Olivier Testard : Du portail Sud de Saint-Pierre d’Aulnay à la façade de la cathédrale de Cahors (deuxième partie).
Du portail sud de Saint-Pierre d’Aulnay à la façade occidentale de la cathédrale de Cahors : Partie 2
Ce texte poursuit l’étude de l’apport des arts libéraux et de la mise en scène pour enrichir notre connaissance des programmes iconographiques et de la conception des églises. Alors que le portail expose la dimension horizontale des effets de la dédicace, le registre supérieur de la façade vient approfondir ce thème en lui donnant une dimension verticale. La Jérusalem céleste y prend la forme de la coupe d’une église où la rose veut signifier la présence de Dieu.
La dédicace, par le lien noué avec les cieux, garantit l’efficacité des rites qui se déroulent dans l’église pour atteindre l’objectif du salut collectif que l’Église s’est assigné, en assurant la présence de Dieu descendu du ciel dans l’eucharistie.
Des églises évoquent cette superposition en insérant le zodiaque qui vaut voûte étoilée entre le rez-de-chaussée terrestre et l’étage de Dieu. Le tout est complété par l’église des morts en sous-sol. De plus en plus présente, la Vierge viendra prendre place dans l’église terrestre qu’elle représente, comme lieu du point de départ du rachat qui trouve son point d’arrivée dans l’église céleste. La façade ouest de la cathédrale de Cahors s’analyse à partir de ce contexte iconographique.
Présents : Mme Czerniak Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry Bibliothécaire, Cabau, Secrétaire général, Mme Napoléone Secrétaire-Adjointe ; Mme Cazes ; MM. Cazes, Lassure, Peyrusse, Sournia, Testard, membres titulaires ;
Mme Machabert ; M. Kérambloch, membres correspondants.
Invitée : Carlyne Henocq (doctorante).
Excusés : Mmes Balty, Bessis, Dumoulin, Queixalos, Rolland, MM. Balty, Surmone, Tollon.
Après avoir ouvert la séance, la Présidente nous annonce la démission de notre Directrice Adriana Sénard. En effet, débordée par son travail et sa vie familiale, elle a jugé préférable de cesser ses fonctions au sein du bureau de la Société. Nous en sommes tous attristés et nous espérons la revoir bientôt à l’occasion d’une de nos futures séances. Il y aura donc dans un mois des élections pour désigner un nouveau directeur (lors de la séance du 19 avril).
Elle nous signale par ailleurs que la date de la séance publique a été repoussée au 29 mai, nous aurons donc le temps de préparer les invitations et les affiches. Le programme reste inchangé : la présentation des prix du concours et une conférence présentée par notre Présidente et Émilie Nadal sur la peinture toulousaine au XIVe siècle.
Enfin, la dernière information concerne une demande de prêt de la stèle de Montels et la statue-menhir de Frescaty par le site archéologique Lattara, Musée Henri Prades de Montpellier Méditerranée Métropole, pour une exposition intitulée Statues-menhirs, miroirs de pierre du néolithique, qui se tiendra du 7 octobre 2022 au 6 mars 2023. Cette exposition présentera des statues-menhirs découvertes en Occitanie et datant de la fin de l’époque néolithique (3300-2200 av. J.-C.). Le bureau est favorable à ce prêt si les préconisations d’usage sont respectées. Daniel Cazes attire l’attention sur le fait que la statue-menhir de Frescaty est très lourde et que la limite pour l’ascenseur est de 630 kg, il faudra donc que le transporteur soit vigilant sur le poids de cette dernière.
Virginie Czerniak fait don à la bibliothèque d’un ouvrage :
Bernard BERTHOD et Gaël FAVIER, Conques un trésor millénaire, CLD éd., Paris 2019.
Dans la perspective de la séance publique, Louis Peyrusse a fait une sélection de vieux ouvrages en surplus dans les stocks de notre bibliothèque, que nous envisageons de mettre en vente le 29 mai aux prix suivants :
Les Congrès archéologiques de France de l’Agenais, du Velay et du Quercy. 10 €
Les mélanges Durliat. 10 €
Les mélanges Labrousse. 5 €
Un tiré-à-part du Bulletin Monumental de Marcel Durliat sur « la sculpture monumentale du XIe siècle en Occident ». 5 €
Une plaquette, Autour d’Assézat. 3 €
Une plaquette Toulouse à l’époque romantique. 3 €
Il pense, en effet, qu’il vaut mieux remettre ces ouvrages dans le circuit plutôt que de les laisser dormir dans nos réserves.
La Présidente passe enfin la parole à notre confrère Olivier Testard pour une communication longue intitulée Du portail sud de Saint-Pierre d’Aulnay à la façade de la Cathédrale de Cahors (2e partie, la première partie ayant été présentée 15 décembre 2020).
Virginie Czerniak remercie l’orateur pour cette présentation personnelle et foisonnante. Revenant sur ce qui a été dit à propos des peintures d’Ourjout et de son zodiaque assimilé au ciel des étoiles fixes, elle reste pour sa part convaincue que celui-ci était plutôt à considérer comme un symbole du temps christique. Cela, reconnaît-elle, peut cependant fonctionner dans les deux sens. N’ayant pas pu présenter tous les exemples, Olivier Testard répond qu’il faut s’appuyer sur le modèle du Panthéon des rois où les mois de l’année et le zodiaque sont dissociés. Dans certains cas en effet, les occupations des mois jouxtent le zodiaque, le premier en-dessous de l’autre représentant ce qui se passe sur terre et le second ce qui se passe dans le ciel. Concernant les décors situés au-dessus du portail de Cahors, reprend la Présidente, si l’un des personnages peint sur un mince badigeon était encore visible il y a une quinzaine d’années (car protégé par la voussure intérieure du portail), il ne l’est presque plus à l’heure actuelle. Celui-ci tenait quelque chose dans la main et il lui a semblé voir les cordes d’un instrument de musique. Cela poserait alors un problème d’interprétation iconographique puisque l’on a douze niches sur le tympan du portail (10 plus les deux personnages peints sur les côtés). On serait donc tenté d’y voir le collège apostolique, mais si l’un d’eux tient un instrument de musique, cette interprétation ne fonctionne pas. Virginie Czerniak a également retenu la remarque sur l’absence de tympan sculpté pour le portail d’Aulnay, mais il semble qu’il n’y en ait pas de façon générale sur ces églises de Saintonge ; il s’agit donc d’un choix structurel et esthétique, la notion d’abstraction n’est donc peut-être pas à convoquer dans ce cas. L’abstraction est un mot moderne répond Olivier Testard, mais on trouve dans les textes des débats intellectuels sur ces questions ; c’est un grand thème de réflexion.
Quitterie Cazes voudrait revenir sur le portail d’Aulnay qui a été présenté et plus particulièrement l’oculus du niveau supérieur. Son remplage est certainement moderne et il est curieux de le voir percé dans la partie basse de l’arc. Est-il bien roman, n’est-ce pas une intervention postérieure ? Par ailleurs, dans le portail, sous la seconde voussure, il ne s’agit pas d’atlantes comme pour la première, car les petits personnages représentés ont un genou à terre et présentent une main devant, l’autre sur le genou et ne portent rien. C’est pourtant la position d’Atlas portant la sphère céleste répond Olivier Testard. Les premiers sont des atlantes et les seconds des Atlas
Daniel Cazes remercie le conférencier pour cette longue communication en deux parties. Il déclare avoir été très intéressé par le passage de l’anthropomorphe à l’abstraction géométrique, ce que beaucoup d’auteurs ne voient pas en étudiant un édifice. Il faut noter en plus, toutes les spéculations d’ordre théologique et philosophique qu’il peut y avoir, sans que nous soyons toujours armés pour les comprendre et les identifier. Ce qui a été dit sur la notion du trois en un, en relation avec la Trinité, est effectivement très fréquente dans les églises et, ayant travaillé sur le monde cistercien, il a pu noter que celui-ci a particulièrement privilégié ce genre de spéculation, particulièrement dans les chevets toujours composés d’une rosace qui est l’un et trois fenêtres en-dessous qui sont la Trinité. La rosace a également une valeur cosmique. Notre confrère pense en particulier à l’église cistercienne de Santes Creus dont la conception est remarquable puisque le thème iconographique de cette architecture est visible tant de l’intérieur que de l’extérieur. Par ailleurs, remonter dans les textes, comprendre la spéculation exacte, quelle a été celle du commanditaire, il peut y avoir différents cas selon les édifices considérés et les transpositions ne sont pas toujours possibles. Cependant, la démonstration faite sur la cathédrale de Cahors est tout à fait convaincante.
Quitterie Cazes a trouvé très intéressante cette idée du zodiaque qui sépare les mondes présentée par notre confrère et les schémas qu’il a faits étaient très clairs.