Société Archéologique  du Midi de la France
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SÉANCE PUBLIQUE DU DIMANCHE
20 MARS 2016

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Elle se tient à l’Hôtel d’Assézat, dans la salle Clémence-Isaure.

Allocution du Président

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Palladia Tolosa, Toulouse la palladienne, protégée par Pallas-Athéna-Minerve, la déesse gréco-romaine de l’intelligence et des arts, Gloriae Majorum, « à la gloire des ancêtres », avez-vous pu lire sur les invitations et affichettes annonçant notre séance publique. Ces mots, les derniers formant même sa devise, sont chers à notre Société, soucieuse de porter la connaissance au plus haut niveau, tout en rendant hommage à ceux qui, dans le passé, ont formé notre civilisation et le patrimoine intellectuel, artistique et archéologique dont nous avons hérité. La Société archéologique du Midi de la France contribue à l’étudier, le conserver et transmettre aux générations futures, le mettre en valeur.

Afin de remplir cette mission, au cours de l’année écoulée elle a continué à susciter des communications savantes, présentées lors de ses séances ordinaires. Les membres qui les entendent interviennent, apportant remarques, appréciations, compléments, questions. Les auteurs testent ainsi la solidité de leurs raisonnements, corrigent et enrichissent leurs textes, destinés à nos Mémoires. Il n’est pas vain de rappeler ce système académique, stimulant, dans une proximité et un climat empreints de confiance. Cette dimension humaine et humaniste de nos séances n’est pas la moindre de leurs qualités. Ces assemblées n’en sont pas pour autant imprégnées de ce parfum du XIXe siècle que l’on fait parfois flotter sur notre Société, pour l’accuser d’archaïsme. De tous âges, ses membres sont bien vivants, dans le présent. Tournés vers l’avenir, ils proclament leur attachement à l’atmosphère qui règne dans notre salle du deuxième étage de l’Hôtel d’Assézat, où ils se retrouvent nombreux. C’est le meilleur encouragement à poursuivre cette œuvre, dans la perspective du bicentenaire de notre compagnie.

En 2015, nous avons entendu vingt-et-une communications sur des thèmes d’histoire, d’archéologie, d’histoire de l’art, d’épigraphie, de numismatique, d’histoire du livre.
Le territoire reste celui du grand Languedoc, du Roussillon, du Rouergue, du Quercy, d’ une partie de la grande Aquitaine, de l’Auvergne, voire de la Provence…), soit un Midi de la France assez central, avec des sujets qui l’envisagent globalement, d’autres qui touchent seulement certains départements ou villes.

Deux de ces communications ont concerné l’Antiquité : avec la complicité de Marc Comelongue, Vincent Geneviève nous a fait part du goût pour les monnaies anciennes du poète Jean-Jacques Lefranc, marquis de Pompignan, de la collection de son ami Charles-Clément Martin de Saint-Amand et du trésor de Sainte-Suzanne, à l’origine du médaillier de l’Académie des sciences, inscriptions et belles-lettres de Toulouse, notre voisine. Pierre Pisani a montré l’évolution d’un quartier d’Elusa (Éauze) entre le Ier et le Ve siècles, à travers l’étude d’une maison romaine intégralement fouillée, aujourd’hui mise en valeur et visitable par le public.

Quatorze communications ont abordé des sujets relatifs au moyen-âge. Raymond Laurière nous a replongés dans le curieux univers des églises à angles arrondis du Rouergue. Quitterie Cazes a résolu la question iconographique des arbres qui bourgeonnent auprès du saint Jacques le Majeur sculpté à la porte Miégeville de la basilique Saint-Sernin. Emmanuel Garland nous a fait redécouvrir les monuments religieux du second âge de l’art roman dans le Val d’Aran, puis fait connaître un moulage d’un bas-relief de la collection Demotte-Macé acquis par la mairie de Saint-Gaudens, et un chapiteau du cloître de la collégiale de cette ville réapparu en vente publique en juin 2015. Patrice Cabau nous a révélé l’histoire peu commune de Jean Dominique, notaire de Toulouse, juriste au service des princes, dont l’épitaphe datée de 1283 a été retrouvée lors des sondages archéologiques d’évaluation exécutés au nord de la basilique Saint-Sernin. À Maurice Prin nous devons des recherches sur le couvent disparu des Carmes de Toulouse, spécifiquement sur son église au plan si original ; à Michelle Fournié une passionnante étude du couvent des chanoinesses régulières de Saint-Sernin à Toulouse, montrant le rôle qu’y joua le cardinal franciscain Vital du Four (1260-1327) ; et à Bernard Sournia un exposé magistral, illustré de ses relevés, sur le collège-monastère Saint-Benoît-Saint-Germain de Montpellier, fondation du pape Urbain V. Anne-Laure Napoléone et Pierre Garrigou Grandchamp ont étudié deux maisons médiévales de Castelsagrat. Maria-Alessandra Bilotta et François Bordes ont parlé de l’enluminure aux XIVe et XVe siècles à Toulouse et dans le Midi de la France. Nicole Andrieu et Jean-Marc Stouffs nous ont fait découvrir l’armoire peinte de Poubeau.

Restent cinq communications pour les temps modernes. Geneviève Bessis et Christian Péligry ont rappelé un travail inédit de Marie-Thérèse Blanc-Rouquette sur quatre siècles d’imprimerie à Toulouse, intitulé « Les armes de la Lumière ». Pascal Julien a réétudié l’architecture et le décor de l’hôtel Molinier, éloquents témoignages de l’art de la Renaissance à Toulouse. Guy Ahlsell de Toulza nous a fait visiter l’ancien hôtel de Barassi, à Toulouse, où des travaux de restauration et d’aménagement viennent d’avoir lieu. Puis il a entrepris l’étude du vaste hôtel toulousain de la rue Croix-Baragnon où vécut le marquis Joseph Léonard de Castellane, l’un des fondateurs, en 1831, et le premier président de notre Société. Françoise Merlet-Bagnéris a développé quelques points méconnus de l’enseignement artistique délivré entre 1806 et 1895 à l’École des beaux-arts de Toulouse.

De nombreuses questions diverses étaient également à l’ordre du jour de nos réunions. Notre Société reçoit ainsi de ses membres une information sur les fouilles archéologiques et découvertes récentes, les restaurations en cours ou réalisées, l’actualité des institutions chargées de la conservation et de l’étude du patrimoine, les ventes et mouvements d’œuvres d’art. Limitons-nous à quelques exemples. Patrice Cabau a repéré, remployée dans la fabrique de vitraux de Victor Gesta, à Toulouse, une clef d’arc aux armoiries du cardinal Vital Dufour déjà nommé. Pierre Pisani a présenté les premiers résultats des sondages de diagnostic qu’il a dirigés autour de Saint-Sernin. Une collaboration, pour leur documentation et leur étude, s’est établie entre lui et plusieurs membres de notre Société. Nicole Andrieu a évoqué la conservation des textiles anciens du même monument, qui ne trouvera de solution satisfaisante, comme celle de la collection publique qui y est concentrée dans de mauvaises conditions, qu’avec la construction d’un musée de l’œuvre.

La Société sort de temps à autre hors de ses murs, pour quelque visite. Ainsi avons-nous apprécié l’exposition Toulouse en vues, sous la conduite de son commissaire, membre de notre compagnie, François Bordes. N’omettons pas l’exceptionnelle conférence donnée par notre confrère Laurent Macé, lors de notre séance publique du 22 mars 2015, sur « Les comtes de Toulouse au miroir de leurs sceaux (XIIe-XIIIe s.) », étayée par la projection d’images d’une série de ces derniers. Cette séance a été l’occasion pour notre Société de décerner le prix Gustave-de-Clausade à une remarquable thèse de doctorat rédigée par monsieur Eneko Hiriart : « Pratiques économiques et monétaires entre l’Èbre et la Charente (Ve-Ier s. av. J.-C.) ».

Continuer à donner de tels prix, souvent de forts encouragements pour des jeunes chercheurs, suppose des finances saines. Y veille Guy Ahlsell de Toulza, notre trésorier, que j’oserai dire perpétuel car il assume avec bonheur cette fonction depuis longtemps. Louons aussi le travail fourni par les autres membres du Bureau. Maurice Scellès méritera aussi bientôt le titre de secrétaire général perpétuel. Son rôle a été essentiel et continue à l’être, pour nos Mémoires, pour son mécénat, pour notre site Internet, qu’il dirige avec une constance remarquable et vient de réformer intégralement, pour les procès-verbaux des séances, avec le secrétaire-adjoint, Patrice Cabau, et l’aide d’Émilie Nadal (qui le relaie aussi sur le réseau social Facebook), pour la vie enfin du groupe de travail sur la maison médiévale, qu’il anime avec Anne-Laure Napoléone et Pierre Garrigou Grandchamp. Notre bibliothèque et nos archives bénéficient de la haute compétence de Christian Péligry, à laquelle s’ajoutent celles de Jacques Surmonne et de Geneviève Bessis. Quelle chance que de pouvoir compter sur trois vrais professionnels ! Un travail considérable a été fait en 2015, de rangement, catalogage de nos livres et revues. Un cadre de classement de nos archives a vu le jour. La bibliothèque a été régulièrement ouverte au public. Tout cela, avec les échanges et envois de publications, a été aussi possible grâce à l’aide de Michèle Pradalier-Schlumberger, notre ancienne présidente, très attachée à la vie de la Société, et de notre ami bénévole, également et heureusement perpétuel, Georges Cugullière.

Anne-Laure Napoléone, avec le concours de Maurice Scellès et Jean-Luc Boudartchouk, assume un travail considérable pour l’édition des Mémoires, dont deux volumes (2012 et 2014) ont paru, et un troisième (2013) devrait sortir de presse sous peu, bénéficiant de l’aide du comité scientifique et de celui de lecture et d’impression, et d’autres membres, dont notre directeur qui, statutairement, doit veiller sur nos éditions. Henri Pradalier le fait tout en étant, en tant qu’ancien président, un excellent conseiller du Bureau et du président. Enfin, je n’oublierai surtout pas notre ancien bibliothécaire-archiviste, Louis Latour, qui ne peut en raison de son âge suivre toutes nos séances, mais n’en est pas moins de tout cœur avec nous et assure l’envoi de nos convocations.

Tout cela montre la cohérence et l’estime mutuelle de cette équipe active, qui ne demande qu’à être renforcée. Fort heureusement, de nouveaux membres correspondants rejoignent nos rangs. Nous avons ainsi accueilli Christian Landes, Bernard Sournia, Pierre Pisani et Magali Vène, et d’autres candidatures, de jeunes étudiants, viennent d’être présentées. Mais nous avons eu, en février dernier, à déplorer le décès d’un de nos membres, le professeur Germain Sicard, auteur d’une thèse au retentissement international : Aux origines des sociétés anonymes. Les moulins de Toulouse au Moyen Âge, soutenue à la Faculté de droit de Toulouse en 1952, publiée en 1953, rééditée récemment en anglais. Parfois sommes-nous aussi touchés par la disparition de membres d’autres institutions et académies proches de notre Société. Nous ont ainsi affectés la perte du grand professeur d’histoire médiévale Maurice Berthe, de l’université de Toulouse-Jean-Jaurès, et celle de l’ancien président, exemplaire, de cette même université, le professeur Georges Mailhos, secrétaire perpétuel de l’Académie des Jeux Floraux. Certains d’entre nous ont bien connu ces trois éminents universitaires, pour avoir été leurs étudiants, leurs collaborateurs, leurs lecteurs, leurs admirateurs. Qu’un hommage posthume leur soit encore aujourd’hui rendu. Que la reconnaissance et la sympathie de notre compagnie continuent à accompagner leurs familles.

Terminons par l’intérêt que nous portons, conformément à nos statuts, à la défense du patrimoine. Il se dirige régulièrement vers des cas difficiles, voire désespérés. Ainsi avons-nous encore dû regretter l’absence de vraies fouilles et d’une mise en valeur archéologiques lors du réaménagement de la place Saint-Pierre et du port de la Daurade à Toulouse, ou nous tenir informés du dossier du palais de Via à Cahors, pour lequel nous avions saisi différentes institutions publiques, et dont le devenir n’est pas encore acquis. C’est au contraire avec satisfaction que nous avons appris l’initiative privée de la restauration tant attendue du Château des Verrières, à Toulouse, et vu naître le grand musée romain que Narbonne mérite. Nous nous sommes préoccupés du devenir de certaines œuvres d’art, apparues ou réapparues sur le marché, en nous réjouissant de l’acquisition par le musée de Metz d’une rare toile peinte du XVe siècle étudiée ici-même par deux de nos membres, ou de l’achat par notre

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Société d’un morceau de sarcophage de la fin de l’Antiquité et d’une peinture de Paul Pujol, de 1890, représentant le martyre de saint Saturnin. Moins heureux fûmes-nous lors de la vente publique d’un chapiteau roman sculpté du cloître de Saint-Gaudens, qui nous a échappé en raison d’un prix trop élevé. Mais, la prise de conscience que nous avons suscitée a fait que, désormais, l’œuvre semble assurée de rester en France et de faire retour à Saint-Gaudens. Grâce à Nicole Andrieu, nous avons enfin su qu’un certain nombre d’objets d’art volés en Haute-Garonne avaient été retrouvés.

La question qui a cependant requis presque toute notre attention et notre action en 2015 est celle de l’aménagement des places contiguës de la basilique Saint-Sernin, annoncé par l’actuelle municipalité de Toulouse.
Notre Société ne comprend pas qu’un tel site archéologique, monumental et muséal ne fasse pas l’objet d’un schéma directeur prenant en compte tous les aspects d’un tel projet, dont la dominante est patrimoniale, culturelle et touristique. Elle croit que la dimension de celui-ci devrait être plus grande, même si la réalisation s’échelonne dans le temps pour ménager les finances publiques. Ainsi estime-t-elle que des fouilles archéologiques complètes doivent précéder tout aménagement, en raison de l’intérêt supérieur du site pour l’histoire de Toulouse, pour celle des premiers temps chrétiens autour de la Méditerranée, pour celle de Saint-Sernin au moyen-âge et dans les temps modernes. Monuments, aires archéologiques et musées devraient ensuite s’y accorder en un tout cohérent et attrayant, constituant une réalisation exceptionnelle. Après avoir voté le 17 mars 2015 une motion en ce sens, adressée au maire de Toulouse et président de Toulouse-Métropole, et être entrée dans un dialogue avec ces institutions, la Société a réuni en son sein une commission spéciale, qui constitue un dossier, mis au fur et à mesure de son élaboration à la disposition de tous sur notre site internet. Notre confrère Olivier Testard a traduit en dessins et images les propositions qui y ont été faites. Comme la vie de notre chère Société, cette question connaîtra d’autres développements au cours de cette année 2016, inspirant, c’est notre souhait le plus cher, une solution digne du monument majeur de la capitale du Languedoc, dont la place est éminente dans le patrimoine mondial.

Daniel Cazes

 

Remise des prix du concours

Le prix De Champreux est attribué à Mme Anna Thirion pour sa thèse intitulée La « tribune » de Saint-Michel de Cuxa : essai de restitution numérique au service d’une nouvelle approche historique, iconographique et liturgique, Université Paul-Valéry – Montpellier 3, 2015.

Le prix Ourgaud est attribué à M. Stéphane Abadie pour sa thèse intitulée Un temporel monastique dans l’espace médiéval gascon : l’abbaye prémontrée de la Casedieu (Gers), XIIe-XVIe siècles, Université Toulouse II - Jean Jaurès, 2016.

Le prix spécial de la Société Archéologique du Midi de la France est attribué à :
Mme Stéphanie Adroit, pour sa thèse intitulée Pratiques funéraires et sociétés de la Garonne à l’Èbre (Xe s. - Ve s. av. J.-C.), Université Toulouse II - Jean Jaurès, 2015,
et à
M. Benjamin Marquebielle, pour sa thèse intitulée Le travail des matières osseuses au Mésolithique. Caractérisation technique et économique à partir de séries du sud et de l’est de la France, Université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne, 2014.

Une médaille d’argent d’encouragement est remise à :
M. Émeric Rigault, pour son mémoire de master intitulé Le sacrifice d’Abraham dans le décor monumental roman du Sud-Ouest de la France et du Nord de l’Espagne (XIe-XIIIe siècles), Université Toulouse II - Jean Jaurès, 2015,
et à
M. Denis Mirouse, pour son mémoire de master II intitulé Les circonscriptions intermédiaires du sud du pagus de Toulouse aux Xe et XIe siècles (ministerium, vicaria, suburbium...), Université Toulouse II - Jean Jaurès, 2015.

Conférence

Images et fantaisies colorées
L’enluminure aux XIIIe et XIVe siècles
dans le Midi de la France

par Émilie Nadal


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