Société Archéologique  du Midi de la France
FacebookFlux RSS

Séance du 21 Juin 2022

separateur

Communication de Catherine Viers, La fouille du site de Castel Bielh à Saint-Lézer.

La découverte et l’identification du site fortifié du Bas Empire de Saint-Lézer au XIXe siècle entretient une polémique concernant l’origine de l’évêché de Bigorre et celle du déplacement de la capitale des Bigerri de Tarbes à Saint-Lézer.
Durant l’été 2017, le projet de construction d’une maison individuelle au cœur de l’enceinte Antique est à l’origine d’une fouille concernant une surface de 1000m2.
Les périodes protohistoriques et Antiques sont très peu représentées. Une batterie de fours de la fin de la période mérovingienne témoigne d’une occupation active à cette époque. Durant le Moyen Âge, l’installation d’un vaste complexe architectural organisé autour d’une cour, pose en revanche la question de son attribution comme évêché de Bigorre jusqu’à son transfert à Tarbes. Après son abandon, le site est réinvesti et un village s’installe sur les ruines du complexe, avant son abandon définitif au XIVe siècle.
Après un résumé des arguments qui ont alimenté la polémique sur l’évêché de Bigorre, et des découvertes anciennes, les résultats de la fouille seront exposés par période, retraçant une part de l’histoire du Castel Bielh de Saint-Lézer.

Présents : Mme Czerniak Présidente, M. Cabau, Directeur, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry Bibliothécaire-archiviste, Mmes Napoléone Secrétaire générale, Machabert Secrétaire adjointe ; Mmes Cazes, Fournié, Watin-Grandchamp ; MM. Cazes, Garrigou-Grandchamp, membres titulaires ; Mmes Rolland, Viers ; membres correspondants.
Excusés : Mmes Balty et Caucanas, MM. Balty, Kérambloch, Scellès, Sournia et Surmonne.

La Présidente salue la compagnie et rappelle que cette dernière séance de l’année sera clôturée par le traditionnel petit goûter de fin d’année académique.

Elle laisse ensuite la parole à notre Trésorier qui, au titre des questions diverses, nous livre deux informations.
La première concerne trois pierres trouvées dans l’Hôtel d’Assézat, il y a quelques mois de cela et dont la Fondation désire se débarrasser. L’une d’elle est un bloc en marbre romain provenant d’une corniche (0,90 m de longueur environ). Sa présence a été signalée à Pascal Capus et à Daniel Cazes. Ce dernier a évoqué la possibilité qu’il s’agisse d’un élément oublié des dépôts du Musée établis jadis dans les caves de l’immeuble. Le Musée Saint-Raymond a finalement récupéré ce bloc avec une lettre détaillant son histoire et le contexte de sa conservation, que notre Trésorier a rédigé au nom de la Présidente.
Ensuite, par un message téléphonique de la secrétaire de la Fondation Bemberg, Guy Ahlsell de Toulza a appris que la nouvelle directrice du Musée allait prendre ses fonctions le 11 juillet. Notre Trésorier a contacté M. Pech, Président de l’Union des Académies de l’Hôtel et membre du Conseil d’administration de la Fondation, pour l’informer de la question de l’avenir des trois blocs. À ce titre il a une position intermédiaire intéressante pour négocier la récupération des deux autres pierres trouvées dans les sous-sols de l’immeuble. La première est une table en marbre percée d’un certain nombre d’alvéoles qui, selon Louis Peyrusse et Bruno Tollon, est destinée à recevoir des vases contenant de l’huile ou des liquides un peu précieux dans une réserve (pour ne pas les poser sur le sol). Celle-ci, selon les souvenirs de Bruno Tollon, se trouvait au premier sous-sol de l’Hôtel d’Assézat contre le mur de la rue de l’Écharpe, là où M. Voinchet a construit l’escalier moderne reliant la loggia aux pièces situées en sous-sol. Cette table était destinée à rester dans les réserves ; elle a été démontée et remontée dans la cuisine, là où elle est aujourd’hui, par M. Voinchet. La seconde est une pierre étrangement trouée qui se trouve actuellement sous la loggia où elle a été déposée il y a longtemps vu la noirceur de sa patine. La dernière hypothèse de Bruno Tollon serait qu’elle appartiendrait à une fontaine ; le trou est trop petit pour un oculus de dessus de porte mais effectivement un peu grand pour un tuyau. On voit cependant que l’orifice a été creusé à la base et que l’usure visible pourrait avoir été provoquée par l’écoulement de l’eau. On peut supposer que cette pierre provienne de l’Hôtel. Dominique Watin-Grandchamp fait remarquer que celle-ci est en remploi car il faut la basculer pour avoir une bonne lecture de la sculpture. Louis Peyrusse rappelle qu’en dehors de sa cour d’honneur, l’Hôtel d’Assézat avait une cour de service avec des écuries, deux jardins, des bâtiments annexes, un puits et très certainement un réservoir d’eau. On peut donc penser que cette pierre provient du décor du puits ou du réservoir. En tout état de cause, reprend notre Trésorier, cette pierre est à cet endroit depuis la fin du XIXe siècle et n’a aucune raison d’être jetée.
Il en a donc informé M. Pech qui en parlera à la conservatrice quand il la rencontrera. Il a par ailleurs indiqué à la secrétaire de la Fondation que le Musée Saint-Raymond ne récupèrera pas ces pierres qui n’ont pas été trouvées en fouilles et qui appartiennent à l’Hôtel. Notre trésorier rappelle que c’est Jean-François Laigneau qui est l’architecte en chef chargé par la Fondation des travaux à l’Hôtel d’Assézat. Il projette avec M. Pech de demander à la secrétaire la note écrite demandant l’enlèvement de ces pierres. Une fois en possession de cette note, ils la feront suivre à l’Inspection des M.H. Selon Dominique Watin-Grandchamp, la table est classée au même titre que l’immeuble, elle ne peut donc quitter le sous-sol où elle a été remontée. Par ailleurs, on a pu noter la façon dont est mené le chantier, en particulier les trous qui ont été faits dans le plafond de notre salle de séance. Il s’agit d’un Monument historique classé, il y a des gens responsables qui doivent faire appliquer la législation pour ce type d’édifices. S’il y a dégradation et disparition d’éléments lapidaires qui doivent rester in situ, ce n’est pas, selon elle, au conservateur du Musée d’intervenir. Il faut en référer aux Monuments Historiques. Faire suivre la note ne remettra pas les choses dans le sens de la loi : il faut rédiger un courrier et signaler les faits. Notre Trésorier se demande alors sur quels éléments concrets s’appuyer. Louis Peyrusse rappelle le mail envoyé à Pascal Capus lui demandant de récupérer des pierres qui doivent rester dans l’Hôtel. Il est alors possible de transmettre une copie de ce courrier à l’Inspection, propose Dominique Watin-Grandchamp, de façon à rappeler aux responsables de faire appliquer la loi.
Daniel Cazes précise par ailleurs que ce n’est pas la Fondation Bemberg qui est propriétaire du bâtiment mais la Mairie. Notre confrère se rappelle, lorsqu’il a pris ses fonctions de conservateur au Musée Saint-Raymond en 1985, que Mme Labrousse lui avait confié les clés des réserves éparpillées dans la ville, dont une située dans les caves de l’Hôtel d’Assézat accessible par l’escalier situé à gauche de l’entrée principale. Cette clé permettait d’accéder à l’ensemble des caves de l’édifice, qui contenaient beaucoup de meubles anciens, et il avait pu voir toute l’installation des offices, des éléments maçonnés en pierre et en briques, le tout remarquablement conservé. Malheureusement, une grande partie a été détruite lors des travaux d’aménagement de la fondation Bemberg.
La Présidente se propose d’écrire donc à la C.R.M.H., à l’Inspection et peut-être à l’A.B.F. dans le cadre du secteur sauvegardé, en commençant par signaler les désagréments dont nous sommes victimes dans notre salle de séances depuis quelques temps (la chute de poussière pouvant être dans certains cas dangereuse pour les gens qui la reçoivent).

La deuxième information est un courrier que notre Trésorier a reçu de la part du Journal des Arts, à propos de la Tour de Via à Cahors. Il nous lit l’article publié il y a trois jours sur le projet de réhabilitation de l’édifice. Louis Peyrusse note qu’il n’y a rien de neuf par rapport à ce que nous savions déjà. La Ville avait en effet proposé ce type de réhabilitation et avait même donné des indications précises sur les commerces qui devaient s’installer dans certains bâtiments. Quant à la restauration de la rue du Château du Roi, il faut voir ce que cela peut donner. Pierre Garrigou Grandchamp fait remarquer qu’une étude archéologique complète n’est toujours pas prévue. Nous connaissons certes la tour, mais nous savons aussi que les murs qui donnent sur la petite rue Devia étaient les façades de deux corps de bâtiment disparus, c’était donc l’occasion d’observer les maçonneries pour en savoir un peu plus sur l’édifice. Anaïs Charrier, archéologue du bâti de la ville, ne pourra en faire une étude que si celle-ci est prescrite.
Dominique Watin Grandchamp rappelle que Maurice Scellès avait commencé l’étude du bâtiment, puisqu’elle avait fait le dossier de classement en 2019, à l’exclusion des bâtiments ajoutés au XIXe siècle, sauf s’ils se révélaient recouvrir des vestiges médiévaux en élévation. Par ailleurs, on sait ce qu’il y a dans les sous-sols de la tour mais sous les terrasses qui servaient de cour de prison, il y a aussi un réseau de caves et de pièces qui ont pu servir au stockage. Un gardien lui avait montré comment y accéder mais depuis le passage est condamné. Il y a donc bien matière à faire une étude. Depuis, rappelle Pierre Garrigou Grandchamp, Gilles Séraphin a complété cette étude par un dossier, sans avoir le droit de faire des fouilles (ce n’est pas sa spécialité), où il a posé toutes les bonnes questions auxquelles il reste à répondre.
La Présidente propose à nouveau d’envoyer un courrier à la Mairie de Cahors et à la DRAC de la part de notre Société qui, après la lecture de cet article, s’interroge sur l’éventuelle programmation d’une étude archéologique complète de ce monument. Selon Catherine Viers, si le projet n’est pas déposé, il n’y a pas de prescription possible, à moins que la ville fasse une demande de diagnostic par anticipation. Quitterie Cazes propose de mettre que la Société souhaiterait être rassurée sur le fait que la prescription d’une analyse archéologique complète, faisant suite au diagnostic ou à l’étude préalable, a bien été faite ; cette prescription comprenant bien entendu l’étude de bâti et des sondages. Daniel Cazes propose de joindre Maurice Scellès qui connaît bien le dossier avant d’envoyer ce courrier.

Virginie Czerniak donne ensuite la parole à Catherine Viers pour sa communication longue, La fouille du Castelvielh à Saint-Lézer. Dernières découvertes archéologiques.
La Présidente remercie notre consœur pour cet exposé passionnant et extrêmement pédagogique. La présentation historique évoquant un lieu très particulier était vraiment alléchante. Malheureusement le système de prescription archéologique est très frustrant, puisqu’il n’a pas été possible de fouiller au-delà de 30 à 90 cm de profondeur. Louis Peyrusse admire l’importance de la conclusion et les difficultés d’y arriver. Catherine Viers se dit prête à échanger sur ses conclusions. Notre ancien Président remarque sur les photographies projetées des maisons qui ont l’air neuves autour du site, il demande si elles ont été fouillées. Catherine Viers répond que non et si, comme elle le pense, le site se développe à l’ouest, la zone est malheureusement bâtie. Par exemple la maison située sur la parcelle où ont été faites les tranchées de drainage recouvre 3 m de remblais. Ici se trouvaient certainement des informations archéologiques qui ont été mal évaluées (en 1986). Les propriétaires de la parcelle qui vient de faire l’objet d’une prescription n’ont pas été informés au moment de l’achat qu’ils se trouvaient sur le castelvielh et que le chantier risquait de mettre au jour des vestiges archéologiques. Ils étaient d’ailleurs désolés quand ils ont vu sortir les murs de terre. La Présidente pense qu’il revenait au Maire, qui a la carte archéologique à sa disposition, de les informer avant de délivrer le permis, ou de s’interroger sur l’opportunité d’une construction à cet endroit. Pierre Garrigou Grandchamp demande si, étant donnés les enjeux scientifiques, la D.R.A.C. ne serait pas tentée par une fouille programmée sur le site ? Cela permettrait en effet, ajoute Virginie Czerniak, de répondre à de nombreuses questions sur le plan historique. Catherine Viers répond que la zone est désormais construite ; elle dit par ailleurs avoir présenté les résultats de sa fouille aux Journées Archéologiques donc tout le monde connaît le potentiel de ce site. Quitterie Cazes pense que des prospections géophysiques dans les jardins pourraient aujourd’hui donner de nouvelles informations. Pierre Garrigou Grandchamp voudrait revenir sur les vestiges trouvés : ce qui a été interprété comme la cour de l’évêché. Est-il possible de distinguer les bâtiments et les pièces. Catherine Viers dit n’avoir pu observer que les fondations des murs. Si ce qu’elle a trouvé correspond à une extension, il peut s’agir d’un petit cloître. Pour le reste il lui paraît difficile d’identifier quoi que ce soit, sauf à dire qu’il s’agit d’un grand complexe avec des cours et des murs qui traversent l’ensemble et donc qu’on est en présence d’un grand projet architectural.
Daniel Cazes remercie notre consœur pour son travail et s’étonne qu’un site avec une histoire pareille n’ait pas laissé plus de documents graphiques. N’y-a-t-il vraiment rien dans la cartographie ancienne demande-t-il ? Catherine Viers répond que les recherches en archives n’étaient pas comprises dans son budget. Ce serait sans doute une piste de recherches supplémentaire intéressante, reprend Daniel Cazes, car ce serait étonnant qu’un évêché comme celui-ci n’ait pas laissé, sinon des représentations, au moins des descriptions. Le problème, font remarquer Quitterie Cazes et Dominique Watin Grandchamp, c’est que l’édifice a disparu au XIIIe siècle, donc assez tôt. Il est toujours possible d’avoir quelques documents reprend Daniel Cazes, si l’édifice a disparu au XIIIe siècle, il peut y avoir des ruines au XVe siècle. D’après Catherine Viers, une fois le site abandonné, les regards se sont tournés vers Tarbes. Notre Présidente demande quelle est la date précise du déménagement de l’évêché. Cela dépend des interprétations répond la conférencière, si l’on se base sur les appellations des évêques de Tarbes ou de Bigorre, la première est inexistante jusqu’en 1080, puis les deux sont présentes dans les textes et enfin la seconde disparaît au XIIIe siècle. À ce sujet, Catherine Viers propose de présenter un jour les résultats de la prospection géophysique du chevet de la cathédrale de Tarbes qui a révélé les vestiges d’un édifice antérieur ; des sondages permettent de dire que cette église n’est pas très ancienne. Il s’agira de tout mettre en relation pour faire une synthèse des textes et des apports de l’archéologie. Concernant les vestiges connus à Tarbes, la Mairie est consciente de leur valeur et a décidé de ne pas toucher au jardin qui les recouvre. Virginie Czerniak se réjouit de cette nouvelle.

Avant que tout le monde parte en vacances, Daniel Cazes voudrait remercier notre nouvelle Présidente pour son travail et son enthousiasme. Il nous annonce par ailleurs que la ville de Toulouse a décidé récemment de détacher complètement la gestion de la Basilique de Saint-Sernin de celle du Musée Saint-Raymond, ce qu’il trouve navrant. Apparemment, un administrateur a été nommé (qui est l’ancien administrateur du Panthéon), il n’a rien de personnel contre l’homme, mais un administrateur des Monuments Historiques n’est pas un conservateur, tient-il à préciser. Notre Présidente lui propose de le laisser faire ses preuves, il sera peut-être à l’écoute et scrupuleux dans son travail. Le problème reprend Daniel Cazes c’est qu’il y avait jusque-là en commun, un service technique, un système de veille de nuit, des gardiens, que va-t-on construire à la place ?

La présidente prononce la clôture de l’année académique.

Haut de page