrès national des Sociétés historiques et scientifiques, organisé par le C.T.H.S.,
à tenir du 14 au 21 avril 2003 à Bastia et consacré aux « Relations, échanges et
coopération en Méditerranée » ;
congrès annuel
organisé par la Fédération historique du Sud-Ouest, la Fédération historique de
Midi-Pyrénées et lAcadémie des Sciences, Lettres et Arts dAgen, à tenir
les 23-24 mai 2003 à Agen et Moissac sur le thème: « Les pays de la moyenne Garonne »
;
La Présidente fait
ensuite circuler plusieurs ouvrages qui viennent enrichir notre Bibliothèque :
Vasconia,
Revue du Patrimoine de Gascogne, n° 3, Conservatoire du Patrimoine de Gascogne,
septembre 2002, 60 p., reçue au titre des échanges ;
Toulouse au
XIXe siècle, actes du colloque tenu le 18 mai 2001 à lHôtel
dAssézat, Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse,
Toulouse, 2002, 80 p., reçus au titre des échanges ;
Mère Anna
Maria Antigo et les Clarisses de Perpignan du XVIIème siècle à nos jours
Mare Anna Maria Antigó i les Clarisses de Perpinyà des del segle XVII fins ara,
Journal de lexposition présentée du 25 mai au 3 novembre 2002, 56 p., don de
Sandrine Conan et Laurent Hernandez ;
Gisela Ripoll, La necrópolis
visigoda de El Carpio de Tajo (Toledo), Madrid, Ministerio de Cultura, Dirección
General de Bellas Artes y Archivos, Subdirección General de Arqueología y Etnología,
1985, 254 p. (Excavaciones arqueológicas en España), don de Maurice Scellès ;
Tolosa.
Nouvelles recherches sur Toulouse et son territoire dans lAntiquité, ouvrage
collectif sous la direction de Jean-Marie Pailler, collection de lÉcole française
de Rome, fascicule 281, Rome et Toulouse, 2002, 601 p., 2 pl. hors-texte, don de Mme
Nicole Lombrail-Akermann.
Après avoir remercié les donateurs, Mme Pradalier-Schlumberger donne lecture du rapport quelle a rédigé sur la candidature de Mme Adeline Béa au titre de membre correspondant de notre Société. Il est procédé au vote ; Mme Béa est élue membre correspondant.
La Présidente lit ensuite à la Compagnie la lettre que M. le député-maire de Cahors a adressée en réponse à notre courrier concernant le devenir du palais de Via :
« Cahors, le 28 octobre 2002
Madame la Présidente,
Jai été très sensible à lintérêt manifesté par la Société Archéologique du Midi de la France qui, en votant cette motion, a confirmé lintérêt majeur de ce monument dans la ville mais également dans lhistoire de larchitecture médiévale.
Je
tiens à réaffirmer ici notre volonté de tout mettre en uvre
afin de préserver ce monument et le rendre accessible au plus grand nombre.
Ainsi, dans le cadre de la réflexion menée
par la Ville sur le projet de création dun pôle patrimonial, dont un des volets
concerne lobtention du label Villes et Pays dart et dhistoire, le palais
de Via apparaît comme le lieu idéal pour accueillir lensemble des activités
liées à ce projet.
La Ville de Cahors sassocie donc à votre
requête quant à la reprise de linstruction du dossier de classement, au titre des
Monuments Historiques, de la totalité de lédifice. Je peux vous affirmer que le
devenir du palais de Via fera partie des dossiers que je présenterai à Monsieur
Aillagon, Ministre de la Culture, lors de notre prochaine entrevue.
En vous remerciant de lattention que vous portez au devenir de cet édifice et en vous réaffirmant limportance de ce monument pour la Ville de Cahors, je vous prie de croire, Madame la Présidente, à lexpression de mes respectueuses salutations.
Le Député-Maire
Dr. Michel Roumégou »
La Société Archéologique ne peut que se féliciter de la volonté affichée de la Ville de Cahors dassurer la conservation et la mise en valeur du palais de Via et den faire un lieu ouvert au public.
La parole est à labbé Baccrabère pour la communication du jour, consacrée à des Vestiges de verriers dans la Montagne Noire aux XVe-XVIe siècles :
« Deux sites ont pu être repérés lors des mises à sec de la retenue deau en 1973 et 1975 : le bassin de Saint-Ferréol au sud de la ville de Revel et le barrage de La Garbelle à lest et près du bourg des Cammazes ; ces deux réservoirs ont livré des débris de récipients de verriers.
Le bassin de Saint-Ferréol, dont lexistence remonte à la deuxième moitié du XVIIe siècle, a livré des débris de
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 234
gobelets, des pieds de verre de forme biconique, à tige, et des restes de bouteilles et de flacons. Sur le site de La Garbelle, de la seconde moitié du XXe siècle, ont été recueillis quelques éléments de gobelets, de perles et des débris de céramique (pot, pichet, dourne, marmite, jarre et plat), ainsi que des restes de creusets avec des lèvres et des fonds. Si lensemble des trouvailles demeure relativement modeste, il nen est pas moins intéressant de connaître quelques restes de productions de ces deux ateliers de verriers établis aux abords de la Montagne Noire, qui semblent appartenir aux XVe-XVIe siècles. »
La Présidente remercie notre confrère,
exprimant une nouvelle fois le plaisir que lon a de manipuler les objets quil
présente pendant ses exposés. Elle lui demande comment il lui a été possible de dater
ces petits fragments de verre : serait-ce grâce à des éléments de céramique trouvés
sur les deux sites de Saint-Ferréol (Haute-Garonne) et des Cammazes (Tarn) ? Labbé
Baccrabère dit sêtre surtout fondé sur des comparaisons avec les pièces
représentées dans des ouvrages spéciaux ayant trait à la verrerie.
Répondant à Louis
Latour, qui évoquait les études sur les verriers, Georges Baccrabère déclare que
lon sait très peu de choses à leur sujet. M. Latour précise quil pensait
par exemple aux travaux publiés sur les verriers ariégeois du XVIIe siècle.
Labbé Baccrabère assure quil nexiste rien concernant la région de
Saint-Ferréol et des Cammazes pour les XVe et XVIe siècles ; on
connaît cependant une famille Robert, installée dès le XVe siècle à
proximité de la Montagne Noire, vers Saint-Ferréol, qui a été active « pendant pas
mal de temps ».
Mme
Pradalier-Schlumberger demande si, daprès léchantillon recueilli sur les
deux sites, on peut faire lhypothèse dun abandon au XVIIe siècle.
Labbé Baccrabère croit que celui-ci a dû se produire au moment des Guerres de
Religion. Insistant sur les conditions très difficiles de ses explorations (pente très
forte et 0,50 m de vase au lac des Cammazes !), il reconnaît que ses observations sont
restées très superficielles et quil na pas dindice certain pour
confirmer ce sentiment. Maurice Scellès sétant enquis de la date de la mise en eau
des deux bassins, Georges Baccrabère indique quil sagit de la seconde moitié
du XVIIe siècle pour celui de Saint-Ferréol et des environs de 1955 pour
celui des Cammazes.
Daniel Cazes
sinterroge sur la diffusion des produits de ces ateliers de la Montagne Noire :
locale ou plus large ? Labbé Baccrabère dit quil est très difficile de
répondre, étant donné lextrême fragmentation de la verrerie. Louis Latour fait
observer que lon retrouve de manière typique pour les productions du XVIIe
siècle des « olives » de soudure entre le pied et le calice, qui ont bien mieux
résisté que les parois, beaucoup plus minces et fragiles. M. Latour indique ensuite que
des éléments de comparaison peuvent se voir dans le petit musée aménagé au
Mas-dAzil (Ariège).
Nelly Pousthomis-Dalle
signale quil existe aux Archives communales de Revel un document portant mention
dune activité de verrerie vers Les Cammazes au milieu du XVe siècle,
mais elle doute quil sagisse dans ce cas dun véritable atelier de
verrier. Comme elle la constaté lors des fouilles du castrum de Durfort
(Tarn), la présence de creusets peut ne correspondre quà une production verrière
marginale, occasionnelle.
Maurice Scellès lui
ayant demandé sil avait pris des photographies des sites au moment de ses
explorations, en 1973 et 1975, labbé Baccrabère répond par la négative : « Non,
cest le tort que jai eu ! ». Nonobstant, Louis Latour souligne
lintérêt du repérage : « Pour un passage, on ne pouvait pas faire mieux que ce
que vous avez fait ! »
Au titre des questions diverses, Daniel Cazes signale louverture de deux chantiers de fouilles particulièrement importants pour la connaissance de Toulouse antique et médiévale, lun devant le Monument aux morts, en avant de lemplacement de lancienne Porte Saint-Étienne, lautre sur le site de la caserne de gendarmerie, sur lemplacement de lancienne Porte Narbonnaise. Le Directeur propose de demander à notre confrère Jean Catalo, qui dirige ce dernier chantier, den organiser une visite pour notre Compagnie.
SÉANCE DU 19 NOVEMBRE 2002
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Coppolani, Directeur honoraire, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint,
MM. labbé Baccrabère, Bordes, Gérard, Gilles, Hermet, le Père Montagnes,
Nayrolles, Peyrusse, Pradalier, Prin, Mgr Rocacher, membres titulaires, Mmes Andrieu,
Béa, Félix-Kerbrat, Pujalte, MM. Ginesty, Manuel, membres correspondants.
Excusés : M. Cazes, Directeur, Mmes Cazes, Galés, Napoléone, MM. Gérard, Molet,
Tollon.
La parole est au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal de la séance du 5 novembre, qui est adopté.
La Présidente souhaite la bienvenue à Mme Adeline Béa, qui prend séance ce soir, puis elle remet à la Société le coffret des deux volumes consacrés à la Maison des chevaliers de Pont-Saint-Esprit offert par M. Alain Girard : La maison des Chevaliers de Pont-Saint-Esprit, t. 1, Alain Girard, La demeure des Piolenc, 230 p., t. 2, Christian de Mérindol, Les décors peints. Corpus des décors monumentaux peints et armoriés du Moyen Âge en France, 475 p., Conseil général du Gard, Pont-Saint-Esprit, Musée dArt sacré du Gard, 2000-2001.
Louis Peyrusse fait circuler les nouveaux bulletins de souscription pour le livre sur lHôtel dAssézat, en précisant que le délai de souscription est prolongé jusquau 10 décembre. Louvrage est à la reliure, mais Louis Peyrusse en présente les bonnes pages et dit la véritable satisfaction que lon éprouve devant cette somme scientifique devenue un beau livre grâce à lAssociation
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 235
des Amis de lHôtel dAssézat. Lédition est sans but lucratif puisque louvrage est vendu à prix coûtant et il est important que chacun dentre nous en fasse la promotion. François Bordes demande que des bulletins soient distribués dans les différentes institutions culturelles de la ville.
La Compagnie entend le rapport dHenri Pradalier sur la candidature au titre de membre correspondant de M. Raymond Laurière. Il est procédé au vote : M. Raymond Laurière est élu membre correspondant.
La parole est alors à Louis Latour, qui nous fait part des Dernières recherches sur le facteur dorgues Guillaume Monturus :
« La carrière de Guillaume Monturus, originaire de Sarlat, nest guère connue que depuis une trentaine dannées, grâce à létude dAlex Bèges consacrée au Grand orgue de Saint-Nazaire de Béziers parue dans Recherche XII sur la musique française classique (Picard, 1972).
Les travaux de Louis Latour sur lorgue dAuterive (1986), de Jean-Claude Richard et Roland Galtier sur Les orgues de labbaye bénédictine de Villemagne LArgentière (dans Bulletin de la Société archéologique et historique des Hauts Cantons de lHérault, n° 14, 1991) ont permis de mieux connaître lhomme, ses qualités et ses défauts, et ont révélé limportance de luvre accomplie par Guillaume Monturus dans tout le Midi, en particulier à Marseille, Montpellier, Béziers, Lombez
En 1999, la découverte par Bernard Podevin (De Sarlat à lEspagne , dapprenti à maître facteur dorgues, litinéraire de Guillaume Monturus, dans Société dart et dhistoire de Sarlat et du Périgord Noir, n° 80, 2000) du contrat dapprentissage de Monturus dans latelier des Lépine (1752) où le jeune Guillaume, âgé de 15 ans, travailla à côté de Jean-François Lépine, de cinq ans à peine son aîné, permet de mieux comprendre la rivalité qui les opposa plus tard à Montpellier et à Béziers.
Les derniers travaux, encore inédits, de Françoise Clastrier sur les orgues de Bayonne et de Saint-Jean-de-Luz ont révélé une partie peu connue de la vie de Guillaume Monturus : sa carrière espagnole. Cest en Espagne, en effet, à partir de 1792, que Guillermo Monturus, puis son fils Juan, accomplirent une uvre considérable que des recherches récentes éclairent peu à peu. »
Louis Latour termine
sa communication en indiquant que lenquête a connu un nouvel épisode avec un
courrier électronique qui lui a été adressé tout récemment par un descendant
barcelonais du facteur dorgues. La Présidente remercie Louis Latour de nous avoir
présenté cet état dune recherche dont lhistoire ne manque certes pas de
rebondissements et lui demande si la descendance espagnole de Guillaume Monturus a des
renseignements qui confirmeraient linstallation de la famille à Sarlat au XVIIIe
siècle. Louis Latour cite lacte de baptême (1737) et le contrat
dapprentissage de Guillaume Monturus, mais aucune autre pièce ne confirme
lancienneté de linstallation de la famille à Sarlat.
Henri Pradalier ayant
demandé si létablissement des Monturus en Espagne navait pas été une
conséquence de la Révolution, Louis Latour dit espérer le savoir grâce aux descendants
espagnols ; il rappelle quen tout cas le prêtre dAuterive avec lequel
Monturus était en relation était farouchement royaliste et quil a fini par choisir
lexil.
Nicole Andrieu présente à la Société quelques objets classés au titre des Monuments historiques en 2002 à Saint-Sulpice-sur-Lèze :
« Sept objets conservés dans léglise de Saint-Sulpice-sur-Lèze ont été classés Monuments historiques en 2002, après linscription de sept autres à lInventaire supplémentaire des Monuments historiques en lan 2000. La protection de quatorze pièces de mobilier ou objets de cette église répondait à la demande du maire et du conservateur régional des Monuments historiques, alors que larchitecte en chef travaillait à une étude préalable à sa restauration générale.
La chaire à prêcher est complète et toujours en place. Elle est sobre dans sa structure comme dans son ornementation, mais elle est mise en valeur par le décor de moulures dorées et les panneaux de marbre feint qui recouvrent la cuve, par des volutes et des feuilles dacanthe déployées qui lencadrent. Le dosseret, en marbre feint, est encadré dune tête dange se prolongeant en une chute végétale. Labat-voix avec rayons dorés et colombe, est complet dans sa partie supérieure.
Lappui de communion est, lui aussi, toujours en place. Il est composé de plusieurs éléments : les deux battants de la porte centrale sont ornés dun médaillon de tôle dorée figurant lévêque Sulpice et saint Jean-Baptiste, avec son agneau. Les parties latérales sont ornées de rinceaux et de volutes, avec des médaillons ajourés en forme de cur, entourés de feuilles et de fleurs. En 1798, lordonnance du commandeur de Malte (1) évoque la balustre de communion qui vient dêtre réparée.
La chapelle Saint-Joseph conserve une très belle grille de style rocaille. Dans un ensemble de volutes, rinceaux et motifs géométriques, se détachent les deux pots-à-feu placés sur les portes dentrée.À lentrée de léglise, et dans la chapelle Saint-Jean-Baptiste, quatre statues de terre cuite retiennent lattention. Leur état de conservation est déplorable : saint Luc et saint Marc nont plus de tête ; les bras sont amputés comme ceux de saint Jean. Seule la statue de saint Matthieu est complète.
Comme toutes les statues de terre cuite de grande dimension, qui étaient débitées pour sécher et cuire, ces quatre statues sont composées de trois parties superposées.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 236
Les quatre évangélistes portent un vêtement ample, largement décolleté et plissé, serré à la taille par une ceinture ou un drapé. Saint Matthieu porte une barbe fournie. Il tient une plume dans la main droite et un livre dans la main gauche, que soutient aussi lange, figuré comme un enfant à la chevelure ondulée, vêtu dune tunique courte. Saint Jean montre un visage jeune, encadré dune chevelure longue et bouclée. Son vêtement est complété par un drapé qui recouvre lépaule gauche et sert de ceinture. De la main gauche, il tient un livre ouvert ; à ses pieds, laigle traditionnel. Saint Marc, dont la tête repose à terre, porte lui aussi un drapé sur lépaule et un livre dans la main gauche. À ses pieds, un grand lion, à la crinière abondante, lève une patte et tourne sa tête vers Marc. La statue de saint Luc est la plus mutilée, mais son attribut est figuré ici comme un puissant taureau ailé.
SAINT-SULPICE-SUR-LÈZE, statue en terre cuite :
saint Matthieu.SAINT-SULPICE-SUR-LÈZE, statue en terre cuite :
saint Jean.Ces statues napparaissent mentionnées dans aucune visite pastorale ou prieurale. Le nom des chapelles secondaires et les cultes qui y étaient honorés ne permettent pas plus de justifier la présence de ces statues dans léglise.
En 1904-1906, labbé Lestrade a publié dans le Bulletin de la Société archéologique du Midi de la France (2) le bail à besogne conclu en 1766 entre le sculpteur François Lucas et le curé de Lézat pour faire en terre cuite quatre statues représentant les quatre évangélistes avec leurs attributs, de la hauteur de cinq pieds deux pouces pour 300 livres. Labbé Lestrade ajoute quon lui a assuré que ces statues sont (en 1904) reléguées dans une pièce accessoire du presbytère de Lézat.
Paul Mesplé (3) et Jean-Pierre Suzzoni (4) ont émis lhypothèse que les quatre statues conservées dans léglise de Saint-Sulpice et les quatre statues commandées en 1766 à François Lucas sont les mêmes, les dimensions correspondant à 1 ou 2 centimètres près. Jean-Pierre Suzzoni reconnaît quon ne retrouve pas de manière évidente dans ces statues le style de François Lucas, contredit par Brigitte Bonnin-Flint qui, dans sa thèse (5), constate des parentés entre ces statues et dautres uvres de François Lucas : même traitement des drapés, des chevelures et des barbes, même goût pour les lions majestueux et les enfants. Elle qualifie ces quatre statues de puissantes, sobres et en même temps équilibrées ; elles témoignent de la maîtrise de François Lucas.Nicole ANDRIEU »
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 237
1. A.D. Haute-Garonne : H Malte, reg. 597.
2. Abbé Jean LESTRADE, « Bail à besogne conclu en 1766 », dans B.S.A.M.F., n° 32-36, 1904-1906.
3. Paul MESPLÉ, « À travers lart toulousain, hommes et uvres », Toulouse, éditions du Musée des Augustins, 1942, p. 39-42.
4. Jean-Pierre SUZZONI, « Les statues des évangélistes de Saint-Sulpice-sur-Lèze sont-elles de Lucas ? », dans LAuta, n° 508, 1985.
5. Brigitte BONNIN-FLINT, « Une dynastie dartistes toulousains : les Lucas », thèse de doctorat de 3e cycle, Université de Toulouse-Le Mirail, 1999.
La Présidente remercie Nicole Andrieu
et lui demande si lanalyse stylistique a confirmé lattribution des
évangélistes à François Lucas. Nicole Andrieu répond que Brigitte Bonin le pensait
mais quaucune source ne le confirme ; les statues sont en mauvais état et un
épais badigeon les recouvre. Jean Nayrolles fait remarquer quil est tout à fait
probable que cet enduit soit du XVIIIe siècle.
Après avoir rappelé
quil a eu loccasion détudier la table de communion en fer forgé de la
chapelle Saint-Joseph, attribuable à Bernard Ortet, Louis Latour demande où en est la
restauration qui avait été souhaitée par la municipalité. Nicole Andrieu confirme que
cette restauration avait été envisagée mais avoue ne pas savoir où cela en est.
Louis Peyrusse remarque
que les représentations de la Vierge du Pilar sont rares de ce côté-ci des Pyrénées
alors quelles sont si fréquentes en Espagne et demande si lon a des
informations sur le tableau de léglise de Saint-Sulpice-sur-Lèze. Nicole Andrieu
rappelle que les tableaux ne sont pas mentionnés, le plus souvent, par les inventaires
révolutionnaires. Maurice Scellès signale un tableau représentant la Vierge du Pilar
dans léglise Saint-Barthélemy à Cahors. Jean Nayrolles se demandant si les deux
tableaux ne formaient pas un pendant, Nicole Andrieu confirme que cétait en effet
le cas mais elle précise que lune des toiles a été modifiée pour sadapter
à son nouveau cadre.
Au titre des questions diverses, Patrice Cabau commente pour la Compagnie une inscription médiévale conservée par notre Société et exposée dans la salle des séances :
« Inscription commémorant létablissement dune fontaine à Ramonville en 1270
Parmi les monuments lapidaires exposés depuis 1996 dans la salle des séances de notre Compagnie se voit une inscription médiévale (1) répertoriée sous le n° 56 (2) et entrée dans nos collections en 1909 : M. Rodière, maire de Ramonville-Saint-Agne, et M. labbé Martin, curé de lagreste paroisse, offrent au Musée de la Société [ ] une inscription de lannée 1270 trouvée récemment dans le jardin du presbytère (3).
Le support est une plaque (0,37 m x 0,30 m x 0,10 m env.) de marbre pyrénéen de couleur grise, du type dit de Saint-Béat, qui semble avoir été taillée dans une paroi de cuve de sarcophage de lAntiquité finissante. La surface inscrite paraît légèrement usée ; des restes de mortier adhérent sur les faces antérieure et postérieure ainsi que sur les chants.
Linscription, rédigée en latin, occupe la presque totalité du champ. Le texte est tracé sur dix lignes, dont les deux premières sont encadrées et interrompues par trois petits écus armoriés gravés au trait : les écussons latéraux portent un château à trois tours, celui du milieu une croix de Toulouse.
Il ny a pas trace de réglure préalable à la gravure, et le lapicide na pas bien évalué la longueur du texte à insérer dans le champ : les trois dernières lignes se resserrent par manque de place, les éléments des mots ultimes occupant sur le bord inférieur du support les zones les moins abîmées.
Les caractères paléographiques sont ceux que présentent en général les inscriptions gravées à Toulouse et dans la région toulousaine entre la fin du onzième siècle et celle du quatorzième (4). Lécriture est dans lensemble relativement soignée et régulière, avec des lettres dassez petit module (variant de 2 à 1,5 cm env.), plutôt espacées. Les onciales paraissent relativement nombreuses (e, h, m, n, t, u). Les signes suscrits correspondent aux abréviations usuelles (o = o, ? = us, pontets = m / n / ). Les unités lexicales ou numérales se trouvent séparées par trois points superposés (exceptionnellement deux à la ligne 2, en raison de la proximité de lécusson médian), parfois répétés : ils marquent alors la fin dune ligne et le début de la suivante (lignes 5/6, 6/7, 7/8).
Quelques particularités linguistiques sont à relever : omission de die après le quantième du jour du mois (ligne 2), celui-ci étant indiqué au génitif (mensis septembris, l. 2-3), ce qui exclut de lire 1277 pour le millésime ; interversion de lettres dans Tohlose (l. 6) ; graphie méridionale homnium, pour omnium (ligne 8) ; expression grammaticalement fautive homnium humanum generum (l. 8-9), au lieu de omnis humani generis (5).
La teneur de cette inscription apparaît comme tout à fait exceptionnelle :
Lan du Seigneur 1270, le 7 du mois de septembre, fit faire louvrage de cette fontaine le seigneur Pierre de Castelnau, chevalier, citoyen de Toulouse, en lhonneur de Dieu et de la bienheureuse Vierge Marie et en lhonneur de tout le genre humain et aussi pour la rédemption de ses péchés.
On observera que sont ici reprises à propos de la création dune fontaine publique les formules de dédicace et de demande dindulgence caractéristiques des fondations pieuses (6). Les rédacteurs du Corpus des inscriptions de la France médiévale notaient en 1982 : Létat actuel des relevés dépigraphie médiévale ne permet pas de citer de textes comparables (7).
Cette inscription remarquable fut faite à linstigation dun homme considérable, qui fut à Toulouse lun des
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 238
personnages consulaires le[s] plus importants de la deuxième moitié du XIIIe siècle (8).
Pierre de Castelnau appartenait à la lignée toulousaine issue de Pierre Guillaume Peltort ( 1163-1170 ), fils de Bernard Raymond ( 1116-1162 ), lun des trois frères qui assuraient au début du douzième siècle la garde et la défense de lhôpital Saint-Rémy et de son église (9). Après 1163, les descendants de Pierre Guillaume Peltort prirent le nom du castrum novum dEstrétefonds (cant. Fronton, arr. Toulouse, Haute-Garonne), tel son fils le chevalier Aymeric ( 1171-1230 ), dit lAîné ou le Prudhomme (10), à qui le comte de Toulouse Raymond VI concéda le castelnau en 1213.
INSCRIPTION LAPIDAIRE. Collection de la S.A.M.F. Cliché A.M. Toulouse.
[ÉCUS-] A N N O : [ÉCUS-] D(OMI)NI : M°: [ÉCUS-]
[SON] : CC°: LXX : VII.[SON]M E N S I S : [SON]
S E P T E (M) B R I S : F E C I T : F I E R I : O
P(VS) : ISTIVS : FO(N)TIS : D(OMI)N(VS) : PETR(VS)
: D E : C A S T R O : N O V O : M I L E S :
: C I V I S : T O H L[OSE] : A D : H O N O R E(M) :
: D(E)I : E T : B(EAT)E : V I R G I N I S : M A R I E :
: E T : A D : H O N O R E(M) : H O M N I V(M) : H V M A N V(M)
G E N E R V M : A T : R E D E(MP)C I O N E(M) : P E
C A T O R V M : S V O R V(M)Fils probablement cadet dAymeric de Castelnau (11) et de son épouse Constance, Pierre de Castelnau paraît pour la première fois en 1222, comme témoin dun acte des consuls de Toulouse (12). Entre 1255 et 1270, chevalier, conseiller des consuls (13), qui le qualifiaient dhomme noble et sage (14), il fut à plusieurs reprises envoyé en ambassade auprès du comte Alphonse de Poitiers (15). Témoin de divers actes émanés des consuls ou les intéressant (16), il fut le troisième des soixante-deux notables toulousains appelés à attester, le 5 février 1286, la véracité de la version écrite des coutumes de la ville, promulguée le lendemain par les représentants du roi Philippe III le Hardi (17). Pierre fut lui-même consul en 1258-1259, 1273 (?), 1275 et 1288-1289 (18). Il dut mourir dans le courant de la décennie 1290, à un âge fort avancé (19).
La famille de Castelnau portait des armoiries dazur au château dor à trois tours, donjonné (20), qui se retrouvent, également accompagnées décussons arborant la croix des comtes de Toulouse, sur lépitaphe dAlamande de Castelnau, veuve du viguier comtal de Toulouse Guillaume de Castelnau ( v. 1190) et tante de Pierre de Castelnau, décédée le 27 décembre 1223 (21).
Reste à savoir où se trouvait la fontaine pour laquelle Pierre de Castelnau fit graver linscription qui nous occupe, autrement dit si ce monument, qui pourrait fort bien avoir été transporté dailleurs, provient originairement de Ramonville-Saint-Agne (cant. Toulouse-Sud, arr. Toulouse, Haute-Garonne). Jules de Lahondès signalait en 1909 quune source jaillit sur la pente du coteau, entre les maisons alignées sur la route et léglise qui se dresse sur un petit plateau quencadrent les ombrages et il se demandait : Est-ce auprès delle que Pierre de Castelnau avait érigé une fontaine ou sur une dérivation amenée dans le jardin du presbytère ? (22).
Linscription qualifie le fondateur de citoyen de Toulouse. Cette précision eût été inutile si le chevalier avait agi dans la ville où il habitait notoirement (23). Toujours mentionné comme le premier des consuls de la Cité, Pierre de Castelnau représentait vraisemblablement le quartier de la Daurade (24), où il devait donc demeurer. Hors la ville, il possédait des biens à Castelnau-dEstrétefonds, à Verfeil ainsi quà Flamolriu, sur la rive droite de la Garonne, au sud de Toulouse (25). Sa famille avait aussi des possessions près de Pech-David, à Vieille-Toulouse, Pechbusque, Auzeville et Ramonville (26) ; au quatorzième siècle, des Castelnau étaient seigneurs de Pouvourville (27).
On en conclura que cest à Ramonville que Pierre de Castelnau dut faire aménager en 1270 une fontaine publique et que linscription commémorant cette largesse, sans doute légèrement déplacée par la suite, fut découverte en 1909 non loin du lieu auquel elle avait été destinée à lorigine.
Patrice CABAU »
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 239
1. Sur cette inscription : LAHONDÈS 1909, p. 534-536 (photo en noir et blanc) - C.I.F.M. 1982 (8), Haute-Garonne, n° 8 bis, p. 43-44 - BORDES 2003, n° 4, p. 23 (photo en couleurs).
2. Ce numéro, qui correspond à un inventaire ancien non retrouvé, figure sur une étiquette de papier ronde collée.
3. LAHONDÈS 1909, p. 534.
4. Par labsence de lignage et lespacement des lettres, cette inscription peut être rapprochée en particulier de lépitaphe de Bernard de Suc, prêtre, chanoine et ouvrier de Saint-Sernin, décédé le 7 novembre 1261. Toulouse, musée des Augustins, galerie dépigraphie médiévale, n° 40 (inventaire : Ra 524) = C.I.F.M. 1982 (7), n° 86, p. 127-128, et fig. 91, pl. XLVI.
5. La formule genus humanum a été utilisée notamment par Cicéron (Laelius, de amicitia, 20) et par saint Léon Ier le Grand, pape de 440 à 461 (Liber sacramentorum Romanae Ecclesiae, P.C.C.S.L., LV, 1846, c. 146...).
6. Pour le formulaire usité dans les fondations pieuses, voir par exemple C.I.F.M. 1982 (7), nos 12 (autel), 64, 65, 80 (anniversaires), 100 (tombeau), 99, 110, 111 (chapelle).
7. C.I.F.M. 1982 (8), p. 44.
8. GILLES 1969, p. 167, n. 2.
9. Pour le début de lhistoire de cette famille, aux douzième et treizième siècles, voir MUNDY 1985, p. 178-190.
10. Cet Aymeric de Castelnau était qualifié de major ou de probus homo pour le distinguer de son neveu homonyme, dit juvenis ou minor, et surnommé Copha.
11. Toulouse, A.D. 31, H Lespinasse, 24 [février 1258] ; H Malte, 184, 120 [juin 1258] - MUNDY 1985, p. 186-187, n. 29.
12. Toulouse, A.M., AA 1, n° 75 [6 mars 1222] - MUNDY 1985, p. 186, n. 28. On ne connaît pas dautre mention de ce Pierre avant 1255 (Paris, B.N.F., Doat, LXXIII, f. 394r° et 397r° [avril et mai 1255] - MUNDY 1985, p. 185, n. 24 ; p. 187, n. 29). Il nous semble que le Pierre de Castelnau ( 1190-1243 ) qui fut consul de Toulouse en 1217-1218 était fils de Guillaume de Castelnau et frère dAymeric le Jeune, plutôt que fils dAymeric lAîné (cf. MUNDY 1985, p. 179 ; p. 186, n. 28). Un autre Pierre de Castelnau était en 1211-1213 maître du Temple en Toulousain (DU BOURG 1882, p. 24 - MUNDY 1985, p. 180, n. 4).
13. Paris, B.N.F., ms. lat. 10 918, f. 34r° [vers 1265] = H.G.L.3 1879, n° 515, c. 1552-1560 - MUNDY 1985, p. 187, n. 29 - Cf. MUNDY 1997, p. 98.
14. Paris, A.N.F., J 308, 76 [24 mai 1266] = H.G.L.3 1879, n° 516, c. 1560-1561.
15. Paris, A.N.F., J 896 [juin / décembre 1255] = H.G.L.3 1885, Notes, p. 167-168 - GILLES 1969, p. 167, n. 2. || Paris, A.N.F., J 308, 76 [24 mai 1266] = H.G.L.3 1879, n° 516, c. 1560-1561 - GILLES 1969, p. 167, n. 2 - MUNDY 1985, p. 186, n. 28. || Toulouse, A.M., II 61 [14 avril 1270] - GILLES 1969, p. 167, n. 2 - MUNDY 1985, p. 187, n. 30.
16. Toulouse, A.M., BB 204, f. 4 [6 août 1267] ; AA 3, n° 128 [19 juin 1270] ; AA 34, n° 12 [17 février 1279]. Toulouse, A.D. 31, G 347, f. 42v° [15 octobre 1280] - GILLES 1969, p. 167, n. 2.
17. Paris, B.N.F., ms. lat. 9 187 = GILLES 1969, p. 72.
18. MUNDY 1985, p. 186 [1257-1259] - MUNDY 1997, p 411 [janvier 1258 - mars 1259]. || LAFAILLE 1687, Annales, p. 3 [« 1272 » = 1275], 4 [1273] - GILLES 1969, p. 167, n. 2 [1272-1273] - Cf. MUNDY 1997, p. 414 et 415. || Paris, B.N.F., ms. lat. 9 187 = GILLES 1969, p. 82 ; p. 167, n. 2 [1274-1275] - MUNDY 1985, p. 187 [1275-1276] - MUNDY 1997, p. 98, n. 47 [1275] ; p. 415 [janvier-octobre 1275]. || LAFAILLE 1687, Annales, p. 17 [1288] - GILLES 1969, p. 167, n. 2 [1288-1289].
19. Cest sans doute le même personnage qui paraît en 1286 et 1292 dans des actes relatifs à la famille de Saint-Vast (Toulouse, A.D. 31, H Malte, Toulouse, 133 [juillet ou septembre 1286] - GILLES 1969, p. 168, n ; cf. p. 80, n. 6. || Montauban, A.D. 82, A 297, f. 883 r° [décembre 1292] - MUNDY 1985, p. 187, n. 30). Peut-être était-il encore en vie en 1297 (Toulouse, A.D. 31, H Malte, Toulouse, 133 [9 novembre 1297] - GILLES 1969, p. 167, n. 2). Deux autres Pierre de Castelnau paraissent au début du quatorzième siècle : lun, dont le fils était également prénommé Pierre (Toulouse, A.M., II 7 [8 juin 1309]), fut en 1308-1309 consul du Bourg pour le quartier de Pouzonville (LAFAILLE 1687, Annales, p. 39) ; lautre, damoiseau, fut en 1320-1321 consul de la Cité pour le quartier de la Dalbade (LAFAILLE 1687, Annales, p. 54) ; lun des deux fut envoyé par les consuls auprès du roi en 1316 (Toulouse, A.M., II 61 [13 février 1316])
20. Les émaux sont indiqués daprès les armoiries de Pierre de Castelnau, capitoul pour le quartier de Saint-Sernin en 1370-1371 et 1393-1394, dÉtienne de Castelnau, capitoul pour le même quartier en 1372-1373, et de Jean de Castelnau, capitoul pour le quartier de Saint-Julien en 1373-1374, peintes sur les miniatures du premier livre des Annales capitulaires : « écartelé, au 1 et 4, dazur au château dor à trois tours, donjonné ; au 2 et 3, de gueules à 2 fasces dor. » (Toulouse, A.M., BB 273, chroniques 74 [1370-1371] et 93 [1393-1394] - ROSCHACH 1887, p. 423-424 - ROSCHACH 1904, p. 685, fig. 571 - CAU 1990, p. 70, 72. || New-York, Pierpont Morgan Library, chroniques 75 [1372-1373] et 76 [1373-1374] - BORDES 2001, p. 121, 122). Une composition différente, « écartelé avec au un et au quatre trois fa[s]ces, aux deux et aux trois un château à trois tours crénelées », figure sur la dalle tombale dArnaude de Castelnau, clarisse du couvent de Sainte-Claire du Salin, décédée le 5 août 1364 : ANNO DOMINI MCCCLXIIII NONAS AVGVSTI OBIIT SOROR ARNALDA DE CASTRO NOVO CVIVS ANIMA REQVIESCAT IN PACE (Toulouse, musée archéologique de lInstitut catholique = BACCRABÈRE 1974, n° 223, p. 65 - GILLES 1969, p. 80, n. 3).
21. AN(N)O : D(OMI)NI : M° : CC° : XX[°] : III[°] : VI° : K(A)L(ENDAS) : IANV/ARII : OBIIT : D(OMI)NA : ALAMANDA : DE C/ASTRO : NOVO : VXOR : (CON)DAM : W[ILLELM]I : DE : CA/STRO : NOVO : MILITI[S] : CANONICA : ECC(LESI)E : / SAN[C]TI : STEPHANI : CVI(VS) : A(N)I(M)A : RE/Q[V]IESCAT IN : PACE : AMEN : Toulouse, musée des Augustins, galerie dépigraphie médiévale, n° 10 (inventaire : Ra 431) = C.I.F.M. 1982 (7), n° 66, p. 108-109, et fig. 71, pl. XXXV.
22. LAHONDÈS 1909, p. 535. Une voie toute proche de léglise de Ramonville-Saint-Agne porte le nom de « rue des Sources ».
23. Gausbert Donadieu, qui fonda une chapelle à Cahors en 1259, est semblablement qualifié de « citoyen de Montpellier » : ISTA(M) : CAPELLA(M) : FEC(IT) EDIFICARI : DO(MINVS) : / GAVSB(ER)T(VS) : DONADIEV TIVIS < CIVIS > : MO(N)TISPE/SSVL(ANI) : AD HONORE(M) : D(E)I : ET B(EAT)I : MICHAEL(IS) : AR/C(H)A(N)GELI : P[RO] REDE(M)PT(I)O(N)E : A(N)I(M)E : F(RA)T(R)IS : SVI : D(I)C(T)I : / GERALDI : DONADIEV : Q(V)I : IAC(ET) : I(N) CIMIT(ER)IO : IS/TO : (E)T SVE : A(N)NO: D(I)C(T)I < D(OMI)NI > : M° : CC° : LIX° : LE(C)TOR : DIC : P(ATE)R / N(OSTE)R : P[RO] : A(N)I(M)AB(VS) : EOR(VM) Cahors, collège Gambetta : inscription sur marbre encastrée dans le mur ouest de la chapelle, au-dessus de la porte dentrée, et provenant de lancien couvent des Cordeliers (ce monument nous a été signalé par notre consur Dominique Watin-Grandchamp, que nous avons plaisir à remercier).
24. Cétait lordre en vigueur en 1295 (LAFAILLE 1687, Annales, p. 20), et déjà observé précédemment à en juger daprès les listes consulaires antérieures.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 240
25. Toulouse, A.D. 31, H Malte, 184, 120 [juin 1258] ; 1 E 493 [avril 1265] ; H Malte, 4, 197 et 198 [juillet et octobre 1260] - MUNDY 1985, p. 186-187, n. 29.
26. MUNDY 1985, p. 182 ; cf. carte, p. 181.
27. Jean de Castelnau est mentionné comme seigneur de Pouvourville en 1367, et Aymeric de Castelnau vers 1380 (renseignements dus à lobligeance de notre confrère Henri Ginesty, daprès les travaux de M. Navelle).Bibliographie
BACCRABÈRE (abbé Georges), « Le rempart antique de lInstitut catholique de Toulouse », Institut catholique de Toulouse - Chronique, 1974, n° 4, supplément au Bulletin de littérature ecclésiastique, Imprimerie du Centre, Toulouse, 1974.
BORDES (François), « Sur un feuillet américain des Annales de Toulouse (1371-1372 et 1372-1373) », dans M.S.A.M.F., LXI, 2001, p. 119-126 (voir les planches en couleurs au début du volume).
BORDES (François), « Pierre de fondation dune fontaine par Pierre de Castelnau - 1270 », dans Fontaines toulousaines, catalogue dexposition (19 septembre - 27 décembre 2003), Archives municipales de Toulouse, Toulouse, 2003, n° 4, p. 23.
CAU (Christian), Les Capitouls de Toulouse - Lintégrale des portraits des Annales de la Ville - 1352-1778, Privat, Toulouse, 1990.
DU BOURG (M. Antoine), Histoire du Grand-Prieuré de Toulouse [...], Louis Sistac et Joseph Boubée, Toulouse, 1882 (et 1883).
C.I.F.M. = FAVREAU (Robert), MICHAUD (Jean), LEPLANT (Bernadette), Corpus des inscriptions de la France médiévale, 7, Ville de Toulouse, Éditions du C.N.R.S., Paris, 1982 ; 8, Ariège, Haute-Garonne, Hautes-Pyrénées, Tarn-et-Garonne, Éditions du C.N.R.S., Paris, 1982.
GILLES (Henri), Les Coutumes de Toulouse (1286) et leur premier commentaire (1296), Académie de Législation, Toulouse, 1969.
H.G.L.3 = DEVIC (Dom Claude), VAISSETE (Dom Claude), Histoire générale de Languedoc [ ], 3e édition, Édouard Privat, Toulouse, VIII, 1879 ; X, 1885.
LAFAILLE (Germain de), Annales de la ville de Toulouse [...], Prémiére Partie, Guillaume-Louïs Colomyez, Jérôme Posuël, Toulouse, 1687.
LAHONDÈS (Jules de), « Une inscription sur pierre du treizième siècle », dans B.S.A.M.F., nouvelle série, fascicules nos 37-39 [séances du 27 novembre 1906 au 29 juin 1909], Édouard Privat, Toulouse, 1909, p. 534-536 [29 juin 1909].
MUNDY (John Hine), The Repression of Catharism at Toulouse - The Royal Diploma of 1279, Studies and texts, 74, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, Toronto, 1985.
MUNDY (John Hine), Society and Government at Toulouse in the Age of the Cathars, Studies and texts, 129, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, Toronto, 1997.
P.C.C.S.L. = Patrologiæ cursus completus - Series Latina, Jean-Paul Migne, Paris, LV, 1846.
ROSCHACH (Ernest), « Les douze livres de lhistoire de Toulouse - Chroniques municipales manuscrites du treizième au dix-huitième siècle (1295-1787) - Étude critique », dans Association française pour lavancement des sciences - Seizième session à Toulouse en 1887 - Toulouse [ ], Édouard Privat, Toulouse, 1887, p. 129-469.
ROSCHACH (Ernest), Histoire graphique de lancienne Province de Languedoc, Édouard Privat, Toulouse, 1904 (et 1905).
La Présidente
remercie Patrice Cabau pour cette lecture érudite qui nous révèle une inscription
médiévale tout à fait exceptionnelle. Maurice Scellès se déclare tout
particulièrement intéressé par cette commémoration de la création dune fontaine
qui permet de verser une pièce en effet exceptionnelle au dossier de leau dans la
ville du Moyen Âge, question fréquemment évoquée avec Anne-Laure Napoléone.
Louis Peyrusse pense
quil est peu probable que linscription concerne Ramonville, et quil est
en revanche très plausible, car il sagit dune pierre aisément transportable,
quelle provienne en fait de Toulouse. Patrice Cabau en convient volontiers.
François Bordes
signale que les archives municipales travaillent actuellement sur ce thème de leau
dans la ville. La situation au Moyen Âge se laisse difficilement saisir et la relecture
de cette inscription arrive à point nommé. Nous navons aucune trace
déquipements urbains entre lAntiquité et le XVIe siècle où la
fontaine de la prévôté est déplacée et devient le griffoul de la place
Saint-Étienne. Patrice Cabau pense que linscription a pu sappliquer à un
simple aménagement dune résurgence située au pied des coteaux de Ramonville,
comme de nombreuses autres fontaines semblables, celle du Griffoulet sur la butte du
Calvinet, à Toulouse, par exemple.
Le Secrétaire général fait le point sur lédition du prochain volume des Mémoires. Après avoir exposé les difficultés rencontrées cette année, il insiste pour que les membres respectent en particulier le nombre de pages déterminé après larbitrage du Bureau. Le nombre darticles proposés pour la publication ne cesse daugmenter, et lon ne peut que sen féliciter, mais il nest pas possible daccroître sans cesse le nombre de pages et le coût : il a fallu, cette année, renoncer aux quatre pages couleur hors texte et reporter un article sur le volume de lannée prochaine. Le Secrétaire rappelle la procédure à suivre pour publier dans les Mémoires : les membres intéressés doivent adresser une fiche de proposition à la Présidente avant le 31 décembre en donnant une estimation précise du nombre de pages, comprenant le texte et lillustration ; la composition du volume est arrêtée au printemps par le Bureau qui fait alors savoir aux auteurs si leur article est retenu ou non pour publication et quel nombre de pages leur est dévolu. Le Bureau a par ailleurs décidé quun membre qui ne serait pas à jour de sa cotisation se verrait refuser la publication : nos Mémoires sont ceux des membres de la Société.
La Présidente rappelle que la prochaine séance se tiendra au Musée Saint-Raymond.
SÉANCE DU 3 DÉCEMBRE 2002
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Mme Napoléone MM. Peyrusse,
Tollon, membres titulaires, Mmes Béa, Félix-Kerbrat, Ugaglia, Watin-Grandchamp, MM.
Ginesty, Macé, Manuel, Salvan-Guillotin, Vézian, membres correspondants.
Excusés : M. Cabau, Secrétaire-adjoint, Mmes Labrousse, Merlet-Bagnéris.
Invitées : Mmes Belin, Latour, Lavergne, Mlle Rieg.
La séance se tient au Musée Saint-Raymond, musée des Antiques de Toulouse, où Daniel Cazes, conservateur en chef, accueille la Compagnie. Lexposition Le temps des Gaulois en Provence qui nous sera présentée par Lydia Mouysset, responsable de son installation au Musée Saint-Raymond, a été organisée sous la direction de Jean Chausserie-Laprée, archéologue municipal
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 241
de la ville de Martigues. Elle traite dune période assez mal connue mais sur laquelle des acquis extraordinaires ont été obtenus par les archéologues provençaux au cours de ces dernières années. Après un vif succès à Martigues, où elle accompagnait un colloque, lexposition a voyagé à Bibracte puis Nice, sadaptant à chaque fois au lieu. À Toulouse, lexposition est presque complète à lexception de quelques pièces dont le prêt a été refusé par les musées de la Ville de Marseille. Ces manques ont heureusement été compensés par le prêt magnifique, de la part du Musée Calvet dAvignon, de la très fameuse « Tarasque » de Noves, dont Évelyne Ugaglia nous entretiendra.
La parole est alors à Mlle Lydia Mouysset, qui entraîne la Compagnie à travers les différentes sections de lexposition en commentant pour chacune les pièces ou les sites les plus significatifs.
De nombreuses questions et discussions émaillent la visite qui sachève avec la « Tarasque ». Évelyne Ugaglia analyse luvre en exposant les dernières conclusions des spécialistes qui considèrent quil sagit bien dune uvre celte et non dune sculpture du Moyen Âge comme cela avait été parfois proposé.
La Présidente remercie Lydia Mouysset et Évelyne Ugaglia de nous avoir offert daussi idéales conditions pour voir et comprendre cette exposition passionnante.
SÉANCE DU 17 DÉCEMBRE 2002
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Cazes, Directeur, Coppolani, Directeur honoraire,
Cabau, Secrétaire-adjoint, Latour, Bibliothécaire-Archiviste ; Mme Napoléone, MM.
labbé Baccrabère, Bordes, Hermet, Peyrusse, Roquebert, membres titulaires ;
Mmes Andrieu, Bayle, Conan, Fournié, M. Manuel, membres correspondants.
Excusés : MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général,
Garland, Pradalier, Mgr Rocacher.
Invités : M. Bayle.
La Présidente ouvre la séance à 17 heures et commence par remercier André Hermet de la note de lecture élogieuse quil a rédigée pour LAuta (4e série, n° 37, novembre 2002, p. 285 et suivantes) au sujet du dernier volume de nos Mémoires (t. LXI, 2001).
La parole est au Secrétaire-adjoint pour la lecture des procès-verbaux des séances des 19 novembre et 3 décembre, rédigés par Maurice Scellès, qui sont adoptés moyennant quelques menus amendements.
Michèle Pradalier-Schlumberger présente deux volumes offerts pour notre bibliothèque par leurs responsables dédition respectifs :
- Myriam Daydé, Jérôme Lourenço, Arec 31, Le canton de Lanta, collection Églises et Chapelles de la Haute-Garonne publiée sous la direction de Jean Rocacher, Éditions Empreinte, Portet-sur-Garonne, 2002, 386 p. ;
- LHôtel dAssézat, monographie publiée sous la direction de Louis Peyrusse et Bruno Tollon, Association des Amis de lhôtel dAssézat, Toulouse, 2002, 239 p.
Après avoir adressé aux donateurs ses plus vifs remerciements, la Présidente donne la parole à Dominique Watin-Grandchamp pour la lecture de son rapport sur la candidature de M. Patrick Gironnet, Architecte des Bâtiments de France, Chef du Service départemental de lArchitecture et du Patrimoine du Tarn, au titre de membre correspondant de notre Société. Il est procédé au vote ; M. Gironnet est élu membre correspondant de notre Société.
La parole est ensuite à Jeanne Bayle pour la principale communication du jour, intitulée Les livres liturgiques de Philippe de Lévis, évêque de Mirepoix de 1497 à 1537, publiée dans ce volume (t. LXIII, 2003) de nos Mémoires.
La Présidente remercie Jeanne Bayle pour une communication qui est une remise en perspective de lenluminure des derniers manuscrits liturgiques, à la charnière du Moyen Âge et de la Renaissance, et qui aborde nettement la question complexe des attributions. Jeanne Bayle déclare quil faut bien « oser ». Michèle Pradalier-Schlumberger ayant relevé le caractère encore très gothique de la décoration du pontifical de Melbourne, Mme Bayle abonde en ce sens et va jusquà qualifier de « banal » le décor de ce manuscrit jusquici peu connu. Louis Peyrusse, sintéressant aux fragments épars de miniatures extraits des antiphonaires, se demande sil ny en avait pas dans les collections constituées à Toulouse au XIXe siècle, telle celle de Chambert (devenue collection Olivier à Montauban) ou celle de Soulages, qui furent pour la plupart dispersées avant la Grande Guerre, mais dont les catalogues des expositions toulousaines de 1858, 1865 et 1892 permettent de se faire une idée. Pour M. Peyrusse, il y a sans doute une enquête à mener pour tenter de reconstituer le « puzzle des localisations momentanées » des fragments en question. Par ailleurs, pour ce qui concerne les hypothèses dattribution, il lui apparaît nécessaire de ne pas limiter le jeu des influences à la dimension étroitement locale des relations entre Mirepoix et Toulouse : lentourage de Philippe de Lévis était denvergure internationale ; aussi convient-il d« ouvrir largement le spectre des possibles ». Répondant sur le premier point, Jeanne Bayle souligne la difficulté quil y a à suivre la trace des fragments de miniatures, par exemple celle de cette initiale « S » signalée à Narbonne, mais jamais retrouvée. Sur le second point, Dominique Watin-Grandchamp relève à propos des grandes initiales des antiphonaires celles qui comportent de véritables tableaux la maîtrise dun peintre qui avait totalement intégré le processus de déstructuration / restructuration à litalienne. Jeanne Bayle précise alors que le frère de lévêque de Mirepoix était très lié à lItalie. Louis Peyrusse conclut cet échange de vues en déclarant que les influences artistiques paraissent circuler plus vite par la diffusion de livres que par la propagation de la connaissance directe de larchitecture, de la sculpture ou de la peinture
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 242
monumentales. Daniel Cazes intervient à propos de Servais Cornouaille, connu notamment pour avoir fait une « figure » des vestiges de larc de triomphe romain conservés dans le Château-Narbonnais (gravure publiée en 1556 par Antoine Noguier dans son Histoire tolosaine, p. 26). Il demande à Mme Bayle si elle a découvert sur ce peintre des indices biographiques, mais celle-ci répond navoir rien trouvé de plus que ce que Robert Mesuret a écrit sur le sujet. Dominique Watin-Grandchamp signale que notre confrère Pascal Julien a « croisé » Servais Cornouaille dans ses recherches. Patrice Cabau interroge Jeanne Bayle sur le point de savoir si le surnom de Jean Rancy, dit « Feuillette », peut avoir un rapport avec le fait que celui-ci peignait des feuillets de manuscrits. Mme Bayle dit lignorer.
La parole est ensuite à Sandrine Conan pour une communication brève consacrée aux vestiges dune maison médiévale à Bayonne :
« Vestiges dune maison médiévale dans la Ville haute de Bayonne : la maison noble dArribeire
BAYONNE, plan de situation des vestiges.
Les travaux de réhabilitation engagés à lhôtel de Hauranne [1] par la municipalité de Bayonne ont permis de mettre au jour des vestiges médiévaux [2]. Il sagit de deux murs perpendiculaires qui appartenaient à un édifice situé contre lenceinte antique de la Ville haute, avec une façade donnant sur la rue des Poissonniers. Ces vestiges ferment aujourdhui la partie nord-est de lhôtel de Hauranne et une petite cour mitoyenne au nord [3]. Ils appartenaient à la maison des seigneurs dArribeire, édifice qui semble apparaître dans la littérature dès le début du XVIIIe siècle avec létude du chanoine Veillet [4]. Plus tard, Édouard Ducéré y fera toujours mention dans les différents écrits [5] quil consacre à Bayonne. La construction médiévale : matériaux et mise en oeuvre
Parfaitement distincte du reste des élévations, la construction médiévale est presque exclusivement réalisée en pierre de taille de grès dit de Mousseroles. Ce matériau, de couleur jaune, tendre et poreux, avec parfois des amas de minuscules coquillages fossiles, provient de carrières situées à Mousseroles, à proximité de Bayonne.
Chaînés en besace, ces deux murs sont conservés sur près de 7 m de long et de 11 à 12,50 m de haut. Ils sont construits en moyen et grand appareils de pierres de taille dont la longueur peut atteindre 0,55 à 0,60 m avec des hauteurs dassises qui oscillent entre 0,25 et 0,40 m. Les joints irréguliers sont pleins dun mortier blanc à base de chaux et de sable de rivière à granulats épais, et les plus gras comportent de nombreuses cales tels que débris de grès ou plus rarement de terre cuite.
Lappareil réglé est double comme on peut le noter sur les tableaux des percements modernes réalisés dans lépaisseur du mur sud. Les faces des pierres sont dressées à laide dun marteau bretté qui laisse des traces obliques pourvues de stries tandis que les queues sont simplement équarries. Cette mise en uvre ne se rencontre peut-être pas sur lensemble des élévations puisque si le mur (M1) possède une épaisseur constante de 0,60 m [6], le mur gouttereau (M2), passe de 0,90 m au niveau inférieur à 0,75 m. Une marque de tâcheron (lettre A incisée et indifféremment disposée à lendroit ou à lenvers) a été observée sur seulement trois pierres situées sur la même assise (mur M1) [7].
Les anomalies dans la construction sont rares : seul, un décrochement dassises, qui est visible à proximité de langle intérieur ouest des deux murs. Lutilisation de bouchons [8] est particulièrement fréquente en partie inférieure du mur (M1).
Toute la partie supérieure du mur gouttereau est montée à laide déléments fabriqués en série. Ces pierres de taille (0,18 ou de 0,20 m de hauteur et de 0,46 à 0,50 m de long) sont utilisées pour la corniche, servant dappui à la charpente, et pour les exutoires, destinés à lévacuation de leau pluviale. La mise en uvre de ces éléments est singulière puisque les joints montants des assises superposées sont alignés. Cette caractéristique se rencontre également mais de façon moindre sur le reste des parements.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 243
BAYONNE, Parement intérieur des murs M1 et M2.
a : piédroits dune cheminée (XVIe-XVIIe s.), e : encoches pour cloison ou escalier, FM : fenêtres médiévales, F : fenêtres modernes, R : reconstruction après la destruction du mur est de la maison médiévale, CA : courtine antique, TR : exutoires, Pi : pignon, E : construction moderne, Pl : planchers, Co : corniche.Bien que majoritaire, le grès nest cependant pas exclusif. Un calcaire dit de Bidache, calcaire dur, de couleur gris clair avec des veines de rognons de silex est en effet utilisé ponctuellement. Les moellons aux faces éclatées ne se rencontrent que sur le parement intérieur des élévations. Disposés sur une seule assise, ils marquent chaque niveau de plancher et se situent au niveau de lassise du couvrement de lembrasure, également en calcaire, des fenêtres médiévales (FM1 et FM2). La présence de ces moellons nest pas due à un remaniement de la maçonnerie mais répond plus probablement à une nécessité technique en raison de la qualité du matériau.
Un édifice à trois niveaux
De cet édifice, dont il ne subsiste plus aujourdhui que ces deux murs, on ne connaît pas la position du mur oriental par rapport à lenceinte antique. Tout comme lenceinte, il a été entièrement détruit, probablement au XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle si lon tient compte des aménagements intérieurs de lhôtel de Hauranne mitoyen.
Plusieurs indices laissent supposer que ce mur nétait pas bâti au nu du parement extérieur de lenceinte antique mais plus certainement en retrait. Au niveau inférieur du mur M1, les assises de grès sappuient contre une maçonnerie de moellons de calcaire, disposés en assises régulières ; celle-ci est bâtie contre lenceinte antique (CA). Ce vestige maçonné paraît bien antérieur au mur sud (M1) médiéval et ce sur toute la hauteur du premier niveau. Le reste de lélévation comporte ensuite un chaînage construit en pierres de taille de grès posées parfois sur le bout (remplois). Cette observation indique que lextrémité du mur M1 a été refaite après la destruction du mur gouttereau oriental de la maison médiévale. Lélévation ainsi chaînée a ensuite servi dappui à la construction du mur moderne de lhôtel de Hauranne (E).
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 244
BAYONNE, trous maçonnés pour lévacuation de leau pluviale au faîte du mur M2.
La position du mur gouttereau en retrait de lenceinte antique explique la présence dune porte, en brique et partiellement conservée (P). Son arc brisé et une partie du piédroit gauche sont visibles sur le parement extérieur du mur (visible à lintérieur de lhôtel de Hauranne). Le seuil de cette baie se situe au niveau du chemin de ronde de lenceinte antique qui ne correspond pas au niveau doccupation intérieur de lédifice médiéval. Cette porte devait permettre, à linstar dautres ouvrages conservés ailleurs dans la ville, de circuler sur le chemin de ronde de lenceinte alors pourvue dun parapet. La présence dun tel dispositif est peut-être une des raisons pour lesquelles la maison est qualifiée dans les textes précités de forteresse.
Si certaines interrogations demeurent, lanalyse des vestiges médiévaux permet cependant de restituer un édifice composé de trois niveaux : un rez-de-chaussée, un premier étage et un étage sous comble.
Au rez-de-chaussée, aucun aménagement médiéval na été repéré à lexception dun arc de décharge dans le mur sud (M1). Lensemble des parements nayant pas été observé, sa fonction reste indéterminée : présence dune baie, problème de fondations ? Présent sur toute la hauteur du rez-de-chaussée, il est traversant, visible sur les deux parements du mur.
À louest, le mur gouttereau (M2) est à ce niveau plus épais et présente un ressaut dun peu moins de 0,10 m à lintérieur par rapport au reste de lélévation. À lest, lespace était fermé par la courtine antique.
De la même façon, le premier étage nétait pourvu daucun aménagement particulier dans cette partie de lédifice. Dans le mur sud sont encore en place les piédroits dune cheminée (a) qui a été ajoutée par refouillement de la maçonnerie comme lindique lemploi de cailloux et de fragments de terre cuite de part et dautre, noyés dans un mortier de chaux. La mise en place de cette cheminée a entraîné locclusion de la fenêtre médiévale du dernier niveau (FM1). Construite en grès, cette cheminée possédait un manteau mouluré de tores séparés par un cavet datable du XVIe siècle ou du XVIIe siècle [9]. La hotte droite et le conduit étaient liés ponctuellement à la maçonnerie par lintermédiaire dencoches encore visibles sur toute la hauteur de lélévation. Le percement de la fenêtre F l est postérieur à la destruction de la maison médiévale et est à mettre en relation avec de nouveaux aménagements dans lhôtel de Hauranne.
Les seules fenêtres médiévales reconnues se rencontrent au dernier niveau. Elles sont entièrement condamnées et nont donc pu être que partiellement observées. Couvertes par un linteau en calcaire [10], les embrasures étroites [11] indiquent quil sagit là de petits jours ; ébrasées, elles possèdent un seuil situé à 0,60 cm du niveau de plancher.
Les niveaux étaient séparés par un plancher que létat de la maçonnerie ne permet pas de restituer. Au rez-de-chaussée, il est probable que les solives perpendiculaires au mur sud (M1) reposaient sur des corbeaux. En effet, deux pierres de calcaire aux têtes éclatées, distantes de 1 m, sont conservées sur la même assise. Entre les deux derniers niveaux, le parement du mur ouest (M2) conserve une encoche de 0,09 m de profondeur et 0,24 m de côté puis, à intervalle régulier (2 m), des bouchons de fragments de terre cuite noyés dans un mortier. Ces aménagements pourraient correspondre à lemplacement de poutres. Les espaces ainsi dégagés présentaient une hauteur sous plancher de 3,50 m à 3,70 m.
Entre les premier et second étages, le mur ouest présente un ressaut de 0,08 m qui ne court pas sur toute la longueur du mur mais sarrête à 1,80 m de langle intérieur des deux murs [12]. Cette disposition pourrait peut-être suggérer lemplacement dun escalier en bois à cet endroit. Cette hypothèse expliquerait pourquoi la cheminée et la fenêtre médiévale (FM1) aménagées dans le mur sud (M1) sont décalées par rapport à son milieu.
Le dernier étage nétait, quant à lui, pas couvert par un plancher mais par la charpente de toiture laissée apparente. Sur la longueur du mur gouttereau (M2, Co) court une corniche dont la moulure torique a été partiellement bûchée. Celle-ci est réalisée en petit appareil de grès, pierres taillées en série [13]. Cette corniche permettait de soutenir une sablière de la charpente. Une assise de grès en grande partie démontée surmonte la corniche. Elle constitue le seuil des trous maçonnés destinés à lévacuation de leau pluviale dont quatre sont entièrement conservés (M2, TR). De construction régulière, ils présentent des côtés maçonnés à laide de deux pierres de taille disposées en boutisse montées avec des joints fins ; ils ont par ailleurs un couvrement à ressaut. Le seuil présente une légère pente. Louverture intérieure de ces exutoires de 0,34 m de large et 0,40 m de haut diminue ensuite vers lextérieur de 0,10 m. Lobturation de ces trous par des briques na pas permis dapprécier entièrement leurs dimensions.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 245
La présence de ces exutoires maçonnés indique que les longs pans de la toiture étaient encaissés derrière les murs gouttereaux arasés. Une incertitude demeure sur lélévation sud puisque les deux parements ne présentent pas les mêmes dispositions. À lintérieur, des pierres de grès taillées en sifflet paraissent marquer la position de la charpente. Les remaniements observés comme la présence de nombreux moellons de calcaire ne permettent pas den donner une restitution certaine. Labsence de cette disposition sur le parement extérieur laisse ainsi supposer que lensemble de la toiture était caché par un mur écran. Létat de conservation des parties hautes rend impossible détablir une liaison entre les deux murs.
Vestiges de la maison noble dArribeyre
Avant la destruction de la maison, les modifications, dans cette partie tout du moins, sont peu nombreuses à lexception de laménagement de la cheminée au premier étage dans lépaisseur du mur sud (M1, a). Sur toute la hauteur du mur gouttereau (M2), apparaissent des encoches (e) qui ont dû servir à lintégration dune cloison ou dun escalier monumental en bois. Cette dernière suggestion se base sur la description que donne Didron de la maison lors de son passage à Bayonne en 1848. Il est particulièrement séduit par le double escalier en bois et à balustres qui, du fond de la cour, monte à tous les étages, [et qui] est tellement bizarre, que des archéologues, novices il est vrai, 1attribuent aux Arabes ; dautres font de la maison une synagogue ancienne [14]. Il est probable quà linstar dautres exemples connus à Bayonne, cet escalier monumental ait été ajouté au cours du XVIIe siècle [15]. Les traces de rubéfaction visibles sur le parement intérieur du mur indiquent que lensemble a brûlé à une date indéterminée.
Quoique aujourdhui modestes, ces vestiges appartiennent sans aucun doute à la maison noble dArribeyre. La confrontation des données de lanalyse et des plans anciens de Bayonne latteste. Cette maison de plan rectangulaire présentait une façade étroite sur la rue de la Poissonnerie et possédait à larrière une petite cour, cour sur laquelle donnait la fenêtre médiévale (M1, FM1) du dernier étage. Elle était desservie par une ruelle longeant le mur ouest qui recevait leau pluviale canalisée par les exutoires retrouvés sur le faite du mur gouttereau. En recalant ces vestiges sur le plan cadastral de 1975, il est possible destimer pour cet édifice une surface denviron 315 m² (35 m de long et au moins 9 m de large). Rien ne permet de sassurer quil se composait dun ou de plusieurs corps de bâtiment.
Peut-on voir dans lédifice étudié une bâtisse ancienne qui focalisa lattention depuis lépoque moderne jusquau début du XXe siècle ? Ainsi, un plan de la ville daté de 1674 [16] faisait apparaître cette demeure sous le nom de Temple de Mars. Cette désignation a conduit plusieurs auteurs à sy intéresser. Le chanoine Veillet, au début du XVIIIe siècle, nous donne une description rapide de la façade et considère surtout que cet édifice était pour la ville comme un château destiné à sa défense, fort épais, pour résister aux attaques. La tradition populaire voulait, comme lécrit Édouard Ducéré en 1909, que ce soit ... dans cette maison que les pirates normands ou scandinaves, qui sétaient emparés de Bayonne, eussent érigé le culte dOdin, le Mars des Nations du Nord. Selon la même tradition, cest aussi là que saint Léon fit descendre le feu du ciel sur ces faux dieux, et les réduisit en cendres.
Selon le chanoine Veillet, la maison existait déjà en 1383. Elle appartenait aux seigneurs dArribeire, famille qui donna au début du XIIIe siècle, à la ville de Bayonne, un évêque (Barthélémy dArribeire) et un certain nombre de maires. Si la famille dArribeyre séteint, semble-t-il, au XVIe siècle, la maison reste, au cours des siècles suivants, qualifiée de maison noble dArribeyre.
Bien que les données historiques et les vestiges soient assez ténus, la construction entièrement en pierre de taille et la présence de trois niveaux indiquent quil sagissait dun édifice médiéval majeur à Bayonne. La date de son édification reste incertaine en labsence de critères significatifs. Pour linstant, seule la mise en uvre permet de situer son édification au XIIIe siècle ou au XIVe siècle si on la compare à celle dautres édifices érigés à cette époque à Bayonne la cathédrale et laile orientale du cloître, le couvent des Cordeliers, le Château-Vieux ou les caves dites gothiques [17]. Ces données modestes constituent cependant un apport significatif pour la connaissance de larchitecture civile médiévale à Bayonne.
Sandrine CONAN »
[1] Situé au n° 14 de la rue Gosse, à lintérieur de la Ville haute de Bayonne, lhôtel de Hauranne est sis sur lenceinte antique. Son plan composé de plusieurs corps de logis organisés autour dune cour résulte de campagnes de construction successives. Mentionné au XVIe siècle, il conserve le nom de ses propriétaires du XVIIe siècle, nom qui évoque labbé de Saint-Cyran, Jean Duvergier de Hauranne, un des pères fondateurs du jansénisme.
[2] Le Service Régional dArchéologie dAquitaine a prescrit une étude archéologique du bâti. Confiée au bureau détudes HADÈS, elle a été réalisée en 2001 en collaboration avec J.-P. FOURDRIN et R. MONTURET, UPR 5500 CNRS, PAU, Institut de Recherche sur lArchitecture Antique.
[3] Parcelles BX 512 et 211 du plan cadastral actuel.
[4] V. DUBARAT et J.-B. DARAINATZ, Recherches sur la ville et sur léglise de Bayonne, manuscrit du chanoine René Veillet, Bayonne, 3 vol., 1910-1929.
[5] Voir notamment : É. DUCÉRÉ, Le vieux Bayonne, hôtels, maisons et logis, Bayonne, 1909, réimpression de 1981, p. 51-58.
[6] On ne note quun léger fruit à peine perceptible au niveau inférieur.
[7] Le parement intérieur des élévations a beaucoup souffert (pierres rubéfiées), il nest pas exclu que les marques de tâcheron aient été plus fréquentes.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 246
[8] Lobservation des deux parements indique quil ne sagit pas là de boutisses.
[9] Le profil a pu être relevé grâce à la présence de deux pierres encore en place dans lépaisseur du mur.
[10] Celui de la fenêtre FM2 a été arraché.
[11] FM1 : embrasure de 0,80 m de large et 1,50 m de haut, FM2 : 0,70 m de large et 1,70 m de haut.
[12] On note également labsence de moellons de calcaire sur cette distance.
[13] Dimensions : 0,20 m de haut et 0,50 m de long.
[14] « Iconographie et ameublement dune cathédrale. De Paris à Bayonne », dans Annales archéologiques, t. VIII (1848), p. 315-329.
[15] J. CRUCHON, A. MANGIN-PAYEN et A. MELISSINOS, « Énigmes en lanières dans le vieux Bayonne », Le Festin, n° 31-32, 1999, p. 81.
[16] Plan conservé au Service Historique de lArmée de Terre.
[17] Voir par exemple : É. LAMBERT, « Bayonne », Congrès Archéologique de France, Bordeaux-Bayonne, 1939, p. 507-570, J.-L. PIAT avec la collaboration de A. LEGAZ, A. MARIN, J. NADAL et S. TONON, Le couvent des Cordeliers, Document Final de Synthèse, 2000, Hadès, Service Régional de lArchéologie dAquitaine.
La Présidente remercie lintervenante pour cette présentation de lancienne maison dArribeyre, dautant plus intéressante que les demeures médiévales connues pour Bayonne sont rarissimes. Mme Conan insiste sur le fait que celle-ci était entièrement construite en pierres de taille. Elle ajoute quune autre a été découverte dans le Bourg-Neuf, que des observations poussées permettraient peut-être den repérer de nouvelles ; quoi quil en soit, la maison présentée est un cas exceptionnel. Louis Peyrusse senquiert du destin des pans de murs subsistants. Sandrine Conan indique que doivent être installés en ces lieux le Service départemental de lArchitecture et des logements, que les vestiges conservés feront lobjet dune présentation archéologique, mais que, situés dans une cour privative, ils resteront peu visibles pour le public. Dominique Watin-Grandchamp ayant fait remarquer, en se fondant sur la configuration du parcellaire médiéval, que limplantation de la construction ne paraît guère correspondre à celle dune maison dhabitation, Mme Conan objecte que lon a plusieurs mentions de « maisons nobles », aujourdhui détruites, semblablement placées au contact et à lintérieur de lenceinte de la ville antique.
Pour terminer, au titre des questions diverses, la Compagnie se voit proposer un reportage photographique réalisé sur le chantier qui sest ouvert cette année dans lancien collège de Périgord en vue de linstallation de lÉcole supérieure dAudio-visuel (ÉSAV) : le constat consternant qui simpose à lévidence, cest que cette « appropriation » est menée dans la méconnaissance, sinon le mépris des constructions médiévales et postérieures. La Présidente sinterroge sur le devenir du décor peint, un faux-appareil coloré dans le style du XIVe siècle, dont les éléments sont apparus dans la partie supérieure des murs de lancienne chapelle du collège. Il est indiqué que des décisions viennent dêtre prises quant à un suivi des travaux, mais que « la suite nous échappe ». Louis Peyrusse rappelle avec amertume les courriers que notre Société avait adressés avant travaux aux autorités compétentes et qui mettaient en évidence la nécessité de procéder à une étude préalable des bâtiments, les réponses négatives qui ont été reçues, et pour finir l« engueulade » quil a dû essuyer à titre personnel et non pas comme Président de la S.A.M.F. de la part de M. Gaignard, alors Président de lUniversité de Toulouse-Le Mirail.
TOULOUSE, COLLÈGE DE PÉRIGORD.
À gauche, larc de la porte de la chapelle donnant sur la galerie de la cour, à
droite la nouvelle porte en béton.
Quant à
l« intervention architecturale » opérée sur un édifice de
limportance de lancien collège de Périgord, lassemblée la juge
proprement « affligeante ». À ce propos, un membre précise quun projet
initial avait prévu la transformation de la tour Maurand en cage dascenseur, et que
lon doit à M. Bernard Voinchet, Architecte en chef des Monuments historiques,
davoir échappé à pareille bêtise. Par ailleurs, il faut encore signaler que la
bibliothécaire de lInstitut dÉtudes méridionales, a vu, lors du creusement
du sol de lancienne chapelle, des tombes, dont certaines en bâtière, qui devaient
appartenir à la nécropole de Saint-Sernin et dont les vestiges ont disparu sous une
dalle de béton.
Michèle
Pradalier-Schlumberger et Louis Peyrusse concluent à la nécessité délever une
nouvelle protestation auprès de lUniversité de Toulouse-II et de son Président
actuel, M. Pech.
SÉANCE DU 7 JANVIER 2003
Présents : Mme
Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM. Coppolani, Directeur honoraire, Cazes, Directeur,
Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint, Mme Pousthomis-Dalle, MM.
Bordes, Hermet, le Père Montagnes, M. Pradalier, Mgr Rocacher, membres titulaires, Mmes
Félix-Kerbrat, Fournié, Stutz, MM. Balagna, Ginesty, Luce, Testard, membres
correspondants.
Excusés : M. Latour, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Czerniak, Pujalte, MM.
Gérard, Lapart, Peyrusse, Tollon.
Invité : M. Rigaud.
La Présidente ouvre la séance en présentant ses meilleurs vux à tous, souhaitant que lannée 2003 voie enfin seffacer les dernières séquelles de lexplosion dAZF, qui a touché certains membres de notre Société.
La Présidente donne la parole à André Hermet qui prononce devant la Compagnie léloge de notre confrère Georges Fabre :
« Le 27 septembre 2002, notre confrère Georges Fabre est décédé. Membre de notre Société depuis plusieurs décennies, il en était le vice-doyen en ancienneté. Élu membre correspondant en 1946, il devint membre titulaire en 1951. Il nétait ni archéologue, ni historien de lart. Son érudition lavait fait entrer en notre compagnie à une époque
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 247
où on aurait eu quelques difficultés à occuper les quarante fauteuils uniquement avec des professionnels de ces disciplines.
Né à Toulouse en 1911, Georges Fabre fut élève au Caousou avant de poursuivre à la faculté de droit des études achevées par un doctorat. Sa vie active, premier clerc dans une importante étude de notariat, ne léloigna jamais de Toulouse, cité à laquelle il voua un attachement constant. Issu dune famille profondément toulousaine son grand-père fut en 1871 maire de la ville pendant une brève période , il fut conduit tout naturellement à entrer dès 1958 dans une association uvrant pour la défense du patrimoine. Cest ainsi quil devint archiviste-bibliothécaire des Toulousains de Toulouse, fonction occupée pendant de nombreuses années avant daccéder à la vice-présidence.
La fréquentation des livres anciens et des vieux papiers ne léloignait guère des registres notariaux et cest à la pratique de ces documents que son comportement se forma peu à peu. Il en devint précis au point den être minutieux. Il fut aussi dune grande discrétion mais cela nétait quune façade derrière laquelle se cachait un esprit curieux du passé toulousain. Ses connaissances en histoire locale et en généalogie ne pouvaient que satisfaire ceux qui sadressaient à lui.
Discret, il létait sur sa famille. Jamais il ne parla des fonctions de son grand-père, de son frère professeur de médecine, de son oncle professeur de faculté, auteur dune remarquable encyclopédie sur la photographie.
Son penchant pour les vieux livres et les documents du passé nétait pas celui dun collectionneur. Il trouvait là matière à réflexions et à interrogations. Cela le conduisit à rédiger quelques articles où se mêlaient thèmes juridiques et littérature.
Ainsi, dans les pages quil rédigea sur la décollation du duc de Montmorency à Toulouse en 1632, il essaya, après dautres, de préciser le mode dexécution : coutelas, hache, épée, doloire. Il sappliqua à revoir tout ce qui avait été écrit sur le sujet, depuis les Mémoires de Puysségur jusquà lHistoire du parlement de Dubedat, sans oublier les machines rudimentaires figurant sur des gravures de Georges Penez, dHenri Aldegrever ou de Lucas Cranach au XVIe siècle, tout en critiquant les invraisemblances de limage donnée par Thomas Alboui au XIXe siècle. Létude de Georges Fabre, réfléchie et longuement argumentée, laissera cependant planer un doute sur la réponse à la question posée.
Ce doute, il la cultivé également dans laffaire du suicide de Marc-Antoine Calas, objet dun court article développant les thèses de plusieurs auteurs partageant des opinions contraires.
Il sintéressa aussi aux séjours toulousains de la famille de Montijo qui, à Paris, rencontrera Prosper Mérimée, Mérimée qui va tenir une place importante dans une étude traitant des rapports de cet inspecteur général des monuments historiques avec Alexandre Du Mège. Cela commence en 1834 lorsque Mérimée part en voyage dans le Midi, voyage le conduisant à Narbonne, Carcassonne et Toulouse. Dans notre ville, il va rencontrer le marquis de Castellane, Léonce de Lavergne et Alexandre Du Mège. Cest lépoque des discussions sur les bas-reliefs découverts à Nérac. Cest aussi celle de laffaire Du Mège dans laquelle Mérimée va se trouver engagé et il se prononcera pour lauthenticité des Tétricus. Dans lhistoire de cette mystification, Georges Fabre traite des correspondances échangées entre Mérimée, Du Mège et Ludovic Vitet. Notre confrère retrouvera par ailleurs Mérimée et Du Mège à léglise Saint-Nazaire de Carcassonne où la destination dune dalle funéraire donna libre cours à limagination de larchéologue toulousain.
Je ne citerai quun autre écrit de Georges Fabre, celui traitant des amitiés qui liaient le poète Pierre Paschal à Ronsard, étude qui nous convie à rencontrer dautres poètes et aussi quelques musiciens dans la cité toulousaine de la Renaissance.
Lorsque lâge et létat de sa santé léloignèrent des sociétés qui lavaient accueilli, notre confrère se retira dans un lieu de retraite du quartier de la Dalbade, proche de son ancien domicile. Cest là que cet esprit curieux, vif et quelquefois critique, sest éteint. Nous garderons de lui le souvenir dun homme dune parfaite civilité et dune grande discrétion, une discrétion qui masquait son savoir.
André HERMET »
La Présidente remercie André Hermet et rappelle que son grand âge avait éloigné Georges Fabre de nos séances depuis quelques années. Tous ceux qui lont connu se souviennent en effet de sa très grande discrétion et de sa modestie.
La parole est à Henri Pradalier pour une communication consacrée à Saint-Sernin gothique, publiée dans ce volume (t. LXIII, 2003) de nos Mémoires.
La Présidente
remercie Henri Pradalier en faisant remarquer que la plupart des chapiteaux du XIIIe
siècle montrent une influence des modèles cisterciens assez importante, mais que
lon ne peut certainement pas parler à leur propos de médiocrité.
Pour Daniel Cazes, en
dehors de toute question de datation, les étages supérieurs du clocher de Saint-Sernin
ne sont en rien gothiques, alors que le baldaquin manifeste au contraire de façon très
évidente larrivée de lart du Nord. Les deux niveaux supérieurs du clocher,
dont Henri Pradalier a bien montré la parfaite harmonie avec les premiers niveaux romans,
empruntent la forme de leurs arcs en mitre à larc cuspidien romain. Plusieurs
hypothèses sont possibles quant à la source dinspiration. Un monument romain
encore visible à cette époque pouvait associer arcs cuspidiens et effets de bichromie
dus à lassociation de la pierre et de la brique. Le relais avec lart antique
a pu également être assuré par lart de lautre côté des Pyrénées et
lon pense en
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 248
particulier aux tours mudéjares de
lAragon. Enfin, larc cuspidien est particulièrement présent dans les
sarcophages antiques de Rome, plus généralement dItalie, mais également dans le
groupe des sarcophages du Sud-Ouest de la Gaule : cest un sarcophage de ce
type, avec arcs en mitre, qui est justement réutilisé au Moyen Âge pour le tombeau dit
du comte Taillefer.
Henri Pradalier est
daccord pour considérer que les formes ne sont pas gothiques, et que ce nest
que la hauteur de louvrage et la verticalité quelle lui confère qui
rattachent le clocher à larchitecture gothique.
Après avoir rappelé
que des chapiteaux semblables à ceux des parties hautes du clocher existaient dans des
édifices datés vers 1150, Maurice Scellès dit que rien ninterdirait, de ce point
de vue, de situer leur construction avant le XIIIe siècle. Il sétonne
surtout que rien ne trahisse à cet endroit une campagne « gothique », ce qui
nest le cas daucune autre intervention du XIIIe siècle à
Saint-Sernin, quelle que soit la qualité, ou la médiocrité, de la sculpture. Henri
Pradalier souligne néanmoins que le dessin qui accompagne le récit de la croisade prouve
que les deux derniers étages, qui ne sont pas représentés, sont postérieurs à
1270.
Christophe Balagna note
que lallongement de la corbeille est en faveur du XIIIe siècle. Il
ajoute quà linverse du baldaquin, uvre dartistes venus du Nord de
la France, les arcs en mitre ont sans doute été réalisés par des artistes locaux
habitués à la construction en briques, le matériau étant probablement à
lorigine de la forme. Maurice Scellès fait cependant remarquer que la très grande
majorité des constructions en briques des XIIe et XIIIe siècles
ont recours à larc en plein cintre ou brisé.
Nelly
Pousthomis-Dalle ayant demandé quelle datation serait attribuée aux chapiteaux des
derniers étages du clocher sils étaient trouvés hors de tout contexte, Henri
Pradalier convient que lon serait contraint à une fourchette très large allant de
1150 à 1250.
Patrice Cabau rappelle
que Bernard Guy, en établissant son catalogue des évêques de Toulouse, mentionne la
reconnaissance du tombeau de saint Saturnin en 1258. Puis il se demande si le clocher avec
ses cinq niveaux était effectivement reproduit sur la châsse au moment de sa mise en
place le 25 juin 1284. À propos du baldaquin, il sinterroge sur larticulation
entre la base de celui-ci et le sol roman du déambulatoire. Par ailleurs, Bernard Guy ne
fait pas état de la crypte inférieure et la datation par les blasons ne tient pas :
les armoiries des abbés ne sont en effet pas connues et ne peuvent être associées
clairement à celles des Montaut de Toulouse. Patrice Cabau souligne encore
léventuelle relation qui pourrait être recherchée entre le creusement de la
crypte inférieure et le chemisage des piliers de la croisée. Pour Henri Pradalier, si la
crypte inférieure ne peut être datée par les blasons, le style de la sculpture et de
larchitecture la situent néanmoins vers 1320 au plus tard.
La Présidente rappelle que la séance publique se tiendra le samedi 22 mars 2003 à 16 heures, avec une conférence de Bruno Tollon et Louis Peyrusse sur lHôtel dAssézat.
Prenant la présidence de la séance, le Directeur donne la parole au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal de la séance du 17 décembre dernier, qui est adopté.
À propos des travaux
réalisés dans les bâtiments du collège de
Périgord, Nelly Pousthomis-Dalle indique que notre Présidente et elle-même se
sont rendues en délégation auprès de M. Idrac, chargé du suivi des travaux pour
lUniversité. Après avoir insisté sur la nécessité dun suivi
archéologique des travaux, elles ont obtenu lautorisation pour notre consur
Anne-Laure Napoléone daccéder au chantier pour faire étude et relevés.
On fait cependant
remarquer que lUniversité a perdu une occasion de dorer, ou redorer, son blason, en
rendant à ce haut lieu de lUniversité de Toulouse une dignité à la hauteur de
son histoire. La faculté de Droit de Tarragone a su le faire et les bâtiments anciens
ont été relevés et étudiés avant dêtre mis en valeur et dêtre ouverts
à la visite alors même que les locaux sont occupés par lUniversité.
On évoque également
la maison de la rue Valade, sur le site de lUniversité des Sciences sociales,
longtemps laissée à labandon, dépouillée de ses cheminées, de ses parquets, de
ses décors puis « restaurée » à grands frais.
On rappelle par
ailleurs que lancien collège de Périgord a été successivement occupé par
lInstitut dart, jusquà son transfert au Mirail, par la Direction
régionale des Affaires culturelles, avec en son sein le Service régional de
lInventaire et la Conservation régionale des Monuments historiques, et par
lAgence des Bâtiments de France
Un comble !
Une discussion
sensuit sur le partage des responsabilités entre les différents acteurs. Il est
décidé de reprendre le débat au cours dune prochaine séance.
SÉANCE DU 21 JANVIER 2003
Présents : Mme Pradalier-Schlumberger, Présidente, MM.
Coppolani, Directeur honoraire, Cazes, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour,
Bibliothécaire-Archiviste, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-adjoint,
Mmes Napoléone, Pousthomis-Dalle, Sudre, MM. Bordes, Boudartchouk, Gilles, le Père
Montagnes, MM. Pradalier, Prin, Mgr Rocacher, M. Vézian, membres titulaires, Mmes
Andrieu, Bayle, Boussoutrot, Débax, Félix-Kerbrat, Fraïsse, Jiménez, Marin, Stutz,
Watin-Grandchamp, MM. Burroni, Garland, Gironnet, Macé, Manuel, Molet, Rebière,
Salvan-Guillotin, Testard, membres correspondants.
Invitée : Mlle Martine Rieg.
La Présidente ouvre
la séance et annonce le report de la séance publique au samedi 22 mars.
La Compagnie se
constitue en Assemblée générale et la Présidente présente le rapport moral de
lannée 2002. La parole est ensuite au Trésorier pour le rapport financier.
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 249
Une discussion
sengage sur la nécessité de réduire les dépenses ou daugmenter les
revenus, et en particulier sur la cotisation et le coût des Mémoires. Il
est procédé au vote : quitus est donné au Trésorier pour sa bonne gestion. La
Présidente met au vote la proposition daugmentation du montant de la cotisation à
45 euros : la proposition est adoptée. Laugmentation du prix public des Mémoires
à 40 euros et de labonnement privé à 35 euros est également entérinée.
Lordre du jour
appelle les élections statutaires qui concernent cette année les fonctions de Directeur,
de Trésorier et de Secrétaire-adjoint. Les trois titulaires sont réélus dans leurs
charges.
La Présidente souhaite la bienvenue à Patrick Gironnet, récemment élu membre correspondant et qui prend séance ce soir. Puis elle annonce que notre confrère Jean Catalo propose aux membres de notre Société une visite du chantier de fouilles du palais de Justice le vendredi 31 janvier, et elle demande à ceux qui sont intéressés de bien vouloir sinscrire sur la feuille qui est mise en circulation.
Mlle Sudre ayant fait état de la fouille en cours au Jardin des plantes, Henri Molet confirme lintérêt des structures mises au jour : un lotissement médiéval et une rue dont le tracé au moins persiste jusquau XVIe siècle. Mlle Sudre se rappelle avoir vu les vestiges dune chapelle, lors de travaux effectués dans le muséum.
La Présidente donne la parole à Jean-Luc Boudartchouk pour la communication du jour : De la Toulouse wisigothique à la Toulouse mérovingienne : archéologie et histoire.
La Présidente
remercie Jean-Luc Boudartchouk de cette belle présentation et lui demande quelle
explication peut être proposée pour ce vide archéologique et sil faut penser que
certains quartiers ont été abandonnés à lépoque mérovingienne. Jean-Luc
Boudartchouk indique que, sur le site du couvent des Carmes, lon attendait un état
correspondant à la voie mérovingienne et que cest en fait la seule période qui
fait défaut. Un curetage postérieur pourrait certes être supposé, curetage qui aurait
entraîné la disparition des couches, mais on devrait dans ce cas les retrouver en
certains endroits, ce qui nest pas le cas. Il semble bien quil y ait un
déclin politique, économique et financier de la ville, accompagné dune chute
démographique, ce que laisse entendre dune certaine manière le fait quil
ny ait eu quune seule fondation déglise à Toulouse à lépoque
mérovingienne.
Daniel Cazes
layant interrogé sur la période wisigothique, Jean-Luc Boudartchouk admet avoir
été sans doute un peu trop rapide dans son exposé. La période se manifeste par une
grande richesse archéologique qui, avec les textes nombreux dont on dispose, montre une
ville extrêmement prospère et en pleine expansion. Le contraste est tel avec la période
suivante quil semble que la conquête franque provoque une rupture complète.
Françoise Stutz voudrait nuancer la valeur probante des objets retrouvés en fouille,
dont la datation nest pas toujours précise. Mais il faut surtout se rappeler que
lapport des Mérovingiens au sud de la Loire se situe principalement dans les grands
domaines ruraux et quil est au contraire très limité dans les villes. Jean-Luc
Boudartchouk en convient en soulignant que la question nest en effet pas celle de la
présence des Mérovingiens dans la région, incontestable, mais plutôt celle des
conséquences sur la cité de la victoire des Francs.
Henri Pradalier demande
si lon peut évaluer le nombre des Francs installés au sud de la Loire et sil
sagit principalement de garnisons. Jean-Luc Boudartchouk confirme que lon a
affaire à des garnisons de quelques dizaines de personnes. Henri Pradalier demande alors
si lon ne peut imaginer que la culture du Ve siècle, et son expression
matérielle, na de ce fait pu se maintenir au siècle suivant. Jean-Luc Boudartchouk
dit que lon a limpression à travers les fouilles dune complète
éradication de la culture wisigothique. Il subsiste certes quelques problèmes de
datation, mais, pour faire simple, on constate à Toulouse la disparition complète
dobjets que lon connaît en revanche pour la même période en Septimanie ou
dans lEspagne wisigothique, voire à la périphérie de lancien royaume de
Toulouse : à Cahors, en Rouergue
Françoise Stutz pense quil convient de
rester très prudent quant à linterprétation technico-culturelle des objets :
on la dailleurs bien vu lors de la fouille de Saint-Pierre-des-Cuisines. Les
objets sont du reste peu nombreux et lon ne dispose donc pas encore de séries, ni
de typologies complètement établies.
Henri Pradalier
voudrait savoir ce quil en est du culte de saint Rémy. Pour Jean-Luc Boudartchouk,
la fondation de Saint-Rémésy par saint Germier, un évêque légendaire qui aurait
rencontré Clovis, relève dune Antiquité reconstruite au Moyen Âge.
Patrice Cabau évoque
le site de Larrey et les dépendances du palais wisigothique qui y ont été retrouvées,
et il voudrait savoir si les archéologues ont eu limpression que les Francs avaient
occupé les lieux. Jean-Luc Boudartchouk dit que lon na aucune trace qui
permette de penser que le bâtiment perdure au-delà du Ve siècle et que, pour
ce quil en sait, on a surtout limpression dune démolition suivie
dune récupération systématique des matériaux.
Patrice Cabau note que
lors des partages successifs du royaume franc, Toulouse figure pourtant parmi les
capitales. Il sagit pour Jean-Luc Boudartchouk dun rôle à chaque fois
éphémère et il affirme quil ny a pas de continuité de statut de la cité.
Le duc de Toulouse consacre certes une église, ce qui signifie sans aucun doute que la
ville nest pas déserte, mais cela est sans commune mesure avec lactivité que
lon connaît pour le Ve siècle. Quant au site du Château-Narbonnais,
sur lequel linterroge Patrice Cabau, Jean-Luc Boudartchouk indique que les fouilles
actuelles nont rien donné pour lépoque mérovingienne.
La parole est à Nicole Andrieu qui présente à la Compagnie des éléments du retable en albâtre de Montgeard récemment classés au titre des Monuments historiques :
« Léglise Notre-Dame de lAssomption de Montgeard conserve les différents éléments épars dun retable dalbâtre anglais comparable à ceux qui se trouvent encore complets dans léglise de Nailloux, ou au Musée des Augustins provenant de léglise de Rabastens. En 1914, deux panneaux de ce retable dédié à la Vierge, le Couronnement de la Vierge et sainte Catherine, ont été classés parmi les Monuments historiques, oubliant pour
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 250
une raison inconnue deux autres panneaux et les débris dun troisième. Ces éléments ont été maintes fois signalés par les historiens qui se sont intéressés à Montgeard. Loubli a été réparé en janvier 2002 par le classement de la totalité des panneaux.
Pour mémoire, les deux premiers panneaux classés en 1914 :
- le Couronnement de la Vierge, selon un schéma très souvent reproduit dès la première moitié du XVe siècle (1) La Vierge est couronnée par les trois personnes de la Trinité : à droite le Père, reconnaissable à son vêtement, à gauche le Christ enveloppé dans son linceul, au centre le Saint Esprit. Le panneau est amputé des deux anges qui se trouvent habituellement aux pieds de la Vierge ; il conserve des traces denduit jaune et rouge.
- Sainte Catherine, statue dextrémité de retable, de manière générale, le plus souvent associée à sainte Marguerite, avec quelques traces de dorure.
MONTGEARD, retable en albâtre,
panneau de la Trinité.MONTGEARD, retable en albâtre,
panneau du Couronnement de la Vierge.Deux autres panneaux se trouvent intégrés aux murs de léglise :
- lAssomption, la Vierge y apparaît couronnée dans une mandorle portée par quatre anges ; la partie supérieure tronquée ne laisse deviner quune partie du buste de Dieu le Père : traditionnellement, il est entouré de deux anges musiciens. Agenouillé aux pieds de la Vierge, saint Thomas tient la ceinture de la Vierge que celle-ci lui aurait envoyée pour convaincre lincrédule de la réalité de son Assomption. Ce panneau, bien que très mutilé, conserve lui aussi des traces de polychromie, toujours à base de bleu azurite, de vert, de rouge vermillon et dor, selon une symbolique strictement définie et inspirée des enluminures.
- la Trinité, intégrée de manière plus insolite dans le dosseret de la chaire : cette scène associe la représentation de Dieu le Père tenant au-dessus de la croix un linge contenant les âmes des élus, comme Abraham recevant les âmes dans son sein, tel quil nous est présenté dans lévangile de Luc, dans lépisode du pauvre Lazare, et la Trinité sous forme du Trône de grâce , une image créée probablement à Saint-Denis au XIIe siècle, où le Père porte la croix de son Fils, le colombe de lEsprit Saint posée au sommet de la croix. Ici, la colombe est absente, remplacée par les âmes dans un linge. W. L. Hildburgh (2), qui constitua la collection dalbâtres du British Museum, voyait dans cette association une étape dans lélaboration de la représentation du Trône de Grâce (3), à la fin du XIVe et au début du XVe siècle. De part et dautre de Dieu le Père, des anges agitent des encensoirs. Quatre anges autour de la croix recueillent le sang du Christ dans des calices. Ce panneau de la Trinité (0,53 m de haut contre 0,38 m pour les autres) était sans
M.S.A.M.F., t. LXIII, p. 251
doute le centre du retable, flanqué des panneaux de lAssomption et du Couronnement, les saintes Catherine et Marguerite formant les extrémités. Il est fréquent dans ces retables consacrés à la Vierge que deux autres panneaux figurent lAnnonciation et lAdoration des Mages. Des débris épars pourraient provenir de ces panneaux disparus.
Pour ce qui est de la datation, la raideur des attitudes, lallongement des silhouettes, des mains et des pieds, les yeux globuleux, la différence de hauteur entre le panneau central et les autres panneaux plaident pour la période 1420-1460.
Nicole ANDRIEU »
1. DAngleterre en Normandie, Sculptures dalbâtre du Moyen Âge, catalogue de lexposition des musées de Rouen et dÉvreux, 1998.
2. W. L. HILDBURGH, « English alabaster tables of about the third quarter of the fourteen century », dans Art Bulletin, 1950 b, t. XXXII.
3. Émile MÂLE, Lart religieux du XIIe siècle en France, Paris, Armand Colin, 1966, p. 182.
La Présidente remercie Nicole Andrieu
et senquiert du sort du fragment qui nest pas encore fixé. Nicole Andrieu dit
quil serait sans doute souhaitable de réunir tous ces morceaux du retable.
Jean-Louis Rebière
ayant demandé si les retables de ce genre étaient nombreux dans la région, Nicole
Andrieu dit quils ne sont pas rares, mais quelle ne peut répondre avec
précision. Guy Ahlsell de Toulza cite les deux retables de Rabastens : celui de
Notre-Dame-du-Bourg, aujourdhui au Musée des Augustins, est un des mieux
conservés ; un second se trouvait dans la chapelle des Vertus, dont on sait par un
texte de 1860 quil était placé dans un cadre de bois, malheureusement vide à
cette époque. Nicole Andrieu y ajoute celui de Nailloux, complet avec ses sept panneaux
illustrant la Passion du Christ.
La Présidente voudrait
avoir des précisions sur déventuelles comparaisons stylistiques. Nicole Andrieu
répond que, de ce point de vue, le retable de Nailloux paraît plus tardif. Jean-Louis
Rebière ayant fait remarquer labsence du Saint Esprit, nécessaire pour une
représentation de la Trinité, Nicole Andrieu admet que le relief puisse représenter un
Trône de Grâce.
La Présidente donne la parole au Secrétaire général pour la lecture du procès-verbal de la séance du 7 janvier 2003, qui est adopté.
© S.A.M.F. 2002-2003. La S.A.M.F. autorise la reproduction de tout ou partie des pages du site sous réserve de la mention des auteurs et de lorigine des documents et à lexclusion de toute utilisation commerciale ou onéreuse à quelque titre que ce soit.