Société Archéologique  du Midi de la France
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Séance du 13 juin 2023

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Séance dédiée à Jean-Luc Bourdatchouk avec les communications courtes suivantes :

- J.-Ch. Balty : « La statuette dite d’Ausone du musée d’Auch »
- D. Cazes : « Questions autour d’un art wisigothique »
- Ph. Gardes : « Toulouse des origines : de la déconstruction des mythes à la révélation archéologique »
- D. Watin-Grandchamp : « Une tournée lotoise avec Jean-Luc »
- P. Cabau : « À propos de deux manuscrits des œuvres de Sidoine Apollinaire »
- F. Peloux : « Afer natione. Les saints d’origine africaine dans la bordure sud du Massif central (VIe siècle) »
- L. Macé : « Au pied du mur : l’emblématique des vicomtes de Murat »

La séance sera suivie d’un apéritif pour clôturer l’année académique de façon conviviale.

Présents : Mme Czerniak, Présidente, MM. Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Napoléone, Secrétaire générale, Machabert, Secrétaire adjointe ; Mmes Bessis, Cazes, Nadal, Watin-Grandchamp, MM. Balty, Cazes, Garrigou Grandchamp, Lassure, Macé, Peyrusse, Scellès, Sournia, Surmonne, Testard, membres titulaires ; Mmes Balty, Dumoulin, Ledru, MM. Gardes, Peloux, membres correspondants.
Excusés : Mmes Haruna-Czaplicki, Rollins, MM. Capus, Penent, Stouffs.

La Présidente ouvre la séance et fait circuler, à titre d’information, le dépliant promotionnel de l’exposition « Viollet-le-Duc. Trésors d’exception » qui se déroule du 10 juin au 1e octobre 2023 au Musée des Beaux-Arts de Carcassonne. La Présidente rend ensuite compte de la correspondance. Concernant le dossier du château de Scopont, deux courriers ont été reçus : de la part du Ministère de la Culture et du Ministère chargé des Transports. Tous deux prennent acte de la protestation exprimée par notre Société (séance du 9 mai 2023). La bibliothèque s’enrichit grâce à un nouveau don de Pierre Garrigou Grandchamp : Federico Farina, Benedetto Fornari, L’Architettura cistercense e l’abbazia di Casamari, Edizioni Casamari, réédition 2001.
La séance du jour, clôturant l’année académique, est une séance particulière, entièrement dédiée à Jean-Luc Boudartchouk. Coordonnés par Laurent Macé, six membres interviendront pour honorer la mémoire de notre confrère. Pour introduire cet hommage, Louis Peyrusse rappelle les mots de Louis Aragon : « il est des morts qu’il ne faut pas pleurer mais continuer ». Notre ancien Président poursuit : Comment ne pas pleurer quand l’étape vient beaucoup trop tôt et devant une mort trop rapide ? mais continuer, c’est exactement ce que vont faire les collègues de Jean-Luc Boudartchouk.

Pour débuter, la parole est donnée à Jean-Charles Balty qui aborde : La statuette dite d’Ausone du musée d’Auch.
La Présidente remercie notre confrère et lui demande s’il a connaissance d’autres types de sculptures ressemblant à ce modèle à Auch et pouvant correspondre à un programme décoratif commandé au XVIe ou XVIIe siècle ? Une série sur les hommes illustres d’Auch aurait pu être réalisée pour la bibliothèque par exemple. Jean-Charles Balty pense que cette statue a effectivement été taillée pour la bibliothèque. L’œuvre n’a pas été trouvée en fouilles car elle ne présente aucune trace de concrétions à la surface, elle est en bon état, hormis le tenon qui a dû se briser lors d’une chute. Il souligne la singularité de cette statue qui présente un personnage en toge positionné sur une base et non fixé comme cela se voit plus souvent. Aujourd’hui son emplacement au musée d’Auch la rend peu visible. Si elle est méconnue, des qualités de taille se révèlent notamment à travers le traitement du pli de la toge au niveau du coude droit. Le sculpteur a vraisemblablement observé des statues en toge, des exemplaires ont été trouvés à Bordeaux en particulier dès le début du XVIe siècle. Ainsi Jean-Charles Balty avance un terminus post quem vers 1560-1570 ; ce qui doit correspondre à l’arrivée des Jésuites explique-t-il. Notre confrère rappelle que les deux premières éditions des textes d’Ausone ont été éditées par des philologues bordelais à Bordeaux. Le poème que l’auteur consacre à Staphilius a dû marquer les esprits et dans la ville du rhéteur, à Auch, les Jésuites ont pu commander une statue. L’artiste sollicité reste, en revanche, inconnu. Jean-Charles Balty ayant mentionné dans sa présentation le Togado de Periate conservé à Grenade, Daniel Cazes profite de cet échange pour signaler que l’autre grande statue en toge de bronze de l’époque romaine découverte à la fin du XIXe siècle dans la péninsule ibérique (à Pampelune) et disparue depuis a été récemment retrouvée dans une collection particulière aux États-Unis et acquise par le musée de Navarre pour un quart de sa valeur. À la demande de Laurent Macé, Jean-Charles Balty confirme que le personnage tient dans la main gauche un volumen, il s’agit donc d’un homme de lettres. Jean-Michel Lassure évoque la présence, dans le sud du Gers, de têtes en marbre pyrénéen qui se fixent sur des togati et dont les attitudes sont presque semblables à celle de la statuette dite d’Ausone. Il suggère qu’elles aient pu servir de modèle. Jean-Charles Balty est convaincu que le sculpteur de la statuette du musée d’Auch avait un modèle pour la toge. En effet la plupart des statues en toge conservées sont dépourvues de tête, généralement elles se sont cassées, qu’elles soient sculptées directement ou encastrées. La tête et plus particulièrement la chevelure dénotent par rapport au style du corps. Louis Peyrusse remarque que la statue, in abstracto, peut ressembler à une statue baroque. Daniel Cazes pense, lui, au travail de Marc Arcis. L’œuvre rappelle à Guy Ahlsell de Toulza l’image du Christ enfant enseignant telle que figurée sur les sarcophages paléochrétiens. Le Christ est alors montré en togatus, les cheveux longs et bouclés et avec un visage poupin. Aussi, l’auteur de la statuette aurait pu prendre pour modèle une gravure d’un sarcophage romain paléochrétien représentant le Christ enseignant, entouré de saint Pierre et saint Paul par exemple.

Après cet échange, Daniel Cazes nous présente ses Questions autour d’un art wisigothique.
À propos du « deuxième sceau d’Alaric », récemment découvert et conservé dans une collection particulière en Grande-Bretagne, Dominique Watin-Grandchamp signale qu’il existe des chercheurs spécialistes capables d’identifier la veine géologique de la pierre et sa provenance. Il serait intéressant qu’une étude soit effectuée sur une pièce d’une telle importance. Daniel Cazes précise que Jean-Luc Boudartchouk n’avait trouvé aucune étude scientifique probante sur l’origine du saphir.

La parole est ensuite donnée à Philippe Gardes pour son intervention sur Toulouse des origines : de la déconstruction des mythes à la révélation archéologique.

La communication suivante est proposée par Dominique Watin-Grandchamp, qui revient sur Une tournée lotoise avec Jean-Luc (autour de la visite de l’église de Saint-Aureil sur la commune de Castelnau-Montratier et datable du XIIe siècle).
Dominique Watin-Grandchamp précise que l’origine de la dévotion à saint Aureil, considéré comme thaumaturge, guérisseur des maux d’oreille (sic), est inconnue. Fernand Peloux demande pour quelle raison saint Aurélien de Limoges est écarté pour l’identification de la statue de Limoges. Dominique Watin-Grandchamp répond : il y a actuellement deux statues dans l’église : une du XVIIe siècle réputée représenter saint Aureil, mais sans attribut ; la seconde, de style saint-sulpicien, figure en réalité saint Aurélien de Limoges en évêque. Elle ajoute que la manière dont saint Aureil est cité dans les textes médiévaux retranscrits par des érudits quercynois semble exclure qu’il puisse s’agir d’Aurélien. Ces mentions intéressent Fernand Peloux, car il y a un argument qui peut appuyer cette hypothèse d’identification : dans la légende de saint Martial telle qu’Adémar de Chabannes la promeut, en dehors de Limoges il y a peu de lieux que Martial aurait évangélisés, mais le Quercy en fait partie. Un lien entre le sanctoral du Limousin et le Quercy existe donc assez tôt, ce qui rend plausible la référence à Aurélien. Dominique Watin-Grandchamp poursuit : le territoire environnant est d’une grande richesse archéologique et, lors de cette tournée, un repérage avait été effectué sur le site de Saint-Sernin de Thézels, à trois-cent mètres de Saint-Aureil. Seul un bosquet, abritant quelques blocs de pierre, marque encore son emplacement. Les vestiges en ont été largement dispersés, quelques-uns sont conservés au musée de Cahors, d’autres réemployés (chapiteau sous une croix de chemin) sont visibles aux abords et le champ qui entoure le bosquet regorge de fragments de marbre dont du « Grand antique » de provenance pyrénéenne. Daniel Cazes rectifie : le marbre Grand Antique provient de la carrière d’Aubert située dans la commune de Moulis (Ariège) et la vallée du Lez et non de la Lèze.

Puis la parole est donnée à Fernand Peloux pour une communication courte intitulée Afer natione. Les saints d’origine africaine dans la bordure sud du Massif central (VIe siècle).
Dominique Watin-Grandchamp demande si, parmi les manuscrits mentionnés, la transcription proposée par celui de Toulouse est la plus proche de la réalité historique ? Fernand Peloux répond que seul « ejus » est ajouté par rapport aux autres documents, il est donc difficile de savoir si le scribe a simplement voulu rendre le texte compréhensible ou s’il a eu un modèle. Le doute intervient pour beaucoup des textes du légendier de Moissac, en l’absence d’un autre témoin extérieur et aussi ancien, il est délicat de se prononcer. Fernand Peloux ajoute que le texte évoqué est difficilement compréhensible, mais en considérant que Quintien est de la famille de Faust le passage devient clair. Il n’est alors pas étonnant qu’il soit envoyé auprès d’un membre de la famille de l’évêque. En outre, cette hypothèse corrobore ce qu’en dit Grégoire de Tours. Dominique Watin-Grandchamp demande s’il est possible d’identifier le premier manuscrit ayant servi de modèle. Fernand Peloux explique que le légendier de Moissac avait des antigraphes qui probablement étaient, soit en écriture mérovingienne donc difficilement lisibles au moment de leur copie, soit dans un état linguistique tel que les copistes ne sont pas parvenus à le reproduire avec exactitude.

Enfin, Laurent Macé présente sa communication intitulée : Au pied du mur : l’emblématique des vicomtes de Murat.
Valérie Dumoulin note que la présentation des appareils de l’un des sceaux montrés est similaire à celle des faux appareils produits au XIIIe siècle pour les églises. Quitterie Cazes remarque que cet élément est caractéristique du grand appareil et se retrouve aussi dans des sculptures romanes. Olivier Testard précise que dans l’appareil simulé de ce sceau le trait ne figure pas le joint mais évoque la taille de la face de la pierre. Valérie Dumoulin rappelle qu’il existe un exemple local, certes plus récent, avec les armoiries de la ville de Muret qui reproduisent deux murailles crénelées.

Après ce tour de paroles, Guy Ahlsell de Toulza souhaite évoquer trois souvenirs avec Jean-Luc Boudartchouk. Le premier se situe à Caussade où ils s’étaient rendus un jour chez Mme Neveu qui était en possession de fibules mérovingiennes que Jean-Luc Boudartchouk voulait essayer de faire acquérir. Puis, le Trésorier regrette que le projet, souvent évoqué par la Société, d’effectuer un voyage en Auvergne tous ensemble guidés par notre éminent confrère, ne se soit jamais concrétisé. Enfin, Guy Ahlsell de Toulza exprime un dernier regret concernant Saint-Amans de Rabastens. L’accès à l’église rendu impossible a interrompu l’étude qu’il avait entamée avec Jean-Luc Boudartchouk. Depuis deux ans, le travail est à l’arrêt.

La Présidente remercie chaleureusement l’ensemble des membres qui ont accepté de participer à cette séance et qui, à travers les souvenirs, ont rendu hommage à Jean-Luc Boudartchouk.

Pour finir, elle félicite, au nom de la Société, notre consœur Valérie Dumoulin qui vient d’être nommée attachée de conservation du patrimoine.
Daniel Cazes attire l’attention des membres sur l’annonce par la municipalité de l’ouverture d’un nouveau jardin public dans la cour Sainte-Anne à l’arrière de la cathédrale Saint-Étienne. Des réaménagements sont programmés notamment pour végétaliser le site sans qu’il soit question de l’ancien cloître roman sous-jacent. Une vigilance est donc de mise quant au déroulement des travaux.

Après ce dernier point, la Présidente prononce la clôture de l’année académique et invite les membres à partager un moment convivial.

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