Société Archéologique  du Midi de la France
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Séance du 31 janvier 2023

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Communication courte de Gilles Séraphin, Herment en Auvergne et Saint-Amand de Coly en Périgord, un cousinage architectural
Des pérégrinations en Auvergne ont permis de découvrir à Herment, une église médiévale dont le parti architectural et la modénature reproduisent exactement mais hors contexte, les formes caractéristiques d’un groupe d’églises des confins du Périgord et du Quercy.

Présents : Mme Czerniak, Présidente, MM. Cabau, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Napoléone, Secrétaire générale, Machabert, Secrétaire adjointe ; Mmes Bessis, Fournié, Jaoul, Pradalier-Schlumberger, MM. Cazes, Macé, Penent, Peyrusse, Pradalier, Surmonne, Suzzoni, Testard, membres titulaires ; Mmes Dumoulin, Jiménez, Ledru, Rolland Fabre, MM. Kérambloch, Séraphin, membres correspondants.
Excusés : MM. Garland, Scellès, Sournia, Tollon.

La Présidente ouvre la séance et rappelle qu’une partie de celle-ci sera consacrée à l’Assemblée générale. Elle donne la parole à Louis Peyrusse pour deux informations brèves. Celui-ci nous annonce tout d’abord que Maurice Prin a été inhumé dans la chapelle du Crucifix, dans l’église des Jacobins, jeudi 19 janvier à 11h00, conformément à la demande que celui-ci avait faite à la Mairie de Toulouse. Bien qu’ayant été informé tardivement, notre confrère a pu cependant se rendre à la cérémonie avec Henri Pradalier et représenter la Société. Il semble que la pierre tombale sous laquelle il repose, représentant une croix dominicaine entourée d’inscriptions, ait été dessinée par Maurice Prin lui-même. M. Henri Pradalier signale que Mme Sire a fait remarquer qu’en obtenant que sa tombe soit installée dans l’église des Jacobins, Maurice Prin a fait son dernier cadeau au monument. En effet en creusant sa tombe là l’emplacement qu’il avait expressément désigné on a découvert une partie du mur goutterot du XIVe siècle.

Il nous apprend ensuite que l’Hôtel de Lestang, situé face au segment de l’enceinte romaine de la rue Bida, dont il a été question dernièrement, est aujourd’hui mis en vente par la Mairie. Cet hôtel du XVIIe siècle est protégé par les Monuments Historiques.
Il nous annonce enfin que la caserne Vion va aussi être mise en vente. Située sur les allées Charles-de-Fitte, elle n’est plus occupée par le Service d’Incendie et de Secours. L’édifice a été construit à partir de 1967 par Pierre Debeaux comme un exemple presque parfait de ce que devait être une caserne de pompiers, c’est-à-dire : un hall d’où partaient les camions, un petit Service d’administration, un bâtiment d’habitation et un centre d’entraînement pour les pompiers, ainsi qu’un centre sportif ; une sorte d’unité d’habitation corbuséenne. C’est aussi un des chefs-d’œuvre de l’architecture de béton : béton brut, béton en voile, utilisé pour les murs, les voûtes et les escaliers. L’édifice a reçu le label « architecture remarquable du XXe siècle » et il aurait fallu qu’il reste public ; mais sa mise en vente laisse augurer le pire. Le journal Libération a publié la semaine dernière une tribune demandant la protection de l’édifice, signée par de grands architectes. Louis Peyrusse voudrait que la Société s’associe à cette demande. La Présidente ajoute qu’une pétition circule en ce moment et qu’il serait bon que la Société la signe ; elle propose de l’envoyer à tous les membres. Martine Jaoul dit avoir lu un article dans la revue Sites et Monuments qui annonçait la destruction prochaine de la caserne (n° 229, 2022). Henri Pradalier pense qu’il faut proposer rapidement l’édifice à l’inscription. Daniel Cazes, quant à lui, rapporte qu’il est écrit dans le journal Actu Toulouse que la Mairie ne sait que faire de ce monument, car il n’est pas réutilisable : la piscine par exemple n’est pas aux normes… Pour avoir bien connu Pierre Debeaux, notre confrère affirme que cet édifice était celui dont l’architecte était le plus fier.

Puis la Compagnie se constitue en Assemblée générale et l’on procède à la lecture des rapports.
La Présidente donne le texte de son rapport moral pour le procès-verbal de la séance.

Au terme d’une première année de présidence, il me revient d’établir le rapport moral de cette année écoulée et de mettre en lumière les diverses activités de la Société Archéologique du Midi de la France.
La publication annuelle des Mémoires de la SAMF demeure notre plus belle vitrine et les anciens numéros sont accessibles en ligne, marquant de fait notre attachement au bien commun que représente la recherche scientifique. En raison de la crise sanitaire et de difficultés internes aujourd’hui réglées, nous avions pris du retard dans la publication de nos Mémoires 2019 et 2020-2021, mais ce retard est en train d’être compensé grâce à la formidable mobilisation de nos forces vives, tout particulièrement celles d’Anne-Laure Napoléone. Nous avons à cœur de veiller à publier aussi rapidement que possible et avons de ce fait instauré des délais de remise des textes plus contraints.
Outre notre contribution à la connaissance scientifique et à sa diffusion, notre action s’applique aussi à l’acquisition d’œuvres. Des acquisitions « Pour Mémoire ». Ainsi, au printemps dernier notre Président honoraire Louis Peyrusse et notre Trésorier Guy Ashell de Toulza ont acquis pour notre Société deux dessins préparatoires de Bénézet datés de 1878 Bernard Bénézet a été membre de la SAMF jusqu’à sa mort en 1897. Ces dessins ont été réalisés pour la décoration de la chapelle Sainte-Germaine à la cathédrale de Toulouse et représentent sainte Germaine en train d’enseigner l’Évangile aux petits enfants (scène déjà peinte pour une église de Loubens-Lauragais) et l’Apothéose de sainte Germaine, avec une belle série d’anges. Nos collections, qui s’enrichissent donc régulièrement, sont volontiers prêtées, comme nos statues-menhir souvent convoitées et qui, après Zurich l’année passée, sont exposées au Musée Henri-Prades de Lattes depuis le mois d’octobre.
La SAMF est aussi une vigie : tel un marin placé en observation dans la mâture ou à la proue d’un navire, notre Société alerte lorsque le patrimoine est en danger. Cela justifie que la Société Archéologique du Midi de la France ait été déclarée d’utilité publique en 1850. Il nous revient de veiller à la conservation de cette honorable et belle institution. Conserver ne veut pas dire figer et la Société Archéologique du Midi de la France peut s’enorgueillir d’être un véritable trait d’union entre les générations de chercheurs, des plus jeunes aux plus vénérables – notre Bureau le prouve – mais aussi un reflet des évolutions de notre monde au sens large. Ainsi sommes-nous exemplaires avec un Bureau respectant une parfaite parité : une secrétaire adjointe, une secrétaire générale, une présidente, un bibliothécaire, un trésorier, et un directeur. Au vrai, en dépit de son âge canonique, la SAMF est de son temps.
Elle prouve son adéquation à l’actualité de la recherche scientifique, par le biais de la publication des Mémoires, mais aussi avec la participation de ses membres à de prestigieuses manifestations. Ainsi, l’exposition Toulouse 1300-1400, l’éclat d’un gothique méridional, qui s’est tenue au Musée national du Moyen Âge – Cluny à Paris du 18 octobre 2022 au 22 janvier 2023 s’est révélée être un vrai satisfecit pour la SAMF. En effet, cette exposition, la première depuis la réorganisation complète du Musée de Cluny réouvert en mai 2022, a permis la mise en lumière du dynamisme des membres de la SAMF. Fruit du partenariat entre le grand musée parisien et le Musée des Augustins de Toulouse, l’exposition s’appuie sur les travaux mis en lumière à la faveur du colloque organisé en 2017 grâce au partenariat entre le Musée des Augustins, l’UT2J, le laboratoire TRACES et la SAMF, dont les actes ont été publiés aux PUM en 2021 (V. Czerniak et C. Riou (dir.), Toulouse au XIVe siècle. Histoire, Arts et Archéologie). Les commissaires de l’exposition, Béatrice de Chancel-Bardelot pour Cluny et Charlotte Riou pour les Augustins, ont associé trois membres de la SAMF, (Jean Catalo, Virginie Czerniak et Émilie Nadal) en co-commissariat et sollicité un certain nombre de consœurs et confrères pour la rédaction du catalogue (Michelle Fournié, Sophie Brouquet, Laurent Macé, Jacques Dubois, Anne-Laure Napoléone, Hiromi Haruna-Czaplicki, Véronique Lamazou-Duplan)
Quant aux centres d’intérêt de la SAMF, ils sont assurément multiples et ils traversent les âges, comme l’attestent les différents sujets des travaux universitaires primés chaque année, de même que les communications proposées à la faveur de nos séances bimensuelles. Ainsi cette année avons-nous bénéficié, à titre d’exemples, de communications consacrées aussi bien à des manuscrits du Moyen Âge qu’à des épitaphes antiques, des céramiques du XVIIIe siècle ou bien encore de l’évocation de la vie artistique à Toulouse dans les années 1950. Une pluralité thématique toujours au programme de l’année académique en cours.

Le Bibliothécaire-Archiviste donne lecture de son rapport, après avoir rappelé que l’année prochaine il faudra lui trouver un successeur.

Des chercheurs, qu’ils soient membres ou non de la Société archéologique, ont fait observer qu’un certain nombre de pages avaient été oubliées lors de la numérisation de notre Bulletin par la Bibliothèque nationale de France. J’ai donc identifié les quatre fascicules correspondants (environ 300 pages) et les ai remis le 11 janvier dernier au chef de la mission de la coopération régionale, à la BNF, pour qu’ils soient numérisés et intégrés dans Gallica. Dans le courant de l’année 2023, il ne devrait donc plus y avoir de lacunes dans la couverture numérique de notre Bulletin.
Lorsque nous avons entrepris, en 2019, la refonte complète du catalogue pour le rendre consultable en ligne, nous nous étions fixés un objectif, devenu notre priorité : faire en sorte que tous les documents déjà répertoriés dans l’ancien catalogue se retrouvent dès que possible dans le nouveau. C’est chose faite aujourd’hui. Nous y avons rajouté quelques centaines de dessins, aquarelles, estampes, cartes et tirages photographiques encore non classés dans le meuble à plans. Vous pouvez donc accéder à ces ressources de façon très simple en interrogeant la grille de recherche par nom d’auteur, par titre ou mots du titre, par date, ou même en sélectionnant au préalable le type de documents que vous souhaitez consulter. Le logiciel que nous avons retenu nous imposait de réécrire une à une toutes les unités bibliographiques en adoptant un format utilisé par de grandes bibliothèques, en particulier la Bibliothèque nationale de France. Cela signifie que si l’on devait un jour changer de système informatique, les notices que nous venons de rédiger seraient récupérables. Le catalogue en ligne comporte aujourd’hui 11.520 notices ; à titre de comparaison, il y avait deux fois moins de fiches papier dans les années 1920, lorsqu’Alexandre Biscons-Ritay veillait sur la bibliothèque, sous la présidence du chanoine Auriol. Ce projet doit beaucoup à Jacques Surmonne sans qui il n’aurait pu voir le jour ni être conduit à son terme, et à Geneviève Bessis dont l’expérience professionnelle nous a été précieuse. Il s’agit bien d’une œuvre collective où chacun a su trouver sa place et jouer sa partition. Je vous induirais en erreur si je disais qu’il ne reste plus rien à faire, car on ne saurait oublier les plaques de verre photographiques (même si nombre d’entre elles ont été déjà numérisées et figurent sur le site de la Société) ; il faudrait aussi décrire les objets ainsi que plusieurs cartons d’archives qui bénéficient déjà d’un pré-classement mais que nous n’avons pas eu encore le temps d’intégrer dans ce corpus. Nous allons y remédier au cours des mois qui viennent. Malgré une incomplétude toute relative et de rares dysfonctionnements, le catalogue en ligne, tel qu’il se présente aujourd’hui, donne accès à une documentation riche, variée, où l’on trouve, à côté de nombreux ouvrages de référence, des livres conservés en peu d’exemplaires, des pièces uniques et même parfois de véritables pépites. Cet outil mis à votre disposition s’inscrit dans la lignée des inventaires et des fichiers manuscrits qui l’ont précédé ; il se substitue au dernier répertoire informatisé qui apparaît comme un jalon important dans l’histoire de la bibliothèque ; nous conservons pieusement les uns et les autres, car ils constituent autant de témoignages sur le travail effectué par nos prédécesseurs. En réalité il n’y a jamais rupture, mais continuité avec, de loin en loin, un saut qualitatif, lié aux exigences de la recherche, aux normes de catalogage ou aux progrès technologiques. En dernière analyse, ce catalogue est moins celui des bibliothécaires que celui de la Société archéologique ; ce n’est pas le nôtre, c’est le vôtre, désormais, il vous appartient ; c’est à vous de lui donner du sens et de le faire vivre en l’exploitant pour vos propres recherches.
Comme j’ai pris l’habitude de le faire, depuis deux ou trois ans, j’aimerais vous montrer quelques documents pour illustrer ce petit rapport d’activité.

Imprimés, manuscrits, tapuscrits, photographies :

Promenade avec les fantômes du passé

Mémoire de Bernard Villenaissague) — RES 10077
Ce mémoire d’un certain Bernard Villenaissague, né à Toulouse dans la paroisse de la Daurade en 1764, est le récit poignant d’un homme qui n’a connu que des malheurs tout au long de son existence et qui décide, un jour, de mettre par écrit les épreuves qu’il a endurées : maltraitance lorsqu’il était enfant et adolescent, difficulté à trouver sa place dans la société, maladies, échecs, mauvaises affaires, procès, vilenie de certaines personnes auxquelles il avait fait confiance. Il perdit très tôt son père qui exerçait la profession de luthier et fut placé par sa mère dans des orphelinats ou chez des parents qui ne lui ne lui ont guère prodigué d’affection ; on le suit de Toulouse à Vabre en Albigeois, à Castres, à Bordeaux, puis à Rochefort, à Villeneuve-la-Comtesse, non loin de Saint-Jean-d’Angély, où il passe, avec femme et enfants, quelque 26 ans de sa vie. Il fut tour à tour tailleur d’habits, gérant d’un bureau de tabac et acquit, semble-t-il, une réelle compétence dans l’art de l’horlogerie. C’est en 1819, à l’âge de 55 ans, qu’il publie à Niort cette brochure de 80 pages que j’ai découverte récemment sur les rayons de notre bibliothèque et dont je n’ai trouvé aucun autre spécimen dans les bibliothèques publiques ou universitaires ; elle ne figure pas dans le Catalogue collectif de France qui recense plus de 40 millions de documents. Ce témoignage imprimé, aux accents un peu picaresques et d’une grande rareté, me semblait digne de retenir quelques instants votre attention.

La halle de Montréjeau — MSS 324
Cette carte postale, éditée par les frères Labouche au début du XXe siècle, ne fait pas partie des collections de la Société archéologique ; mais elle restitue fidèlement l’aspect et l’atmosphère de la place centrale de Montréjeau à l’époque où existait encore la halle du XVIe siècle qui fut entièrement détruite par un incendie, le 24 décembre 1944. En revanche nous possédons une lettre dactylographiée de Jean Cazes, architecte en chef des Monuments Historiques, adressée au Président de notre Compagnie, le 6 janvier 1945 ; elle a été publiée dans le Bulletin de la Société archéologique ; ce document, accompagné de deux photographies (avant et après le sinistre) fournit de précieuses informations à la fois sur l’intérêt architectural de l’édifice et sur les circonstances dans lesquelles se produisit ce dramatique évènement. Classée Monument Historique quelques années auparavant (en 1938), la halle de Montréjeau abritait au rez-de-chaussée les commerçants et les paysans qui venaient vendre leurs marchandises les jours de foire ou les jours de marché ; elle comportait au-dessus une superstructure en bois surmontée d’un lanternon, où l’on avait aménagé deux petits bureaux, vestiges de l’ancienne mairie, ainsi qu’un local affecté aux archives. Malgré l’intervention rapide des pompiers de Montréjeau, de Saint-Gaudens et de Lannemezan, la halle fut ravagée par le feu ; la municipalité n’ayant pas souhaité la reconstruire à l’identique, il ne nous reste plus que des témoignages photographiques de cette halle du XVIe siècle qui a disparu à tout jamais du patrimoine commingeois.

Convocation à la séance du 19 mars 1946 (adressée à Joseph Rozès de Brousse) — MSS 279
Lorsque n’existaient ni Internet ni les téléphones portables, les membres de la Société archéologique recevaient autrefois une convocation dans leur boîte aux lettres ; celle-ci fut adressée à Joseph Rozès de Brousse en vue de la séance du 19 mars 1946, fixée à 17 heures précises. C’est, en effet, 25 ans plus tôt (le 25 novembre 1921), que l’on prit la décision de fixer les séances le 1er et le 3e mardi du mois, à 5 heures du soir. Depuis un siècle nous restons fidèles à cette tradition. La guerre était terminée depuis quelques mois : si la Société avait poursuivi son activité, en se réunissant régulièrement et en continuant de publier Bulletins et Mémoires, en revanche la publication du Bulletin fut interrompue pendant plus de dix ans, à partir de 1946, pour des raisons financières. Cette convocation dactylographiée comportait l’ordre du jour, à savoir le rapport de Michel Labrousse relatif au concours, et une communication de Charles Higounet concernant la commanderie et l’église de Montsaunès. La présence de notes griffonnées au crayon a tout de suite éveillé ma curiosité : Joseph Rozès de Brousse était assis à côté de Léon Dutil à qui il écrivit, pour éviter de troubler la séance, même en parlant à voix basse : « M. Dutil, avez-vous reçu ma lettre David de Beaudrigue » ? Le confrère dut acquiescer par un signe de tête ; il faut savoir que Léon Dutil avait publié, deux ans auparavant, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences, un article intitulé « Un capitoul perpétuel : David de Beaudrigue (1745-1765) », qu’il offrit à notre Société et qui se trouve toujours dans nos collections. Puis Rozès de Brousse revient à la charge, quelques instants plus tard : « Comment s’appelle et qui est votre voisin de gauche ? » Le papier glisse sur la table, apportant la réponse : Mais c’est « M. Higounet, professeur d’histoire à Montauban » ! En réalité, Charles Higounet n’a pas dû enseigner longtemps dans cette ville car en 1946 il soutint, à Toulouse, une thèse sur le comté de Comminges au Moyen Âge et fut chargé de cours, la même année, à l’Université de Bordeaux. Brillamment reçu à l’Agrégation d’histoire et de géographie à l’âge de 22 ans, il en avait alors 35. Son parcours était d’autant plus remarquable qu’il venait de passer trois ans de captivité en Silésie, dont il revint en 1943 ; Michel Labrousse, lui, resta prisonnier pendant cinq ans en Allemagne, de 1940 à 1945. Si l’on retourne à présent la convocation, on peut lire d’autres notes manuscrites : on y apprend que le prix de Clausade fut attribué à un certain Hauerbach pour son travail sur l’église de Fleurance ; le lauréat avait été conservateur-adjoint du Musée d’art industriel, à Oslo, en Norvège. Nous possédons encore aujourd’hui ce mémoire dactylographié. L’abbé Ajustron, curé de Saint-Plancard, Georges Fouet, instituteur, et l’abbé Jean Laffargue obtinrent une médaille d’argent pour les découvertes d’objets antiques et de peintures médiévales qu’ils firent à Saint-Plancard. Le résultat de leurs recherches fut publié par Edouard Privat en 1948. Enfin Rozès de Brousse évoque la conférence qui devait être prononcée par Robert Mesuret lors de la prochaine séance publique, fixée au 7 avril suivant ; elle avait pour titre : « l’art d’identifier les tableaux ». Mais les conférences n’étant pas publiées, nous n’en connaîtrons jamais la teneur… Voilà les commentaires que m’inspire ce morceau de papier (mesurant 13 cm par 21) conservé sous la cote : MSS 279.

Marcel Durliat, Saint-Sernin de Toulouse — MSS 322
L’ouvrage que Marcel Durliat publia sur la basilique Saint-Sernin, en 1986, devait inaugurer une collection dirigée par Bruno Tollon et Louis Peyrusse, chez l’éditeur toulousain Éché. Il s’agissait de faire de chaque volume à la fois un précis qui replaçait les édifices dans leur contexte historique, social et artistique et un guide qui en permettait la visite approfondie. Au moment où l’architecte en chef Yves Boiret entreprenait la restauration de Saint-Sernin, ce livre venait enrichir de façon opportune et presque providentielle, aussi bien la bibliographie déjà considérable de Marcel Durliat que l’historiographie d’un monument majeur de l’art roman, avant la parution, en 2008, de la grande monographie signée par Quitterie et Daniel Cazes. La bibliothèque de la Société archéologique du Midi conserve aujourd’hui ce tapuscrit grâce à Bruno Tollon qui fut alors un intermédiaire précieux entre l’auteur et l’éditeur et porta en quelque sorte le « Saint-Sernin de Toulouse » sur les fonts baptismaux. Le document se compose de 183 feuillets que viennent compléter les 87 photographies originales en noir et blanc ayant servi à l’illustration du livre et qui font désormais partie d’un même dossier, répertorié sous la cote : MSS 322. En voyant les nombreuses ratures de l’ouvrage dactylographié, ses corrections, ses repentirs, ses ajouts, on perçoit avec émotion, page après page, la mystérieuse alchimie de l’écriture, la quête incessante du mot juste et de la formulation la plus adéquate. Enfin, trois lettres de Marcel Durliat adressées à Bruno Tollon éclairent la genèse d’un livre qui fait toujours autorité : l’une d’entre elles mentionne une référence qui manquait à l’auteur et que celui-ci attendait avec impatience (la note 69 renvoie en effet à un article que Daniel Cazes venait tout juste de publier dans le Bulletin monumental) ; dans une autre lettre, datée du 11 septembre 1985, il souhaitait modifier sa conclusion : « Vous trouverez ci-joint, écrit-il, le texte qui doit supprimer ce qu’avait d’abrupt la manière dont je prenais congé du lecteur. Peut-être le trouverez-vous trop romantique. C’est l’état de mon âme aujourd’hui ». Après avoir évoqué Stendhal qui visita la basilique en mars 1838, il terminait par ces mots : « Bien d’autres depuis ont suivi ses traces. Comme aux temps lointains des pèlerins de Compostelle, Saint-Sernin demeure un des édifices élus pour être le siège des émotions de l’âme. » La dernière phrase du tapuscrit a été soigneusement raturée, mais j’ai quand même réussi à la déchiffrer ; voici donc la dernière phrase qu’il avait écrite puis biffée en parlant de ce monument qu’il chérissait par-dessus tout : « Nul doute qu’il n’ait droit de figurer parmi les lieux où souffle l’esprit ».

Portrait de Gaspard de Daillon du Lude, êvêque d’Albi (de 1636 à 1676) — 3 Fi 2 (19)
Gaspard de Daillon du Lude, dont on voit ici le portrait, a été au XVIIe siècle (de 1636 à 1676), le dernier évêque d’Albi, juste avant que la cité épiscopale ne devienne le siège d’un archevêché. D’abord évêque d’Agen, il fut nommé à Albi où il succéda à Alphonse d’Elbène, l’un des instigateurs de la révolte du Languedoc, qui dut s’enfuir en Italie après l’exécution du duc de Montmorency. Épris de luxe et de faste, Gaspard de Daillon agrandit le palais de la Berbie, notamment l’aile d’Amboise, et aménagea de magnifiques pièces de réception, comme le « Salon doré » où se trouve encore aujourd’hui, au-dessus d’une porte, ce tableau exécuté, vers le milieu du XVIIe siècle, par le peintre Roland Couplet ou Coupelet. Un médaillon ovale, que supportent six angelots, entoure le portrait de l’évêque décoré de l’Ordre du Saint-Esprit (cela permet d’ailleurs de dater plus précisément l’œuvre, peinte de toute évidence après 1661) ; à l’arrière-plan se profile la ville d’Albi avec ses murailles d’où émergent la cathédrale Sainte-Cécile, la tour de la collégiale Saint-Salvy et quelques autres monuments. À gauche, l’église des Cordeliers, partiellement dissimulée derrière le feuillage d’un arbre. On remarque surtout, au centre de la composition, entourée de vastes jardins et bien mise en valeur, une construction récente qui était devenue la nouvelle résidence d’été de l’évêque ; on l’appelait le Petit Lude, par opposition au château du Grand Lude, berceau de la famille, qui existe toujours dans la Sarthe. Le Petit Lude abrite aujourd’hui la Fondation du Saint-Sauveur qui gère un hôpital de jour. L’image que vous avez sous les yeux est due au photographe toulousain Louis Aillaud. Celui-ci publia, chez Édouard Privat, en 1882, un album consacré à la cathédrale Sainte-Cécile, orné de 93 planches photographiques ; on peut donc supposer que la reproduction du tableau conservé au palais de la Berbie date également des dernières années du XIXe siècle.

Visite de Cordes, juin 1905 — 3 Fi 2 (10)
La bastide de Cordes-sur-Ciel, qui s’appelait tout simplement Cordes jusqu’à la fin du XXe siècle, ne pouvait échapper à la curiosité de Viollet-le-Duc et de Prosper Mérimée ; elle fit l’objet d’une savante étude publiée par Charles Portal, archiviste du Tarn, en 1902. Mais c’est au moment de la Deuxième Guerre mondiale, sous l’influence de quelques écrivains, notamment de Jeanne Ramel-Cals, et d’artistes, comme Yves Brayer, qu’elle suscita un réel engouement et attira de plus en plus de visiteurs. La Société Archéologique du Midi de la France n’attendit pas les hordes de touristes pour s’intéresser à ce joyau du pays albigeois. En juin 1905, les membres de notre Compagnie jetèrent leur dévolu sur la petite cité médiévale pour y effectuer leur excursion annuelle. « La porte de la Jane, écrit Lahondès dans le compte rendu qu’il fit de cette promenade, a surtout attiré l’attention, puisque la Société archéologique l’a sauvée par son initiative de la destruction qui la menaçait. Grâce à sa subvention, à celle de la Société française d’archéologie, à celle du Touring-Club devenu une puissante institution protectrice des sites et des monuments, grâce surtout au don du Ministère des Beaux-Arts, la tour de la Jane a été achetée, et de même les murs de la tour de l’Est dont le propriétaire s’est réservé la jouissance intérieure, sans qu’il ait le droit de rien modifier. La Société a transmis ses droits de propriété à la Société des Amis du Vieux Cordes qui s’est formée aussitôt et qui est mieux en état de diriger et de surveiller les travaux de consolidation » (fin de citation). La photographie du groupe où l’on voit les membres de la Société archéologique, leurs épouses et même des enfants, a été prise par Jean-Henri Depeyre non pas devant la porte de la Jane mais devant la porte de Rous, qui date du XIIIe siècle. On y reconnaît, entre autres, Rodolphe de Champreux et Jules Lahondès. « La journée, conclut celui-ci, s’est accomplie à la satisfaction de tous, par un temps radieux. »

Un tympan et un linteau de La Barousse, de la fin du Moyen Âge — 3 Fi 2 (24) et 3 Fi 2 (25)
Ces deux photographies, bien qu’elles ne comportent aucune indication de date, de lieu ni de personne, ont été prises sans nul doute en 1913 par Adolphe Couzi, alors Secrétaire-adjoint de la Société archéologique. L’une donne à voir le tympan de l’église située à Sainte-Marie-de-Barousse, à la limite de la Haute-Garonne et des Hautes-Pyrénées. Couzi, qui se passionnait pour la photographie, publia à ce sujet une note dans le Bulletin du 24 juin 1913 : « De la voie ferrée unissant Montréjeau à Luchon, écrit-il, on aperçoit dans la direction de Siradan un mamelon couronné de quelques maisons, d’une église et d’un clocher à arcades ; c’est le hameau de Sainte-Marie, commune de Bagiry ». Il nous a laissé une description de cette église construite dans les dernières années du XVe siècle, à la suite d’une apparition de la Vierge à une jeune gardienne de moutons. Son tympan sculpté (1,08 m x 0,45 m) représente, à droite, le Christ crucifié entre la Vierge et saint Jean, et à gauche saint Pierre tenant une énorme clef. On distingue sur l’écu martelé la présence de trois fleurs de lys ainsi que la date de 1498. Lors de la visite d’Adolphe Couzy, en 1913, ce bas-relief venait d’être nettoyé mais au détriment, semble-t-il, de la polychromie existante.
L’autre photographie est d’autant plus exceptionnelle que l’œuvre photographiée ne se trouve plus sur le lieu même où elle a été créée, mais, par-delà les océans, à des milliers de kilomètres de la Barousse. Il s’agit du linteau d’une maison médiévale ornée d’une scène de chasse à l’ours, avec deux archers situés de part et d’autre de la composition et deux cerfs encadrant un écu martelé. Le thème n’est guère surprenant dans cette zone du piémont pyrénéen ; sa datation paraît proche de celle du tympan dont je viens de parler ; je serais même tenté de suggérer que les deux bas-reliefs ont été réalisés par le même artiste, si l’on en juge par la façon dont il a représenté les feuillages. Ne parvenant pas à localiser ce linteau, j’ai eu recours, sur les conseils d’Anne-Laure Napoléone, au réseau des membres de la Société archéologique et j’ai pu bénéficier du propre réseau d’Émilie Nadal qui a très vite apporté une réponse à mes vaines investigations. Le linteau que vous avez sous les yeux surmonte désormais une porte du Musée des Beaux-Arts, à Philadelphie, à l’entrée de la salle des armes anciennes. D’après les informations communiquées par Émilie, la maison d’où provient le linteau sculpté se trouvait dans le petit village d’Ore, à deux ou trois kilomètres de Bagiry, en bordure de la route nationale 125 qui longe la Garonne ; la maison n’existe plus, mais, par chance, on en connaît l’aspect extérieur, grâce à un dessin exécuté sans doute au début du XXe siècle. Il met en évidence deux portes, dont celle de droite qui nous intéresse ici, trois fenêtres à meneaux à l’étage et des motifs sculptés qui agrémentent la façade. Cette maison a été démolie et les pierres de taille sûrement récupérées, ainsi que tout ce qui contribuait à son décor. Que s’est-il passé ? Grâce aux travaux de Géraldine Mallet, de Jacques Lapart ou de Céline Brugeat, nous savons que les monuments du Moyen Âge, souvent à l’abandon et en perdition dans le Midi de la France, au début du XXe siècle, attisèrent la convoitise d’un collectionneur américain, Georg Grey Barnard (1863-1938), qui fut particulièrement actif entre 1910 et 1930. Il choisissait lui-même les pièces qui l’intéressaient, mais disposait aussi sur place d’un réseau de marchands plus ou moins scrupuleux, comme le toulousain Fernand Pifteau, et fit expédier aux États-Unis nombre de cloîtres, de chapiteaux et autres vieilles pierres chargées d’histoire. C’est ainsi que les ensembles de Saint-Michel-de-Cuxa, Saint-Guilhem-le-Désert, Bonnefont-en-Comminges, Trie-sur-Baïse, arrachés au terroir qui les avait vus naître, constituent aujourd’hui le Musée des Cloisters, à New-York. Mais bien d’autres échantillons de notre patrimoine méridional (colonnes, portails, fenêtres, chapiteaux romans et gothiques) suivirent le même chemin et furent proposés à des institutions ou des collectionneurs américains. Bien que nous ne connaissions pas dans le détail les conditions d’un tel transfert, il n’est pas surprenant que ce linteau, après le démantèlement probable de la maison seigneuriale d’Ore, dans la Barousse, ait franchi l’Atlantique pour commencer une nouvelle vie au Musée des Beaux-Arts de Philadelphie. En tout cas, sans la photographie d’Adolphe Couzi, nous n’aurions pas soupçonné l’existence de cette curieuse scène de chasse à l’ours du XVe siècle et encore moins sa surprenante destinée.
Ainsi s’achève cette promenade un peu nostalgique avec les fantômes du passé ; nous la poursuivrons, si vous le voulez bien, l’année prochaine, avec d’autres documents.

Notre Trésorier présente enfin le bilan financier de l’année passée :

Quitus est donné au Trésorier pour la bonne gestion des comptes de la Société.
Les rapports précédents sont approuvés à l’unanimité.

Puis le renouvellement des postes de Directeur, de Secrétaire adjointe et de Trésorier est soumis aux votes des membres titulaires. Ils sont tous les trois réélus.

Avant la communication annoncée par l’ordre du jour, la Présidente montre un plan ancien du Musée des Augustins pour replacer précisément les vestiges de la chapelle Renaissance de l’Ecce Homo découverte à la faveur des fouilles effectuées par le Service archéologique de Toulouse-Métropole (en décembre 2021) et dont il a été question lors de la séance du 3 janvier dernier. La DRAC ayant refusé la destruction de ces vestiges, il a été projeté de les déplacer car ils gênent l’aménagement du futur Service d’accueil du Musée prévu l’architecte Aires Mateus. Personne ne semble savoir si ce déménagement aura lieu ou si le projet sera modifié.
Daniel Cazes rappelle qu’après la construction du bâtiment de Viollet-le-Duc et de Darcy, inauguré en 1896, devait suivre la reconstruction de l’aile sud, à l’étage de laquelle on aurait accédé par l’escalier monumental que l’on venait de construire ; mais le projet a été abandonné. Dans les années 1950-1960, l’architecte-en-chef Sylvain Stym-Popper voulait reprendre ce projet. En partie entamé, la Mairie en abandonne la majeure partie en 1976-1980, pour préserver des arbres et la vue des habitants d’un immeuble de la rue de Metz… Stym-Popper avait conscience des vestiges de la chapelle de l’Ecce Homo et de la cage d’escalier qui menait au premier étage où se trouvait la célèbre bibliothèque du couvent. Daniel Cazes regrette profondément qu’actuellement on oublie tout ce qui avait été l’objet des projets antérieurs, qui auraient donné plus de surface d’exposition au musée et permis de meilleures circulations intérieures, pour un musée qui, de toute façon, est aujourd’hui trop petit pour présenter ses riches collections médiévales et des beaux-arts. Virginie Czerniak déclare qu’il est étonnant que la Mairie ou l’architecte n’ait pas eu idée d’intégrer dans le dernier projet des vestiges qui étaient connus par les documents.

Louis Peyrusse fait remarquer que les choses se sont sans doute passées de façon plus complexe. Quand la Mairie a demandé l’accord de l’État pour refaire l’entrée du Musée, il y a eu un accord signé par le Préfet à condition que des fouilles archéologiques soient faites. Une fois celles-ci effectuées, le Conservateur régional des M.H a refusé que le projet aille plus loin sans que soient traités les vestiges. On devine un contentieux entre les parties.

Notre Directeur voudrait également revenir sur les vestiges de la muraille romaine dégagés rue Bida et projette un plan mis en ligne sur le site Urban-hist.toulouse.fr juxtaposé avec le plan cadastral des années 1970, où figurent encore les bâtiments détruits en 1971. Le terrain vaccant couvre environ 2000 m2 ; or seuls 1152 m2 sont mis en vente selon le document présenté par Daniel Cazes le 3 janvier. Des informations provenant d’un Service municipal indiqueraient par ailleurs qu’il y aurait eu un détachement de parcelle : le terrain aurait été ainsi découpé. Enfin, le panneau d’information appliqué sur la clôture précise que les vestiges seront préservés, mis en valeur et éventuellement offerts à la visite. Nous n’aurions donc aucune inquiétude à avoir quant au devenir du site antique, les constructions à prévoir devant être effectuées en retrait. Un second plan dessiné par notre consœur Quitterie Cazes est projeté. Il montre les vestiges de l’enceinte romaine reconnus dans ce secteur. D’après un document du XIVe siècle que Patrice Cabau vient de transcrire, le duc Louis d’Anjou, frère du roi Charles V et son lieutenant « en toute la languedoc », étant à Toulouse dans le premier trimestre 1374, s’émeut de l’état de l’enceinte entre les Hauts-Murats et la porte Saint-Étienne ; les chanoines de la cathédrale avaient profité de l’arasement des fortifications et, ignorant « la clausure antique », avaient construit au-dessus ainsi que sur les fossés comblés, ce qui devenait problématique pour la mise en défense de la ville pendant la Guerre de Cent Ans. Le duc d’Anjou donne donc ordre de détruire tous les bâtiments élevés par les chanoines dans cette zone et d’en revenir aux fondements antiques sur lesquels les capitouls sont chargés d’élever de nouvelles fortifications.
Michelle Fournié se réjouit des informations très intéressantes fournies par ce texte car il s’agit d’actions peu connues du duc d’Anjou. Par ailleurs, le duc d’Anjou, gouverneur en Languedoc, mène la reconquête sur les territoires perdus face aux Anglais entre 1370 et 1374. Il est donc parfaitement logique qu’il s’intéresse à l’état de l’enceinte et à sa réfection. De plus, jusque dans les années 1380, Toulouse est la base militaire de la reconquête. Louis d’Anjou séjourne fréquemment à Toulouse, où deux de ses enfants sont nés. C’est aussi un grand mécène, donc un personnage très important pour notre ville.
La Présidente demande à Patrice Cabau de nous proposer une communication à partir de ce texte qui semble en effet particulièrement intéressant.

Puis elle donne la parole à Gilles Séraphin pour sa communication courte : Herment en Auvergne et Saint-Amand de Coly en Périgord, un cousinage architectural.
Virginie Czerniak remercie notre confrère et demande s’il existe des liens entre les édifices présentés, autres que la plastique et la grammaire ornementale. Il n’y en a aucun actuellement connu répond Gilles Séraphin. La question de la circulation et de la formation des artistes se pose ; notre confrère déclare qu’il commence à penser que ceux-ci ont une connaissance très fine de ce qu’ont fait leurs prédécesseurs et pas nécessairement dans la même région que celle où ils officient. Il prend pour exemple le portail de l’église de Mauriac et montre le décalage entre les moulures de la voussure, qui accusent la fin du XIIe ou le début du XIIIe siècle, et le tympan sculpté proche de celui de la cathédrale de Cahors ; il en conclut que malgré les similitudes des tympans, l’église de Mauriac est postérieure au portail nord de la cathédrale de Cahors. Mais de combien de temps ? Il pense en revanche que la chronologie est plus resserrée entre la construction des églises de Saint-Amand-de-Coly et d’Herment (élevée sans doute vers 1232, ce qui correspondrait à la création du collège de chanoines). Pour lui, les édifices de Saint-Amand-de-Coly, Paunat, Comarque et la lanterne des morts de Sarlat seraient achevés entre 1220 et 1250. La Présidente trouve cette datation tardive. Henri Pradalier pense qu’on pourrait la remonter jusqu’à 1200 car les formes dont il a été question existaient déjà. Revenant sur la question de la circulation des artistes, il pense que ce sont plutôt les carnets de dessins qui circulent plus que les hommes : les œuvres sont donc connues à travers les dessins qui sont faits et recopiés. Gilles Séraphin déclare qu’il ne s’appuie pas sur la création du collège d’Herment pour proposer ses datations, mais sur l’article qu’il avait fait sur les croisées d’ogives où il avait conclu que les voûtes de Saint-Amans de Coly, de Paunat et de la lanterne des morts de Sarlat ne pouvaient dater que des années 1230. Ce qui est intéressant à Herment, c’est que l’on trouve dans la construction des éléments inspirés des parties les plus anciennes et les plus récentes de Saint-Amans-de-Coly. Le même phénomène peut être noté au portail de l’église de Mauriac et d’autres exemples peuvent être donnés. C’est cette pratique originale d’inspiration qui a particulièrement intéressé notre confrère, et les réflexions qui en découlent restent des hypothèses.
« Obazine est un centre cistercien, qu’en est-il des autres ? » demande Laurent Macé. Les autres sont bénédictins répond Gilles Séraphin.

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