Jean LAUTIER
1923-1990 Membre de la S.A.M.F. |
Éloge prononcé par Henri Pradalier, président de la Société Archéologique du Midi de la France lors de la séance publique du 9 juin 1990 (M.S.A.M.F., t. L, p. 191-192) :
« Né à Rabastens-sur-Tarn le 4 janvier 1923, Jean Lautier a consacré toute sa vie à son département d’origine et à l’archéologie. Appelé aux Chantiers de Jeunesse en 1943, menacé d’être envoyé en Allemagne dans le cadre du S.T.O., il rejoint le maquis en 1944. Incorporé à la Libération dans l’armée régulière, il participe au siège de Royan. C’est là qu’il rencontre un autre tarnais, un albigeois, André Jarlan. Ils décident, s’ils survivent, de fonder un club de spéléo-archéologie. Ce qu’ils font en 1947.
C’est par le biais de la spéléologie à laquelle il restera fidèle toute sa vie que Jean Lautier va devenir un archéologue éclairé. Mais, entré dans les P.T.T., nommé à Paris, Marseille, Toulon, le contrôleur, puis l’inspecteur Lautier ne retrouve le Tarn qu’en 1954 avec sa mutation à Albi. Dès lors, il va pouvoir s’adonner à sa passion. La spéléologie le pousse vers l’étude des cavités souterraines artificielles dont il entreprend la recherche systématique. Attiré par la théorie selon laquelle ces cavités sont d’utilisation cultuelle et funéraire, sa pensée évolue et il en vient, dans les années 60, à l’idée qu’elles avaient une fonction utilitaire ou artisanale. Ses recherches aboutirent à la découverte de plus de 300 souterrains et le poussèrent à organiser à Cordes, en 1967, un symposium sur ces questions.
Avec les cavités souterraines et la spéléologie, les mégalithes furent la troisième passion de Jean Lautier. Il fouilla entre autres les dolmens de Castelsec et Lagarde à Murat, celui de Peyroseco à Roussayrolles et se précipitait avec frénésie vers tout menhir et surtout tout menhir sculpté qui lui était signalé. Il en sortira un inventaire fouillé des pierres dressées du département : Les mégalithes du Tarn.
Enfin l’apport de Jean Lautier a été considérable pour la connaissance d’Albi avant le Moyen-Age. Attentif aux travaux réalisés dans la ville, il fouilla d’abord à la va-vite dans les tranchées de canalisation ou les fondations d’immeubles avant que les autorités locales devenues conscientes de sa compétence ne lui accordent des délais plus longs. La récente Histoire d’Albi montre tout ce que nous lui devons Pour la connaissance du site et de la ville antique. Les fouilles du Patus-Crémats en 1981 et de la place Sainte-Claire en 1984 en sont un exemple.
Les découvertes réalisées par Jean Lautier et tous ceux que sa passion avait entraînés dans son sillage méritaient d’être portées à la connaissance du grand public. Avec la collaboration du conservateur du Musée d’Albi, Édouard Julien, il réorganisa la section archéologique du Musée Toulouse-Lautrec et y établit une galerie permanente inaugurée en 1972 par le Ministre des Affaires Culturelles.
Jean Lautier estimait que les recherches étaient vaines si elles n’aboutissaient pas à la publication. Pour cela il favorisa le développement de deux revues : Travaux et recherches, de 1962 à 1979, et, depuis 1984, Archéologie tarnaise. A ces activités Jean Lautier ajoutait diverses responsabilités. Membre correspondant de notre société depuis 1964, il était en outre vice-président de la Fédération des Sociétés Intellectuelles du Tarn et de la Société des Sciences, Arts et Lettres du Tarn, correspondant de la Commission Supérieure des Monuments Historiques, membre de la Commission des objets mobiliers du Tarn, membre du Conseil d’Administration du Musée Toulouse-Lautrec, correspondant pour le Tarn des deux Directions des Antiquités Préhistoriques et Historiques. Il était détenteur de la médaille d’argent de la Jeunesse et des Sports et Officier des Palmes Académiques.
Sa culture, sa compétence, son autorité naturelle, son dynamisme communicatif l’ont fait reconnaître comme le « patron » de l’archéologie tarnaise. Opéré du cœur en 1986, il déclina malgré quelque répit laissé par la maladie jusqu’au 12 février dernier où il décéda. La Société Archéologique du Midi de la France a perdu en lui un préhistorien éclairé. »
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