Société Archéologique  du Midi de la France
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Mémoires
de la Société Archéologique
du Midi de la France

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Tome LVII (1997)



BULLETIN DE L'ANNÉE ACADÉMIQUE

1996-1997

établi par Maurice SCELLÈS

 

Cette édition électronique respecte la mise en page de l'édition imprimée (Bulletin de l'année académique 1996-1997, dans Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. LVII, 1997) dont nous indiquons la pagination. Certaines illustrations en noir et blanc ont cependant été remplacées par des illustrations en couleur.

1ère partie
Séances du 5 novembre 1996 au 11 mars 1997
2e partie
Séances du 18 mars 1997 au 16 juin 1997

M.S.A.M.F., T. LVII, page 197

 

SÉANCE DU 5 NOVEMBRE 1996

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Labrousse, Pradalier-Schlumberger, MM. l’abbé Baccrabère, Cabau, Catalo, le général Delpoux, Gérard, Hermet, Julien, Péaud-Lenoël, l’abbé Rocacher, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Delaplace, Napoléone, Pujalte, MM. Bertrand, Burroni, Manuel, Gillis, Pousthomis, membres correspondants.
Excusés : Mme Watin-Grandchamp, MM. Cranga, le Père Montagnes, Peyrusse, Richard, Tollon.

 

    La séance se tient dans la salle nouvellement aménagée où se réunira désormais notre Compagnie. Le Président proclame l’ouverture de l’année académique 1996-1997 en se félicitant de cette réinstallation enfin effective après de longues années de négociations parfois très âpres. L’accès à notre salle des séances se fera comme aujourd’hui depuis le grand escalier de l’Hôtel d’Assézat, sous la surveillance du personnel de la Fondation Bemberg en attendant que soit réalisé le sas promis, dont les travaux devraient commencer dès que les crédits seront disponibles.
    Le Président rappelle que si les espaces réservés à la bibliothèque, à la salle de lecture et au secrétariat se trouvent dans le bâtiment neuf, notre salle des séances a été réaménagée dans la partie historique de l’Hôtel. Dans celle-ci a été présentée une sélection d’œuvres de nos collections, nettoyées, restaurées et mises en place par l’Atelier de restauration de la Ville de Toulouse, dirigé par Jean-Louis Laffont. Le Président cède la parole à Daniel Cazes, notre Secrétaire Général, qui s’est chargé de cette installation, afin qu’il présente à la Compagnie les œuvres exposées.
    Daniel Cazes rappelle que la plus grande partie des collections constituées par la Société Archéologique du Midi de la France a fait l’objet de dons successifs à la Ville de Toulouse et se trouve aujourd’hui dispersée entre les différents musées. Après la dernière cession de 1893, notre Société a cependant continué à recevoir des dons et à effectuer quelques achats.

    Le Président remercie Daniel Cazes, et donne la parole au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal de la séance du 18 juin dernier.
    Puis il signale des dons dus à des membres de notre Société : de Gilles Séraphin, Le Périgord roman. 1. La perception de l’espace, numéro hors série de Reflets du Périgord, printemps 1996, 125 p., pour lequel notre confrère a donné un article sur les tours féodales du Périgord roman ; de Pierre Gérard, un tiré-à-part « L’Ariège dans le cartulaire de Saint-Sernin de Toulouse », paru dans Saint-Sernin de Toulouse, IXe centenaire, Toulouse : 1996, p. 129-144 ; de Robert Manuel, des « Notes succinctes sur l’abbé Séré de Rivières, curé de Cordes (1838-1857) », parues dans le Bulletin de la Société des Amis du Vieux Cordes (5 p.) ; de Daniel Cazes : Jean-Charles Balty, Daniel Cazes, Portraits impériaux de Béziers. Le groupe statuaire du forum, Toulouse : Musée Saint-Raymond, 1995, 134 p.
    Par ailleurs, grâce à Pascal Julien, nous avons pu accroître notre bibliothèque d’une collection de La semaine catholique. L’abbé Rocacher et M. Gillis indiquent que la revue paraît toujours sous le titre de Foi et lumière de Toulouse.

    Le Président signale encore que nous venons de recevoir le dernier numéro de MoMus, qui paraît aussi stimulant que l’ont été les précédents.

    Il donne alors la parole à l’abbé Georges Baccrabère pour sa communication : Céramique du XIVe siècle dans l’ancien quartier des Récollets à Toulouse, publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires. Au cours de son exposé, l’abbé Baccrabère fait circuler des poteries et une faucille que les membres peuvent ainsi examiner à loisir.


M.S.A.M.F., T. LVII, page 198

    Le Président remercie l’abbé Baccrabère pour sa communication qui devrait susciter de nombreuses questions de la part des membres présents.
    Jean Catalo, après avoir remercié l’abbé Baccrabère de nous avoir présenté cette collection assez extraordinaire, demande si d’autres éléments ont été retrouvés dans le puits, et s’il y avait parmi eux des ossements. L’abbé Baccrabère confirme que des verres, des tissus y ont été mis au jour, ainsi que des ossements d’animaux dont il aurait volontiers demandé l’étude à P. Crouzel s’il avait été possible de la publier. Les contraintes de l’édition des Mémoires l’ont conduit à limiter sa présentation d’aujourd’hui principalement aux céramiques. Il ajoute que tout le matériel découvert est conservé au musée de l’Institut catholique.
    Répondant à une nouvelle question de Jean Catalo, l’abbé Baccrabère précise que la proportion de vases glaçurés était de 10 à 15 % ; lui paraît également remarquable le nombre de vases à liquides alors que les vases destinés au feu sont peu nombreux. Si la Société y consent, il se propose de publier par ensembles chronologiques les poteries découvertes en particulier à l’occasion de la destruction du quartier Saint-Georges.
    Pascal Julien demande si le puits était construit. L’abbé Baccrabère indique qu’il était seulement creusé dans la marne, mais que des marches aménagées tous les 30 cm environ dans la paroi permettaient d’y descendre. Pascal Julien voudrait encore savoir de quel bois est la cruche. L’abbé Baccrabère dit qu’il ne peut répondre, n’ayant pas voulu prendre le risque d’un prélèvement. Pascal Julien indique que toute la vaisselle en bois qu’il a vue à Toulouse était en orme, essence qui pourrait être aussi celle de la cruche. La vérification pourrait d’ailleurs se faire sans qu’il soit besoin de faire un prélèvement.
Claude Péaud-Lenoël voudrait savoir sur quelles bases ces poteries ont été datées. L’abbé Baccrabère précise que les datations reposent sur des comparaisons avec des pièces analogues publiées. Claude Péaud-Lenoël déclare avoir été frappé par la qualité de ces pièces qui lui inspirent deux réflexions. La première concerne le vase à tête cassée qui ressemble beaucoup aux « demoiselles » dites d’Avignon, très connues en Languedoc à partir du XVIe siècle. Il lui semble par ailleurs que ces céramiques se répartissent en deux groupes bien distincts : des poteries noires et un groupe de poteries blanches auquel appartiennent par exemple la forme en balustre ou le vase anthropomorphe, le second groupe ne succédant pas forcément au premier. C’est aussi l’avis de l’abbé Baccrabère qui pense que les poteries blanches sont peut-être des céramiques importées, de la côte méditerranéenne ou de la vallée du Rhône. Daniel Cazes se demande s’il ne serait pas intéressant de tenter des comparaisons avec les productions hispano-mauresques et en particulier les très importantes séries mises au jour lors de fouilles récentes à Lérida. L’abbé Baccrabère, dont c’était la première idée, demande si ces céramiques ont été publiées. Daniel Cazes pense que leur publication est en cours.
    Bernard Pousthomis attire une nouvelle fois l’attention sur la cruche anthropomorphe dont l’importance est accrue par l’extrême rareté de ce type de céramique dans la région. Il pense qu’elle mériterait à elle seule une publication. L’abbé Baccrabère accepte très volontiers de lui en laisser l’étude.

    Le Président remercie tous les intervenants et donne la parole au Trésorier qui expose les arguments ayant conduit à inscrire à l’ordre du jour le relèvement de la cotisation des membres de la Société. La discussion porte ensuite sur l’augmentation du coût des Mémoires. Le Président annonce que le Bureau a néanmoins réservé une bonne nouvelle pour les membres de la Société qui pourront désormais bénéficier de tarifs spéciaux très peu élevés sur les volumes anciens des Mémoires.

    On entend ensuite le rapport présenté par Daniel Cazes sur la candidature de M. Daguerre de Hureaux, directeur du Musée des Augustins, qui est élu membre correspondant.

 

SÉANCE DU 19 NOVEMBRE 1996

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Noé-Dufour, Pradalier-Schlumberger, MM. Blaquière, Gilles, Julien, Peyrusse, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Delaplace, Napoléone, Pujalte, MM. Bertrand, Bruand, Burroni, Cranga, Manuel, le Père Montagnes, Pousthomis, membres correspondants.
Excusés : M. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Mmes Blanc-Rouquette, Fraïsse, Labrousse, MM. le général Delpoux, Manière, Séraphin.

 

    En l’absence du Président retardé, le Directeur ouvre la séance et donne la parole au Secrétaire-adjoint pour la lecture du procès-verbal de la séance du 5 novembre dernier qui est adopté à l’unanimité.
    Le Secrétaire Général présente une partie des publications reçues depuis le mois de septembre dernier. Ces comptes rendus bibliographiques, interrompus pendant les deux dernières années en raison des travaux de réaménagement de l’Hôtel d’Assézat, seront à nouveau réguliers.
    Le Directeur remercie Daniel Cazes, puis il ajoute qu’il a pu se rendre compte en passant par la Garonnette que l’on était en train de recrépir le pont de Tounis.

    La parole est alors à Marie-Luce Pujalte pour une communication consacrée à Un hôtel toulousain du XVIIIe siècle : l’Hôtel de Nupces, publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires.


M.S.A.M.F., T. LVII, page 199

    Le Directeur remercie Marie-Luce Pujalte pour un exposé qui a le mérite particulier de présenter pour la première fois devant notre Compagnie le dossier de restauration d’un édifice du XVIIIe siècle. Si la restauration conduite par Bernard Calley ne peut être considérée comme un modèle, il faut cependant rappeler qu’elle a été pionnière pour ce qui est du traitement des élévations extérieures réenduites en vue de retrouver l’aspect d’origine.
    M. Bruand souligne le double intérêt que présente cette étude. C’est tout d’abord l’historique de l’édifice, fondé sur des documents et une utilisation intelligente des plans, qui apporte des précisions chronologiques sur les différents états de l’hôtel. C’est bien sûr en second lieu l’analyse de la restauration des années 1970. En ce qui concerne les plans cadastraux, M. Bruand note que le bâtiment est indiqué en pointillés sur le plan de Grandvoinet et que les hachures ajoutées sur la reproduction présentée en masquent les détails : or on constate que la façade arrière est animée de ressauts aujourd’hui disparus, ce qui laisse supposer une reconstruction de cette partie, survenue en même temps que l’on ajoutait d’autres constructions, sans doute au XIXe siècle. En revanche, la façade sur cour paraît peu modifiée. Si la comparaison entre les plans de Rochefort et de Grandvoinet assure que l’hôtel n’est pas antérieur à 1716, les ferronneries plus tardives témoigneraient de travaux de réfection qui ont peut-être vu la modification du grand escalier, lui-même reconstitué de façon volontairement « fantaisiste » au XXe siècle parce qu’aucune trace ni aucun document ne permettait d’en connaître les dispositions d’origine. En dépit de ses avatars, dont les récents surhaussements en retrait de toiture, l’hôtel de Nupces est un monument toulousain d’un indéniable intérêt.
    Après avoir demandé ce que l’on sait de la famille de Nupces, Pascal Julien dit qu’il ne croit pas que la vente à rente et le rachat de l’hôtel soient dus à des difficultés financières, et qu’il faut se méfier de ce genre d’acte pouvant être des tours de passe-passe. M. Bruand pense qu’il s’agit bien sûr d’une forme de prêt, et M. Gilles précise que cette pratique avait l’avantage de dispenser du paiement des intérêts.
    Pascal Julien se dit sidéré par la « restauration » qui a entièrement vidé les bâtiments en ne conservant que les façades. Louis Peyrusse renchérit en considérant que la destruction de l’édifice aurait été préférable au pastiche malhonnête que nous avons aujourd’hui. Maurice Scellès pense qu’il faut replacer cette rénovation dans le contexte de son époque, qui est celle des premières années d’application de la loi Malraux où le façadisme apparaissait comme un progrès après les destructions radicales de la période précédente.
    Marie-Luce Pujalte rappelle que la propriétaire a tenté une démolition partielle, orientant sur le portail un ordre de démolition donné par la Mairie pour des parties devenues dangereuses.
    Louis Peyrusse s’inquiète de savoir s’il a été possible de se faire une idée de la distribution et des aménagements intérieurs. Marie-Luce Pujalte indique que les dispositions connues par les photographies appartenaient au XIXe siècle, mais qu’elle est parvenue à reconstituer les grandes lignes de celles du XVIIIe en rapprochant les plans et les procès-verbaux de visite. Elle ajoute que l’hôtel était entièrement occupé par la famille de Nupces et ses domestiques et qu’il ne comprenait pas de partie louée, ce que confirme M. Coppolani qui précise que la famille comptait en 1790 neuf ou dix enfants et une quinzaine de domestiques.
    Répondant à une question de Louis Peyrusse, Marie-Luce Pujalte indique que les vases Médicis de la façade sur cour ont sans doute été ajoutés au XIXe siècle.
    Maurice Scellès fait remarquer que l’acquisition de la parcelle ne peut être suffisante pour dater la construction et demande quels sont les arguments stylistiques qui viennent confirmer une datation des années 1720. En se référant aux méthodes utilisées pour l’architecture civile médiévale, où le décor est souvent le principal argument de datation, il s’étonne que toutes les ferronneries étant datées des années 1760, l’hypothèse d’une construction tardive et peut-être archaïque ne soit pas envisagée. Louis Peyrusse affirme que les années 1720 correspondent à l’hypothèse la plus intéressante : le style de l’architecture pourrait éventuellement être celui d’une construction de la fin du siècle, hypothèse qui ne peut être retenue dans le cas de l’hôtel de Nupces, mais est tout à fait impossible dans les années 1750.
    Bernard Pousthomis considère que la restauration de l’hôtel est infiniment critiquable aujourd’hui, mais qu’il faut sans doute tempérer les critiques en considérant que l’édifice était promis à une disparition complète. Il rappelle qu’entré dans l’entreprise au début des travaux, il a eu l’occasion de visiter l’édifice avant rénovation. Il se souvient en particulier qu’il subsistait quelques marches et la saignée laissée par le limon sur les murs, d’ailleurs visible sur une photographie, qui aurait tout à fait permis de reconstituer l’escalier dans sa forme originelle. Les stucs qui restaient en place et les parquets ont été démolis pour permettre la rénovation.
    Bernard Pousthomis se souvient encore que les vestiges d’une mosaïque antique avaient été mis au jour par des travaux de reprise de fondation. Daniel Cazes indique que Michel Labrousse a signalé la découverte dans Gallia et l’abbé Baccrabère précise qu’aucune autre observation n’a été faite à cette occasion.

    Tous les membres ne partagent pas l’optimisme exprimé par certains alors que l’on continue aujourd’hui à vider entièrement des bâtiments pour n’en conserver que les façades, y compris dans le cas d’édifices protégés au titre des Monuments historiques comme la Manufacture des Tabacs à Toulouse. On donne également l’exemple de l’ancien collège et actuel musée Saint-Raymond où le premier projet de rénovation de l’architecte en chef et de l’administration des Monuments historiques, approuvé par la Commission supérieure, prévoyait de ne conserver que les quatre murs ; ce n’est qu’in extremis qu’il a été finalement décidé de conduire la rénovation en maintenant les niveaux d’origine.

    Au titre des questions diverses, M. Blaquière demande des informations sur les éventuels projets pour l’hôtel Saint-Jean. Il est rappelé que des travaux sont prévus pour y installer la D.R.A.C. et que le sujet ayant été évoqué en séance l’année dernière, il avait paru opportun d’adresser au Directeur régional des Affaires culturelles une demande d’information sur le sort qui serait fait


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à l’étude archéologique du sous-sol et des élévations de l’édifice. Ce courrier n’a finalement pas été fait. On fait remarquer qu’il serait important que notre Société manifeste à cette occasion toute l’attention qu’elle porte aux dossiers en cours.

    Le Président informe la Compagnie de nouvelles attributions parmi les membres de la Société : Christine Delaplace a pris en charge le rangement et le récolement des revues étrangères et assurera désormais le suivi des échanges ; Jean Nayrolles prendra la responsabilité des abonnements à partir de la fin de l’année tandis que le Secrétaire-adjoint remplace Claude Péaud-Lenoël pour la gestion des ventes des Mémoires.

 

SÉANCE DU MARDI 3 DÉCEMBRE 1996

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Cazes, Secrétaire Général, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste ; Mme Pradalier-Schlumberger, MM. l’abbé Baccrabère, Cabau, le général Delpoux, Julien, l’abbé Rocacher, membres titulaires ; Mmes Blanc-Rouquette, Delaplace, Napoléone, Pujalte, MM. Burroni, Ginesty, Manuel, le Père Montagnes, membres correspondants.
Excusés : M. Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mme Aribaud, MM. Gérard, Peyrusse.

    Le Président rend compte de la correspondance adressée à la Société et relève parmi les nombreuses invitations reçues l’annonce d’une exposition organisée par le Musée des Augustins et le Musée Paul-Dupuy sur la sculpture à Toulouse au XVIIe siècle. Cette exposition, à la préparation de laquelle plusieurs membres de notre Compagnie ont participé, se tiendra au Musée des Augustins à partir du 13 décembre. Le Président souhaitant que nous puissions en faire une visite particulière, rendez-vous est pris pour le mardi 14 janvier à 17 heures.

    Le Président relève ensuite dans le bulletin de la Société française d’Archéologie, SFActualités, le compte rendu du Congrès archéologique tenu à Toulouse au mois de septembre 1996 ; on y souligne le bon accueil réservé aux congressistes.
    Puis le Président signale la réception d’un travail présenté au prochain concours annuel de notre Société, dont les lauréats doivent être récompensés lors de la séance publique du 5 avril 1997. Il s’agit d’un mémoire de maîtrise soutenu au mois de juin 1996 à l’Université de Toulouse-Le Mirail par Mlle Cécile Gloriès et intitulé Un exemple d’analyse de parcellaire urbain : l’îlot de l’ancien hôtel de ville de Saint-Antonin-Noble-Val, au Moyen Âge et à l’époque moderne (2 volumes).
    Enfin, le Président annonce le décès de Jean Vanel, de Rabastens, membre correspondant depuis 1947, l’un des plus anciens de notre Compagnie.

    Il cède ensuite la parole au Secrétaire Général pour le compte rendu des revues étrangères et françaises reçues par notre Société. Puis il présente une série d’ouvrages offerts à la Société. Dominique Baudis, Maire de Toulouse, nous a fait hommage de son roman Raimond « le Cathare » ; trois de nos confrères ont contribué à l’enrichissement de notre bibliothèque : Christine Delaplace avec l’Histoire des Gaules (VIe siècle avant J.-C. - VIe siècle après J.-C.) dont elle est le coauteur ; Louis Latour a offert huit volumes de publications diverses.

    Le Président remercie Daniel Cazes pour sa recension, ainsi que les donateurs, et cède la parole au Père Montagnes pour la communication du jour, consacrée à L’œuvre du graveur toulousain Michel Beaujean pour la Confrérie du Rosaire, au XVIIe siècle, publiée dans ce volume de nos Mémoires (t. LVII, 1997).

    Le Président remercie le Père Montagnes pour sa communication, qui constitue une intéressante contribution à l’étude des graveurs toulousains de la seconde moitié du XVIIe siècle, puis il fait appel aux questions et remarques de l’assemblée.

    L’abbé Rocacher demande au Père Montagnes si ses recherches lui ont fait découvrir de nouveaux renseignements sur Frère Balthasar-Thomas Moncornet, peintre dominicain du couvent de Toulouse, qui décora dans la seconde moitié du XVIIe siècle le cloître des Jacobins et la chapelle de la maison de l’Inquisition. Le Père Montagnes répond par la négative, mais il signale à ce propos que le premier portrait gravé du réformateur dominicain Sébastien Michaëlis donna lieu à diverses réinterprétations, dont l’une fut réalisée par le Frère Moncornet.

    Daniel Cazes fait remarquer le caractère pictural de la composition de certaines des gravures présentées et s’interroge sur le point de savoir si elles constituent une iconographie originale ou bien si elles ont été inspirées par des peintures. Pour le Père Montagnes, il s’agit là d’un problème réel, difficile à résoudre du fait de l’extrême rareté des représentations du Rosaire subsistant dans la région toulousaine : on ne connaît en effet aucune toile peinte, seulement une sculpture se trouvant sur l’autel du Rosaire dans l’église de Fronton. À l’inverse, la gravure illustrant le mystère du feu pourrait avoir servi de modèle pour des peintures. Il ressort en fin de compte que Michel Beaujean a créé des œuvres relativement originales, notamment avec la série des quinze figures de sainteté de l’Ordre dominicain.

    Pascal Julien intervient pour signaler que la gravure figurant la prédication de saint Dominique dans la nef de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse contient la seule représentation connue de la grosse cloche « Cardaillac » refondue en 1531, qui fut détruite à la Révolution. Il indique ensuite que la planche gravée pour la Confrérie des Corps-Saints de Saint-Sernin de Toulouse, dont notre Société possède la matrice regravée en 1762, fut à l’origine dessinée par Jean II Michel, en 1701, et gravée par Michel Beaujean, en 1702. Puis il évoque la possibilité que d’autres œuvres de Michel Beaujean se trouvent dans le fameux Fonds


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Pifteau ; on déplore que les gravures et brochures de ce fonds ne soient pas encore inventoriées et demeurent toujours inaccessibles.
    Marie-Thérèse Blanc-Rouquette rappelle que Robert Mesuret avait présenté plusieurs œuvres de Michel Beaujean lors de l’exposition Les estampes toulousaines, les graveurs en taille-douce de 1600 à 1800, tenue en 1951. Elle ajoute qu’un portrait de Pierre Goudelin passait pour une des meilleures œuvres de cet artiste, et que celui-ci a refait des gravures de Jean-Étienne Lasne, son parent par alliance.

    Cet échange de vues terminé, on passe à la suite de l’ordre du jour avec l’élection d’un membre correspondant.
    Le Président donne la parole à Michèle Pradalier-Schlumberger pour la lecture du rapport sur la candidature de Conchita-Christine Jimenez, qui est élue membre correspondant.

    Les questions diverses sont abordées avec la lecture d’une note concernant la découverte récente à Toulouse des vestiges d’une importante construction médiévale. Au n° 69 de la rue du Taur, les élévations qui ferment au sud la cour orientale de l’ancien collège de l’Esquile laissent apparaître un mur-pignon et un autre mur perpendiculaire, percé d’ouvertures, lesquels peuvent appartenir à un bâtiment datable du XIIe ou du XIIIe siècle ; à l’extrémité est de cette face de la cour se voyaient déjà des maçonneries peut-être plus anciennes, associant briques et pierres, qui avaient attiré l’attention de Daniel et Quitterie Cazes. Anne-Laure Napoléone, qui a examiné les éléments révélés en dernier lieu, souligne la qualité de leur construction, réalisée avec des briques entières. Henri Pradalier fait circuler un croquis de ces élévations, que lui a fait parvenir l’architecte Olivier Testard, à qui l’on doit l’identification et l’analyse des vestiges. Le programme de rénovation lié à l’implantation de la cinémathèque dans le bâtiment de l’ancienne chapelle du Grand Séminaire prévoyant d’enduire de crépi la paroi méridionale de la cour, il a été demandé aux Services administratifs compétents de faire surseoir à l’exécution de ce projet. Gabriel Burroni, qui a repéré une tour médiévale située immédiatement au Sud de l’ancienne chapelle et qui surveille les travaux exécutés dans ce secteur, annonce que l’élément oriental, le plus ancien, vient d’être recouvert d’un épais crépi.

    Les membres de la Société s’accordent une nouvelle fois à condamner l’incurie des Services institutionnels, que l’on hésitera de plus en plus à qualifier de « compétents » ou de « responsables » ; on stigmatise en l’occurrence le désintérêt affiché par l’Agence des Bâtiments de France, laquelle s’est naguère installée sur place, à quelques mètres à peine des vestiges maintenant occultés, et qui se trouvait tout particulièrement concernée par leur mise en valeur.

    D’une façon plus générale, plusieurs membres s’émeuvent que les Services et les architectes qui ont eu à intervenir dans le cadre de ces travaux n’aient pas accordé une plus grande attention aux traces archéologiques ou aux éléments en remploi. On cite encore l’exemple de l’opération qui vient d’être entreprise dans une maison située à l’angle de la place Saint-Sernin (n° 7), des rues Gatien-Arnout et des Cuves Saint-Sernin, dont les murs contiennent une très grande quantité d’éléments provenant de


TOULOUSE, PLACE SAINT-SERNIN, N° 7.
Photographie prise vers 1980 : on distingue les arases formées de dalles en remploi provenant du cloître de Saint-Sernin.

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l’ancien cloître du monastère, démoli au début du XIXe siècle (dalles de pavement en pierre calcaire, fragments de marbre gris, parmi lesquels un tronçon de colonnette). Dans cette maison doivent être aménagés un restaurant et un « appartement de fonction » ; la cave a été surcreusée, un étage supplémentaire est en cours de construction, et les murs ne tarderont pas à recevoir un crépi qui fera disparaître les derniers vestiges du cloître visibles sur son propre site. Aucune des autorités alertées ne paraît être intervenue. On peut s’étonner qu’une telle opération ait pu être possible dans l’environnement immédiat de la basilique et être choqué que des administrations qui savent par ailleurs soumettre à une tutelle tracassière le choix du traitement des façades ou de la couleur des portes, fenêtres et volets, n’aient pas jugé utile de réagir.

 

SÉANCE DU 17 DÉCEMBRE 1996

Présents : MM. Pradalier, Président, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mme Pradalier-Schlumberger, MM. l’abbé Baccrabère, Cabau, Gérard, Julien, Péaud-Lenoël, Vézian, membres titulaires ; Mmes Blanc-Rouquette, Delaplace, Heng, Napoléone, Pujalte, MM. Bertrand, Bruand, Burroni, Cranga, Luce, Manuel, le Père Montagnes, Nayrolles, Pousthomis, membres correspondants.
Excusés : MM. Coppolani, Directeur, Cazes, Secrétaire Général, Mlle Pujalte, MM. Daguerre de Hureaux, Peyrusse, Tollon.

 

    Patrice Cabau donne lecture du procès-verbal de la séance du 3 décembre, qui est adopté.
    Puis le Président rend compte de la correspondance manuscrite et présente plusieurs publications offertes par Mme Blanc-Rouquette et M. Pascal Julien.

    Le Président donne ensuite la parole à Michèle Heng pour la communication du jour, L’hôtel dit de la Reine Jeanne d’Albret à Nay ou les problèmes posés à une commune de quatre mille habitants par l’acquisition, la restauration, l’aménagement et l’utilisation d’un monument historique, publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires.

    Le Président remercie Michèle Heng pour cette communication qui lui a parfois donné l’impression de revivre certains épisodes du réaménagement de l’Hôtel d’Assézat. Il est évident en tout cas que la restauration de cet hôtel de Nay pose un certain nombre de questions. Mais avant d’aller plus avant, le Président voudrait savoir ce que Michèle Heng entend quand elle dit « nous ». Celle-ci répond qu’ayant réalisé le reportage photographique qui a été à l’origine de « l’affaire », elle s’est retrouvée à son corps défendant, désignée « commissaire culturel de la Mairie », sans cependant disposer d’un quelconque pouvoir. Elle a assisté de ce fait à toutes les réunions de chantier. En outre, elle était en contact personnel avec un collectionneur de la région qui était disposé à prêter des œuvres si le projet d’un centre d’art voyait le jour.

    Maurice Scellès pense que les maçonneries de moellons relèvent d’une technique de construction très utilisée à cette époque et qu’il ne faut pas nécessairement y voir une marque de médiocrité.
    Pour Pascal Julien, la datation proposée paraît très précoce : à première vue, on pourrait même songer au début du XVIIe siècle. Michèle Heng rappelle qu’elle n’est pas spécialiste de l’architecture de cette époque et regrette que Bruno Tollon ne soit pas présent pour nous apporter son concours. Elle rappelle cependant que les archives font état de deux parcelles en 1550 et que Pedro Sacazes, à qui l’on attribue la construction de l’hôtel, est mort en 1556. Pascal Julien pense qu’il faut regarder du côté de Toulouse où les ordres superposés ne sont pas employés avant 1550. Guy Ahlsell de Toulza fait remarquer que l’on en a en fait un exemple à Toulouse dès les années 1527-1530 avec l’hôtel de Lamamye, l’actuel n° 31 rue de la Dalbade ; il note par ailleurs que le chiffre placé dans les armes ressemble beaucoup à une marque de marchand, et regrette que la recherche n’ait pas été plus poussée sur ce point. Michèle Heng précise que ce n’est pas faute d’y avoir pensé, mais que les recherches auraient dû être poursuivies à Saragosse, ce que les limites d’un mémoire de maîtrise ne réclamaient pas de l’étudiante à qui l’on doit l’étude de l’hôtel.

    Le Président remarque que quel que soit le choix retenu pour la réutilisation de l’édifice, celui-ci deviendra un point de rencontre culturel et sera de ce fait visible par tous. Mais le projet de restauration respecte-t-il l’édifice ? Michèle Heng indique que le projet de bibliothèque, abandonné après qu’ont été réalisés les travaux de gros œuvre, a conduit a dénaturer entièrement les sols d’origine qui ont été remplacés par des dalles de béton capables de résister aux charges des livres.
Répondant à une interrogation de Michèle Heng, le Secrétaire-adjoint dit que la question de savoir s’il faut reconstituer ou non le pavement de la cour dépend surtout des disponibilités financières. Si la conservation impose des interventions et les moyens nécessaires, on peut estimer que la reconstitution de parties manquantes n’a aucun caractère d’urgence même si elle est souhaitable.

    Guy Ahlsell de Toulza constate que les remous provoqués par l’achat et la restauration de l’hôtel par la commune révèlent une étonnante absence de conscience culturelle dans la ville. Aucun érudit local, aucune association n’a pu servir d’interlocuteur et permettre à la population d’avoir d’autre source d’information que la rumeur. Le Syndicat d’initiative ne pouvait-il éviter la dérive politique du débat ? Michèle Heng fait l’état des lieux et déplore que le Syndicat d’initiative soit totalement dépendant de la municipalité.
    Guy Ahlsell de Toulza admet que les 14 millions de francs que représente l’opération est un engagement financier considérable pour une commune de 3 000 habitants et pense qu’il faudrait sans doute dans bien des cas pouvoir brider l’architecte


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en chef des Monuments historiques. Une seule personne ne suffit pas et ce sont cinq ou six personnes qui seraient nécessaires pour avoir le contrepoids intellectuel local. Pour Louis Latour, il faut que l’action éducative soit menée très en amont.

    Claude Péaud-Lenoël demande des précisions sur l’état des autres maisons de la place après l’incendie qui a précédé la construction de l’hôtel. Michèle Heng indique que la reconstruction s’est faite sur un plan d’ensemble. Actuellement, les deux maisons voisines datent du XVIIe siècle pour l’une et du XIXe pour l’autre. Les cornières sont conservées et quelques maisons intéressantes du XVIIe siècle subsistent dans les rues perpendiculaires.

 

SÉANCE DU 7 JANVIER 1997

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Pradalier-Schlumberger, Labrousse, Merlet-Bagnéris, Noé-Dufour, MM. Blaquière, Gérard, Julien, Péaud-Lenoël, Peyrusse, l’abbé Rocacher, Sicard, Tollon, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Delaplace, Jimenez, Pujalte, Ugaglia, MM. Bertrand, Cranga, Daguerre de Hureaux, Manuel, Nayrolles, le Père Montagnes, Pousthomis, membres correspondants.
Excusé : Le général Delpoux.
Invités : Mme Latour, Mlle Trouvé, le Père Clair O.P.

 

    La séance se tient au Musée des Augustins. Le Président présente à la Compagnie ses meilleurs vœux pour la nouvelle année, puis il donne la parole à M. Alain Daguerre de Hureaux, Conservateur du Musée des Augustins et depuis peu membre de notre Société.

    Avant de céder la place à Pascal Julien à qui il reviendra de présenter l’exposition, Alain Daguerre de Hureaux tient à exprimer le plaisir qu’il éprouve à accueillir la Société Archéologique du Midi de la France au Musée des Augustins, en se rappelant d’ailleurs que les musées de Toulouse doivent une grande partie de leurs collections à la Société Archéologique.

    On sait combien de difficultés rencontre la réalisation d’une exposition, et plus encore celle d’une exposition de sculpture. D’autres problèmes s’y ajoutent quand il faut déplacer des œuvres en bois, nombreuses dans cette exposition, en constatant au moment de leur transfert leur extrême fragilité due à leur mauvais état. Il faut en effet savoir que les dorures ou les peintures cachent souvent sous de trompeuses apparences des bois entièrement vermoulus. L’exposition a donc fourni l’occasion d’un diagnostic et toutes les œuvres qui le méritaient ont été non seulement nettoyées mais également consolidées, certaines entièrement restaurées. Celles qui ne l’ont pas été faute de temps recevront un traitement complémentaire avant d’être rendues à leurs édifices. C’est dire que cette exposition, plus encore qu’une autre peut-être, n’aurait pas été possible sans le concours permanent de l’atelier de restauration de la Ville de Toulouse qui seul pouvait assurer le transport, la restauration et la présentation de ces sculptures.

    Alain Daguerre de Hureaux tient également à souligner tout l’intérêt que représente pour le Musée lui-même une exposition de cette nature. Si L’or de Bogota a été visitée en trois mois par 45 000 personnes qui ont ainsi retrouvé ou découvert le Musée des Augustins, une exposition de sculpture régionale a l’avantage d’être en liaison directe avec les collections du musée dont la connaissance se trouve ainsi enrichie. Il rend hommage au travail accompli par Jean Penent et par Pascal Julien, Stéphanie Trouvé, Fabienne Sarthe, Catherine Bourdieu et Jean-Pierre Suzzoni, dont les recherches ont alimenté la matière scientifique de l’exposition, et qui ont de plus apporté leur concours quotidien. Alain Daguerre de Hureaux exprime le souhait que se poursuive cette nécessaire collaboration entre le Musée et l’Université. Il ajoute que cette collaboration est d’autant plus nécessaire que l’époque n’est pas au renforcement des conservations des Musées : c’est en faisant appel à des concours extérieurs, et en particulier aux chercheurs de l’Université, que l’on pourra accomplir le travail considérable qu’il reste à faire sur les collections. Cette exposition doit être la première d’une série qui permettrait de mieux connaître les œuvres du Musée des Augustins, l’un des seuls grands musées français à avoir une véritable collection de sculpture. Mme Catherine Gaich a ainsi commencé à travailler sur les sculptures du XIXe siècle, et en particulier les œuvres de Falguière. Alain Daguerre de Hureaux termine en déclarant que ce serait avec plaisir qu’il recevrait des propositions pour la sculpture du XVIIIe siècle.

    Pascal Julien prend alors la parole pour présenter L’âge d’or de la sculpture : artistes toulousains du XVIIe siècle à la Compagnie, en rappelant que ce sont trois étudiants de M. Yves Bruand qui sont, pour une large part, à l’origine de cette exposition qui est ainsi un hommage à leur professeur.

    Le Président remercie Alain Daguerre de Hureaux et Pascal Julien et tous ceux qui ont permis la réalisation de cette exposition. Plusieurs discussions s’engagent autour de différentes œuvres. Le Président interroge Pascal Julien à propos de l’écart de qualité d’exécution que l’on constate entre des sculptures pourtant attribuées au même artiste. Pascal Julien indique que dans le cas des statues de Mestrier, l’attribution se fonde sur les contrats, mais qu’il faut bien garder à l’esprit que si le contrat est passé avec un sculpteur, il est tout à fait possible que ce soit en fait un autre artiste travaillant dans son atelier qui réalise effectivement l’œuvre ; l’analyse stylistique s’en trouve bien sûr singulièrement compliquée.
    Répondant à une question de M. Sicard sur les techniques de l’argent repoussé, Pascal Julien précise que les motifs principaux


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sont sculptés sur l’âme de bois et recouverts d’une mince feuille d’argent, éventuellement retravaillée, mais que s’y ajoutent le travail propre de l’orfèvre et des motifs secondaires en repoussé.

    Le Président donne le programme des prochaines séances.

 

SÉANCE DU 21 JANVIER 1997

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Cazes, Labrousse, Pradalier-Schlumberger, MM. Cabau, le général Delpoux, Gérard, Hermet, Julien, Péaud-Lenoël, Peyrusse, l’abbé Rocacher, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Delaplace, Jimenez, Napoléone, Pujalte, Ugaglia, MM. Bertrand, Burroni, Cranga, Daguerre de Hureaux, Ginesty, Manuel, Nayrolles, le Père Montagnes, membres correspondants.

 

    Le Président présente les derniers ouvrages donnés à la Société par ses membres :
    - de l’abbé Rocacher : Maurice Prin et Jean Rocacher, Les Jacobins et les maisons dominicaines de Toulouse, Albi-Toulouse : 1996, non paginé ; Églises et chapelles de la Haute-Garonne : le canton de Fronton, Toulouse : Ass. des Amis des Archives, s.d. [1996], 10 p.
    - d’Henri Pradalier : Jean-François Lemainguier, La France médiévale : institutions et société, Paris : A. Colin, 1981, 416 p. (Coll. U) ; John Steer, Anthony White, Atlas de l’art occidental, Paris : Citadelles et Mazenod, 1995, 335 p.

    Le Président invite les membres à multiplier les dons à la Bibliothèque, en rappelant que nos nouveaux locaux nous permettent à présent de recevoir des livres, et que notre salle de lecture est de plus en plus fréquentée. Nos collections présentent cependant des trous importants, en particulier pour les ouvrages parus depuis 1945, qu’il serait souhaitable de combler dans la mesure du possible.
    Le Secrétaire-adjoint donne lecture des procès-verbaux des séances des 19 novembre 1996 et 7 janvier 1997, qui sont adoptés.

    Le Président fait circuler une série de photocopies de dessins du Cabinet des estampes, que Mme Jestaz a adressée à la Société pour identification. Ces dessins sont réputés représenter des édifices toulousains, mais le Président a reconnu dans l’un d’eux une vue de l’église de Grenade, ce qui indique que le cadre géographique est sans doute plus large.

    La parole est ensuite au Trésorier pour le rapport financier.
    Le Président remercie Guy Ahlsell de Toulza pour la présentation des comptes, aussi claire qu’à l’accoutumée et très bien expliquée.
    Le Président évoque les éventuelles subventions que nous pourrions rechercher, mais rappelle que nous avons intérêt à sauvegarder notre indépendance. Il ajoute toutefois que M. Remplon lui a annoncé que la Ville de Toulouse pourrait augmenter de façon significative sa subvention aux Académies et Sociétés savantes.
    La Compagnie donne quitus au Trésorier pour sa bonne gestion.

    Le Président reprend la parole pour le compte rendu de la réunion que M. Remplon et lui-même ont eue avec Mme Salvan, responsable des Affaires culturelles à la Région. Par ailleurs, à la suite des contacts pris à l’occasion du salon F.A.U.S.T., le lycée des Arènes à Toulouse et celui de Muret pourraient effectuer des mises en forme informatique permettant de rendre des informations disponibles sur Internet. Le Secrétaire-adjoint demande ce qu’il en est aujourd’hui du site mis à notre disposition par Médiacastres. Le Président s’en informera auprès de M. Desbonnet.

    Puis le Président rappelle que la séance publique aura lieu le 5 avril, avec une conférence de notre confrère Pascal Julien. La séance publique est aussi le jour de la remise des prix du concours. Le Président souhaite que la plus large publicité soit faite pour ce concours, afin que les candidats soient plus nombreux qu’à l’accoutumée. Il constate qu’en effet les prix décernés au cours de ces dernières années peuvent donner l’impression de prix réservés à des étudiants de l’Université de Toulouse-Le Mirail.
    Par ailleurs, le Bureau a décidé de créer une commission qui sera chargée de suivre le dossier de Martres-Tolosane en reprenant contact avec le Maire qui nous a sollicités. La commission est composée de Daniel Cazes, Guy Ahlsell de Toulza, Jean Coppolani et Maurice Scellès.

    Comme prévu à l’ordre du jour, il est procédé aux élections statutaires : MM. Coppolani, Ahlsell de Toulza et Scellès sont réélus respectivement Directeur, Trésorier et Secrétaire-adjoint.
M. Coppolani, en son nom et au nom de ses confrères réélus, remercie la Compagnie de cette confiance renouvelée.


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    Le Président propose de procéder à l’élection de membres titulaires. Il indique que deux sièges sont vacants et qu’il a proposé au Bureau, qui les a acceptés, les noms de Jean Nayrolles et du Père Montagnes. On procède au vote : le Père Montagnes et Jean Nayrolles sont élus membres titulaires.

 

    La parole est alors à Quitterie Cazes pour une communication consacrée aux fouilles du Musée Saint-Raymond, publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires.

    Après avoir présenté les résultats des fouilles, Quitterie Cazes laisse la parole à Daniel Cazes qui, accompagnant son propos de photographies qu’il fait circuler parmi la Compagnie, résume les principaux apports de la fouille pour la connaissance des sarcophages dits « du Sud-Ouest de la Gaule ». Puis Patrice Cabau expose les quelques données que fournissent les documents historiques sur l’hôpital et le collège.

    Le Président remercie les intervenants et donne la parole à M. Pierre Gérard qui souhaite apporter quelques informations que l’on peut tirer du cartulaire de Saint-Sernin. Il rappelle tout d’abord que celui-ci a été recopié entre 1167 et 1169 et complété à partir de 1183 : le fonds de l’hôpital Saint-Raymond appartient à la première partie du cartulaire. Les deux actes qui concernent la fondation de l’hôpital, les n° 546 et 547, s’inscrivent dans la période de renouveau religieux que l’on connaît à partir de 1075. Pour M. Gérard, compte tenu des personnages qui interviennent dans les deux actes, il faut dater le n° 546 des années 1075 à 1078, et le n° 547 des années 1078-1080.
    Pour ce qui est du cumul des mandats, M. Pierre Gérard souligne qu’il faut, pour les comprendre, remonter aux origines mêmes, lorsque l’évêque était en fait entouré de deux chapitres, celui de Saint-Étienne d’une part, celui de Saint-Sernin d’autre part, chacun ayant à sa tête un prévôt. Le relâchement religieux du XIe siècle a favorisé des cumuls considérables, et l’on voit avec un personnage comme R. Ebbon une transmission des charges de père en fils. En 1073, l’évêque Isarn réforme son chapitre, tandis que celui de Saint-Sernin procède à sa propre réforme. À l’heure de sa mort, R. Guillaume de Marquefave se repent et restitue les biens usurpés, et l’on constate que toutes les restitutions interviennent d’ailleurs à peu près à la même époque : la démonstration en est faite dans la publication du cartulaire.
    Pierre Gérard ajoute qu’en ce qui concerne Raymond Gayrard, il a trouvé un document datable vers 1110 dans lequel celui-ci réalise une acquisition pour l’œuvre de Saint-Sernin, ce qui prouve qu’il est encore vivant au moins jusqu’à cette date.
Le Président demande si l’on sait précisément quel était le vocable de la chapelle Saint-Jean : Saint-Jean-l’Évangéliste ou Saint-Jean-Baptiste. M. Pierre Gérard et Patrice Cabau répondent que rien ne permet de le savoir.

    Pascal Julien ramène l’attention sur le four à chaux en demandant s’il faut conclure qu’il se situerait après la construction de la basilique Saint-Sernin. Quitterie Cazes précise que le four est strictement daté par deux monnaies de 364-378 et 378-408 qui donnent le terminus post quem, un terminus ante quem étant fourni par une fiole datable des années 450-550.
    Le Président s’étonne que le four ait été abandonné sans avoir été vidé de son chargement. Quitterie Cazes indique que la fouille n’a pas permis de déterminer les conditions de l’abandon. Louis Peyrusse demande ce que l’on sait en général sur les fours à chaux. Quitterie Cazes répond que des batteries de fours ont été étudiées en Allemagne, que d’autres exemples de fours à chaux sont connus en Italie : il apparaît qu’ils sont souvent placés dans un bâtiment qui sert de réserve, mais jamais il n’a été possible de mettre en relation l’approvisionnement, le four et le bâtiment à construire.

    Au titre des questions diverses, M. Hermet annonce que l’Assemblée générale des Toulousains de Toulouse, à laquelle les membres de la Société Archéologique du Midi de la France sont naturellement invités, aura lieu le samedi 15 février à 16 heures dans la salle Tolosa. La conférence sera faite par Henri Pradalier et les Toulousains de Toulouse remettront leur prix annuel à notre confrère Pascal Julien.

    À la demande du Président, le Secrétaire-adjoint tente une présentation de l’affaire des fouilles de Rodez dont la presse a largement rendu compte ces derniers jours. Le Président donne lecture de la lettre du premier ministre autorisant la reprise du chantier de construction et de celle du préfet expliquant au Service régional de l’archéologie que la décision prise pour Rodez ne doit pas faire croire que la législation en matière de destruction de vestiges archéologiques n’est plus applicable. Un membre précise que les fouilles n’ont pas été réalisées et que des vestiges archéologiques ont été détruits. Afin de mieux pouvoir juger du dossier, il est convenu de chercher un complément d’information.

 

SÉANCE DU 4 FÉVRIER 1997

Présents : MM. Pradalier, Président, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Pradalier-Schlumberger, Labrousse, MM. Blaquière, Cabau, Nayrolles, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Jimenez, Pujalte, Ugaglia, MM. Burroni, Cranga, Luce, membres correspondants.
Excusés : M. Coppolani, Directeur, M. Gérard.
Invités : Mme Cranga, M. Guilbaut.


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    Le Secrétaire-adjoint donne lecture du procès-verbal de la séance du 17 décembre.

    Puis le Secrétaire Général poursuit sa présentation des ouvrages reçus. Le Président remercie le Secrétaire Général et rappelle que le déménagement de la Société a provoqué un retard si considérable que de très nombreux ouvrages ne pourront être présentés en séance. Il attire l’attention sur le travail très important que demande cette recension et souhaite que d’autres membres, en particulier des modernistes, apportent leur concours en réalisant une partie des comptes rendus, comme cela avait déjà été envisagé.
    Puis le Président présente les publications données à la Société par deux de ses membres qu’il remercie :
    - de Christine Aribaud, trois tirés-à-part : « Un devant d’autel du musée Paul-Dupuy », dans Cahiers de Fanjeaux, vol. 28, 1993, p. 175-190 ; « À propos de la chasublerie à Toulouse du XVIe au XIXe siècles », dans Annales du Midi, n° 1 (1994), p. 41-56 ; « La création d’une manufacture de soie à Toulouse en 1543 : espoirs et déboires », dans Bulletin du Centre International d’Études des Textiles Anciens, n° 73 (1996), p. 79-83 ;
    - de Daniel Cazes, plusieurs ouvrages, tirés à part et plaquettes.

    La correspondance manuscrite comporte divers catalogues et invitations que le Président fait circuler. Nous avons également reçu de Dominique Baudis une lettre de remerciements aux condoléances que le Président lui avait adressées au nom de la Société pour le décès de son père Pierre Baudis.

 

    Le Président donne ensuite la parole à M. Jean-Emmanuel Guilbaut, Ingénieur d’études au Service Régional de l’Archéologie, qui a bien voulu répondre à notre invitation en venant nous présenter ce soir le dossier qui est devenu ces derniers jours l’« affaire » du Parmentier de Rodez :

    Jean-Emmanuel Guilbaut rappelle tout d’abord que Rodez, comme Toulouse ou Auch par exemple, a fait l’objet ces dernières années d’un zonage archéologique établi par le Service Régional de l’Archéologie (S.R.A.) dans le cadre du décret de 1986 qui permet d’intervenir sur les permis de construire et de démolir.
    Les débuts de ce qui n’est pas encore une « affaire » remontent à 1992, lorsque la demande de permis de démolir reçoit un avis favorable mais assorti d’une restriction pour tout terrassement, qui devra faire l’objet d’une autorisation préalable. Le plan du quartier sur lequel ont été reportées toutes les découvertes archéologiques connues montre clairement dans quel contexte se situe la parcelle concernée : le terrain se trouve à 100 m de l’église Saint-Amans, au cœur d’une zone où les découvertes ont été nombreuses, et en bordure immédiate du rempart médiéval figuré par une gravure de 1495 et sur le plan du XVIIIe siècle qui a servi de fond à l’Atlas historique des villes de France.
    Le second permis de démolir, déposé après qu’une parcelle supplémentaire avait été acquise par le promoteur, a reçu le 29 décembre 1994 un avis du S.R.A. excluant tout terrassement. Des sondages d’évaluation, autorisés et financés par le promoteur dans le cadre de la phase de diagnostic, ont confirmé l’intérêt scientifique du site en mettant au jour des niveaux de la Tène III, un bassin romain et le rempart médiéval conservé sur 3 m d’élévation et 30 m de long. C’est sur cette base qu’a été engagée la négociation, selon une procédure habituelle.
    Un premier devis de 900 000 F. pour la fouille et l’étude a été proposé, bientôt ramené à 750 000 F. à la demande de la Direction du Patrimoine. Le promoteur maintient son refus tandis que les pressions politiques se font de plus en plus lourdes. Au mois d’août 1995, la Mairie de Rodez délivre l’autorisation de démolir, passant outre l’avis du S.R.A. On concède cependant aux archéologues deux mois et demi pendant lesquels le terrain restera disponible.
    Vers le 25 octobre 1995, le chantier démarre, aussitôt arrêté par les agents du S.R.A. : le Ministre de la Culture signe une instance de classement immédiat au titre des Monuments historiques qui suspend les travaux pour un an. Deux inspections sont alors diligentées et la négociation reprend, l’État proposant en particulier de financer par une subvention, de façon tout à fait exceptionnelle, 50 % du coût de la fouille. On n’aboutit à rien et l’aménageur considère que la question sera réglée à la fin du délai légal de l’instance de classement. Le Ministre de la Culture a toutefois rappelé que le non classement du site n’autoriserait pas la destruction des vestiges archéologiques.
    Le Vice-Président du Conseil régional fait alors une intervention directe auprès du Premier ministre qui, par sa lettre du 12


RODEZ (AVEYRON), « AFFAIRE » DU PARMENTIER.
Vestiges d'un bassin romain mis au jour par les sondages d'évaluation réalisés en 1995.
novembre 1996, autorise la reprise de l’opération immobilière en indiquant que les promoteurs n’auront pas à craindre « d’être poursuivis pour démolition de vestiges archéologiques en vertu de l’article 322-1 [sic] du code pénal », le Ministre de la Culture ayant décidé le 25 octobre « de ne pas prononcer le classement définitif des vestiges trouvés sur le terrain » et renonçant « à toute opération de protection de ces éléments archéologiques ». On a ainsi confondu la loi de 1913 sur les Monuments historiques et l’article 322-2 du code pénal relatif à la destruction d’éléments archéologiques.
Lorsque le personnel du S.R.A. a eu connaissance de ce courrier, les travaux avaient déjà repris, salués de façon triomphante

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RODEZ, « AFFAIRE » DU PARMENTIER. VUE DU SITE EN JANVIER 1997 : l'excavation pratiquée à la hâte
a fait disparaître 2,50 m de couches archéologiques.

par la presse locale. Une fois sur place, les agents ont essuyé un refus de la police de les accompagner et ont dû procéder au procès-verbal en installant une échelle contre la palissade du chantier, pour constater qu’un énorme trou avait déjà été pratiqué à la hâte, faisant disparaître 2,50 m de couches archéologiques, avec d’ailleurs quelques risques pour les bâtiments voisins. La presse a alors largement fait écho aux chiffres donnés par l’aménageur qui prétendait que le coût des sept mois de fouilles demandés par les archéologues était exorbitant et représentait 20 % du coût global du chantier, quand il n’en représente en fait que 4,5 %.

    La mobilisation immédiate des archéologues a permis de réunir en une journée 180 personnes qui sont venues manifester à Rodez, sur les 336 agents que comptent les S.R.A. et les 1500 archéologues de l’Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (A.F.A.N.). En même temps était déclenchée une grève nationale, avec une occupation des locaux des S.R.A. et des Directions régionales des Affaires culturelles qui a duré neuf jours. Lors d’une rencontre avec les agents du S.R.A., le Secrétaire général de la Préfecture de l’Aveyron a renvoyé vers la police la responsabilité de l’arrêt des travaux. Finalement, à l’issue du Conseil des ministres du 23 janvier 1997, le Ministre de la Culture et le Premier ministre ont déclaré que la loi s’appliquait à tous de la même manière, et la police a fait évacuer le chantier.

    La négociation a donc repris, sur la base d’un coût de 600 000 F. pour la fouille, subventionnée à 50 % par le Ministère de la Culture, avec cette fois-ci la question supplémentaire de savoir qui allait fouiller le site. Le choix s’est porté sur l’Association archéologique locale, qui tout en déclarant que la destruction des vestiges archéologiques était scandaleuse, ne s’était pas associée aux manifestations et au mouvement de grève en considérant qu’il s’agissait d’un mouvement politisé. Si elle est dirigée par un archéologue incontestablement compétent, cette association, subventionnée par le Conseil Général, emploie pour effectuer les travaux des C.E.S. et des bénévoles, ce qui posait dans ce cas précis des problèmes délicats en raison de la technicité du chantier. Après une nouvelle campagne de protestation, c’est finalement l’A.F.A.N. qui a été retenue. En guise de conclusion, il est possible de se demander si les choses eussent été différentes si l’année 1996 n’avait justement été l'« année André Malraux » ?

    Le Président remercie Jean-Emmanuel Guilbaut de cet exposé très clair.

    Guy Ahlsell de Toulza demande quel est le temps accordé à la fouille. Jean-Emmanuel Guilbaut précise que le délai inclut un mois de fouille et un mois d’étude, mais que dix jours au moins seront nécessaires pour nettoyer le terrain.

    Évelyne Ugaglia remarque que la grève des archéologues a été déclenchée par l’affaire de Rodez, mais que la question posée reste bien sûr celle de l’archéologie en général. Jean-Emmanuel Guilbaut confirme que si les textes en vigueur interdisent la destruction des vestiges archéologiques, rien n’est prévu pour financer les fouilles. On applique en fait le principe selon lequel « le casseur paye » ; il ajoute que la France a signé la Convention de Malte sur la protection du patrimoine archéologique, mais que les décrets d’application ne sont toujours pas parus. Le Ministère de la Culture vient de promettre que serait élaboré un livre blanc de l’archéologie, mais n’a pas annoncé de calendrier.


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    Le Président demande ce qu’il adviendra des vestiges qui seront mis au jour sur le chantier du Parmentier à Rodez. Jean-Emmanuel Guilbaut confirme qu’ils seront détruits après la fouille.
    On souligne le fait qu’au-delà de l’affaire de Rodez, on est en droit de s’interroger sur les critères qui conduisent au classement au titre des Monuments historiques. Dans ce cas précis, le classement provisoire montre une souplesse assez inquiétante. D’une façon plus générale, la protection des découvertes archéologiques varie d’une ville à l’autre : ici on conserve, là on détruit. Or il faut insister sur le fait qu’il ne suffit pas de fouiller, et qu’il s’agit en conservant ce qui a été mis au jour de réserver la possibilité pour les générations à venir de reprendre l’étude. Jean-Emmanuel Guilbaut reconnaît que la conservation dépend essentiellement de la volonté des pouvoirs locaux dont on pourrait souhaiter qu’ils aient un peu plus le souci du patrimoine alors que prévalent le plus souvent des préoccupations politiciennes. Un membre s’étonne encore de l’écart que l’on constate en France entre la perception que l’on a du monument en élévation et celle des vestiges archéologiques : on protège sans difficulté au titre des Monuments historiques telle petite chapelle tout à fait secondaire du XVIIe siècle mais on hésite pour le podium d’un temple romain retrouvé en fouille, qui est finalement détruit.

    On relève par ailleurs combien l’application de la loi de 1941 provoque d’aberration, impliquant un marchandage entre le service de l’archéologie et le maître d’ouvrage, marchandage qui tient peu compte de l’intérêt scientifique du site, et qui devient franchement ridicule quand le maître d’ouvrage est un autre service de l’État : la pratique est la même, le marchandage est le même. Le comble est atteint quand le bâtiment appartient à l’État qui donne ainsi un bel exemple de la cohérence de sa politique patrimoniale : dans le cas d’une cathédrale, appartenant donc à l’État, les fouilles sont arrachées par les archéologues au Service des Monuments historiques qui défend ses crédits, et suivent comme elle le peuvent la programmation des travaux. Pourtant rien ne devrait empêcher dans des cas de cette nature des fouilles programmées, sur des sites dont l’intérêt archéologique n’est certes pas à démontrer. À propos de la conservation des vestiges, Maurice Scellès rappelle que l’abbé Baccrabère a pu obtenir d’une société H.L.M. l’aménagement d’une crypte archéologique, que l’on peut toujours visiter dans le quartier d’Ancely à Toulouse, dès la fin des années 1960. Mme Labrousse précise que cet aménagement n’a pu être obtenu qu’avec une pression très forte de la Circonscription des Antiquités historiques, et que le problème était d’ailleurs très différent.

    Un membre constate que se développent en Europe des politiques du patrimoine très différentes et que la France n’est certes pas à la pointe quand la Suisse et l’Espagne s’efforcent de constituer de grandes réserves archéologiques. Jean-Emmanuel Guilbaut rappelle que de telles réserves ont été créées à Millau et à Saint-Bertrand-de-Comminges, et que l’on achète chaque année des terrains à Éauze. Il est certain néanmoins que cela suppose l’adhésion des collectivités locales, ou plus exactement des élus locaux.

 

    Le Président remercie tous les intervenants et donne la parole à Yves Cranga pour une communication présentée en duo avec Mme Françoise Cranga : Représentations et symbolique de l’escargot dans le Midi de la France, publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires.

    Le Président remercie les deux conférenciers pour cette communication qui nous a beaucoup appris et nous a montré que l’escargot était fréquemment représenté dans l’art du Midi. Puis le Président demande si l’escargot apparaît dans les Bestiaires médiévaux. Yves Cranga répond par la négative, et ajoute que la nature de l’escargot le met indifféremment du côté du diable ou du côté de Dieu, ce qui n’a bien sûr pas empêché qu’on le représente. L’absence de textes rend son interprétation plus difficile pour le Moyen Âge.

    Michèle Pradalier-Schlumberger, constatant un hiatus entre l’escargot figuré sur le sarcophage de Marseille et les exemples suivants qui sont beaucoup plus tardifs, demande s’il n’est pas présent dans l’art irlandais. Mme Françoise Cranga indique que cette présentation devait être limitée au Midi où aucun exemple n’est connu pour la période carolingienne. Yves Cranga ajoute que l’enquête, commencée en Bourgogne, étendue maintenant au Midi de la France, devra sans doute être encore élargie.

    Répondant à Daniel Cazes, Yves Cranga précise qu’Isidore de Séville ne traite que de la limace, dans laquelle il voit un vers né dans la boue et donc de nature mauvaise, mais qu’il ne mentionne pas véritablement l’escargot.

 

    Passant aux questions diverses, le Président donne la parole à Anne-Laure Napoléone qui informe la Compagnie d’une « restauration » malencontreuse de la façade de la maison romane de la place Champollion à Figeac :

    « Cette petite demeure est un des vestiges les plus intéressants de la ville. Ses façades relativement peu modifiées ont permis d’en proposer une restitution parfois assez détaillée notamment pour les parties bâties en pierre. En effet, cet édifice fait partie de l’ensemble important des maisons figeacoises construites en matériaux mixtes, c’est-à-dire que l’on a utilisé la pierre pour édifier les parties basses jusqu’au premier étage, tandis que les deux derniers niveaux s’élevaient en pans-de-bois, en encorbellement sur la place Champollion et sur la rue Boutaric. Au premier étage, s’ouvrent deux baies ternées dont l’abondant décor sculpté est en grande partie conservé. Celui-ci a permis de dater la demeure du XIIe siècle ; c’est la plus ancienne maison datable de Figeac. Témoin particulièrement bien conservé de la construction de son époque, cet édifice a été proposé au classement ; la procédure est en instance. Cet été, le pas-de-porte des commerces a été vendu et, à cette occasion, le rez-de-chaussée a été débarrassé de ses devantures en bois de façon à mettre en valeur les deux grands arcs sur la place qui étaient jusque-là masqués. Malheureusement, les travaux qui devaient se limiter, selon le descriptif conservé à la D.R.A.C., à la restitution des ogives et à la consolidation du


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FIGEAC (LOT), PLACE CHAMPOLLION, MAISON ROMANE,
façade sur la place avant travaux.

FIGEAC (LOT), PLACE CHAMPOLLION, MAISON ROMANE.
Angle des façades de la place Champollion et de la rue Boutaric après reprise des joints.

trumeau, on touché également les maçonneries des parties basses de la façade donnant sur la place. Les joints ont été ici refendus, dans le but de les élargir. Cette opération a occasionné la cassure des arêtes des blocs de pierre.
    Depuis quelques années, les études sur l’architecture médiévale de Figeac se multipliant, les caractéristiques de la construction romane de cette ville sont désormais bien connues (A. Melissinos et G. Séraphin, rapports du secteur sauvegardé de 1988 et de 1990, H. Pradalier et A.-M. Pêcheur, Saint-Sauveur de Figeac dans C.A.F. tenu en 1989 et A.-L. Napoléone, Figeac au Moyen Âge, thèse, Université de Toulouse-Le Mirail, 1993). Elle se reconnaît par l’emploi d’un grès à grain très fin et homogène, par la taille particulièrement soignée qui permet un assemblage des blocs très ajusté, réduisant les joints à une simple ligne. Le traitement d’un matériau d’excellente qualité par des tailleurs de pierre apparemment très soigneux rend cette construction particulièrement esthétique. Cette technique de mise en œuvre, présente un peu partout dans la ville, se repère facilement. Elle existe notamment sur les parties romanes de l’église abbatiale de Saint-Sauveur mais également sur toutes les demeures les plus anciennes dont, bien entendu, celle de la place Champollion. La défiguration dont celle-ci vient de faire l’objet montre que les travaux n’ont pas bénéficié de la surveillance qu’exige un édifice classé ou en instance de l’être.
    D’autres travaux sont prévus prochainement sur cette maison en vue de la restauration des parties hautes. Il est à souhaiter que les organismes responsables de notre patrimoine y soient désormais plus attentifs. »

    Yves Cranga précise que la maison est actuellement en attente de classement.
    Il est décidé d’adresser un courrier à l’Architecte des Bâtiments de France du Lot ainsi qu’au Maire de Figeac.

    Maurice Scellès donne lecture d’une note, accompagnée de photographies, que nous adresse notre confrère Gilles Séraphin à propos de la découverte d’une charpente peinte médiévale à Riom (Puy-de-Dôme) :

    « L’élaboration conjointe d’un fichier analytique par le Service Régional de l’Inventaire d’Auvergne et par la Sous-direction des espaces protégés, dans le cadre du secteur sauvegardé de Riom, a conduit récemment à la découverte d’une remarquable charpente médiévale. L’immeuble concerné, situé au n° 9 rue de la Caisse d’Épargne, offre extérieurement l’aspect d’un hôtel particulier du XVIIIe siècle ne laissant rien soupçonner de son ossature médiévale. La charpente du corps de bâtiment principal est constituée de fermes triangulées, portées sur des corbeaux moulurés, à arbalétriers croisés et sans poinçon. Cette absence la distingue d’une charpente par ailleurs analogue, conservée dans une maison médiévale de Montferrand (1). La charpente de Riom offre de plus l’intérêt de porter un décor peint qui subsiste tant sur les pannes que sur les lambrequins d’entrevous. Ces derniers, sur fonds bleus et rouges alternés, présentent des motifs géométriques et zoomorphes assez proches de ceux qui ont été décrits dans une maison de Montpellier, attribuée à la première moitié du XIVe siècle (2). La présence de ce décor conduit à supposer que la charpente assurait le plafonnement apparent d’une grande salle, hypothèse confirmée par la découverte dans l’immeuble voisin des vestiges de l’une des fenêtres, qui assurait l’éclairement de cette salle par le pignon. Les caractères stylistiques de la fenêtre bipartite, à colonnette et arcatures trilobées, la rapprochent très directement d’une façade gothique partiellement conservée au n° 12 de la rue Saint-Amable, mais aussi des parties les plus anciennes de la cathédrale de Clermond-Ferrand, commencée vers 1248 par le premier Jean Deschamps. Un rapprochement que confirment les premières analyses par la dendrochronologie qui attribueraient, encore sous réserve, les bois de la charpente au milieu du XIIIe siècle.


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RIOM (PUY-DE-DÔME), RUE DE LA CAISSE D'ÉPARGNE,
DEMEURE
MÉDIÉVALE.
Vue de la charpente. Cliché Gilles Séraphin.


RIOM (PUY-DE-DÔME), RUE DE LA CAISSE D'ÉPARGNE,
DEMEURE
MÉDIÉVALE.
Détail d'un décor peint conservé sur un lambrequin d'entrevous de la charpente. Cliché Gilles Séraphin.


RIOM (PUY-DE-DÔME), RUE DE LA CAISSE D'ÉPARGNE,
DEMEURE
MÉDIÉVALE.
Fenêtre du pignon sud de la salle charpentée, visible au n° 15 rue Goumot. Cliché Gilles Séraphi
n.

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    La conservation de cet ouvrage qui mériterait une protection au titre des Monuments historiques, semble désormais assurée (3). Encore pourrait-on souhaiter que soient réunis les moyens nécessaires à en assurer désormais la restauration.

    Bénédicte Renaud, Gilles Séraphin

1. Maison dite de l’Éléphant à Montferrand (Puy-de-Dôme). Cf. relevé de J. Creusot dans P. Garrigou Grandchamp, Demeures médiévales, cœur de la cité, éd. Rempart, 1992, p. 123.
2. Plafond à caissons d’une maison, 7 place du Marché-aux-Fleurs. Cf. B. Sournia, J.-L. Vayssettes, Montpellier, la demeure médiévale, Paris : Imprimerie Nationale, 1991, p. 166-174.
3. Une autre charpente médiévale, caractérisée par ses poinçons moulurés analogues à ceux de la maison de l’Éléphant à Montferrand, a été récemment déposée et détruite lors de travaux de réhabilitation. Il n’en subsiste que les poinçons moulurés en colonnettes, actuellement entreposés dans une remise.
»

 

SÉANCE DU 18 FÉVRIER 1997

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mme Pradalier-Schlumberger, MM. l’abbé Baccrabère, Cabau, le général Delpoux, Hermet, le Père Montagnes, Nayrolles, Peyrusse, l’abbé Rocacher, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Blanc-Rouquette, Delaplace, Jiménez, Pousthomis-Dalle, Pujalte, Watin-Grandchamp, MM. Bertrand, Burroni, Cranga, membres correspondants.

 

    Après lecture et adoption du procès-verbal de la séance du 21 janvier, le Président ouvre la séance en donnant quelques informations diverses sur la vie de la Société.

    Soucieuse d’informatiser le fichier de la bibliothèque, notre Société s’est vue promettre par l’entreprise M.T.D. qui a en charge le métro de Toulouse, un logiciel mis au point par son informaticien, M. Jolly. Nous l’accepterons avec empressement. M.T.D. se déclare également prêt à nous offrir deux ordinateurs Macintosh que l’on pourrait installer dans la salle de lecture, à la disposition des chercheurs, ainsi que des ordinateurs P.C.

    Le Président regrette que la publicité faite sur les concours organisés chaque année par la Société Archéologique du Midi de la France afin de primer les travaux les plus méritants soit demeurée lettre morte.

    Au sujet des restaurations en cours sur certains monuments de la région, deux courriers ont été envoyés dernièrement au nom de la Société : l’un à Mme Tomasin sur de récents travaux effectués sur une maison médiévale de Figeac, l’autre à Mme Sire afin d’obtenir des éclaircissements sur le parti choisi dans la restauration à mener à la Porte Miégeville de la basilique Saint-Sernin. En réponse à ces interrogations, Mme Sire indique que pour l’instant, il ne s’agit que d’une phase d’« observation » des éléments sculptés qui exigent à terme une intervention. Le Président suggère l’idée d’inviter prochainement Mme Sire à exposer devant notre Société les différents projets du service des Monuments historiques dans la région.

    Lors d’une visite dirigée par M. Féron à l’Hôtel d’Assézat, notre Président a rencontré M. Hugon, journaliste à La Dépêche, rédacteur de la chronique « Échos d’écrits », qui a rendu compte dans un de ses articles des travaux de la Société Archéologique du Midi de la France et de son dernier volume de mémoires, insistant plus particulièrement sur l’étude de Mme Blanc-Rouquette, L’église Saint-Quentin, siège de la corporation des imprimeurs et libraires toulousains. Mais la diffusion de nos activités passe aussi, aujourd’hui, par « internet ». Or, la vitrine informatique que nous offre le serveur Média-Castres est encore vide à ce jour : il faut se dépêcher de l’occuper.

    Après avoir fixé le calendrier des prochaines séances, le Président donne la parole à Nelly Pousthomis pour sa communication sur Les restaurations de la cathédrale de Tarbes aux XIXe et XXe siècles.

    Le Président remercie Nelly Pousthomis pour son exposé qui suscite de nombreuses questions et remarques.

    M. l’abbé Rocacher indique que les frères Pedoya, auteurs des décors peints de la cathédrale de Tarbes au XIXe siècle, ont déployé une grande activité de décorateurs d’églises dans le diocèse de Toulouse. Nelly Pousthomis regrette la rareté des documents sur leur intervention et évoque la disparition de leurs œuvres dans plusieurs églises, non seulement à la cathédrale de Tarbes, mais aussi à Garaison et Saint-Lizier.

    M. Coppolani précise que les Pedoya étaient trois frères et que l’on peut voir leurs œuvres dans l’église de Seysses ainsi que dans celle de Lherm, dans le canton de Muret. Maurice Scellès évoque leur activité dans le Tarn-et-Garonne, dont rend compte le dictionnaire des églises de ce département par le chanoine Gayne. Selon Dominique Watin-Grandchamp, il existe des monogrammes qui permettent d’identifier leurs œuvres. D’ailleurs, leurs descendants se sont manifestés, ce que confirme Mme Blanc-Rouquette avec qui ils sont entrés en relation : il s’agit bien d’une famille d’origine italienne, qui a habité dans le canton de Saint-Girons en Ariège et qui a donné des peintres décorateurs d’églises sur au moins deux générations. Ils ont travaillé


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dans un nombre impressionnant d’édifices, reproduisant un peu partout le même catalogue d’ornements italianisants (rinceaux, grotesques...). D’après Daniel Cazes, ce répertoire peu original était très proche de celui d’un autre peintre ornemaniste : le Toulousain Ceroni, également d’origine italienne.

    Louis Peyrusse demande quelles pouvaient être les sources de financement à l’époque de Bordes, autour de la seconde campagne de décors peints à l’intérieur de la cathédrale Sainte-Marie. En l’absence de financement public, ce furent manifestement les pèlerinages de Lourdes qui enrichirent le diocèse de Tarbes.

    Henri Pradalier regrette que l’intervention ait consisté à recréer un nouveau décor obtenu en déformant les œuvres précédentes. Nelly Pousthomis souligne que pour ce faire, les arguments avancés étaient, comme toujours en pareil cas, d’ordre technique. À cet égard, Maurice Scellès constate avec amusement que l’évolution de la doctrine des architectes-restaurateurs est sensible à travers le vocabulaire utilisé, qui s’adapte aux dernières modes intellectuelles. Aussi, le bilan critique ne peut-il être que sévère.

    Guy Ahlsell de Toulza évoque la sculpture de la cathédrale de Tarbes. Quatre chapiteaux romans à entrelacs, dont deux sont conservés au Musée des Augustins, sont réputés d’origine tarbaise. Peut-il s’agir de chapiteaux déposés au XIXe siècle, peut-être ceux de la fenêtre d’axe de l’abside ? Nelly Pousthomis reconnaît que Sainte-Marie de Tarbes offre fort peu de sculpture médiévale, l’essentiel se situant dans la rose, d’un modèle très proche de celle de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse. Il est vrai que l’architecte Caddau, auteur des restaurations du chevet au début du XXe siècle, a pu déposer des chapiteaux. Cependant, les éléments sculptés que l’on peut observer sur place sont tous d’origine cistercienne, tout comme d’ailleurs le type architectural de l’ancienne salle capitulaire. Il n’y a apparemment rien de semblable dans tout cela aux quatre chapiteaux évoqués. Peut-être la thèse de Catherine Vincent, touchant à la cathédrale de Tarbes, apportera-t-elle quelques lumières sur cette question.

    Pascal Bertrand attire l’attention sur le baldaquin de la cathédrale de Tarbes, chef-d’œuvre de Marc Arcis qui n’aurait sans doute pas trouvé place dans l’édifice agrandi selon le projet d’Hippolyte-Louis Durand. L’abandon de ce projet a donc peut-être sauvé ce remarquable élément de mobilier liturgique.
Enfin Louis Peyrusse s’étonne du projet de Jean-Jacques Latour qui, en 1843, proposa une curieuse façade romano-Renaissance très italianisante. Bien peu de réalisations contemporaines pourraient en effet lui être comparées.

    Au titre des questions diverses, Henri Pradalier rend compte d’un courrier reçu récemment, annonçant que l’amicale des sociétés savantes du Midi de la France et du Nord de l’Espagne, l’U.C.E.P. (Union des Centres d’Études transpyrénéens) se réunira le 31 mai prochain à Toulouse afin d’établir ses statuts. Affaire à suivre...
    Enfin, Pascal Bertrand tient à exprimer son indignation, ayant appris dans la journée que les publications de Maurice Prin ont été retirées de la vente à l’entrée du cloître des Jacobins. Parmi les membres présent, chacun s’accorde à juger cette décision inadmissible. La Ville de Toulouse n’a-t-elle pas décerné sa médaille d’or à Maurice Prin ? Que doit-on faire pour réparer cette injustice ?

 

SÉANCE DU 11 MARS 1997

Présents : MM. Pradalier, Président, Coppolani, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Latour, Bibliothécaire-archiviste, Cazes, Secrétaire Général, Scellès, Secrétaire-adjoint ; Mmes Pradalier-Schlumberger, Labrousse, MM. l’abbé Baccrabère, Gérard, Julien, Lapart, Nayrolles, Peyrusse, Tollon, Vézian, membres titulaires ; Mmes Aribaud, Delaplace, Napoléone, Pujalte, MM. Burroni, Cranga, Manuel, Morvillez, membres correspondants.
Excusé : M. Cabau

 

    Le Secrétaire-adjoint donne lecture du procès-verbal de la séance du 4 février, qui est adopté. Le Président donne ensuite la parole à Jean Nayrolles pour la lecture du procès-verbal de la séance du 18 février, qui est adopté.

    Puis le Président rend compte de la correspondance manuscrite.
    En réponse au courrier que lui a adressé le Président, le Maire de Figeac souhaite que puissent être effacés les défauts de restauration de la maison Peyrière, dont il regrette en outre que le dossier de classement au titre des Monuments historiques soit toujours en instance.
    Le Maire de Toulouse accuse réception du tome LVI de nos Mémoires et nous remercie de lui avoir fait connaître la satisfaction des étudiants qui fréquentent notre bibliothèque.
    La Xunta de Galicia nous informe de la tenue à Saint-Jacques-de-Compostelle du Salon International du Patrimoine Culturel qui aura lieu du 17 au 21 septembre 1997. Le Directeur général du Patrimoine Culturel invite notre Société à y participer.
    L’Université d’Alcalá (Espagne) nous informe d’un prochain séminaire consacré « au projet de conservation et d’intervention » mis en place dans le cadre de son master « Restauration et réhabilitation du patrimoine ».
    M. Jean Guyon accepte bien volontiers de faire partie du comité scientifique de nos Mémoires dont il apprécie la qualité. Il souligne en outre tout l’intérêt de contributions qui s’efforcent de couvrir tout l’arc chronologique de l’archéologie, entendue sous tous ses aspects, voie dans laquelle il faut sûrement poursuivre.


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    Enfin, nous avons reçu une lettre de candidature au titre de membre correspondant de Mme Caterina Magni, spécialiste d’archéologie amérindienne.

    Le Directeur rend compte à son tour de la correspondance imprimée, puis le Secrétaire Général présente les ouvrages offerts par des membres de la Société et poursuit la présentation des ouvrages reçus au titre des échanges.

 

    La parole est alors à M. Éric Morvillez pour la communication du jour consacrée à L’architecture de la salle à absides de Saint-Rustice (Haute-Garonne), publiée dans ce volume (t. LVII, 1997) de nos Mémoires.

    Le Président remercie Éric Morvillez pour cette communication si solidement documentée et très abondamment illustrée. Il constate que la mosaïque de Saint-Rustice fait figure de vestige d’un Empire romain qui subsiste en Afrique du Nord comme à Antioche et dont la koinè perdure au Ve siècle même en Gaule. Les rapprochements qui ont été proposés avec les tissus et les tentures lui paraissent tout à fait probants.
    Éric Morvillez souligne que les parallèles observables entre les mosaïques et les tissus montrent bien que les cartons circulent. Les thèmes, comme par exemple celui des Néréïdes, sont d’ailleurs très largement utilisés aussi bien dans le décor architectural que pour les tissus ou les objets.
    Christine Aribaud rappelle que la fouille récente de Denderah (Égypte) a permis de retrouver des milliers de tissus romains dont cinq cents feront prochainement l’objet d’une première publication par Dominique Cardon du C.N.R.S., publication qui remet un peu en cause l’idée selon laquelle prédominaient les tapisseries à grandes scènes et les tissages à motifs géométriques : il s’avère que les thèmes décoratifs étaient très variés. La raideur du tissu suggère que c’est une tapisserie qui a été représentée sur la mosaïque de Saint-Rustice.

    Répondant à Claude Péaud-Lenoël, Éric Morvillez précise que c’est parce qu’il a exclu de son propos toutes les représentations antérieures au IIIe siècle qu’il n’a pas fait état du dieu marin de Saint-Romain-en-Gall, mais il existe en effet de très nombreux exemples de ce thème pour la Gaule des IIe et IIIe siècles.

    Daniel Cazes dit à quel point il a été intéressé par la précision des comparaisons proposées, mais il se demande si l’on dispose de suffisamment d’éléments architecturaux pour considérer qu’il s’agit d’une villa. L’évolution ultérieure du site pourrait être éclairante. La recherche historique reste à faire, mais il est sûr en tout cas que le site est habité et connu au VIIe siècle, et peut-être célèbre, lorsqu’on y enterre l’évêque Rustice. À la fin du XIe siècle, l’église est prieuré de Moissac. Daniel Cazes se rappelle qu’il avait été intrigué, en étudiant l’édifice, par la présence sous l’abside d’une crypte où l’on vénérait une source et à laquelle on accédait par un escalier extérieur. Bien que la " villa " soit située en contrebas par rapport à l’église, il y a peut-être une relation à établir entre les deux sites. Il ajoute que les circonstances de l’enlèvement de la mosaïque en 1863 sont assez confuses : il est probable que personne ne maîtrisait alors dans la région les techniques de dépose et les catalogues font état de très nombreux morceaux et de quantité de tesselles que l’on n’a sans doute pas su conserver.
    Éric Morvillez note qu’en dépit des lacunes, l’ensemble conservé est remarquable. Il avoue avoir été étonné par la passion manifestée par la Société Archéologique du Midi de la France pour obtenir que la fouille soit couverte par un toit, alors que les vestiges ont été ensuite réenterrés. Quant au rapport éventuel avec la source, Éric Morvillez dit y avoir pensé, mais avoir préféré ne pas l’évoquer parce que le lien lui paraissait trop ténu. Par ailleurs, le décor qui reste païen ne paraît pas pouvoir être daté de façon trop tardive, ce qu’admet Daniel Cazes qui accepte tout à fait une datation de la fin du IVe ou du début du Ve siècle.

    Une telle datation, qui n’irait pas au-delà du milieu du Ve siècle, convient à Christine Delaplace qui fait par ailleurs remarquer que l’on a trop accentué la coupure que représenterait la période. En effet, l’environnement culturel ne se transforme pas immédiatement et il n’y a pas de volonté d’un changement autoritaire des mentalités. Dans les différents panégyriques qu’il compose pour les Empereurs, Sidoine Apollinaire ne fait aucune référence au christianisme mais puise sans cesse aux sources des mythes. Christine Delaplace ajoute qu’un tel décor de pavement incluant des inscriptions en grec lui paraît pouvoir refléter le goût de l’élite de l’époque.
    Éric Morvillez acquiesce tout en rappelant que la mosaïque de Saint-Rustice reste un cas isolé dans l’ensemble aquitain. En outre, cette grande composition mythologique convient sans doute mieux à une construction privée qu’à un édifice public. Christine Delaplace se demande toutefois si des thermes aussi importants ont pu appartenir à une demeure privée et s’il ne faut pas envisager l’hypothèse d’un établissement lié à une source curative. Éric Morvillez pense qu’en effet l’hypothèse d’une source curative plus tard christianisée ne doit pas être écartée : mais seules des fouilles permettraient de replacer la salle à absides dans son contexte architectural.

    Louis Peyrusse admet que de nouvelles fouilles seraient hautement souhaitables, mais qu’elles risquent d’être très compliquées : il faut savoir que les recherches du milieu du XIXe siècle n’ont pas été conduites par la Société Archéologique du Midi de la France mais par le prédateur boulimique qu’était Jules Soulages. Les procès-verbaux manuscrits de notre Société en donnent la chronique.
    Jean Nayrolles indique qu’au moment de la reconstruction de l’église, Esquié avait adressé une note aux Bâtiments civils. Daniel Cazes confirme le renseignement en précisant toutefois que le bref rapport qui accompagne le plan de l’église ne contient pratiquement aucune indication sur l’occupation antique.
    L’abbé Baccrabère se souvient qu’à l’occasion du survol du site en hélicoptère, il y a une vingtaine d’années, il avait constaté, si ses souvenirs sont exacts, qu’un embranchement de route se dirigeait vers le site de la villa. La prospection sur place, qui n’avait pas été systématique, avait révélé de nombreuses tesselles de mosaïque et des fragments d’enduit. Éric Morvillez rapporte que le


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Maire lui a également dit avoir des morceaux de mosaïque ; si les décors de pavement ont probablement été largement détruits, il faut insister sur l’intérêt d’une fouille qui permettrait de retrouver le plan de l’édifice et d’en préciser les dispositions.
Jacques Lapart évoque la villa de Séviac à Montréal-du-Gers, puis revenant à Saint-Rustice, remarque que le propriétaire dispose sans doute de moyens importants. C’est ce que pense aussi Éric Morvillez qui note encore que le commanditaire montre son attachement à la culture antique.


2e partie
Séances du 18 mars 1997 au 16 juin 1997