Société Archéologique  du Midi de la France
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Jacques OURGAUD (1796-1868)

separateur

 

ÉLOGE DE M. LE DOCTEUR OURGAUD,

par . DE CROZANT-BRIDIER

Extrait des Mémoires de la Société Archéologique du Midi de la France, t. X, 1872 -1873, p. 119-120.

 

 

MESSIEURS,

Dans une de vos précédentes séances, vous avez bien voulu me charger de faire l’éloge de notre cher et regretté confrère, M. le docteur Ourgaud, membre correspondant de notre Société, en résidence à Pamiers. J’ai accepté cet honneur, dont l’accomplissement est également pour moi un pieux devoir ; et si déjà je ne me suis acquitté de cette douloureuse mission, c’est que moi aussi, Messieurs, j’avais été frappé, à la même époque, dans mes affections les plus chères.
Aujourd’hui que le temps et la religion ont versé leur baume consolateur sur ma plaie, je viens essayer de vous rappeler rapidement les mâles vertus chrétiennes, les travaux poétiques, historiques et archéologiques de celui à qui appartient l’honneur d’avoir le premier doté notre compagnie d’un prix qui désormais s’appellera le prix Ourgaud.

Doué d’une intelligence rare, le docteur Ourgaud fit pressentir de bonne heure ce qu’il serait un jour. Le spectacle des souffrances humaines fit sur cette nature délicate et bonne une impression profonde. Ce fut pour y apporter sa part de soulagement qu’il embrassa la médecine. Parmi ses clients, les plus déshérités des biens de la fortune avaient toujours le privilège de mériter ses préférences.
Les pauvres de Pamiers se souviendront longtemps de celui qui fut avant tout leur ami. Les soins qu’il leur prodiguait avaient quelque chose qui tenait plutôt de la tendresse d’un père que de la raideur d’un devoir consciencieusement accompli.

Les rares moments de liberté que ses chers malades lui laissaient il les consacrait à l’étude. Son premier travail fut un poëme en vers patois qui parut, en 1857, sous ce titre : l’Esprit del tens. Mais où nous trouvons le sérieux et infatigable travailleur, c’est dans sa Notice historique sur la ville et le pays de Pamiers. J’ai lu avec attention cet ouvrage remarquable, et j’ai été frappé des recherches qu’il a dû coûter à son auteur. L’histoire de Pamiers depuis les temps les plus anciens s’y retrouve tout entière, et, pour être plus complet, notre savant confrère n’a pas cru pouvoir se dispenser d’y joindre l’histoire des comtes de Foix et de Toulouse.
A diverses reprises, j’ai été admis dans son sanctuaire de travail ; là, j’ai vu des quantités considérables de vieux parchemins presque illisibles, qu’il déchiffrait péniblement et plus souvent avec le secours de la chimie. Il les classait afin de s’en servir plus tard pour son histoire des évêques de Pamiers, à laquelle il travaillait depuis longtemps et que la mort l’a seule empêché de terminer.
C’était avec bonheur que M. Ourgaud montrait le résultat de ses recherches, ainsi que les divers objets archéologiques recueillis dans la contrée.

La dernière fois que j’ai visité M. Ourgaud, il était souffrant. Espérant cependant guérir, lui qui en avait guéri tant d’autres, il me disait :
« ne manquez pas, cher patron, de dire à mes honorés confrères de Toulouse qu’aussitôt ma santé rétablie, mon premier soin sera d’aller les remercier de ce qu’ils ont bien voulu m’admettre parmi eux, et puisque vous m’apprenez qu’on institue un prix qui portera mon nom, je veux en créer un second, sous un patronage plus autorisé que le mien. » Il voulait parler du fondateur de notre Société.
Hélas ! Messieurs, ce furent les dernières paroles que je recueillis de ses lèvres. Elles ont pour moi la solennité d’un testament. En effet, à quelques jours de là, il avait cessé de vivre.
Le docteur Ourgaud était un savant des plus modestes. Il ne briguait pas les honneurs, et cependant les distinctions venaient l’atteindre dans sa retraite. Tour à tour maire de Pamiers, membre du Conseil d’arrondissement et du Conseil général de l’Ariège, chevalier de la Légion d’honneur, inspecteur des thermes d’Ussat, fondateur de la caisse d’épargnes à Pamiers, bienfaiteur de l’hospice et des Sociétés de secours de cette ville, il laisse un grand vide parmi les siens.
Je regrette, Messieurs, que sa santé, altérée par les veilles et le travail, ne lui ait pas permis de terminer son histoire des évêques de Pamiers. Il se proposait de nous en faire hommage. Cet ouvrage vous eût permis d’apprécier l’homme d’étude comme sa libéralité nous met à même d’apprécier l’érudit qui sait encourager la science.

 


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