Société Archéologique  du Midi de la France
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Mémoires
de la Société Archéologique
du Midi de la France

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Tome XLIX (1989)


 

Bulletin de l'année académique
1988-1989

 

    Cette édition électronique, revue et corrigée,  respecte la mise en page de l'édition imprimée (Bulletin de l'année académique 1988-1989, dans Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. XLIX, 1989) dont nous indiquons la pagination. (Mise en page html : Martin Menu, septembre 1999.)


M.S.A.M.F., page 245

 

Séance du 22 novembre 1988

Présents : MM. Leblanc, Président, Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier ; Mmes Labrousse, Cazes, Mlle Sudre, MM. Bernet, Cabau, Georges Fabre, Lassure, Latour, Péaud-Lenoël, l'abbé Rocacher, Scelles.
Excusés : MM. Cazes, Fouet, Gérard, Ménard.

    Le Président annonce que la visite des chantiers de fouilles de l'hôpital Larrey aura lieu le 13 décembre sous la conduite de M. Raphaël de Filippo, responsable de cette opération archéologique.

    M. Coppolani fait savoir à la Société que des rayonnages ont été posés pendant l'été et que les ouvrages étrangers y ont été rangés. M. Coppolani présente ensuite la correspondance manuscrite. Y figure une lettre des Amis du Vieux Cordes, qui sont soucieux de sauver l'ensemble de l'agglomération, dont la périphérie est souvent délabrée et ruinée. L'abbé Jean Rocacher offre à la Société un exemplaire de sa thèse. Le Président l'en remercie et donne la parole à M. Latour pour la communication du jour : L'administration et la gestion d'une confrérie sous l'Ancien Régime, qui sera publiée dans le t. XLIX des Mémoires.

    Sont ensuite abordées les questions diverses.

 

Séance du 6 décembre 1988

Visite de l'exposition de Musée Paul-Dupuy consacrée à l'orfèvrerie, présentée par M. Chassaing, Commissaire-priseur, son organisateur.

 

Séance du 13 décembre 1988

Présents : MM. Leblanc, Président, Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général ; Mmes Labrousse, Merlet, Mlle Sudre, MM. Gilles, Latour, l'abbé Rocacher, Membres titulaires ; Mlle Éclache, MM. Cabau, Hermet, Loncan, Scelles, Vézian, Membres correspondants.
Excusés : MM. Cazes, Secrétaire Adjoint, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Mme Cazes.

    La séance s'est tenue exceptionnellement sur le champ de fouilles de l'ancien hôpital militaire Larrey.

    Sous la conduite de M. de Filippo, directeur des fouilles, les membres présents ont pu examiner successivement les diverses constructions mises au jour.

    D'abord, le rempart antique, conservé sur toute sa hauteur sur une longueur d'environ 50 m avec sa structure interne révélée par l'arrachement du parement de briques extérieures, et deux tours, l'une arasée au niveau de ses fondations, l'autre conservée dans toute sa hauteur mais sur un quart seulement de sa circonférence.

    Puis, au centre de la fouille, une grande construction en galets et en briques remontant sans doute au Bas Empire, adossée au rempart et se poursuivant probablement sous la rue des Blanchers jusqu'à la Garonne proche, conservée sur un mètre de hauteur environ et dont la fonction reste problématique. Par-dessus cet édifice, des constructions médiévales ont laissé de nombreuses traces ; elles ont été démolies au XVIIe siècle par les religieuses de Notre-Dame, qui installèrent là leur potager. Les fouilles ont, en outre, livré un abondant matériel archéologique remontant à l'Antiquité (une monnaie en particulier) et surtout aux XIVe et XVe siècle, avec notamment des poteries, des verres, quelques monnaies, divers objets (regroupés dans une salle de l'hôpital). Des traces d'un habitat pré-romain apparaissent au fond de la fouille.

    Les questions posées par plusieurs membres ont permis de préciser plusieurs points : des analyses de fragments de matériaux sont en


M.S.A.M.F., page 246

cours pour confirmer ou non l'hypothèse de la construction du rempart au Ier siècle ; Mlle Sudre a offert la collaboration du Muséum pour ce travail. Contrairement à ce qui avait été annoncé lors de réunions avec les officiels, il semble que non seulement la totalité des substructions découvertes sera détruite pour permettre l'exécution du programme de constructions prévu sur leur emplacement, mais que le rempart lui-même serait masqué, au moins partiellement, par un bâtiment.

    Aucune hypothèse n'a, en revanche, été avancée sur la destination du grand bâtiment du Bas-Empire.

 

Séance du 17 janvier 1989

Présents : MM. Leblanc, Président, Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Cazes, Secrétaire Adjoint ; Mmes Labrousse, Noé-Dufour, MM. le général Delpoux, le général Ménard, l'abbé Rocacher, Manière, Latour, Bernet, Hermet, Georges Fabre, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Cabau, Scelles, Blaquière, Gérard.
Excusé : M. Tollon.

    En ouvrant la séance, le Président souhaite une bonne année à chacun et rappelle la mémoire du professeur Michel Labrousse, Président de notre Société décédé le 12 janvier 1988.

    Après lecture du compte rendu de la visite du 13 décembre sur le chantier de fouilles de l'ancien hôpital Larrey, il est demandé que la Société émette un vœu auprès de la Municipalité afin que le rempart romain mis au jour soit conservé et mis en valeur. Ce vœu sera porté à la connaissance de la presse. Il semble que cette partie du rempart ait été classée au titre des Monuments Historiques ; confirmation doit être demandée. Par ailleurs, M. Leblanc rappelle que M. Hersant, Premier Adjoint au Maire de Toulouse, a déclaré que la courtine et les tours romaines de Larrey seraient respectées et mises en évidence. Il est suggéré que des renseignements à ce sujet soient demandés auprès de la Direction des Antiquités Historiques du Midi-Pyrénées. Enfin, la Société apprend que la question du classement ou de l'inscription des bâtiments des XVIIe et XVIIIe siècles de l'ancien hôpital Larrey est à l'ordre du jour de la prochaine COREPHAE de Midi-Pyrénées.

    M. Coppolani lit ensuite la correspondance manuscrite. Le Secrétaire Adjoint fait part de l'abondante correspondance imprimée.

    L'abbé Rocacher donne lecture du texte du vœu de notre Société concernant le rempart romain de l'hôpital Larrey :

    « Allons-nous voir disparaître le rempart romain du site Larrey ? Comme beaucoup d'autres Toulousains, les membres de la Société Archéologique du Midi se sont rendus récemment sur le site de l'ancien hôpital Larrey. Ils ont été vivement intéressés par les explications du responsables des fouilles, M. Raphaël de Filippo, qui leur a magistralement démontré l'intérêt historique et archéologique des découvertes faites par son équipe. Ils ont particulièrement apprécié la mise au jour d'un important élément du rempart romain, entre deux tours, sur une cinquantaine de mètres de longueur.

    La Société Archéologique du Midi, réunie au siège habituel de ses séances, le 17 janvier 1989, se félicite donc des travaux accomplis pour favoriser une meilleure connaissance de l'histoire toulousaine. Mais en même temps elle tient à manifester ses inquiétudes devant les perspectives d'aménagement du site. Malheureusement, les informations qui lui ont été communiquées lui font redouter le pire. L'élévation des constructions contre le rempart romain équivaudrait à une destruction pure et simple.

    Considérant que, dans un passé récent, les pouvoirs publics ont laissé gommer sans concertation préalable d'importants témoins de notre patrimoine, archéologique et monumental, la Société Archéologique du Midi demande à être consultée avant toute mise en œuvre architecturale du site Larrey. »  

    Il sera transmis à la presse avec copie à la D.R.A.C., au Maire, au Directeur des Antiquités Historiques, au Préfet, au Président du Conseil Général et aux parlementaires.

    Le Président donne ensuite la parole à M. Gérard pour la communication du jour sur les activités de la Conservation des Antiquités et Objets d'Art de la Haute-Garonne

    Divers dossiers ont été présentés à la COREPHAE de Midi-Pyrénées concernant :

- le bassin du Radoub (annexe technique du canal du Midi) à Toulouse,
- les trésors des églises d'Aure en Comminges et de Saint-Béat,
- des peintures des XIVe et XVIe siècles découvertes dans l'église de Pechbonieu représentant l'arrestation du Christ au Jardin des Oliviers, le Christ en Croix, un décor géométrique multicolore...
- une table d'autel romane à Clermont-le-Fort ; il faut encore signaler ici une très belle Vierge baroque placée dans le chœur et une statue en bois peint de Notre-Dame-des-Bois.
- le mobilier du sanctuaire Notre-Dame de l'Aouach au Fauga
- certains objets mobiliers de l'église de Cazères (à la demande de M. Manière).

    M. Leblanc félicite M. Gérard pour son action exemplaire. M. Gérard attire l'attention sur l'avenir des églises. Il pense qu'il est dès maintenant nécessaire d'y réfléchir et de créer des centres de rassemblement pour les objets religieux si l'on veut éviter leur disparition.

 

Séance du 24 janvier 1989

Présents : MM. Leblanc, Président, Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Fouet,


M.S.A.M.F., page 247

Bibliothécaire Archiviste, Cazes, Secrétaire Adjoint ; Mmes Labrousse, Cazes, Noé-Dufour, Sire, MM. Latour, Hermet, Bernet, Fabre, Pousthomis, Loncan, Cabau, Scelles, l'abbé Rocacher, Blaquière, Tollon.
Excusés : Le général Ménard, M. Manière.

    Le procès verbal de la séance précédente est lu et adopté. M. Coppolani fait état de la correspondance manuscrite. Le Secrétaire Adjoint présente les ouvrages reçus par la Société. M. Fouet fait part du don, par Mme Allègre, au nom de son époux décédé, de quatre ouvrages à la bibliothèque de la Société :

- G. Gromort, L'architecture et la sculpture en France de la Révolution à nos jours, Paris, s.d.
- H. Focillon, L'art des sculpteurs romans, Paris, 1931.
- C. Enlart, Manuel d'archéologie française, 1ère partie, t. I et II, Paris, 1927-1929.
- E. Mâle, L'art religieux de la fin du Moyen Âge en France, Paris, 1931.

    Le Président enverra une lettre de remerciement à Mme Allègre.

    Les élections statutaires pour le renouvellement du Trésorier, du Directeur et du Secrétaire Adjoint ont lieu ; ces derniers sont réélus à l'unanimité des douze membres votants. MM. Pradalier, Tollon et Cazes présentent les rapports sur les candidatures à des places de membres correspondants de MM. Christian Péligry, Jean Nayrolles et Jean Catalo. Par vote des membres titulaires, les trois candidats sont élus à l'unanimité.

    G. Ahlsell de Toulza fait le rapport financier pour l'année 1988 ; le rapport est adopté.

    Le Président donne la parole à M. Tollon pour la communication du jour consacré aux restaurations en cours des façades sur cour de l'hôtel d'Assézat.

    Le nettoyage de ces façades par ruissellement a mis en valeur leur polychromie et, notamment, la curieuse disposition des pierres de taille par rapport à l'appareil de briques. Après cette découverte, l'Architecte en Chef, M. Voinchet, et le Conservateur des Monuments Historiques, Mme Tomasin, ont demandé un complément d'étude. L'enjeu est important pour le monument le plus représentatif de la Renaissance à Toulouse. La polychromie résultant du désordre dans lequel les pierres sont disposées vient brouiller l'ordonnance architecturale et il est envisagé de remplacer les pierres « gênantes » par de la brique et vice-versa. Les documents graphiques établis par César Daly ont souvent rectifiés un état original qui comportait ce désordre. De même, contrairement à ce que l'on voit sur certain documents, les travées serliennes n'ont jamais été ouvertes à l'hôtel d'Assézat. Au moment de la construction de l'hôtel, Vignole et Philibert Delorme n'avaient pas encore publiés leurs traités théoriques. Le système de la régularité de l'appareil n'existaient pas sur les chantiers de cette période.On ne peut donc aujourd'hui refaire cet hôtel avec la régularité du XVIIe siècle et il paraît imprudent d'utiliser des critères tardifs pour sa restauration. Pourquoi ne pas respecter tout simplement les différents états du monument ?

    M. Leblanc remercie M. Tollon de nous avoir appris à regarder l'hôtel d'Assézat et juge que les transformations entreprises sont regrettables. M. Tollon précise que les travaux sont arrêtés et que l'on procède pour l'instant au nettoyage et au remplacement des pierres malades. Une travée « expérimentale » a été choisie pour commencer la restauration, et une commission de spécialistes a été nommée. Certains membres trouvent regrettable de faire des expériences sur le monument lui-même avec tous les problèmes de réversibilité que cela pose.

    Sont ensuite examinées des questions diverses.

    Il semble que le rempart de l'hôpital Larrey ne soit en rien protégé. Son inscription sera demandée lors d'une prochaine COREPHAE. D'autre part, le terrain a été cédé à un ensemble de promoteurs ; la Ville de Toulouse n'est plus concernée. Un bâtiment doit être appuyé contre le rempart. Il conviendrait que la Société engage le dialogue avec ces promoteurs.

    Plusieurs membres expriment l'avis que c'est l'ensemble du rempart antique de Toulouse qui doit faire l'objet d'une protection.

 

Séance du 14 février 1989

Présents : MM. Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Ahlsell de Toulza, Trésorier ; MM. Bernet, Fabre, Lassure, Latour, l'abbé Rocacher, Membres Titulaires ; Mmes Cazes, Noé-Dufour, MM. Cabau, Catalo, Loncan, Nayrolles, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Scelles, Membres correspondants.
Excusés : MM. Leblanc, Président, Cazes, Secrétaire Adjoint, Gérard. 

    Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. Le Secrétaire Général présente la correspondance manuscrite et imprimée.

    Après audition du rapport de M. Loncan, Aurel Bongiu, Conservateur à l'Inventaire Général de Midi-Pyrénées, est élu à l'unanimité.

    La parole est ensuite donnée à B. Pousthomis pour sa communication : « Le Castlar, commune de Durfort (Tarn), fouille d'un village déserté du Bas Moyen-Âge ».

    Situé dans l'une des premières vallées de la Montagne Noire, en bordure du Lauragais (plaine de Revel), le Castlar est le nom d'un éperon calcaire qui porte les vestiges du castrum médiéval de Durfort. Le site fait l'objet depuis 1981 d'une fouille archéologique programmée, sous la direction de B. Pousthomis.


M.S.A.M.F., page 248

    Les documents d'archives, que viennent compléter les données de la fouille archéologique, ne permettent pas actuellement de faire remonter l'origine de ce village au-delà de la fin du XIIe siècle, la période d'occupation intensive couvrant les XIIIe et XIVe siècles. Co-seigneurie partagée entre l'abbé de Sorèze et le seigneur de Roquefort, le sort de Durfort est étroitement lié à celui du château de Roquefort. Durfort est mentionnée en 1317 comme paroisse du diocèse de Lavaur nouvellement créé. L'exploitation de moulins foulons dès le début du XIIIe siècle marque très tôt la vocation artisanale de cette communauté. Nous sommes mal renseigné sur l'abandon de ce site de hauteur au profit du village actuel en fond de vallée, mais il semble s'être effectué progressivement dans la deuxième moitié du XIVe siècle, période de mutation troublée par le Guerre de Cent Ans et la peste.

    Ce bourg fortifié d'environ 110 m par 40 m présente une organisation rationnelle adaptée au site accidenté. Une première défense, composée de ravins couronnés d'un rempart, ceint la majeure partie du site. Le point culminant est occupé par une tour elle-même protégée par une seconde enceinte et un fossé sec. L'ensemble du village s'organise à l'intérieur du premier rempart et à l'extérieur, sur le flanc nord-ouest, sous la forme d'un faubourg. Le seul point d'eau potable actuellement connu est une source aménagée hors les murs.

    Les bâtiments sont partiellement creusés dans le massif calcaire pour constituer deux parois, les deux autres étant construites en pierres sèches et en terre. Seules les défenses (tour et remparts) sont bâties en blocs de calcaire équarris liés au mortier. Les fouilles ont permis d'étudier des bâtiments d'habitation et des zones d'activités implantées à l'intérieur et à l'extérieur de l'enceinte. Les maisons, peut-être à étage et couvertes en tuile canal, ont une surface au sol de 17 à 21 m². Une cour leur est adjointe.

    Un des intérêts majeurs du site est la présence de bâtiments dont les fonctions sont liées au stockage et à l'emploi de céréales. Ainsi ont été étudiées un vaste grenier incendié à la fin du XIVe siècle, deux bâtiments de stockage à silos et une aire de grillage ou de torréfaction.

    L'analyse de la masse documentaire engendrée par cette fouille apportera une meilleure connaissance du cadre de vie des populations rurales du Lauragais aux XIIIe et XIVe siècles. De plus, le mobilier archéologique, riche en éléments métalliques et en poteries, permettra l'étude de séries et devrait apporter d'importantes informations sur la vie quotidienne et l'outillage au Bas Moyen-Âge.

    À la suite de la communication, l'auteur précise qu'une église dédiée à Saint-Étienne est attestée ; elle était dans le vallon voisin, mais son emplacement exact n'a pas été retrouvé. M. Fouet fait remarquer qu'il existe des analogies entre ce site et celui de Lespugue, en Comminges, qui reste à étudier.

    Questions diverses :
    La COREPHAE a recommandé l'inscription à l'Inventaire de la totalité des bâtiments non encore protégés de l'hôpital Larrey. Le même rapport propose le classement du rempart comme Monument Historique. Il est observé que d'autres parties du rempart sont également menacées : la partie visible par la tranche, qui jouxte l'ancienne chapelle de l'Inquisition abandonnée par les Réparatrices et qui n'est nullement protégée, pas plus que la chapelle elle-même, ainsi que la partie à découvert à l'angle des rues Bida et Saint-Jacques.

    Les travaux de restauration de l'hôtel d'Assézat ont repris depuis le 13 février ; une réunion des responsables a eu lieu au cours de la semaine précédente, mais les résultats n'en sont pas connus. La Société continuera de suivre ces deux questions.

 

Séance du 28 février 1989

Présents : MM. Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Cazes, Secrétaire Adjoint ; Mmes Cazes, Noé-Dufour, MM. Cabau, Catalo, Fabre, Lassure, Latour, Manière, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Rocacher, Vézian.
Excusés : MM. Leblanc, Président, Gérard, le général Ménard.
Invité : M. Villeval

    Le procès-verbal de la séance précédente est lu et approuvé.

    L'abbé Rocacher précise que la chapelle de l'Inquisition est inscrite à l'Inventaire supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 30 septembre 1988. Plusieurs membres pensent qu'il serait utile de réunir au sein de la Société une commission de réflexion sur le devenir du rempart romain, qui puisse proposer des projets d'aménagement afin de mieux le préserver. Il faut demander la protection de la totalité du rempart et suggérer à la Ville de Toulouse d'encourager les initiatives en faveur de sa mise en valeur.

    Le Directeur donne la parole à J.-M. Lassure pour la communication du jour sur le « site archéologique de L'Isle-Bouzon » (Gers)

    « Le site médiéval de Corné (XIe siècle-seconde moitié du XIIIe siècle) se trouve dans la vallée de l'Auroue, à 600 m au sud-ouest de L'Isle-Bouzon, castelnau établi sur une hauteur de la rive opposée et dont la charte de coutumes est de 1266. Il a été découvert au cours de l'hiver 1986-87 et fait depuis cette année l'objet de fouilles de sauvetage programmées.

    Une tranchée entreprise sur la parcelle 631 a fait apparaître les fondations larges d'environ 2,40 m d'une tour-salle de plan presque carré (9,55 m x 9,40 m). Elle a montré que cette tour était en partie protégée par un fossé qui débutait par un glacis en pente douce et dont le bord extérieur a été retrouvé à un peu plus de 21 m de son mur ouest. Ce fossé a été exploré jusqu'à une profondeur de 3 m. Après l'achèvement de la fouille de celui-ci, les recherches porteront sur la parcelle 629 où la présence de matériaux de construction et d'un grand nombre d'objets archéologiques semble indiquer l'existence d'une agglomération. »


M.S.A.M.F., page 249

Localisation cadastrale du site médiéval de Corné
(les parties en contrebas du site sont indiquées en grisé).

 

bouzon2.BMP (54450 octets)

    M. Pradalier remercie M. Lassure pour sa communication et lui demande quelle était la superficie interne de la tour ; il voudrait également savoir si l'on trouve des chaînages d'angle dans sa construction. M. Lassure précise qu'il n'y a pas de chaînage d'angle. M. Pradalier voudrait connaître la datation du monument. J.-M. Lassure la situe entre le XIe et le XIVe siècles. Le village a été créé vers 1250 à côté : il est donc probable de situer la construction de la tour avant l'installation du village. Des monnaies de Morlaas du XIIIe siècle ont été trouvées. Le site fut occupé de façon continue depuis la Préhistoire grâce à la présence d'un gué. M. Fouet suggère qu'une tour en bois a pu précéder la construction maçonnée. G. de Toulza pense que les tours en maçonnerie se répandent surtout vers la fin du XIIe siècle. A. Noé-Dufour constate l'importance de l'épaisseur des murs. À la demande de Q. Cazes, J.-M. Lassure précise qu'il a fait, pour l'avenir, une demande de fouille programmée pour ce site : les premières recherches ont un caractère purement exploratoire. Il faut essayer de percevoir l'organisation de ce village. Pour ce qui est des archives, J.-M. Lassure rappelle qu'on ne possède que la charte de coutumes et de fondation de L'Isle-Bouzon. A. Noé-Dufour précise que cette charte concerne uniquement le village, et non le site fortifié. J.-M. Lassure définit l'originalité de ce site par son abondance en matériel métallique. M. Fouet remarque que les céramiques du Moyen Âge sont de forme et de matière très variables. Il propose des comparaisons avec les céramiques de La Hillière. A La Hillière, on a trouvé 85 monnaies du XIVe siècle mais pas de céramiques vernissées. Il pense que l'étude de la céramique médiévale est très difficile à conduire : il y a beaucoup d'ateliers de potiers, mais leurs rayonnements sont très limités, contrairement à ce que l'ont sait pour l'Antiquité. Est ensuite abordée la question de la protection de la Manufacture des Tabacs.

 

Séance du 14 mars 1989

Présents : MM. Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Cazes, Secrétaire Adjoint, MM. Baccrabère, Gilles, Latour, Ménard, l'abbé Rocacher, Blaquière, Cabau, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Scelles, Vézian.
Excusés : M. Leblanc, Président, Mme Labrousse, M. Gérard.

    La séance est consacrée à la visite de l'exposition « Palladia Tolosa, Toulouse romaine », au Musée Saint-Raymond, sous la direction de M. Cazes, Conservateur du Musée, Mlle Ugaglia, Conservateur-Adjoint, et M. l'abbé Baccrabère, Conservateur du Musée archéologique de l'Institut Catholique.

 

Séance du 11 avril 1989

Présents : MM. Leblanc, Président, Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Cazes, Secrétaire Adjoint : Mmes Cazes, Noé-Dufour, Mlle Eclache, MM. Bernet, Blaquière, Bongiu, Cabau, Catalo, le général Delpoux, G. Fabre, Hermet, Latour, Lassure, le général Ménard, Péaud-Lenoël, Péligry, Pousthomis, l'abbé Rocacher, Scelles, Tollon, Vézian.
Excusés : Mme Labrousse, M. Manière

    Le Président accueille les nouveaux membres : M. Péligry et M. Bongiu. Il salue la parution des nouveaux Mémoires consacrés à l'église Saint-Pierre-des-Cuisines.

    M. Coppolani fait part de la correspondance manuscrite. Le Président signale tout particulièrement la notification d'une subvention de 5000 f. de la part du CNRS. M. Leblanc lit également une lettre de M. Calley concernant la sauvegarde du rempart de l'hôpital Larrey. Le Secrétaire Adjoint présente les ouvrages reçus par la Société.


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    M. Tollon fait un rapport sur la candidature au concours annuel de la Société de M. Pascal Julien, auteur d'une étude universitaire sur les stalles de la cathédrale de Toulouse. M. Pradalier lit ensuite le rapport sur la candidature à ce même concours de M. Manuel Marzet, auteur d'une recherche sur l'église Saint-Michel-des-Lions de Limoges.

    La Société décide d'accorder le prix Ourgaud à M. Julien et le prix spécial de la Société archéologique à M. Marzet.

    M. Blaquière est réintégré dans sa place de membre titulaire. Mme Annie Noé-Dufour, MM. Scelles et Vézian sont élus à l'unanimité membres titulaires.

    Le Président donne ensuite la parole à Mme Cazes pour sa communication sur les bâtiments canoniaux de la cathédrale de Toulouse, qui sera publiée dans le t. XLIX des Mémoires.

    M. Leblanc remercie Mme Cazes d'avoir présenté des plans peu connus. Il demande des précisions sur le bâtiment de la prévôté. Esquié a donné relation de sa démolition. M. Leblanc aimerait bien savoir où était le labyrinthe qui ornait le carrelage et demande où se trouve la colonne de l'église Saint-Jacques. Mme Cazes précise qu'elle est aujourd'hui dans le jardin du musée Saint-Raymond.

    L'abbé Rocacher rappelle la destruction des vestiges archéologiques découverts dans la cour de l'hôpital Larrey. La presse a rapporté ces informations et son propre avis sur la question. Il a précisé que les vestiges étaient détruits une semaine avant la publication du premier article dans la presse. Les sociétés de promotion immobilière agissent un peu au jour le jour. Les archéologues ne sont pas du tout au courant de l'évolution du projet architectural. Le décalage est trop important entre les discussions en COREPHAE et la réalité du chantier. Des membres constatent qu'il y a une très mauvaise concertation, que la COREPHAE, qui n'a qu'une voix consultative, ne vote que sur les projets qui lui sont soumis, que les potentialités archéologiques devraient être prises en compte suffisamment tôt, avant la remise du chantier au promoteur. Il est rappelé que l'on connaissait l'intérêt du site de Larrey dès 1985, et on souligne que ce qui vient de s'y passer remet en cause notre action. La Société pourrait envisager des recours devant le tribunal administratif dont les jugements feraient jurisprudence. Le problème se posera désormais pour chaque fouille et la Direction des Antiquités, qui ne peut qu'imposer des fouilles sur des sites archéologiques, voit sa compétence s'arrêter au moment où se pose la question de la conservation. On fait enfin remarquer que l'information sur ce chantier a fait défaut et que les membres de la Société manquent d'éléments concrets : projets, permis de construire. Il est proposé d'aller prendre des informations à la Mairie.

 

Séance publique du samedi 15 avril 1989

    Allocution du Président

    Mesdames,
    Mesdemoiselles,
    Messieurs,

    L'invitation que vous avez reçue et à laquelle vous avez courtoisement répondu portait la mention habituelle : « Allocution du Président ».

    Ce dernier, victime de deux sérieux accidents de santé, a bien cru ne pouvoir être des vôtres ce soir. Mais, en tant que maître de maison, il lui a paru finalement « malséant », comme l'aurait trouvé André Gide, de ne pas être ici pour vous accueillir. En vous demandant d'excuser une voix encore faible, me voici donc une fois de plus devant vous, heureux de vous saluer et de vous offrir, au nom de notre Compagnie, les civilités d'usage. En cette année, 158e de notre toujours jeune Société, je me bornerai à vous informer de notre action sur le terrain pour la défense du patrimoine toulousain. Notre gros sujet de préoccupation est resté celui du sauvetage du site Larrey.

    D'abord celui des beaux et vénérables bâtiments élevés par les religieuses de Notre-Dame. On peut s'étonner de la désinvolture avec laquelle les promoteurs ont voulu traiter ces bâtiments. Eux ou leurs architectes n'avaient-ils donc pas lu la précieuse Histoire des rues de Toulouse de Jules Chalande, en particulier les numéros 299 et 300 consacrés à la rue Larrey et au Couvent des Religieuses de Notre-Dame du Sac ? À défaut, l'Évocation du Vieux Toulouse où notre regretté secrétaire Robert Mesuret consacra à ces bâtiments toute la page 414 ? Craignant leur manque de curiosité, je n'avais pas manqué d'en développer les traits essentiels sur le registre de l'enquête de 1986. J'en remis une copie à M. le Premier Maire Adjoint Guy Hersant à l'issue du débat public du 22 septembre 1987. Il voulu bien m'adresser quelques rassurantes paroles.

    Vous n'ignorez pas que, malgré toutes ces précautions, le bâtiment B fut menacé de quasi-démolition à la faveur de l'imprudent arrêté préfectoral du 31 janvier 1987. À la suite de notre vœu du 15 mars 1988 et de nombreuses démarches, le bâtiment fut finalement sauvé. Mais alors les menaces se reportèrent sur les bâtiments D et E. D'où le 5 novembre 1988 une nouvelle intervention personnelle auprès de M. l'Inspecteur Général des Monuments Historiques à Paris.

    Je pense que la cause est gagnée et que seront aussi épargnés les lieux auxquels reste attaché le souvenir du grand « pastelier » Pierre Lopez, chez qui logea en 1548 le célèbre jurisconsulte portugais Antonio de Gouveia et dont la sœur épousa Pierre Eyquem, seigneur de Montaigne (1529). De ce mariage naquit Michel, le futur auteur des Essais, qui vint faire son droit à Toulouse et qui, lorsqu'il allait voir Gouveia, le faisait dans la maison de son oncle... rue Larrey ! N'oublions pas que notre patrimoine n'est pas fait seulement de vénérables monuments, mais aussi de durables souvenirs historiques.

    Mais, l'affaire de l'ancien couvent réglée, en surgit une autre : celle des remparts romains. Comment pourrait-on ignorer leur


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existence ? Ils figurent sur tous les plans anciens de Toulouse que l'on peut consulter dans le recueil de notre ancien confrère Roger Camboulives. Mon regretté prédécesseur à cette présidence, Michel Labrousse, leur a consacré 62 pages de sa thèse monumentale sur Toulouse antique. Notre éminent confrère, l'abbé Georges Baccrabère, 39 pages dans le tome 135 des Mémoires de l'Académie des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres de Toulouse (1973). Je les avais à nouveau signalés dans le n° 531 de L'Auta (décembre 1987).

    Nos vœux semblèrent comblés quand on nous annonça qu'on allait les dégager et même entreprendre des fouilles à leur pied. Effectivement, lors des journées « portes ouvertes », les Toulousains purent découvrir en vaste chantier dominé par une courtine de 6 m de haut et 2,40 d'épaisseur ainsi que deux tours au parement en moellons calcaires bien conservés à la base. Le 13 décembre 1988, M. Raphaël de Filippo, directeur du chantier de fouilles, voulut bien nous consacrer quelques-unes de ses précieuses heures de travail pour visiter le site dégagé. C'est à l'issue de cet examen détaillé qu'ayant demandé comment cet ensemble allait être conservé, il me fut répondu que les bulldozers allaient raser tout le chantier, y compris la grande « basilique » inopinément dégagée, que la courtine allait servir d'appui à un parking et que la tour la mieux conservée serait recouverte d'une dalle de béton ! Devant ces projets inadmissibles, nous avons immédiatement réagi, adoptant entre autres un vœu pour que notre Société soit désormais consultée avant tout projet relatif à des témoins de notre patrimoine.

    J'ai envoyé ce vœu accompagné d'une lettre personnalisée à treize personnalités et alerté les membres de la COREPHAE qui se réunissaient à la fin de la semaine. Je n'ai reçu que trois réponses dont la seule officielle émane de M. le Chef du Service départemental de l'Architecture. Il veut bien m'informer « qu'il a été demandé l'inscription à l'Inventaire supplémentaire des « "remparts". Par ailleurs une lettre a été adressée au promoteur, démontrant l'intérêt qu'il y aurait à étudier un aménagement du projet qui a effectivement obtenu le permis de construire. Cet aménagement aurait pour but de voir et de mettre en valeur ces découvertes. Espérant avoir apaisé vos inquiétudes, je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, cher Monsieur, l'expression de mes meilleurs sentiments... Signé : l'Architecte des Bâtiments de France ».

    J'ai reçu cette lettre au début février, alors que je venais d'entrer en clinique. Je n'en savais pas plus, mais n'étais pas rassuré pour cela. Il faudra, pensai-je, essayer de se renseigner en dépit de ce chantier « interdit au public ». La seule nouvelle vient hélas de nous être communiquée par la presse ces jours derniers : « Les vestiges du site Larrey ont disparus ». Il paraît qu'on a profité d'une « querelle » entre historiens et archéologues (?) au sujet de la suite à donner à cette affaire ! Les quatre professeurs d'histoire de l'art et d'archéologie qui siègent au bureau n'ont eu aucun écho de cette « querelle » ; si on les avait consultés, ils l'auraient peut-être apaisée, mais les bulldozers étaient sans doute déjà passés par là, suite logique de la réputation bien acquise que « Toulouse est et demeure la capitale du Vandalisme » dénoncée par Montalembert. Pour nous consoler, nous comptons quand même sur la vigilance de quelques membres du service des Affaires Culturelles et d'avance, nous les remercions.

    Pour un convalescent, je m'aperçois que j'ai été bien long et vous prie de m'en excuser, tout comme le fit Bossuet en terminant l'Oraison funèbre du Prince de Condé (1687), de vous avoir fait subir « les restes d'une voix qui tombe et d'une ardeur qui s'éteint ». Merci quand même ! (À noter que l'Aigle de Meaux ne fermera heureusement les yeux que 17 ans plus tard !).

    Vous n'avez eu que la moitié de l'allocution habituelle. Notre Directeur, M. Henri Pradalier, a bien voulu me décharger du soin d'évoquer les études auxquelles nous nous sommes livrés pendant l'année académique 1988-1989.

    Vous n'avez rien perdu pour attendre. Mon cher ami, je vous donne la parole.

Le Président
Gratien Leblanc

 

    Allocution du Directeur

    La longue tradition de la séance publique de la Société Archéologique du Midi de la France veut que soient rappelés les travaux menés par celle-ci au cours de l'année académique. Comme toujours notre Société a montré son dynamisme en réunissant ses membres au cours de treize séances dans lesquelles ont été présentées des communications de qualité. En faire ici le résumé serait inutile d'autant que la plupart d'entre elles paraîtront dans le prochain volume de nos Mémoires. Je me bornerai donc à rappeler que les thèmes abordés ont touché la tranche chronologique la plus large qui soit, de la préhistoire au XIXe siècle.

    La deuxième activité de la Société Archéologique touche à la publication de ses Mémoires, qui, pour la première fois cette année, voient apparaître la couleur. En couverture seulement, il est vrai. Mais nous avons bon espoir de pouvoir faire à l'avenir des progrès dans ce domaine en vue de rendre plus attrayante une revue qui ne perdra rien de son poids scientifique. La preuve en est donnée cette année avec un numéro d'une grande solidité, intégralement consacré à l'église Saint-Pierre des Cuisines, et qui donne le résultat de fouilles menées sur ce site pendant plusieurs années par ou avec l'aide de l'Université, de la Conservation des Monuments Historiques et de la Direction des Antiquités Historiques de la région Midi-Pyrénées. C'est donc avec la satisfaction du devoir accompli que nous arrivons à cette séance publique, avec la sentiment de n'avoir pas failli à notre mission, tout au moins dans les domaines traditionnels qui sont ceux de la Société Archéologique du Midi de la France.

    Mais les séances de la Société ont aussi été consacrées à de longues discussions sur les moyens de protection et de conservation des monuments dans une ville en pleine expansion. Et ici, il faut l'avouer, c'est pour nous un relatif échec. Certes les bâtiments des XVIIe et XIXe siècles de l'hôpital Larrey, pour lesquels nous sommes intervenus, paraissent-ils désormais à l'abri. Certes, grâce à la compréhension de l'entreprise Tué et de l'Architecte en Chef M. Voinchet, les vestiges trouvés à l'angle de la cour de l'hôtel d'Assézat ont-ils été


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préservés, de même que, grâce à l'imagination du maire de l'Union, ont été conservés les thermes romains découverts sur la chantier de la cathédrale Saint-Étienne. Mais à côté de cela, que de pertes à déplorer ! Que de monuments ou de sites archéologiques irrémédiablement détruits ou atrocement défigurés en moins d'un an et demi ! Le catalogue, pour un laps de temps aussi court, en est consternant.

    Disparus, à l'angle de la rue Gambetta et de la Place du Capitole, les derniers vestiges de la chapelle Sainte-Catherine de l'ancien collège de Pampelune datant du XIVe siècle, et, disparue avec eux, une zone archéologique antique et médiévale, de plus de 2000 m² en plein cœur de la cité, le long de l'ancien Cardo romain sans avoir été fouillée et sur laquelle la découverte de certains éléments archéologiques auraient dû interrompre momentanément les travaux ; éventré au bulldozer, l'enclos funéraire de l'église Saint-Sauveur sous la halle aux grains sans qu'aucune fouille ait pu être entreprise. Enfin et surtout, réduits à néant, les vestiges antiques mis au jour, il y a quelques mois, à l'hôpital Larrey. Des fouilles menées avec compétence et efficacité avaient permis de faire apparaître un monument d'une taille unique dans toute la Gaule pour cette période de la fin de l'Antiquité. Il y a trois semaines, alors qu'il devait être statué prochainement sur ces découvertes, les bulldozers ont tout détruit, supprimant à jamais un ensemble sur lequel auraient dû se pencher longuement les spécialistes de l'Antiquité pour en tirer les renseignements archéologiques et historiques qu'il était à même de fournir sur la Toulouse de la fin de l'Antiquité. Avouons-le, cela fut un déchirement pour tous les membres de la Société Archéologique en même temps qu'un aveu d'impuissance.

    Nous voici donc encore et hélas réduits au rôle impopulaire de censeurs. Et pourtant la Société archéologique souhaiterait pouvoir éviter ce genre de situation. Or l'élément fondamental qui commande les comportements des nouveaux Vandales est la peur. La peur de perdre de l'argent, beaucoup d'argent si un chantier est arrêté ou si des programmes doivent être modifiés en raison d'importantes découvertes. Pourtant, il y a sans doute une autre que les promoteurs ne devraient pas oublier : celle de l'image de marque de leur entreprise. Détruire des vestiges anciens n'a jamais fait une bonne publicité. Par contre quelles louanges n'adresse-t-on pas à ceux qui acceptent de modifier leurs programmes en fonction des découvertes ! On dit partout du bien des villes et des entreprises qui conservent leur patrimoine. On entend le pire sur celles qui font le contraire. Il faut donc que nous puissions convaincre les personnes concernées que leur intérêt est davantage dans la mise en valeur et la conservation des vestiges que dans leur destruction.

    Mais la peur de perdre de l'argent n'est pas toujours la seule cause de ces destructions. Il y a aussi l'ignorance. L'ignorance qui est tout aussi responsable que le souci de préserver des intérêts matériels. Certes l'ouvrier qui excave avec un engin mécanique n'est pas tenu de savoir si le morceau de mur qu'il rencontre est antique ou médiéval, important ou sans intérêt. Mais si, auparavant, il a été prévenu du risque qu'il y a à trouver des restes archéologiques et s'il sait qu'il doit à ce moment-là s'interrompre et prévenir, il sera attentif ; on objectera bien sûr que parfois il est prévenu, mais, en sens inverse, avec comme consigne de faire disparaître immédiatement toute trace de découverte pour éviter fouille ou enquête. Et c'est là que les décideurs doivent connaître la position des archéologues. Nous ne sommes pas attachés à la conservation systématique de tout ce qui se découvre. On ne peut toujours tout conserver, et cela, nous le savons. Par contre, nous jugeons qu'il est indispensable de toujours tout faire pour conserver ce qui peut et doit l'être. Et cela, il faut que tout le monde le sache.

    Enfin, dira-t-on, il existe des administrations chargées de la protection et de la conservation. Que font-elles donc? Elles font leur travail, tout leur travail. Mais elles souffrent d'un manque tragique d'argent et de personnel pour veiller sur tous les chantiers qui s'ouvrent non seulement à Toulouse mais aussi dans une Région qui est une des plus étendues de France. Et lorsqu'on sait le peu de moyens dont elles disposent, on ne peut que leur rendre hommage pour tout ce qui a été défendu, protégé et sauvé.

    Ces remarques débouchent sur un examen de conscience, le nôtre, membres de la Société Archéologique. Avons-nous été assez dynamiques, assez rapides, assez convaincants, assez entendus dans nos interventions ? Probablement pas si l'on en juge aux maigres résultats obtenus. Pouvons-nous faire mieux que d'adresser des vœux tardifs ? Oui, sans doute, en alertant l'opinion publique, en annonçant à l'avance les risques qu'il y a, à l'occasion de l'ouverture de tel ou tel chantier, de faire des découvertes. Il faut, avant qu'une entreprise n'ouvre un chantier, qu'elle connaisse ces risques et les intègre dans ses devis et ses délais de livraison. Cela nous évitera d'avoir à protester après. Encore, bien sûr, faudrait-il être au courant des projets et des plans.

    Dans le cas qui nous occupe, donc, c'est probablement par la communication que l'on évitera erreurs et destructions et, par conséquent, conflits et rancœurs. Et ici, le rôle de l'information est primordial ainsi que l'attention que doivent porter tous les citoyens à ce qui se passe dans leur ville, dans leur quartier, dans leur immeuble lors de travaux en tous genres, en restant à l'affût de tout ce qui peut être un reste archéologique. Aussi, à la veille des travaux importants qui vont s'ouvrir à Toulouse à l'occasion du creusement du métro, à l'occasion des restaurations qui vont s'engager, la Société Archéologique souhaite voir tout le monde faire des efforts de concertation et d'information nécessaires pour sauver ce qui peut et doit l'être, tant à Saint-Pierre des Cuisines, qu'à l'Hôtel d'Assézat, à l'Hôtel de Pierre, et, encore, à l'hôpital Larrey, où il faudra, comme promis, que les restes du rempart romain soient mis en valeur.

    Que Toulouse ne retrouve pas la déplorable réputation qui fut la sienne dans les années 1830, réputation qui la fit qualifier capitale du vandalisme en France par Montalembert, c'est le vœu que nous formulons.

    Un vœu de plus ! Dira-t-on. Oui, un de plus !
    Mais peut-être le dernier avant que ne soient envisagés des moyens plus radicaux d'être enfin entendus et écoutés. Je vous remercie.

Le Directeur
Henri Pradalier

 


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    Rapport sur le concours par Mme Michèle Pradalier-Schlumberger et remise du prix Ourgaud à M. Pascal Julien, du prix spécial de la Société Archéologique à M. Manuel Marzet.

    Conférence de M. Bruno Tollon : « Les Restaurations dans l'architecture civile à Toulouse : problèmes actuels ».

 

Séance du 25 avril 1989

Présents : MM. Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Cazes, Secrétaire Adjoint ; Mme Cazes, Mlle Eclache, MM. l'abbé Baccrabère, Bernet, Blaquière, Cabau, Catalo, le général Delpoux, G. Fabre, Hermet, Latour, Manière, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Vézian.
Excusés : MM. Péligry, Scelles, Leblanc.

    En l'absence du Président souffrant, M. Pradalier assure la présidence. M. Coppolani présente la correspondance manuscrite. M. Cazes présente la correspondance imprimée. La parole est ensuite donnée à M. l'abbé Baccrabère pour la communication du jour : Histoire d'une fonderie de canons (1793-1866), qui sera publiée dans le prochain volume des Mémoires.

    M. Pradalier remercie M. l'abbé Baccrabère pour sa communication et lui demande quelle était la durée de la coulée. Il fallait environ 24 h pour couler six canons à la fois. M. Pradalier souhaite également avoir des précisions sur la réalisation de l'entrée de la fonderie et sur la date de fermeture de cette fonderie. 1866 est l'année de la fermeture. Napoléon III a alors créé une grande fonderie centrale à Bourges. D. Cazes demande si le percement du rempart pour la création de la fonderie avait déjà permis des découvertes archéologiques. Le percement de ce rempart, très dur, a entraîné la recherche de démolisseurs-spécialistes à Carcassonne. M. Blaquière s'informe sur la fabrication des boulets. Suit une question de M. Manière : où se procurait-on le bronze ? Des cloches ont été fondues, mais on a toujours conservé une cloche par clocher. Le bronze venait des pays scandinaves, d'Angleterre, de Russie et du Pérou. Les Français on pu prendre Séville sous Napoléon Ier grâce au fondeur espagnol Pédarros venu diriger la fonderie de Toulouse où il fit apporter du bronze d'Espagne. B. Pousthomis demande combien il y avait d'employés : 178 ouvriers, dans les périodes creuses, seulement 50. M. Manière évoque les arrivages par le Port-Garaud. L'abbé Baccrabère montre l'importance architecturale des bâtiments de la fonderie pour la période révolutionnaire à Toulouse. M. Péaud-Lenoël demande des précisions sur la fabrication des moules.

    Sont ensuite abordées les questions diverses.

    M. Latour suggère de constituer une commission pour l'achat des ouvrages.

    Le Directeur demande s'il ne serait pas utile que la Société écrive directement au Ministre au sujet des destructions et restaurations des Monuments Historiques de la ville. Certains membres pensent que c'est bien là le rôle de la Société, et que l'action de l'abbé Baccrabère est exemplaire à cet égard. M. Manière évoque la destruction d'un superbe aqueduc lors de la construction des « Jardins d'Arcadie ». La Société propose d'envoyer copie de la lettre au Ministre, 15 jours après son envoi, à la presse, aux édiles de la ville et aux parlementaires (la procédure de la question parlementaire pouvant être efficace) ; cette lettre ne doit avoir aucun caractère polémique ou politique. Pour B. Pousthomis, la politique actuelle est meilleure que la précédente, puisque l'on fouille, mais l'on détruit ensuite ; la moitié du chemin a été faite. Pour D. Cazes, il y a une question de doctrine : il serait souhaitable de ne pas détruire l'objet de l'étude, objet que l'on ne peut totalement enregistrer scientifiquement avec tous ses caractères. L'abbé Baccrabère, également de cet avis, est persuadé qu'il faut conserver des témoins pour les générations futures, ce que M. Fouet a fait dans des fouilles.

 

Séance du 9 mai 1989

Présents : MM. Pradalier, Directeur, Coppolani, Secrétaire Général, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Cazes, Secrétaire Adjoint ; Mme Cazes, Merlet-Bagnéris, Pradalier-Schlumberger, MM. Prin, Latour, Hermet, G. Fabre, Pousthomis, Péaud-Lenoël, Scelles, Cabau, Catalo, Bongiu.
Excusés : M. Leblanc, Président, les généraux Ménard et Delpoux, M. l'abbé Rocacher, M. l'abbé Baccrabère, M. Manière.

    Le procès-verbal de la séance précédente est lu et adopté. Le Secrétaire Adjoint présente la correspondance imprimée ; M. Coppolani signale que la Société vient d'acquérir le Dictionnaire des rues de Toulouse de Pierre Salies. M. Fouet rappelle que M. l'abbé Rocacher souhaite que l'allocution du Président pour la séance publique soit publiée dans la presse. M. Fouet estime également qu'il faut diffuser le plus possible les prises de position de la Société quant à la conservation du Patrimoine. M. Latour se charge de l'envoi aux journaux, M. Hermet de L'Auta, M. Fouet de la Revue de Comminges. Le Directeur donne ensuite la parole à P. Cabau pour la communication du jour :

   « Une chronique de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse écrite par Bernard du Rosier (v. 1400 - 18 mars 1475 n.s.)

    Bernard du Rosier, le très savant prélat qui occupa le siège archiépiscopal de Toulouse de 1451 à 1475, se montra fort curieux de questions d'histoire. On sait qu'il fit composer par le franciscain Etienne de Gan, en 1452 ou 1453, un mémoire sur les origines de Toulouse (A.M.T., AA 5,1) et qu'il rédigea lui-même, entre autres ouvrages, un livres des annales de cette ville (Liber de annalibus ciuitatis Tholose), hélas déjà perdu au début du XVIIe siècle. On pourra ajouter aux œuvres historiques de ce grand érudit une chronique de la cathédrale de Toulouse.


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    Bernard du Rosier eut en effet le souci de rappeler les circonstances de la fondation de son église métropolitaine, ainsi que les étapes principales de sa construction. Il intégra le résultat des recherches qu'il avait menées à ce sujet dans son traité De laudis beati Stephani protomartyris, livre central d'une trilogie consacrée à la louange du premier martyr, saint patron de la cathédrale. Vers 1463, comme s'achevaient dans sa métropole d'importants travaux d'embellissement, l'archevêque fit placer dans le chœur, attachés aux boiseries des stalles hautes par une chaîne de fer, deux grands volumes en parchemin splendidement manuscrits et enluminés. L'un contenait un ouvrage en sept livres composés en l'honneur de la Vierge Marie, l'autre le triptyque dédié à Saint-Etienne. Ces précieux libri catenati, décrits notamment par Nicolas Bertrand (v. 1455 - ap. 1527) dans son De Tholosanorum gestis (1515), furent consumés dans l'incendie qui ravagea la chœur de Saint-Etienne dans la nuit du 9 au 10 décembre 1609.

    Or partie du texte de la chronique de la cathédrale de été conservée, transmise par deux copies. De la première, faite plus d'un siècle avant la catastrophe, Guillaume Catel (1560-1626) a publié plusieurs extraits de ses Mémoires de l'Histoire du Languedoc (1633). Quant à la seconde, transcrite le 8 mai 1511 et déposée ensuite dans les archives du chapitre de Saint-Etienne, elle existe encore (A.D. 31,4 G 241). En attendant de lire l'édition-traduction des fragments qui nous restent de cette œuvre de Bernard du Rosier, on trouvera ici l'analyse critique de leur substance (entre crochets sont indiqués les sources auxquelles l'archevêque a puisé ses informations).

ÉPISODES LÉGENDAIRES - 1. Mission de saint Martial, l'un des soixante-douze disciples du Christ, envoyé en Gaule par saint Pierre [« Lettre de saint Martial aux Bordelais », apocryphe] - 2. Fondation par Martial de la cathédrale de Toulouse : construction d'une « église toute petite », la première bâtie dans la cité, dédiée à saint Etienne et dotée de reliques du protomartyr [Bernard Gui, Nomina sanctorum Lemouicensis dyocesis, ou Speculum sanctorale ; avec un emprunt probable de l'expression ecclesia paruula à la Passio sancti Saturnini] - 3. Dédicace de la cathédrale par saint Front, disciple du Christ [Ibidem] - 4. Mission de saint Saturnin, disciple du Christ, premier évêque de Toulouse, envoyé de saint Pierre ; ses oraisons dans la cathédrale, où un ange lui annonce son martyre [Bernard Gui, Nomina episcoporum Tholose, d'après une version interpolée de la Passio sancti Saturnini] - 5. Abrégé du récit des origines de la cathédrale de Toulouse selon une inscription [Epitaffium Ecclesie Tholosane, reproduite aussi en marge des Nomina episcoporum Tholose, B.N., ms. lat. 5929]

FAITS HISTORIQUES - 1. Reconstruction, « bien des années après le martyre de saint Saturnin », de la « toute petite église », rebâtie « à la manière d'un très vaste édifice, en briques, comme il apparaît encore en partie » [Il s'agit de la grande nef unique élevée durant les épiscopats de Foulque de Marseille (1205-1231) et de Raymond du Fauga (1232-1270)] - 2. Election, confirmation et consécration de l'évêque Bertrand de L'Isle-Jourdain (1270-1286) [Nomina episcoporum Tholose, d'après Guillaume de Puylaurens, Chronica] - 3. Edification, lancée en 1275 par Bertrand de L'Isle-Jourdain, d'un nouveau chœur ceint de « quatorze chapelles d'un nouvel ouvrage » [Addition marginale aux Nomina episcoporum Tholose, B.N., ms. cit. ; date d'après relation de pose de la première pierre ? Il s'agit du chœur rayonnant entrepris sous la direction d'un maître du gothique septentrional] - 4. Erection, par le pape Jean XXII, de la cathédrale en métropole (1317) [Continuation des Nomina episcoporum Tholose, B.N., ms. cit.] - 5. Confection, aux frais du patriarche d'Alexandrie Jean de Cardaillac, administrateur de l'archevêché de 1378 à 1390 (« de 1378 à 1399 » par erreur), d'un buste-reliquaire « somptueux » pour les reliques de saint Etienne [Armoiries du patriarche sur le reliquaire d'argent doré, pesant plus de cent marcs, fabriqué avant 1383 et disparu après 1792] - 6. Construction, à l'extrémité ouest du chœur canonial, d'orgues « en grande et solennelle forme » offertes par Bernard du Rosier lui-même [cf. A.D. 31, 1 E 843, n° 32 : transcription de l'acte de donation au chapitre de ces quatre ou cinq instruments, dressé le 22 janvier 1463].

    Bernard du Rosier a ainsi tiré parti de témoins du passé visibles dans son église métropolitaine aussi bien que de documents conservés dans ses archives, mais il s'est surtout inspiré des travaux de Bernard Gui (v. 1261-1331). Il s'est beaucoup servi d'un recueil d'ouvrages de l'historien dominicain confectionné dans la première moitié du XIVe siècle, qui comporte tout une série d'annotations ajoutées au siècle suivant et qu'il a complété de sa propre main (B.N., ms. lat. 5929 + 4987). Sa chronique présente un double intérêt, historiographiques ou historiques. D'une part, elle atteste la vogue de la légende apostolique de saint Martial à la fin du Moyen Âge ; ce peut être indirectement la preuve de l'oubli dans lequel avaient sombré, depuis longtemps sans doute, les origines réelles de la cathédrale de Toulouse (on notera à ce propos que la plus ancienne liste épiscopale connue, donnée en 1296 par le juriste Arnaud Arpadelle dans son Commentarium consuetudinum Tholose, reste très lacunaire jusqu'à la fin du XIIe siècle). D'autre part, la compilation de l'archevêque indique explicitement pour les débuts de la seconde reconstruction de Saint-Etienne au XIIIe siècle (généralement fixés à 1272 sur la foi de la Gallia christiana) une date qui mérite réflexion : 1275 (ou 1276 n.s.) ».

    M. Pradalier remercie M. Cabau pour son intéressante recherche régressive et souhaiterait savoir quelles étaient les sources de Bernard Gui. M. Cabau répond qu'il s'agit de la Vita aureliana et de textes qui apparaissent au XIe siècle. H. Pradalier constate que cela correspond aux ambitions des ducs d'Aquitaine sur Toulouse. Il rappelle aussi la présence de saint Martial dans la décor sculpté de la façade occidentale de Saint-Sernin. Il demande également s'il n'y a pas de relation entre les Rosier et les Rogiers, de la famille du pape d'Avignon Clément VI. P. Cabau répond par la négative et précise que les armoiries de Bernard du Rosier comportaient des roses. H. Pradalier évoque la chapelle Saint-Martial du Palais des Archevêques de Narbonne. Il se demande si le souci n'existait pas, au sein du chapitre de Saint-Etienne, de montrer à tout prix l'antériorité de l'église Saint-Étienne par rapport à celle de Saint-Sernin. D. Cazes attire l'attention sur la dalle funéraire gravée de Bernard du Rosier, extraite du chœur de la cathédrale et actuellement conservée au Musée des


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Augustins. On y voit les armoiries de Bernard du Rosier surmontées de trois bonnets de docteur. La représentation en perspective d'une accumulation de livres derrière l'effigie de l'archevêque évoque l'Italie centrale. Michèle Pradalier remarque le caractère tardif de la date de 1275 qui réduit la période de construction du chœur. Ch. Péligry parle de la personnalité exceptionnelle de Bernard du Rosier. Il tient de François Avril qu'un artiste italien passa à Toulouse vers 1460, venant de Turin. Sous l'archevêque B. du Rosier, il fit des vitraux dans la cathédrale. Il rappelle qu'une thèse de l'École des Chartes vient d'être soutenue sur l'œuvre écrite du prélat. Il dit aussi que ce dernier a trouvé le reliques de sainte Jeanne de Toulouse et a demandé l'impression d'une vie de la sainte qui pourrait bien être le premier livre imprimé à Toulouse. P. Cabau conclut le débat en redisant à quel point B. du Rosier a été le ferment d'un bouillonnement intellectuel et artistique à Toulouse.

 

Séance du mardi 13 juin 1989

Présents : MM. Leblanc, Président, Coppolani, Secrétaire Général, Fouet, Bibliothécaire Archiviste, Ahlsell de Toulza, Trésorier, MM. Bernet, Lassure, Latour, abbé Rocacher, Scelles, Membres titulaires, Mmes Cazes, Merlet, Noé-Dufour, MM. Bongiu, Catalo, Loncan, Péaud-Lenoël, Pousthomis, Membres correspondants.
Excusés : M. Pradalier, Directeur, Cazes, Secrétaire Adjoint, Gérard, Cabau.

    Le Président évoque le problème de l'impression du tome XLIX des Mémoires de la Société. Des contacts ont été pris avec les imprimeurs, mais il est certain que tous les textes ne seront pas prêts avant le 30 juin. La commission de rédaction se réunira néanmoins le 20 juin.

    Après communication de la correspondance, la Société décide d'intervenir auprès du gouvernement grec pour la sauvegarde du site de l'Olympe menacé par un programme d'équipements touristiques, intervention demandée par le mouvement international Moutain Wilderners.

    Sur le rapport de M. Maurice Scelles, M. Richard Boudet, chargé de recherches au C.N.R.S., spécialiste de l'âge du fer, est élu à l'unanimité Membre correspondant.

    En l'absence du rapporteur désigné, la présentation de la candidature de Mlle Ugaglia est remise à une séance ultérieure.

    M. Maurice Scelles présente la communication portée à l'ordre du jour : « Aperçu sur quelques édifices civils du moyen-âge à Cahors » :

    « Elle constitue une première présentation de l'étude engagée par le Service régional de l'Inventaire de Midi-Pyrénées sur l'ensemble de la ville ancienne. Celle-ci se caractérise par l'exceptionnel état de conservation d'un grand nombre d'édifices des XIIIe et XIVe siècles.

    Un bâtiment situé à l'est de la cathédrale est qualifié de « cuvier du chapitre » au XVIIe siècle. Cette appellation tardive ne saurait rendre compte des structures de l'édifice médiéval. Derrière une façade qui ne se distingue que peu de celle d'une maison, il s'agit en fait d'un vaste bâtiment de vingt-quatre mètres de long. Le rez-de-chaussée divisé en deux vaisseaux par trois grandes arcades avait probablement une fonction commerciale. Mais il faudra préciser celle de l'étage, largement éclairé et qui ne comporte pas moins de cinq cheminées.

    Trois maisons des XIIIe et XIVe siècles ont pu faire l'objet d'une étude très détaillée à l'occasion de travaux de rénovation. Deux sont des édifices importants, à plusieurs corps de bâtiment autour d'une cour où se trouve un grand escalier sur voûte. Leur étude permet non seulement de restituer les façades du moyen-âge mais également les moindres détails des habitations : décors peints, cheminées, éviers, latrines, escaliers en bois intérieur... Bien que la troisième maison ait été largement transformée au cours des siècles, l'observation des vestiges permet de reconstituer la majeure partie du bâtiment du XIIIe siècle ».

    Le Président remercie et félicite l'orateur, et souligne trois points de son exposé : l'utilisation principale de la brique comme matériau, le nombre élevé de placards dans les locaux et l'équipement en cuisines et en latrines. M. Scelles répond que la pierre est à Cahors un matériau noble réservé principalement, semble-t-il, aux façades de l'axe principal, la grand'rue.

    Mme Noé-Dufour et M. Pousthomis notent les ressemblances entre les façade des trois maisons présentées par M. Scelles et celles de la maison « gothique » de la rue Croix-Baragnon à Toulouse, ou encore des maisons de Cordes. Mais les sculptures sont de caractère nettement différent.

    M. Scelles note que les escaliers de ces maisons se rapprochent de ceux des maisons catalanes et italiennes de la même époque.

    M. Catalo demande si l'on a une idée de l'utilisation première de ces locaux et si le sous-sol apporterait des indications à cet égard. L'une des maisons n'a apparemment pas de cave, les deux autres en ont une voûtée ou sous plancher.

    M. Pousthomis demande si l'on a une idée du niveau social des habitants. Les caractères de l'architecture semblent indiquer des locaux commerciaux au rez-de-chaussée, d'habitation aux étages. Mais s'agit-il des activités et du logement des propriétaires ou de locaux loués ? et par qui ? Peut-être le logis d'une grande famille ? On n'a jusqu'ici trouvé aucun document qui permette de répondre à la question.

    M. Ahlsell de Toulza insiste sur la qualité de cet habitat ancien. Il demande qui a eu l'initiative de ces restaurations. Il s'agit de propriétaires privés qui bénéficient des avantages financiers accordés dans les secteurs sauvegardés. Le pseudo « cuvier du chapitre » deviendra un musée du vin de Cahors, les autres locaux seront aménagés en appartements ou en bureaux.

    Le Président prononce la clôture de l'année académique.


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