Société Archéologique  du Midi de la France
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Séance du 7 mars 2023

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Communication longue de Valérie Rousset et Virginie Czerniak, L’église Saint-Pierre et Saint-Paul de Toulongergues (Aveyron).

L’église Saint-Pierre et Saint-Paul de Toulongergues (commune de Villeneuve en Aveyron) est l’un des plus remarquables édifices à angles arrondis du Rouergue. Classée Monument historique en 1988 après avoir été convertie en grange-étable après la Révolution, l’église a retrouvé son statut en 1984 avec son rachat par la commune et à la suite de plusieurs phases de restauration.
Des fouilles menées dans la nef et l’abside ont mis au jour en 1988 une nécropole des VI-VIIe siècles, recoupée par les fondations de l’église datée par radiocarbone de la seconde moitié du Xe ou du début du XIe siècle.
L’édifice en « double boîte » se caractérise par une nef haute et étroite dans laquelle s’ouvrent des porte « en entrée de serrure » et des fenêtres en meurtrière. L’abside, quadrangulaire et voûtée d’un berceau légèrement outrepassé, est dotée d’arcatures doubles à l’intérieur desquelles sont conservés des colonnes et des bases en grès profilées de baguettes et de filets. Deux personnages ainsi que les pattes d’un équidé sommairement taillés dans la pierre de deux colonnes constituent des témoignages précieux auxquels sont associés deux chapiteaux retrouvés dans des comblements postérieurs. L’un deux porte un décor d’entrelacs et une scène qui pourrait figurer l’Entrée du Christ à Jérusalem.
Une phase d’embellissement a concerné l’abside, l’arc triomphal et une partie de la nef. Un enduit masquant la modénature et le décor sculpté antérieurs a été le support d’un remarquable ensemble peint. En dépit de sa complexité et de l’importance des lacunes, de nouvelles interprétations iconographiques peuvent être proposées et des pistes ouvertes pour l’analyse stylistique de ce décor pictural particulièrement singulier.

Communication courte de Valérie Rousset, Église Saint-Côme et Saint-Damien de Saint-Côme d’Olt (Aveyron) : une signature du XVIe siècle ?
Le portail occidental de l’église Saint-Côme (Saint-Côme d’Olt, Aveyron) présente deux vantaux remarquables sur lesquels s’inscrivent, non seulement le chronogramme de 1532 et les armes de la famille d’Estaing, mais des animaux, des bustes et des lettres onciales.

Présents : Mme Czerniak, Présidente, MM. Cabau, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Napoléone, Secrétaire générale, Machabert, Secrétaire adjointe ; Mmes Cazes, Fournié, MM. Cazes, Peyrusse, Scellès, Stouffs, Surmonne, Testard, membres titulaires ; Mmes Caucanas, Ledru, Rolland Fabre, Rollins, Rousset, M. Laurière, membres correspondants.
Excusés : Mmes Balty, Jaoul, Pradalier, MM. Balty, Dubois, Garland, Garrigou Grandchamp, Kérambloch, Pradalier, Tollon.
Invitée : Jeanne Péligry.

La présidente ouvre la séance et fait un accueil chaleureux à Lanny Rollins, nouvellement élue membre correspondant de notre Société.
Elle donne ensuite les résultats de la commission de la Société sur les travaux présentés au concours de cette année. Sur sept travaux présentés, quatre ont été primés :

Esteban Demesteere L’affaire de Najac (1249-1258), mémoire de master II en histoire médiévale sous la direction du professeur Laurent Macé, soutenu à l’Université de Toulouse 2 Jean-Jaurès, est distingué par le Prix de Clausade.

Dès les premières pages du premier volume de 238 pages, le rapporteur est saisi devant la rigueur d’écriture et de relecture ainsi que la clarté des arguments, présentés dans une langue aussi claire que rigoureuse. Il ne m’a pas permis de trouver une faute d’orthographe et de français ni en latin, sauf un accent sur Dom Devic.
Cette première impression se concrétise à la découverte de l’organisation rigoureuse de l’enquête.
Dans son introduction, M. Demesteere plante le décor, le contexte général, les personnages auxquels il va s’attacher et la méthodologie qu’il va mettre en œuvre.
Le premier chapitre du mémoire est remarquable pour un jeune étudiant dans sa rigueur scientifique et sa capacité à interroger les sources et la bibliographie dont il fait non seulement l’historique mais aussi une critique historiographique qui témoigne de la maîtrise de son sujet, convoquant l’histoire, l’archéologie, l’histoire politique et religieuse, etc.
C’est sans aucun doute cette aisance parmi les sources qui lui permet de se sentir chez lui dans ce castrum et ses habitants du XIIIe siècle, décrit dans le deuxième chapitre.
Après un important travail de transcriptions et de traduction du latin, le chercheur aurait pu s’arrêter là, mais il mobilise bien d’autres sources comme la géographie avec des cartes remarquables et l’archéologie dans son troisième chapitre.
Ce n’est qu’après toutes ces approches, fortes utiles par la suite, qu’au chapitre IV, il en vient au cœur du sujet, la révolte de Najac de 1249 dont il propose une chronologie. Une démarche qui a la particularité de ne s’appuyer que sur les sources médiévales, relues et décortiquées avec un sens critique qui l’honore, mais il est aussi un conteur très précis des évènements et n’en s’en laisse pas compter par les sources partisanes du Moyen Âge et d’aujourd’hui.
De cette affaire, somme toute modeste, M. Demesteere fait un exemple d’approche sociologique des groupes qui habitent Najac, parfois unis, parfois déchirés, alliés ou antagonistes : les coseigneurs de Najac, les grands perdants de la révolte, les consuls et les marchands et les consuls et les autres habitants.
Dans le chapitre VI, l’auteur pose la question de la révolte, comme il l’a fait déjà fait dans le titre de son mémoire en utilisant prudemment le terme d’affaire, plutôt que de révolte. Dans le chapitre suivant, il en vient à la conclusion de la révolte ainsi que ses conséquences, la répression et l’instrumentalisation. C’est ici que s’inscrit l’épisode « cathare » sur lequel le chercheur reste prudent et y voit à juste titre un prétexte pour l’évêque de Rodez et le sénéchal comte de Toulouse à s’enrichir. En effet, même s’il est vrai qu’il y a des hérétiques à Najac, l’hérésie n’a joué aucun rôle dans la révolte de Najac, mais par contre dans son instrumentalisation pour se débarrasser des vaincus.
Enfin, l’auteur montre bien l’emprise du nouveau pouvoir capétien par la construction de la forteresse de Najac, tout en redonnant aux Najacois leur charte de coutumes, mettant en pièces la légende « des méchants capétiens et des gentils raimondins ».
La conclusion du mémoire est aussi claire que le reste, même si le lecteur serait intéressé par l’esquisse de nouvelles perspectives de recherches que ce beau volume fait deviner.
Le deuxième volume du mémoire comporte de très nombreuses pièces présentées par le texte original et leur traduction, ainsi que des tableaux onomastiques.
On l’aura compris, le travail effectué par M. Destemeere est d’une qualité remarquable en tous points et l’on trouve rarement parmi les jeunes chercheurs, aussi bien dans la forme que dans le fond, et nous espérons qu’il puisse persévérer dans cette voie où il excelle.

Sergio Jiménez Manchón, Pratiques d’élevage entre l’Empordà et le Languedoc à l’âge du Fer, Archéozoologie, alimentation animale et saisonnalité, thèse sous la direction d’Armelle Gardessin, soutenue à l’Université de Montpellier 3 Paul-Valéry en 2020, est distingué par le Prix spécial de la Société Archéologique.
La thèse de Sergio Jiménez Manchón correspond à un volume unique de 543 p. Le document présente une grande qualité de forme avec une mise en page efficace, des illustrations de qualité, complétant parfaitement le discours.
La thèse a pour objectif de comprendre comment le contexte de changement apparu à la fin de la fin de l’âge du Fer se traduit dans le domaine de l’élevage. Pour répondre à cette problématique la thèse a été organisée en 6 chapitres : : 1. cadre de l’étude, 2. problématique, 3. matériel et méthodes, 4. résultats par sites, 5. confrontation, 6. synthèse générale.
En réalité, ce découpage intègre trois grandes parties bien équilibrées : présentation, problématique et méthodes, résultats par sites et synthèse/conclusion.
Le chapitre 2 dresse un bilan des hypothèses et des arguments jusque-là avancés sur l’élevage. Il liste les objectifs de la thèse : identifier le spectre faunique, connaître la gestion économique du troupeau, analyser les pratiques culinaires et de boucherie, analyser le régime alimentaire des animaux, étudier les rythmes saisonniers, identifier et décrire les processus taphonomiques et replacer les résultats dans leur contexte géographique.
Le corpus comprend 5 sites principaux (ch. 3). La méthodologie est très élaborée et associe des analyses jusque-là classiques à des approches peu courantes ou inédites pour déterminer l’âge, la saison d’abattage et les espèces…
Les résultats sont ensuite présentés par sites dans une partie analytique (ch. 4). Puis les données sont rassemblées et soumises à une discussion (Ch. 5). Celle-ci conduit à une synthèse générale (ch. 6).
Principaux résultats
L’auteur indique la prédominance de la triade domestique sur tous les sites. Les caprinés arrivent toujours en tête suivis le plus souvent du bœuf puis du porc. Il identifie des nuances : aux VIe et Ve s. le bœuf est surtout présent dans les zones littorales et les caprinés dans l’arrière-pays. Une plus grande variabilité se manifeste à la phase suivante (Ve-IVe s.).
Espèces : aux VIe et Ve s., les valeurs montrent une certaine homogénéité dans l’Empordà et une plus grande variabilité en Languedoc. A la phase suivante, la situation évolue peu en Empordà. En Languedoc, on note une augmentation du porc sur les sites urbains. Il en va de même du bœuf, par rapport aux caprinés. Cela souligne une forte demande en viande stimulée par le phénomène urbain.
Exploitation du troupeau : on observe une tendance générale dans les deux régions. Les animaux sont soit abattus jeunes, pour leur viande, soit gardés plus longtemps pour mettre à profit leurs produits secondaires. La tendance s’accentue durant la deuxième phase.
La taille des animaux : la taille moyenne des animaux est relativement basse. Ceci est d’autant plus vrai pour les bœufs. Ceci pourrait s’expliquer par la réduction de la mobilité de ces animaux et la difficulté d’accès aux pâturages.
Chasse : activité secondaire
Pratiques culinaires et boucherie : l’ensemble des étapes de traitement de la viande est représenté sur la grande majorité des sites. On peut donc en déduire que les carcasses arrivent entières sur les sites. Les techniques bouchères varient selon l’espèce. En revanche, le schéma de découpe apparaît similaire. Ces éléments signalent que l’activité bouchère est déjà normée et exercée sans doute par des spécialistes.
Les traces sur les ossements renvoient à des préparations de type bouillon ou cuisson directe.
Alimentation du bétail : l’analyse de la méso-usure et de la micro-usure des dents permet une première approche de l’alimentation des animaux. Les caprinés bénéficient d’un régime mixte, de type brouteur et les bœufs ont accès à une alimentation plus riche en graminées. Ces derniers ont un régime plus proche des paisseurs.
Fourrage : le recours au fourrage semble secondaire durant la période.
Espaces de stabulation : le porc est assurément présent dans la plupart des sites (zones de parcage ?).
Rythmes saisonniers : l’analyse des données disponibles permet d’identifier différentes tendances :
- la mise bas se produit principalement au printemps chez les caprinés,
- le troupeau se nourrit dans son milieu environnant,
- en été, les caprinés ont un régime plus pauvre en graminées,
- la réforme des adultes intervient principalement au printemps et en été, chez les caprinés,
- les caprinés jeunes sont tués tout au long de l’année,
- en automne et en hiver, une partie des caprinés sont gardés pour la lutte et la gestation,
- les bœufs ont un régime alimentaire riche en graminées. Ils sont mis à mort durant toute l’année contrairement aux caprinés adultes.
Au bilan, la thèse apporte de nouvelles données sur l’élevage entre les VIe et IVe s. Les résultats reposent, entre autres, sur trois types d’analyse novatrices : l’étude de la méso- et de la micro-usure dentaire et de la cémentochronologie.
Conclusion
La thèse de Sergio Jiménez Manchón concerne l’élevage et son économie à l’âge du Fer. C’est un travail de très grande qualité. Il n’échappe pourtant pas à quelques reproches. Ainsi, la question de la transhumance n’est pas du tout abordée. Or, il est difficile de parler d’élevage autour des Pyrénées sans au moins évoquer ce sujet. En outre, certaines hypothèses ne peuvent en l’état être validées. Elles mériteraient d’être confrontées à des études environnementales, réalisées au plus près des sites. Mais là, évidemment, l’auteur n’est pas seul en cause.
Malgré ces quelques remarques, on se doit de souligner la qualité de cette thèse, l’importance du corpus analysé et le caractère novateur du protocole d’étude mis en place. Parmi les nombreux résultats obtenus, plusieurs sont particulièrement significatifs. L’auteur démontre ainsi que le bétail était exploité au plus près des sites, dans des bois ou des zones ouvertes, en fonction des espèces. Plusieurs indices trahissent également une forte pression sur les terres agricoles, comme la réduction de la taille des animaux, signe de difficultés à trouver une nourriture adaptée. Un autre acquis de cette thèse concerne le porc, qui se développe comme corollaire de la croissance urbaine. De mon point de vue, cette thèse est novatrice et de grande qualité. Elle ouvre des perspectives multiples sur l’étude de l’élevage avant la conquête romaine.

Andréa Calestroupat, Du Roi à l’industrie : le règne minéral des marbres de Saint-Béat (XVIe siècle-début XXe siècle), mémoire de master II sous la direction d’Emmanuel Charpentier et Pascal Julien, soutenu à l’Université de Toulouse 2 Jean-Jaurès, est distingué par la médaille de la Société Archéologique.

- Originalité du sujet
Le candidat aborde le sujet d’emblée par une approche intéressante : il interroge la réception et la mémoire de l’activité et du matériau. Il s’inscrit, en mettant au premier plan de sa problématique le matériau, dans une tendance historiographique récente, d’autant plus qu’il veille à placer le marbre dans la société des artisans qui l’exploite, mais également dans le système économique qui se bâtit autour de lui. Si le choix chronologique du traitement du sujet est assez classique, il s’avère à la lecture qu’il s’impose pour donner une dynamique et un tempo à la description de l’activité. Son propos s’inscrit donc dans une démarche actuelle de la recherche, tout en s’imposant comme synthèse des travaux antérieurs déjà effectués sur le thème ou sur le site. Son travail a donc l’intérêt d’une étude de l’activité humaine, technique et économique d’un site sur le temps long.
- Méthodologie
L’argumentaire du candidat est clair et structuré. L’appareil critique est solide, et le texte est agrémenté des figures, cartes et éléments de preuves indispensables à la lecture. Le lecteur, même novice au sujet, ne se perd pas et a en main tous les éléments de compréhension indispensables. Les annexes sont très complètes : sources, bibliographie très fournie, du peu que je puisse en juger vu mon manque d’expertise fine sur le sujet, documents transcrits et figurés. Il est aussi à noter la présence fort utile d’un glossaire. Il est peut-être regrettable d’avoir articulé le plan en seulement deux parties, une troisième aurait pu, peut-être, permettre le déroulé de la réflexion de manière plus fine, mais dans l’ensemble cette objection est contrebalancée par un texte bien construit et facile à suivre.
- Qualité de l’écriture
Le style est clair, l’argumentaire pertinente et la langue française, autant dans sa syntaxe que son orthographe, maîtrisée. Notons également que le candidat fait preuve d’une grande maîtrise dans la transcription des textes historiques, appliquant à la fois les normes correctement, mais également rythmant les textes transcrits avec une ponctuation utilisée à très bon escient.
- Maîtrise du sujet
Le candidat, vu la difficulté de son sujet, réussi brillamment à montrer sa maîtrise des différentes problématiques liées au thème, surtout déclinées dans un temps long. Il fait preuve d’une maîtrise du sujet, au sens où : 1, il mobilise les notions et concepts adéquats, 2, il s’appuie à juste titre sur les travaux existants tout en les requestionnant, 3, il expose un appareil critique très complet et des sources choisies avec pertinence.

Julia Faiers, Power, Piety and Legacy : the Patronage of Bishop Louis d’Amboise in fifteenth Century Languedoc, thèse soutenue à l’Université de St-Andrews (Écosse) en 2020, est distinguée par la médaille de la Société Archéologique

Mme Julia Faiers, de nationalité anglaise, a soutenu en décembre 2020 à l’Université de Saint-Andrews, Écosse, une thèse sous la direction du professeur Katerin Rudy pour l’obtention du grade de PhD (Doctor of Phylosophy). Ce travail, intitulé Power, Piety and Legacy : the Patronage of Bishop Louis d’Amboise in fifteenth Century Languedoc, est consacré aux commandes de Louis Ier d’Amboise, évêque d’Albi à la fin du XVe s. Il consiste en un volume de 421 pages, illustrations (au nombre de 178) et annexes comprises.
Si le sujet n’est pas inédit côté français, en revanche, l’approche scientifique retenue pour aborder le sujet est plus originale pour des médiévistes français. En effet, le travail de Mme Faiers s’inscrit dans la tradition anglo-saxonne de la sociologie de l’art de ces toutes dernières années, approche peu représentée en France chez les médiévistes de nos jours. Le propos est clair dès l’introduction. Il ne s’agit pas de poursuivre une tradition historiographique proposant de nouvelles lectures iconographiques ou attributions à tels ou tels artistes, mais de lire autrement les œuvres commandées et les ouvrages réalisés. Pour cela, la candidate s’appuie uniquement sur les œuvres conservées. Ces sources sont alors regardées autrement que comme la pure et simple manifestation de piété du prélat, comme cela a toujours été présenté par l’historiographie. En effet, Julia Faiers interroge les réalisations de Louis d’Amboise sous l’angle du politique avec des commandes exécutées à tels moments souvent pour répondre à tel contexte, en questionnant notamment la prolifération de l’écu familial sur l’ensemble des ouvrages. Ainsi sa réflexion l’a amené à proposer une analyse convaincante et renouvelée de certaines des commandes du prélat.
Pour cela, le plan de la démonstration, puisqu’il s’agit d’une longue dissertation, est à la fois classique et simple et s’article en 7 chapitres, souvent solides et bien documentés : le premier est consacré aux sources et à l’historiographie, le deuxième aux Amboise aux XVe siècle, puis à partir du suivant, à l’analyse des œuvres (chœur et jubé d’abord, peinture du Jugement Dernier ensuite, palais de la Berbie et clocher de la cathédrale, les travaux à la chapelle de la résidence de Combéfa, puis la plate-tombe conservée dans la chapelle d’axe de Sainte-Cécile d’Albi).
Le travail de recherche est solide et réfléchi, lequel manifeste un sens critique et de la réflexion indéniable, soutenu par une bibliographie référencée plutôt complète et pertinente, même si quelques manques sont à regretter comme notamment les rapports du P.C.R. dirigé par Bernard Pousthomis consacré à la Berbie, rapports pourtant connus de Mme Faiers qui lui aurait permis de revoir une grande partie de son chapitre 6, le moins convaincant de l’ensemble en raison de l’utilisation de données erronées. Il peut être souligné que les sources et les œuvres sont bien exploitées et que les conclusions qu’elle en tire constituent souvent de nouveaux apports à la compréhension de ces réalisations et un parfait complément à l’historiographie existante.
Ainsi, dans les chapitres 2 et 3, les véritables acteurs de la commande et de la gestion des ouvrages, recrutés parmi les religieux de sa cathédrale, sont interrogés, le parcours de ceux du mobilier de cuivre de 1484 est ainsi retracé et l’identité de ceux de l’ensemble de la clôture est avancée et remporte l’adhésion. Dans le chapitre 6, c’est le modèle de la composition des carreaux de pavement de la chapelle de Combéfa qui a été retrouvé en Espagne dans une réalisation datée de vers 1420. La peinture du Jugement Dernier est, quant à elle, comprise par rapport au statut de l’évêque en tant que juge ecclésiastique et seigneur temporel de la ville, notamment après la révolte des Albigeois en 1491 contre le prélat, en tant que réformateur de la justice en Languedoc dans les années 1480. Les commandes sont alors l’occasion pour Louis d’Amboise d’affirmer son autorité en tant qu’évêque et seigneur d’Albi et d’insister sur son rôle d’intermédiaire entre son peuple et Dieu. La multiplication des armes familiales à la vue de tous serait, selon l’auteur, un moyen de signifier sa présence pendant ses nombreuses absences. Tels sont quelques-uns des points forts, qui sont nombreux, de l’étude de Mme Faiers.
Le texte est agréable à lire avec des parties bien construites, terminées par des transitions bien amenées. Néanmoins, il souffre de quelques répétitions et l’appareil de notes, par rapport à un travail français, mériterait d’être enrichi car parfois un peu lapidaire. Dans le chapitre historiographique et en ce qui concerne les œuvres, curieusement, seule la cathédrale est évoquée ; rien sur Combéfa ou la Berbie pour lesquels les références sont pourtant analysées plus tard dans le manuscrit. Enfin, quelques petits problèmes méthodologiques peuvent être signalés, comme l’absence d’approche stylistique pour l’étude des peintures de la galerie d’Amboise par exemple, peintures aujourd’hui datées de vers 1600, ou comme la restitution critiquable des dispositions de la chapelle castrale de Combéfa à partir de plans dressés en 1777.
Quoi qu’il en soit, le travail proposé par la candidate est de grande qualité et mériterait une reconnaissance.

Trois autres travaux n’ont pas été retenus :

- Léonard Granier, Criminalité de misère, criminalité contre les mœurs : les femmes face à la justice royale roussillonnaise dans la première moitié du XVIIIe siècle. Mémoire de master II en histoire sous la direction de Patrice Poujade, soutenu à l’Université de Perpignan-Via Domitia en 2022 ;
- Valentin Girounès, Les artisans de Cordes-sur-Ciel du XIIIe au XVe siècle, mémoire de Master II « Mondes médiévaux » sous la direction de Sandrine Victor, maître de conférence habilitée à diriger des recherches à l’Institut National Universitaire Champollion d’Albi, soutenu à l’Université Toulouse 2 Jean-Jaurès ;
- Mariana Burasovitch, Entre art et entreprise : approche matérielle des peintures murales du Midi exécutées par des décorateurs italiens itinérants (v. 1820-1870), master en histoire de l’art moderne et contemporain sous la direction de Sophie Duhem et de Virginie Czerniak, soutenu à l’Université de Toulouse 2 Jean-Jaurès en 2022.

Le classement est soumis au vote des membres ; il est accepté à l’unanimité. Virginie Czerniak rappelle que les prix seront remis lors de la séance publique qui se tiendra dimanche 26 mars.

La parole est enfin donnée à Valérie Rousset pour une communication longue qu’elle assurera avec notre Présidente, L’église Saint-Pierre et Saint-Paul de Toulongergues (Aveyron).
Raymond Laurière, qui connaît l’édifice depuis longtemps, rappelle qu’il a mis au jour dans les années 1975 une partie des peintures dont il a été question. Il dit avoir apprécié un certain nombre des hypothèses présentées, sans en partager pour autant la totalité. Il y a quelques années de cela, à l’occasion d’une communication à la Société, il avait présenté quelques propositions d’interprétation auxquelles il reste fidèle. En premier lieu, concernant la baie couverte d’un arc en gouttière qui s’ouvre sur la façade, il retient l’hypothèse de Marcel Durliat, qui en faisait le lieu où on pouvait loger une cloche, en référence à ceux qui se trouvent sur les églises wisigothiques d’Espagne. Par ailleurs, à l’occasion de fouilles menées par Laurent Fau, des monnaies ont été trouvées ; elles pourraient dater d’avant l’an Mil, en particulier un denier du Puy. Quant à la colonne sculptée d’un personnage, il retient la proposition que notre Trésorier avait faite, lors de son passage à Toulongergues, d’y voir plutôt que Pierre et Paul, le sacrifice d’Abraham. Abraham serait sur la colonne de gauche avec Isaac, sur la colonne de droite le quadrupède qui serait l’animal sacrifié à la place d’Isaac. Concernant les peintures, il s’étonne que le nom de Matthieu n’ait pas été cité en face de Jean lorsqu’il a été question du tétramorphe. Notre Présidente répond qu’elle pense l’avoir cité en présentant ce décor. Raymond Laurière se dit intéressé par l’hypothèse d’un collège apostolique faite pour la première fois par Marcel Durliat dans les années 1970. Pour lui cependant ces personnages, très semblables et sans attributs, doivent évoquer les 24 vieillards de l’Apocalypse, d’autant que le reste de l’iconographie lié à une évocation de l’Apocalypse permet de les associer. Par ailleurs, il ne voit pas où pourrait prendre place le Christ en Majesté dont elle a parlé. Notre Présidente répond qu’il a pu être peint sur la voûte. Raymond Laurière évoque ensuite le mur du chevet actuellement bétonné et cimenté là où se trouvait une ouverture moderne. Il rappelle que l’église a été désacralisée en 1921 puis achetée par M. Jonquière qui a transformé l’édifice en bâtiment agricole. Il a pu recueillir plus tard le témoignage de Mme Jonquière, qui avait vu représentés sur ce mur « des chevaux à tête d’homme ». Pour la partie inférieure située entre les colonnes, il reste persuadé qu’il s’agit d’un trône vide. Notre Présidente lui fait remarquer que le travail de restauration a permis de faire apparaître les plis d’un vêtement. Raymond Laurière évoque les hétimasies représentées dans le monde byzantin qu’il faut mettre en relation, selon lui, avec les personnages représentés de part et d’autre : Saint Jean et la Vierge ou Adam et Ève. Il se dit enfin très intéressé par l’analyse du personnage couché.
Notre Présidente remercie Raymond Laurière et donne la parole à Quitterie Cazes pour d’autres remarques. Notre consœur remercie les conférencières pour cette présentation et voudrait proposer une autre interprétation pour le personnage couché. Elle se demande en effet s’il ne s’agit pas du songe de saint Jean de l’Apocalypse car le bâtiment représenté derrière montre trois portes et la Jérusalem céleste en compte douze, trois sur chaque côté. Le personnage est bien figuré en train de dormir, c’est la raison pour laquelle on a pu penser qu’il s’agissait de la Dormition de la Vierge. Virginie Czerniak fait remarquer que le bâtiment représenté à l’arrière montre des lacunes dans ses parties hautes et qu’il reste donc difficile à interpréter. Selon elle, l’identification de Paul, confortée par les lanières représentées sur le corps, lui paraît séduisante par rapport à la titulature de l’église et l’interprétation que Jean-Claude Fau avait faite des sculptures. Louis Peyrusse pense que Paul sortant de sa geôle ne devrait pas avoir une position allongée. Virginie Czerniak évoque l’autre hypothèse d’interprétation imaginée par Jacques Lacoste qui serait celle du moment où Pierre, emprisonné, est désespéré d’être abandonné et implore le Christ de le sortir de sa cellule. Toutes ces hypothèses sont à discuter, mais il faut, selon elle, exclure la Dormition de la Vierge. Daniel Cazes fait remarquer que, dans toutes les représentations de la descente de saint Paul de sa tour, il est dans un panier ; ici le personnage est allongé, il donne l’impression d’être endormi et que rien ne le porte. Virginie Czerniak rappelle que les yeux ne sont pas visibles et, même si le personnage semble allongé, le traitement spatial de la scène n’est pas fiable. Par ailleurs les deux lanières représentées au-dessus semblent selon elle le retenir. Elle note enfin que le sujet traité n’est pas fréquent et on peut imaginer un cycle hagiographique dédié à Pierre et Paul, ce qui reste dans la tradition narrative de la peinture romane.

La Présidente donne à nouveau la parole à Valérie Rousset pour une communication courte intitulée Église Saint-Côme et Saint-Damien de Saint-Côme-d’Olt (Aveyron) : une signature du XVIe siècle ?
Après avoir montré un motif gravé à la base d’un escalier, notre consœur sollicite l’assemblée pour interpréter celui-ci. Louis Peyrusse demande si Antoine Salvan n’aurait pas laissé à Rodez des traces similaires. La visite du clocher de Rodez n’a rien donné répond Valérie Rousset. Celle-ci certifie par ailleurs qu’il ne s’agit pas d’une marque de tâcheron et qu’aucune autre trace de ce type n’a été trouvée dans l’édifice.

Virginie Czerniak donne enfin la parole à Daniel Cazes pour un compte rendu de sa visite à Chiragan.
Notre confrère rappelle que le sentier « Garona », initiative du département de la Haute-Garonne, relie à pied Toulouse au Val d’Aran. Ce sentier est désormais presque en place, hormis quelques obstacles administratifs et ponctuels qui se dressent encore sur la voie. Le Département veut développer cette voie par des boucles et nous sommes concernés par l’une d’elle qui part de Mauran, traverse la Garonne et une partie de notre site archéologique de Chiragan pour rejoindre ensuite le quartier de Saint-Vidian. Elle traverse après à nouveau la Garonne par le barrage EDF et retrouve la voie principale. Daniel Cazes rappelle l’inondation importante survenue l’année dernière. À cette occasion, le Département s’est rendu compte que l’itinéraire passant sur nos terres devait être modifié. La réunion à laquelle M. Cazes a participé avait pour but de discuter de la variation de celui-ci. Il rappelle qu’il y a six partenaires : la Société Archéologique, la Mairie de Martres, le Département de la Haute-Garonne, la Direction Départementale des Territoires, un nouveau Service de l’État appelé Natura 2000 et la Communauté de Communes Cœur de Garonne, dont fait partie Martres-Tolosane. Retenons l’intervention de Natura 2000, qui a découvert le site archéologique mais aussi le site naturel extraordinairement préservé où un certain nombre d’espèces de plantes et d’oiseaux, de reptiles et autres ont été inventoriées. Au vu de ce patrimoine naturel, ce Service s’est opposé au premier projet du Département, craignant que le passage ne nuise à celui-ci. Il a donc proposé de faire passer le sentier ailleurs. En conclusion : pour éviter le passage dans les zones inondables et riches en biodiversité, et réduire les problèmes d’entretien du sentier (dont le Département est responsable), le promeneur arrivera sur notre terrain, en passant sur l’écluse du canal du Moulin, sur laquelle le Département va poser une passerelle métallique, et au lieu de faire le tour du site, il se contentera de le longer. Il a été estimé par ailleurs que trois panneaux didactiques suffiraient, l’information étant donnée de telle sorte qu’elle soit utilisable dans les deux sens. Cette modification d’itinéraire sera ratifiée par notre Présidente en juin-juillet. L’inauguration serait prévue pour le mois d’octobre, la Société sera bien sûr invitée. La Présidente remercie notre confrère de suivre ce dossier.
Au titre des questions diverses, Louis Peyrusse annonce que Mme Marie-Laure Le Brasidec, numismate et une des commissaires de l’exposition Cartailhac, a adressé à notre confrère, ainsi qu’à Christian Péligry, un article sur les jetons et les médailles du Canal du Midi. Celui-ci est consultable sur le site de la revue électronique de la Région, Patrimoine du Sud. Notre Trésorier pense qu’il s’agit d’une étude beaucoup plus globale portant sur l’eau puisqu’il a vu un autre article sur les puits à Toulouse. Laure Krispin a fait un recensement de tous les puits publics et privés de la ville avec cartographie consultable également sur ce site.
Pour information également, Virginie Czerniak dit avoir reçu un lien pour effectuer une visite virtuelle de l’exposition « Toulouse 1300-1400 » au Musée de Cluny ; elle pense qu’il serait opportun de le mettre sur notre site. Il faudra également signaler le petit film diffusé sur You tube sur le site du Scribe accroupi ajoute Louis Peyrusse. Cela permettra aux membres qui n’ont pas pu visiter l’exposition de s’en faire une petite idée.

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