Société Archéologique  du Midi de la France
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Séance du 17 octobre 2023

separateur

Emilie Nadal & Claire Rousseau
Un anglais à Toulouse. Récit de voyage d’un gentleman antiquaire en 1814-1815.

Le 12 novembre 1814, Henry et Catherine Howard, leurs quatre enfants, une gouvernante, des domestiques et un chien de compagnie s’installent à Toulouse pour profiter d’une France fraîchement rendue à la monarchie. Au cours de ce séjour raccourci par le retour de Napoléon en mars 1815, Henry Howard se promène, rédige toutes sortes de notes, fait faire des croquis de monuments toulousains, et achète un feuillet des Annales enluminé... Il a rassemblé tous ces témoignages manuscrits dans une Histoire des comtes de Toulouse de Catel, exemplaire acquis en 1969 par la BM de Toulouse mais resté inédit. Nous présenterons le personnage, sa famille, et l’intérêt de son témoignage pour l’histoire toulousaine, avec en particulier des détails inédits sur la Maison de l’Inquisition.

Présents : Mme Czerniak, Présidente, MM. Cabau, Directeur, Ahlsell de Toulza, Trésorier, Péligry, Bibliothécaire-Archiviste, Mmes Napoléone, Secrétaire générale, Machabert, Secrétaire adjointe ; Mmes Cazes, Fournié, Jaoul, Nadal, Pradalier-Schlumberger, Watin-Grandchamp, MM. Balty, Cazes, Macé, Penent, Pradalier, Scellès, Surmonne, Testard, Tollon, membres titulaires ; Mmes Balty, Dumoulin, Henocq, Ledru, Rolland Fabre, Vène, MM. Kérambloch, Rigault, membres correspondants.
Excusés : MM. Garland, Garrigou Grandchamp, Peyrusse.
Invitées : Mme Claire Rousseau, chercheuse à l’Institutum Historicum Ordinis Praedicatorum de Rome, lauréate du prix Ourgaud en 2012 ; Mme Géraldine Chopin, conservatrice ; Mme Catherine Peoc’h, bibliothécaire au Service patrimonial de la Bibliothèque d’étude et du patrimoine de Toulouse ; Mmes Flore Chupin, Nadia Perles, Cécile Rauzi, Raphaëlle Tavernier, étudiantes en Master arts et communication à l’Université Toulouse 2 - Jean Jaurès.

La Présidente ouvre la nouvelle année académique et accueille les invitées du jour. Elle présente ensuite deux projets participant du rayonnement de la S.A.M.F., déjà évoqués au sein du Bureau. Le premier concerne la création d’une chaîne Youtube. Dans l’idée de pouvoir partager avec le plus grand nombre les connaissances de la Société, il s’agira, sous forme de podcasts de dix minutes, d’aborder des sujets majeurs du patrimoine local, toutes périodes confondues. Pour débuter, une série sera consacrée aux grands monuments de Toulouse (la basilique Saint-Sernin, la cathédrale Saint-Étienne, le Capitole, l’hôtel d’Assézat…). Le premier épisode sera dédié à l’histoire de notre Société. Pour mettre en œuvre ce projet, notre Présidente s’est tournée vers le Master arts et communication de l’Université Toulouse 2 – Jean Jaurès. Un « projet tutoré » a ainsi été construit, avec quatre étudiantes, afin d’ouvrir la chaîne Youtube et de produire régulièrement des podcasts, tout au long de l’année. Un appel est lancé aux membres pour participer à cette initiative. Ceux qui le souhaitent peuvent proposer des interventions directement à la Présidente. Les tournages se feront indépendamment des séances, l’organisation sera précisée ultérieurement. Sur le plan technique, des captures des voix des intervenants seront effectuées, associées, grâce à un montage, à des images (libres de droits ou avec autorisations de diffusion), voire à des vidéos. À l’issue de cette année universitaire, le souhait est que la Société soit en capacité de continuer à alimenter la chaîne. Maurice Scellès pose la question de l’archivage des vidéos et met en garde sur les limites de notre site. Dans la perspective conjointe de l’archivage des numérisations de photographies conservées à la S.A.M.F., il faudra alors envisager le stockage de ces documents sur un serveur dédié. Virginie Czerniak ajoute qu’il conviendra de renvoyer depuis le site actuel vers la chaîne Youtube. Elle s’interroge par ailleurs : peut-être faudrait-il, à terme, refondre le site …
La Présidente poursuit avec le second projet qui s’inscrit sur un temps plus long puisqu’il concerne le bicentenaire de la Société Archéologique du Midi de la France, en 2031. Pour l’occasion différentes manifestations pourraient être organisées (exposition, conférences…). Afin de commencer à préparer concrètement cet événement, un groupe de travail va être constitué. Les membres intéressés et disponibles pour intégrer cette commission sont invités à se manifester dès à présent.
Le Trésorier signale que de nombreux membres ne sont pas à jour de leur cotisation ; ils sont incités à prendre contact avec lui dans les meilleurs délais pour régulariser leur situation. Il est rappelé que tout membre n’ayant pas acquitté sa cotisation dans un délai de trois ans est considéré comme démissionnaire.

Ainsi qu’inscrit à l’ordre du jour, l’assemblée procède à l’élection de deux nouveaux membres correspondants. Virginie Czerniak lit le rapport sur la candidature de Christian Mange transmis par Louis Peyrusse, puis Émilie Nadal présente la candidature d’Aurélia Cohendy. Après avoir recueilli les votes des membres titulaires, Aurélia Cohendy et Christian Mange sont déclarés membres correspondants de notre Société.

La Présidente donne ensuite la parole à Émilie Nadal et Claire Rousseau pour une communication longue intitulée : Un Anglais à Toulouse. Récit de voyage d’un gentleman antiquaire en 1814-1815.
La Présidente remercie les intervenantes pour la découverte passionnante du travail d’Henry Howard, qui, en d’autres circonstances, aurait pu être membre de la S.A.M.F. ! Émilie Nadal précise que le livre (Histoire des Comtes de Tolose par Guillaume Catel) a été numérisé par la Bibliothèque d’étude et du patrimoine, il est ainsi consultable en ligne (sur le site Rosalis). Magali Vène souhaite savoir si le départ de l’Évangéliaire de Charlemagne, intervenu quelques années auparavant, est évoqué par Henry Howard. Émilie Nadal confirme la présence d’une note en marge du passage dans lequel Catel aborde ce manuscrit. Howard écrit, en français, que le livre a été donné à Bonaparte par la Ville de Toulouse en 1800. La date est en réalité erronée : le don date de 1811. Magali Vène demande ensuite si la bibliothèque du comte MacCarthy est mentionnée ou si seuls les salons de madame MacCarthy sont cités. Émilie Nadal indique que Catherine Howard parle de la vente de la collection dans son récit. Daniel Cazes se montre très intéressé par les dessins des tombeaux des comtes de Toulouse qui lui semblent être réalisés d’après l’original. À ce titre ils mériteraient de faire l’objet d’une étude détaillée. En effet, ils présentent un intérêt majeur, ils montrent notamment le système de support du grand sarcophage dit, à l’époque, de Guillaume Taillefer, car il existe plusieurs versions de ce système de support du tombeau par colonnettes. Le dessin dévoile une vision totalement inédite, il permet ainsi de constater que les chapiteaux sont déjà très abîmés. Daniel Cazes note que le dessin publié dans l’Histoire générale de Languedoc donne l’impression qu’un tronçon de colonnette antique ronde se trouve au centre et des colonnettes octogonales sur les côtés, alors que ce n’est pas le cas sur le dessin réalisé pour le compte d’Howard par Bernard Griffoul-Dorval. Celui-ci fait donc peut-être foi et atteste l’état du sarcophage en 1814-1815, suggère Daniel Cazes. Il relève un élément curieux : il semble y avoir un mélange entre la réalité observée et le dessin de l’Histoire générale de Languedoc, notamment pour les sarcophages latéraux. Leur tracé est plus rigide, comme si l’auteur avait copié celui de l’Histoire générale de Languedoc. Pour le sarcophage central, le détail des colonnettes, des arcs cuspidiens et des personnages, le dessin paraît très intéressant car l’original est extrêmement usé. Ce document de 1814 permettrait de connaître l’état du sarcophage avant les dégradations intervenues au cours du XIXe siècle. Dominique Watin-Grandchamp est également interpellée par ce dessin inédit des sarcophages et la restitution des chapiteaux et des colonnes mais elle émet une réserve sur la fidélité de ces relevés par rapport à l’authentique. En effet, l’inscription sur le couvercle du sarcophage de droite se situe uniquement au milieu et non sur les côtés comme figurée par Griffoul-Dorval. Émilie Nadal suggère que l’inscription ait pu être ajoutée par Howard. Michelle Fournié demande des précisions à propos d’une crosse en ivoire comportant une représentation des apôtres montrée lors de la présentation. Claire Rousseau explique que la mention de cette crosse a été trouvée dans deux catalogues d’exposition. Dans la notice du premier, le fils d’Henry Howard précise que cette crosse a été acquise par son père lors de son séjour à Toulouse et qu’elle appartenait à saint Dominique. Il écrit aussi qu’elle date du XIVe siècle et qu’elle est anglaise. Dans le second catalogue, la notice est accompagnée d’un dessin mais n’indique pas de provenance. De fait, les informations transmises par le fils d’Henry Howard sont contradictoires et semblent plutôt relayer un récit familial mythifié. Pour l’heure la localisation de l’objet n’est pas connue, mais sa trace pourra sans doute être retrouvée. Daniel Cazes suggère de comparer cette crosse avec tous les ivoires du même genre connus, en consultant notamment le catalogue général des ivoires du musée Louvre. Claire Rousseau ajoute qu’un grand nombre de crosses en ivoire, y compris peintes, sont inventoriées. Virginie Czerniak signale que les polychromies sur les ivoires datent souvent du XIXe siècle car, au Moyen-Âge, le matériau, très noble, était laissé visible. Michèle Pradalier-Schlumberger revient sur le dessin du crucifix dit de saint Dominique qui passionnait le Père Bernard Montagnes. Elle se souvient avoir échangé avec lui sur ce sujet pour une communication présentée aux membres de notre Société (séance du 6 janvier 2009) et lui avoir alors suggéré une origine italienne. En observant les dessins commandés par Howard, notre consœur remet en doute son hypothèse. Elle insiste sur le caractère très précieux de ce document pour la connaissance du crucifix conservé dans la crypte de Saint-Sernin. L’étude de l’objet, particulièrement sous l’aspect stylistique, mérite d’être reprise. Émilie Nadal espère que la présentation de ce témoignage inédit, touchant différents points de l’histoire toulousaine, donnera lieu à un travail collectif.

Au titre des questions diverses, Daniel Cazes fait ensuite un point sur le dossier d’aménagement du sentier Garona reliant Toulouse au Val d’Aran. Les autorités locales et la S.A.M.F. ont émis l’idée de faire une boucle à partir du pont de Mauran afin de traverser le site de Chiragan, propriété de notre Société. Le trajet conduirait ensuite au secteur de la fontaine et de la bataille de saint Vidian, avant de retraverser la Garonne et rejoindre le sentier principal. Néanmoins le projet est complexe, le Département devant obtenir l’autorisation de tous les propriétaires dont les terrains sont traversés. Or, cet été, l’un d’eux est revenu sur sa décision et les travaux sont depuis suspendus. La zone de notre terrain devant recevoir les deux panneaux explicatifs, pour lesquels Daniel Cazes a déjà rendu textes et documentation, n’est en ce moment plus entretenue. Ce faisant, l’inauguration, envisagée pour novembre 2023, se déroulera probablement au printemps de 2024. Cet événement pourra être l’occasion de se retrouver pour une nouvelle journée foraine, après le succès de celle organisée samedi 14 septembre à Narbonne.

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