Société Archéologique  du Midi de la France
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SÉANCE DU 22 NOVEMBRE 2016

Séance privée
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Communication de Sophie CASSAGNES-BROUQUET

Fantaisies de notaires toulousains à la fin du Moyen Âge : des notaires artistes et calligraphes

C’est à l’occasion d’une recherche au long cours dans les registres des notaires toulousains en quête d’artistes et de représentants des métiers du livre, parcheminiers, scribes et libraires, que sont apparus des dessins à la plume dignes d’intérêt. Certes, il ne s’agit pas ici d’œuvres susceptibles de passionner l’historien de l’art, mais elles peuvent être prises en considération par l’historien des mentalités et de la vie toulousaine au Moyen Âge, dans une perspective appelée par certains chercheurs d’« histoire modeste ».

Communication de Christian DARLES

Le pressoir à Grand-Point de Parisot (Tarn) : un patrimoine viticole peu connu

Le pressoir de Nicouleau, dans le Gaillacois, se rattache au type des pressoirs à levier que l’on peut subdiviser en trois grandes familles : les pressoirs à levier proprement dits, les pressoirs à vis centrale et enfin les pressoirs à grand point. Le pressoir fait partie de cette dernière mais dans des dimensions qui pourraient faire penser à un pressoir communautaire : 6,70 m de long pour une hauteur hors-tout de 6,40 m. Cependant la création du chai et son installation, au XIXe siècle, témoignent de sa destination domestique.

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Le pressoir de Nicouleau manque d’inscriptions et de décors qui pourraient en permettre la datation. Les seules marques sont fonctionnelles et correspondent à l’ordre de pose des madriers destinés à s’intercaler entre les planches disposées au-dessus du marc, le manteau, et le levier. Il semblerait que sur les rives du Tarn, ces machines perdurent jusque dans la seconde moitié du XIXe siècle.
Ce type a-t-il été importé ? La seule étude d’envergure, menée par le Service de l’Inventaire de Bourgogne, fournit quelques informations : aucune date relevée ne serait antérieure au XVIIIe siècle et les études dendrochronologiques montrent que certaines pièces de bois correspondent à des arbres coupés en 1449.


Présents : MM. Cazes, Président, Pradalier, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Scellès, Secrétaire général, Cabau, Secrétaire-Adjoint, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste ; Mmes Bessis, Cassagnes-Brouquet, Cazes, Fournié, Haruna-Czaplicki, Jaoul, Nadal, Napoléone, Pradalier-Schlumberger, MM. Catalo, Garrigou Grandchamp, Lassure, le Père Montagnes, Peyrusse, Surmonne, Tollon, membres titulaires ; Mme Czerniak, MM. Darles, Landes, membres correspondants.
Excusés : M. Latour, Bibliothécaire-adjoint ; Mmes Balty, Lamazou-Duplan, MM. Balty, Garland, Julien, Mattalia, Sournia.
Invités : Mme et M. Juliette et Daniel Depuntis, membres de l’association des Amis des Archives de la Haute-Garonne, M. Delpoux, botaniste de Montmaurin.

Le Président annonce un ordre du jour très chargé et demande aux intervenants de respecter les temps impartis.
Il indique que le rapport sur la candidature M. Guillaume Renoux au titre de membre de notre Société a été confié à Philippe Gardes, puis il signale à l’attention de la Compagnie la conférence que Michelle Fournié consacrera le 29 novembre prochain à Saint Vincent Ferrier d’après les enquêtes de canonisation de Toulouse, à l’occasion de l’exposition Manuscrits médiévaux des dominicains de Toulouse : mémoire d’une bibliothèque.

Pierre Garrigou Grandchamp offre pour notre bibliothèque :
- Storia di Piacenza, dal Vescovo Conte alla signoria ; 2e vol. (996-1313), Piacenza, 1984, 781 p.
- la collection des Documents d’évaluation du patrimoine archéologique des villes de France, édités par le Centre national d’archéologie urbaine de Tours, qu’il a pu se procurer avant que les stocks soient envoyés au pilon. Pierre Garrigou Grandchamp rappelle que nous avons à déplorer la dissolution du C.N.A.U. de Tours a été dissous, sa bibliothèque étant en outre transférée au Centre des Monuments nationaux. Pour le Président, c’est en effet une triste nouvelle.
C’est également Roland Chabbert qui nous fait parvenir la dernière publication du service de la connaissance du patrimoine de la Région : Jardins de Tarbes et des Hautes-Pyrénées : Placide Massey, créateur et inspirateur, Région Occitanie, 2016, 159 p.

Le Président rend compte de la correspondance, qui comprend diverses invitations, et signale à l’attention de la Compagnie l’article « Et si Toulouse se racontait dans un musée à La Grave », paru dans La Dépêche du Midi du 10 novembre. Le journal du Conseil départemental de la Haute-Garonne annonce par ailleurs une « Découverte historique à Saint-Bertrand-de-Comminges », où a été mis au jour un grand mausolée de 13 m sur 11, situé dans une très vaste enceinte. Les fouilles ont en effet repris cet été sous la direction de William van Andringa, professeur en archéologie romaine à l’Université de Lille.
Il faut encore signaler le colloque Retour au pays de Cocagne. Nouvelles perspectives sur l’histoire du pastel languedocien, qui se tiendra à l’Hôtel d’Assézat, que notre confrère Bruno Tollon présentera aux participants.

L’ordre du jour appelle l’élection d’un membre honoraire. Après un rappel du travail que celui-ci a accompli bénévolement pour notre Société depuis des années, Georges Cugullière est élu membre honoraire de notre Société.
Émilie Nadal donne lecture du procès-verbal de la séance du 8 novembre dernier, qui est adopté à l’unanimité.

La parole est à Sophie Cassagnes-Brouquet pour une communication sur des Fantaisies de notaires toulousains .

Le Président remercie Sophie Cassagnes-Brouquet pour cette communication brève mais tout à fait inédite. Peu nombreux parmi nous étaient ceux qui connaissaient ces dessins des marges des registres notariaux, et il faut à n’en pas douter être un assidu des archives pour les rencontrer et être en mesure de les montrer. En les regardant, on hésite : dessins de fantaisie ? Caricatures ? Portraits ? Ils s’inscrivent en tout cas assez bien dans cette période de la fin du XVe siècle et le début du XVIe, où l’on voit le retour du portrait. Dans cette optique, les profils sont très intéressants.
En réponse à une question de Maurice Scellès, Sophie Cassagnes-Brouquet précise que dans les registres où ils sont les plus nombreux, ces dessins n’accompagnent que 10 à 15 % des actes. Celui-ci voudrait encore savoir s’ils ont pu avoir une valeur mnémotechnique pour repérer plus facilement certains actes. Sophie Cassagnes-Brouquet dit qu’ils sont sans rapport avec le texte et qu’il faut surtout y voir des fantaisies de scribes.
Ayant bien connu le dessinateur Reiser, Christian Darles se souvient d’un dessin de 4 cm qui avait demandé une ramette de papier de dessins préparatoires, et il a l’impression que ces dessins de notaires sont en effet rapidement exécutés mais maîtrisés.
Comme Michelle Fournié ne se souvient pas avoir rencontré ce genre de dessins dans les registres de la fin du XIVe siècle et du début du XVe, Sophie Cassagnes-Brouquet confirme qu’on les trouve plutôt dans ceux de la seconde moitié du XVe siècle. Pierre Garrigou Grandchamp rappelle que des portraits figurent déjà en enluminure dans des chartes de Charles V.
Ces dessins de notaires rappellent Martine Jaoul ceux que l’on trouve sur les céramiques, ce dont convient Sophie Cassagnes-Brouquet en remarquant cependant que peu sont conservés.
Après avoir signalé que de nombreux compoix du XVIe siècle comportent aussi des dessins de visages ou de scènes, Guy Ahlsell de Toulza se demande à quel moment ils sont réalisés : avant d’écrire le texte ou après ? Pour le portrait de trois-quarts, qui est un unicum, il est clair qu’il est ajouté en marge de l’acte, comme le pense Sophie Cassagnes-Brouquet. Pour les autres dessins, celle-ci s’interroge encore sur le moment de leur réalisation, d’autant que la disposition du texte laisse parfois penser que le dessin est au moins prévu.
Louis Peyrusse voient dans ces dessins une grande liberté formelle, qui s’accorderait bien à des enlumineurs habitués des grandes initiales et devenus notaires, dont le dessin pourrait d’intercaler dans le déroulé de l’acte.

La parole est à Christian Darles pour une communication sur Le pressoir à Grand-Point de Parisot (Tarn) : un patrimoine viticole peu connu .

Le Président remercie Christian Darles de nous avoir fait connaître ce pressoir dont la datation par dendrochronologie serait en effet intéressante, avec peut-être des résultats différents pour chacune des pièces. Christian Darles précise que toutes les pièces sont numérotées, ce qui devait faciliter leur démontage et leur remontage, et donc leur remplacement, et il rappelle que ce type de pressoir « à Grand Point » est connu depuis l’Antiquité.
Après avoir demandé quel était le diamètre de la vis (18 cm, indique Christian Darles), Henri Pradalier demande si l’on peut imaginer que l’on ait utilisé des vis en pierre. Christian Darles ne le pense pas, en raison de l’incompatibilité des deux matériaux, la pierre ayant un effet abrasif sur le bois. Comme Henri Pradalier demande si le pressoir a pu être acheté en Bourgogne, Christian Darles répond qu’il croit plutôt à un transfert de technologie, ajoutant qu’il a été surpris de constater que ce type de pressoir avait disparu de la mémoire collective. Sophie Cassagnes-Brouquet évoque les pressoirs des ducs de Bourgogne que l’on fait encore fonctionner pour des vignes appartenant à l’Université.

Au titre des questions diverses, Christian Landes veut attirer l’attention de la Compagnie sur la menace que ferait à nouveau peser la possible ouverture d’une carrière sur le site archéologique de Montmaurin et toute la zone alentour.
Après avoir remerciés Christian Landes et M. Delpoux pour leur exposé très détaillé, le Président propose que notre Société adresse à ce sujet un courrier au préfet. Le Secrétaire général demande aux intervenants de bien vouloir lui communiquer un texte et des illustrations qui pourraient être mis en ligne sur le site Internet de la Société Archéologique du Midi de la France.

Puis Geneviève Bessis présente une Note sur le lieu de naissance de l’imprimeur Guyon Boudeville (1520 ?-1562) d’après un acte notarié :

Un acte notarié conservé aux Archives départementales de la Haute-Garonne révèle le lieu de naissance de l’imprimeur Guyon Boudeville (1520 ? - 1562) jusqu’ici inconnu. Par quel réseau ce jeune Normand, né à Jouy-sous-Thelle vient en apprentissage à Toulouse chez Nicolas Vieillard probablement vers 1535 ? Marie-Thérèse Blanc-Rouquette dans sa synthèse inédite de l’imprimerie toulousaine lance une hypothèse intéressante : Odet de Coligny, cardinal de Châtillon, évêque de Beauvais tout en restant administrateur de l’archevêché de Toulouse, amateur des lettres et des arts et passé à la Réforme est peut-être de près ou de loin le protecteur du futur imprimeur. Pour étayer cette hypothèse, les témoignages des liens du jeune prélat avec les cercles humanistes toulousains sont rares : deux poèmes de Jean de Boyssoné au cardinal de Châtillon, deux lettres du même Boyssoné à Nicolas Bérault, précepteur des trois frères Coligny et la dédicace adressée au cardinal par François Ponisson en tête de son commentaire du psaume 22 publié à Toulouse chez Colomiès en 1550.

Le Président félicite Geneviève Bessis pour ses recherches et cette belle découverte, que Patrice Cabau trouve à son tour très intéressante, en précisant qu’il n’y a pas de preuve qu’Odon de Chastillon soit venu à Toulouse. On le voit à Paris et à Rome, mais il est représenté par son procureur pour la pose de la première pierre du pont Neuf. Geneviève Bessis fait état d’une liste de manuscrits de la Bibliothèque municipale mentionnant un document aujourd’hui perdu où il est dit qu’Odon de Chastillon doit venir prendre ses fonctions. Après avoir remarqué que la prise de fonction elle-même pouvait être faite par son procureur, Patrice Cabau encourage notre consœur à poursuivre son enquête.


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