Société Archéologique  du Midi de la France
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Le Musée de l’œuvre de Saint-Sernin : 

separateur

un projet de dimension européenne pour la capitale d’une grande région 

Détail d'un tronc en bois sculpté de la Renaissance conservé dans les collections de Saint-Sernin en réserve : masque de Silène dont la bouche permettait l'introduction de monnaies. Cl. D. Cazes.

Qu’est-ce qu’un musée de l’œuvre ?

C’est un musée dédié à un grand monument religieux, dont il présente l’histoire et l’architecture à travers des documents d’archives, des maquettes, des photographies, des objets. Il permet de montrer au public, dans de bonnes conditions, des œuvres rares et fragiles, qui restent sans cela totalement méconnues. C’est aussi un lieu d’accueil des très nombreux visiteurs d’un chef-d’œuvre comme Saint-Sernin. 

Ce musée s’impose aujourd’hui à Toulouse et représente un enjeu de première importance pour la ville et la vaste région de sept millions d’habitants dont elle va devenir la capitale. Son projet doit enfin entrer dans une phase de réalisation, car une  riche collection, actuellement en souffrance, permet un discours muséographique extraordinaire et attractif.  Ce musée favorisera et organisera la visite de la basilique Saint-Sernin et du site archéologique sur lequel elle s’élève. Le bon achèvement de la restauration de la basilique, comme la fouille et la mise en valeur des vestiges archéologiques sont indissociables de ce futur musée et s’inscrivent dans un même plan d’ensemble.

Naissance d’un projet

La nécessité de construire un tel musée est apparue dès 1988. Cela fait donc déjà près d’une trentaine d’années. La restauration  de la basilique dans les années 1960-1990 a généré une importante collection lapidaire (sculptures romanes et gothiques originales ou néo-romanes et néo-gothiques créées au XIXe siècle, entre autres éléments déposés). La progression de ces travaux prévue à l’ouest des tribunes de la nef, dans les chapelles et salles superposées du massif occidental, posait aussi la question du transfert et de la conservation de l’importante collection de textiles anciens, sculptures, moulages, meubles, reliquaires, châsses, mobilier liturgique et de procession, concentrés là dans de mauvaises conditions depuis des décennies. Il ne fallait pas, non plus, oublier le devenir de la salle des archives (avec certains documents dignes d’une exposition régulière) et d’un certain nombre d’œuvres d’art non présentées dans la basilique ou actuellement déposées dans les réserves de divers musées. Vinrent s’ajouter deux importantes maquettes de Saint-Sernin réalisées pour l’exposition de 1989, des objets découverts lors de recherches archéologiques (dans le sarcophage dit de Guillaume Taillefer et lors des fouilles du lycée Ozenne), des sarcophages qui périssaient dans le jardin de la basilique, des graffitis d’organistes sauvegardés par Pierre Bellin…

Sculptures déposées dans les tribunes de Saint-Sernin...

De nombreux visiteurs aujourd’hui sans accueil et sans information

À cette véritable collection de musée d’un indéniable intérêt s’ajoutait toute une réflexion sur l’augmentation considérable du nombre de visiteurs de la basilique et sur la nécessité de les accueillir, les informer, les orienter dans leur visite du monument majeur de Toulouse. Tout cela se déclinait naturellement en un programme classique de musée de l’œuvre, étroitement lié au monument auquel il est consacré : hall d’accueil et de repos, toilettes (il n’y en a toujours pas pour les 300 000 visiteurs annuels de Saint-Sernin en 2015 !), boutique, cafeteria, auditorium, présentation audiovisuelle en plusieurs langues de la basilique, maquettes de l’abbaye disparue, maquettes montrant les différentes phases de construction et de restauration, salles d’exposition permanente, salle d’exposition temporaire, ateliers pédagogiques.

Aspects d’une préfiguration

Trois opérations de communication des savoirs et des œuvres ont en partie préfiguré ce musée : l’exposition Saint-Sernin : trésors et métamorphoses, à Toulouse et Paris en 1989-1990, l’exposition Les fouilles archéologiques du lycée Ozenne à Toulouse,  à Toulouse en 1999, les panneaux didactiques sur  l’histoire et la légende de saint Saturnin réalisés pour la basilique en 2013. Les trois ont suscité un vif intérêt du public, auquel rien de permanent n’est offert aujourd’hui pour accompagner sa découverte de Saint-Sernin.

Un beau bâtiment à concevoir au nord de la basilique

Dès ces années 1988-1990, est apparue l’idée que ce musée devrait être situé au nord de la basilique, au débouché des rues Gatien-Arnoult et des Cuves, sur l’emplacement de l’actuel parking né spontanément au XXe siècle après la démolition d’un îlot de maisons. Ce terrain reste depuis lors constructible et sa situation est  privilégiée : il est sur une partie des vestiges de l’abbaye qui pourraient être accessibles  en sous-sol ; il est au contact de l’emplacement l’ancien grand cloître, dont la remise en valeur et le préau agréablement jardiné feraient  le lien avec la basilique (par l’ancienne porte romane du cloître) ; il permet de concevoir un bâtiment pour ce musée qui refermerait l’espace actuel, trop dilaté, de la place Saint-Raymond, cacherait les disgracieux bâtiments qui se profilent vers l’est, et offrirait enfin les plus belles vues qui soient sur la basilique, particulièrement celles, somptueuses, du soleil couchant.

Un programme muséographique passionnant

Ainsi idéalement situé, ce musée pourrait occuper un millier de mètres carrés au sol, avec un sous-sol archéologique, et trois à quatre niveaux : un rez-de-chaussée, deux à trois étages selon les hauteurs sous plafond choisies et les contraintes urbaines. Soit, au total, les 4000 à 5000 mètres carrés indispensables pour le traitement du programme muséographique. Sans donner ici tout le détail de l’exposition permanente, suggérons l’effet produit par les salles de maquettes, de sculptures, par celles exposant les textiles, notamment celle qu’il faut réserver à l’extraordinaire samit de soie almohade du XIIe siècle dit « suaire de saint Exupère », celles qui expliqueraient ce qu’ étaient les chanoines, leurs maisons, l’abbaye disparue, la musique née à Saint-Sernin, celle réservée aux restes archéologiques des sépultures des comtes de Toulouse, celles évoquant les Corps Saints et les processions qui les accompagnaient dans leur périple toulousain, ou encore celles qui rendraient compte des différentes restaurations de la basilique, du XVIe au XXe siècle.


Détail du « suaire de saint Exupère » : un rare tissu du XIIe siècle, très rarement présenté au public.


Détail du « suaire » de saint Exupère. Cl. M. Prin. 
Cette photo en noir et blanc est la plus nette qui existe pour bien lire tous les détails iconographiques de ce splendide et exceptionnel tissu créé sur le territoire de l'actuelle Andalousie, lorsque celui-ci faisait partie de l'empire almohade.


Détail d' un tronc en bois sculpté de la Renaissance conservé dans les collections de Saint-Sernin en réserve: buste féminin. Cl. D. Cazes.

Un musée que tous les touristes et les Toulousains s’attendent à trouver à Toulouse

Ce musée correspond assurément aux attentes manifestées aujourd’hui par les visiteurs des plus grands monuments du monde entier, dont Saint-Sernin, site et monument, fait partie. Citons, par exemple, le musée de l’œuvre de la cathédrale de Strasbourg, le Museo dell’Opera del Duomo de Florence, le musée cathédral de Compostelle. On n’a que trop différé la réalisation de ce musée équivalent toulousain et, de ce fait, Toulouse a pris un grand retard par rapport à de nombreuses autres villes d’art européennes, ce qui ne peut que freiner le développement du tourisme et priver les habitants-citoyens de l’information à laquelle ils ont droit.

Une salle du musée de l'oeuvre de la cathédrale de Strasbourg. © L'Internaute Magazine/ Bénédicte Huart.

Site du musée de l'oeuvre Notre-Dame.

 

Un partenariat entre la Ville et l’Église catholique

D’un point de vue statutaire, Saint-Sernin étant une église-monument historique appartenant à la municipalité et affectée au culte catholique, la création de ce musée devra faire l’objet d’un partenariat entre la Ville de Toulouse et l’Archevêché/Paroisse Saint-Sernin. Une harmonieuse collaboration, riche d’avenir pour tous, s’impose en effet pour que le monument-lieu de culte, le nouveau musée et les espaces archéologiques (dont celui du cloître) liés à ceux-ci soient régulièrement ouverts au public et selon un système horaire concerté.

Protection du Patrimoine et sécurité

De même devra-t-il en être de l’organisation de la sécurité des biens et des personnes. Le futur musée, les aires archéologiques de plein air (cloître notamment) et la basilique devraient faire partie du même enclos, dans la tradition de l’ancienne abbaye. Concrètement, basilique et sites archéologiques doivent être protégés par des grilles, en extension du système mis en place au XIXe siècle, closes la nuit, ouvertes comme pour les jardins publics le jour, de 7h ou 8h du matin au coucher du soleil. Et l’ensemble ainsi formé doit disposer d’un gardiennage diurne, d’une vidéo-surveillance et de détecteurs de présence la nuit. On ne saurait trop recommander d’éviter l’enlèvement des grilles actuellement en place autour de la basilique si l’on n’a pas au préalable résolu d’une manière analogue la protection du monument et de son site. La porte Miègeville est un chef-d’œuvre absolu de l’art roman et il n’est pas raisonnable de la laisser à la portée de toutes les dégradations. De même voit-on mal les murs de la basilique constamment tagués, ou les espaces logés entre les absidioles transformés en urinoirs publics.

Daniel Cazes
4 juin 2015

Quelques autres oeuvres du futur musée...


Buste de saint Raymond, présentant la basilique Saint-Sernin, qui était utilisé pour la grande procession des Corps-Saints. 
XIXe siècle.

Graffiti d'organistes du XVIIe siècle, sauvegardés par Pierre Bellin lors de la dernière restauration de la basilique Saint-Sernin.

Fanal néo-médiéval en cuivre doré utilisé pour les processions nocturnes. 
XIXe siècle.

Pierre Mathieu, 1852-1853 : chapiteau néo-roman, réalisé pour la crypte basse de Saint-Sernin, représentant l'annonce du reniement de Pierre.

Frises de chapiteaux s'articulant avec des têtes en console (2e quart du XIVe siècle), provenant de la chapelle de Rieux au couvent des Cordeliers de Toulouse, qui avaient été réutilisées dans le réaménagement de la crypte basse de Saint-Sernin.

Châsse-reliquaire de saint François d'Assise et de sainte Claire. Bronze doré. XIXe siècle.

Pierre Mathieu, 1852-1853: chapiteau néo-roman, réalisé pour la crypte basse de Saint-Sernin, représentant le Christ en majesté.

Pierre Mathieu, 1852-1853 : chapiteau néo-roman, réalisé pour la crypte basse de Saint-Sernin, représentant la Vierge à l'Enfant.

Pierre Mathieu, 1852-1853 : chapiteau néo-roman, réalisé pour la crypte basse de Saint-Sernin, représentant l'exaltation de la Croix.

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